WOMACK & WOMACK - CONSCIENCE (1988)



Sweet Soul Music

Ne pas juger ce disque à sa pochette, où l’on voit un couple et leur fifille poser béatement comme si c’était pour la couv’ d’une version funky de Paris-Match, tels de vulgaires Hallyday présentant le dernier gosse qu’ils viennent d’achet … pardon d’adopter à toutes les mémères à chien-chien des beaux quartiers.
Bien que des couvertures de magazine, à l’époque de ce « Conscience », Womack & Womack en ont fait, ce disque ayant obtenu un bon succès. Il faut dire que leurs auteurs ont un sacré pedigree. Lui, c’est Cecil Womack, d’une fratrie de musiciens noirs dont son aîné Bobby est le plus connu. Elle, c’est sa femme, Linda, fille de Sam Cooke, un des plus grands soulman que l’Amérique ait produits. Ce qui crée quelques liens familiaux compliqués, Linda Womack se retrouvant en même temps belle-sœur et belle-fille de Bobby Womack, qui avait épousé sa mère après l’assassinat de Sam Cooke.

Mais foin de ces considérations généalogiques … « Conscience », au vu de ses auteurs, ne peut être un disque quelconque. Les deux époux ont concocté une pâtisserie sonore comme la musique noire oubliait d’en faire en cette fin des années 80. A base de choses aussi désuètes en ces temps-là que soul, funk, rythm’n’blues. Joué dans les règles antédiluviennes de l’art, des gens (dont la moitié s’appellent Womack) et des vrais instruments. Mais comme les deux tourtereaux sont de leur temps, ils ont intégré avec un sens de la mesure infini et un bon goût jamais démenti des sonorités modernes, synthétiques, qui font de ce « Conscience » un disque bien ancré dans son époque, et non un exercice de style en forme de madeleine proustienne renvoyant à des temps immémoriaux. Un disque qui plus de vingt après n’a toujours pas pris une ride …
« Conscience » est un disque où tout n’est que retenue, luxe, calme et volupté. Des arrangements soyeux (c’est Chris Blackwell, le patron d’Island qui produit), au service de mid-tempos swingants, funky, de langoureuses ballades soul, avec une justesse de ton toujours présente. Et puis, quand on s’appelle Womack ou Cooke, on sait ce que chanter veut dire. Le plus généralement, les deux se partagent les parties vocales de tous les titres, sauf sur « I am love », bluette pop miraculeuse au délicat groove funky couché sur un tapis de percussions électroniques et qui revient à la seule Linda.
Et ce disque tout en caresses sonores rencontrera (au moment où explose à la face de la planète le rap militant et revendicatif des Public Enemy) un bon succès a priori improbable tant il semblait éloigné de tout effet de mode. Deux titres iront même squatter les premières places des charts un peu partout dans le monde, les fantastiques « Celebrate the world » et surtout « Teardrops » et son groove imparable qui renvoie Earth, Wind & Fire, Kool & The Gang et autres bruyantes sornettes à leurs chères études.
Bizarrement un succès sans trop de suites, le couple ayant plutôt préféré se consacrer à la vie de famille qu’à la musique …


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