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JASON REITMAN - IN THE AIR (2009)

 

Pas vraiment stratosphérique ...

Par le réalisateur de « Juno », c’est écrit en gros sur la jaquette du Dvd. « Juno », jamais vu mais je sais à peu près de quoi il retourne, une comédie sur une gamine en cloque. Le réalisateur, donc, c’est Jason Reitman. Un fils de. En l’occurrence Ivan Reitman, lui aussi manieur de caméras, auteur de quelques comédies plutôt neuneues mais à succès (« Ghostbusters »), et souvent avec Schwarzenegger à contre emploi (« Junior », « Jumeaux », « Un flic à la maternelle », ce genre …).

Clooney & Reitman

Ce qui est aussi écrit en gros sur la jaquette, c’est le nom de George Clooney. Et au final on se pose la question : « Mr Nespresso peut-il tenir un film à bout de bras ? » Yes, he can … Et donc « In the air » est un bon film ? Euh, comment dire, ça se discute …

Ouvrons donc la discussion.

La thématique de base du film aurait pu être mieux exploitée. Le scénario est tiré d’un bouquin de Walter Kirn (il fait une paire d’apparitions, dans les réunions de cadres, il est assis à côté de Clooney) « Up in the air » (titre du film en V.O.). Le personnage central est Ryan Bingham, cadre sup dans une entreprise (jamais nommée) spécialisée dans les licenciements expéditifs. En gros quand une boîte fait un plan « social », elle fait appel à des gens comme Bingham pour procéder aux entretiens de licenciements. Et aux States, ça rigole pas, t’as la journée pour faire tes cartons et dégager le plancher quand Bingham tout en sourire compatissant te convoque dans un bureau, te sort un baratin convenu et transposable à tous les cas, t’explique qu’on n’a plus besoin de toi, te remet un fascicule pour t’aider à « rebondir », coche ton nom sur la liste et appelle le suivant. A noter que dans « In the air », la plupart des licenciés sont des acteurs amateurs qui ont connu cette situation.

Bingham passe sa vie dans les avions, il a une carte coupe-file dans les aéroports, il a bien un appart quasi vide où il ne passe que quelques jours par an, et vit seul hormis quelques coups d’un soir au gré des escales. Il est aussi conférencier, sorte de gourou new age qui veut insuffler à ses auditeurs un mode de vie dégagé de contingences matérielles et affectives, de fait son mode de vie à lui. Son but secret, qu’on n’apprend que vers le milieu du film, est d’avoir la carte Gold personnalisée chez American Airlines, qu’on n’obtient qu’après avoir parcouru dix millions de miles sur les lignes de la compagnie. Quand il débarque dans une nouvelle ville, il descend à l’hôtel Hilton du coin où il a aussi le statut de VIP et peut profiter des cadeaux, avantages et soirées privées, destinées à des personnalités importantes comme lui.

Clooney & Farmiga

Ça coince un peu, là. Au lieu de chercher à comprendre les tenants et aboutissants de son boulot de coupeur de têtes, tout cet aspect où il y aurait quand même beaucoup à dire (et à montrer), que dalle. Par contre, on a quelquefois l’impression plutôt gênante que « In the air » est une pub (on n’est même plus dans le placement de produits) non stop pour American Airlines et Hilton, et la vie « merveilleuse » qu’ils proposent à leurs plus fidèles clients. Sans oublier leur Blackberry que les protagonistes tapotent à tout moment … Evidemment, Clooney, toujours dans des costars impeccables, donne une touche de glamour sexy à son personnage, et pour ça, force est de reconnaître qu’il sait faire, il est quasiment de toutes les scènes.

C’est là que le manque de courage (?), d’ambition (?) de Reitman devient criard. « In the air » aurait pu être une parabole sur ce capitalisme sauvage qui justifie l’existence de gens comme Bingham et les fait prospérer sur la misère qu’ils créent. Le côté professionnel n’est pas éludé, il est quand même bien biaisé quand est recrutée une jeune surdiplômée Natalie Keener (interprétée par Anna Kendrick), qui entreprend d’optimiser la rentabilité de la boutique. Exit les déplacements en avion onéreux, et place au licenciement par visio grâce à internet, ce qui évidemment ne fait pas les affaires de Bingham et de ses millions de miles. Là aussi, Reitman préfère nous montrer la gamine se frotter à la vraie vie plutôt que s’appesantir sur ce qu’elle représente.

On se retrouve pour « meubler » avec une amourette de Bingham et d’une commerciale croqueuse de miles comme lui, Alex (Vera Farmiga). Ils se rencontrent of course au bar d’un Hilton, font connaissance en étalant sur une table leur cartes de crédit, d’abonnement, master, VIP, etc … (scène la plus drôle du film), se donnent des rendez-vous au gré de leurs déplacements et escales … et contrairement à ce que professe Bingham dans ses conférences, il va s’attacher à Alex et envisager de faire sa vie avec elle. L’atterrissage sera violent. Entre-temps, elle l’aura accompagné au mariage de sa sœur avec un quidam qui hésite au dernier moment. Cadeau-gage des participants au mariage : faire comme dans « Amélie Poulain » avec le nain de jardin (le plagiat est énoncé), prendre des photos du couple de fiancés (en carton) dans le plus d’endroits possibles des States (ce qui donnera le gag navrant et ultra prévisible de Clooney qui tombe à l’eau lors d’une séance de shooting).

Keener & Clooney

« In the air » avait pourtant bien commence, avec son générique fait d’un montage de vues aériennes et en fond sonore une reprise pour le moins tonique du « This land is your land » (de Woody Guthrie) par Sharon Jones & The Dap-Kings. Mais bon, c’est une gentillette comédie douce-amère, la dureté du monde dans lequel évoluent les personnages n’est là qu’en filigrane (les plans fugaces sur des entassements de chaises et de téléphones mis au rebut après les plans sociaux, le suicide d’une femme virée sans ménagement par Natalie n’est semble t-il là que pour donner une « conclusion » à son personnage). « In the air » serait un film français, on aurait Souchon au générique, comme acteur il y a quelques années, avec ses chansons maintenant, voire les deux (double peine, c’est quand même plus marrant de voir une Natalie bourrée chanter étrangement sur un karaoké le « Time after time » de Cyndi Lauper).

On sourit quelques fois, avec l’impression du verre à moitié plein ou vide, car il y avait matière à une belle comédie, ou à un brûlot sociétal. Encore eut-il fallu faire des choix, ce que Reitman n’a pas voulu (ou pas osé). Si j’en crois son suivant (« Young adult », avec une magnifique Charlize Theron), cette « transparence » semble être sa marque de fabrique. Reitman n’imprime pas …




JIMMIE VAUGHAN - DO YOU GET THE BLUES ? (2001)

 

Big Brother ...

Donc Jimmie Vaughan est le frère aîné de Stevie Ray Vaughan (vous savez le Texan affublé d’un Stetson à sequins qui se prenait pour Jimi Hendrix et qui a mouru dans un accident de coléoptère). Et si le Stevie Ray a donné dans le belouze, c’est peut-être grâce à Jimmie. Qui a commencé à faire parler de lui au tout début des années 80 au sein des Fabulous Thunderbirds, dont il était guitariste et chanteur, tout comme l’homme de base du groupe, Kim Wilson, le seul qui persiste de la formation originale.


Si vous regardez sur Wikimachin, on vous dira que les Fab T-Birds sont un groupe de blues. Soit. J’ai une paire de leurs rondelles, fort recommandables au demeurant, et si le blues est là, c’est surtout à travers sa descendance « modernisée », le rhythm’n’blues, le rock(‘n’roll), les sons mis au goût du jour, un peu l’équivalent dans le rustique genre que ce que les Stray Cats faisaient au rockab ou les Lone Justice à la country … Tout ça pour situer les origines du bonhomme Jimmie Vaughan.

Quand son frangin a fait une Balavoine, Jimmie a raccroché un temps les guitares, quitté les Thunderbirds, et quelques années plus tard, commencé à publier des disques solo. Il est raisonnable de penser qu’il n’a jamais envisagé de se reconvertir dans le djying techno, blues un jour, blues pour toujours.

Déjà rien que le titre de la rondelle (sa troisième solo) annonce la couleur. Et la liste des remerciements, longue comme l’annuaire d’Austin à la page des Smith, commence par John Lee Hooker, et pour ceux qui donnent dans la musique, recense un tas de gloires passées ou encore en activité des douze mesures. « Do you get the blues ? » a pourtant peu à voir avec le Hook et ses disciples. En fait, c’est un disque plutôt plaisant (non pas que Hooker et ses descendants n’aient pas fait de grandes choses), différent des blues roots que tout un tas de laborieux (catalogue sur demande) s’acharnent à copier et faire perdurer.

« Do you get the blues ? » risque de décontenancer les ayatollahs des douze mesures et des guitar heroes grimaçants qui vont avec. Jimmie Vaughan n’a pas une voix exceptionnelle, et surtout c’est un guitariste beaucoup plus rythmique que soliste. Oubliez les descentes de manche supersoniques, la saturation à tous les étages, le Jimmie il s’accompagne à la guitare électrique et laisse la virtuosité à ceux qui n’ont que ça…

C’est pas non plus le roi de l’écriture, n’espérez pas trouver ici le morceau qui va changer votre vie. Jimmie Vaughan, c’est pas le trois étoiles Michelin guindé et ignoré, c’est la brasserie du coin, où le patron est sympa, l’ambiance bonne, le morceau de barbaque goûteux et le pinard pas (trop) cher …

La formation de base qui joue sur ce disque, c’est le Jimmie donc, plus le batteur George Rains et le manieur de Hammond B3 Bill Willis. Auxquels se rajoutent de temps en temps un bassiste (sur deux titres), un sax ou un percussionniste (sur un titre). Et pour rester dans la famille, fiston Tyrone vient gratouiller sur un morceau, et la section rythmique de Double Trouble, feu groupe de Stevie Ray (Shannon et Layton), sur la reprise du « In the middle of the night » de Johnny Guitar Watson.

Lou Ann Barton & Jimmie Vaughan

« In the middle of the night », c’est la masterpiece du disque. Parce qu’en plus y’a la Lou Ann Barton venue en voisine (la connexion texane) pousser la goualante. Ah, Lou Ann Barton. Il y a quelques décennies un physique impeccable et des cordes vocales en acier. Autre chose que l’encensée rondouillarde tatouée Beth Hart (seule ou avec le pénible Bonamachin). Barton, à presque cinquante ans au moment des faits, reste encore une voix qui semble s’être bonifiée avec le temps. Et elle illumine deux autres titres (« Power of love », reprise de je ne sais qui, merci si quelqu’un a l’info, et le premier qui dit Céline Dion, Frankie Goes to Hollywood ou Huey Lewis se prend une torgnole), et fait des chœurs époustouflants sur « Out of the shadows ». En fait c’est elle qui justifie l’achat de ce disque …

Parce que le reste, c’est sympa sans plus, en tout cas pas exceptionnel. Avec des passages obligés, la partie de slide sur « The deep end », le titre au tempo ralenti ah que ça fait mal parce qu’elle est partie (« Without you »), le clin d’œil funky (« Let me him »), une paire d’instrumentaux prévisibles où le B3 se taille la part du lion (« Dirty girl », « Slow down blues »), une sortie de route vers une sorte de bouzin afro-cubain (« Planet bongo ») …


La production est près de l’os, y’a pas eu des kilomètres de bandes d’overdubs, pas de sorcier des consoles de mixage recrutés, ça a été enregistré beaucoup dans le Texas, un peu dans le Tennessee, c’est paru sur un petit label (Artemis Records), distribué parcimonieusement par Epic qui on le sent, n’a pas fait de ce disque sa priorité commerciale.

« Do you get the blues ? », ça figurera pas sur les listes de disques indispensables, c’est un peu longuet sur la durée (plus de cinquante minutes pour onze titres), c’est sauvé du quelconque par Lou Ann Barton. Face aux grosses machines du genre promues à grands coups de qualificatifs superfétatoires, ça fait figure d’artisanal. Et l’artisanat, ma foi, j’ai rien contre. Disque mineur, sans prétention, mais somme toute plutôt sympathique …


GUS VAN SANT - ELEPHANT (2003)

 

Bowling for Columbine ...

20 avril 1999 à Columbine, petite ville (25 000 habitants) du Colorado. Deux lycéens de 18 ans se rendent lourdement lestés d’armes de guerre et d’explosifs dans leur école et tirent sur tout ce qui bouge. Bilan : treize morts, vingt et un blessés.

18 mai 2003. « Elephant » de Gus Van Sant, « inspiré » par la tuerie est projeté au Festival de Cannes. Quelques jours plus tard, il y recevra la Palme d’Or et le prix de la mise en scène.

Gus Van Sant Cannes 2003

Quelques mois plus tôt, un film documentaire de Michael Moore, « Bowling for Columbine », utilisait la tuerie pour un plaidoyer contre la libre circulation des armes aux USA.

Autant dire que ce massacre a bouleversé (un temps, ce genre de carnage est récurrent aux States, c’est sûr ce coup-ci on va s’attaquer au problème des ventes d’armes, vous allez voir ce que vous allez voir, et puis on passe à autre chose) la société, pour que le monde du cinéma s’en empare si vite et à deux reprises.

« Elephant » est le dixième film de Van Sant, qui a accumulé succès critiques et commerciaux (« Drugstore cowboy », « My own private Idaho », « Will Hunting », « Psycho » entre autres, je cite ceux-là parce que je les aime bien), et inaugure un dyptique avec son successeur « Last days ». A savoir que ces deux films sont très fortement inspirés par des faits réels (le suicide de Kurt Cobain pour « Last days »), mais ne sont en aucun cas des reconstitutions des faits évoqués, la licence poétique, ce genre de choses, s’est justifié Van Sant, enfin certainement pour éviter procès et procédures.


« Elephant », d’abord pourquoi ce titre ? En référence à un film anglais homonyme d’Alan Clarke (c’est là que se pointe le fan de Bowie, Alan Clarke ayant réalisé pour la télé au début des 80’s une adaptation de « Baal » de Bertold Bretch avec l’ex Ziggy dans le rôle-titre, parce que le reste de ses travaux à l’Alan Clarke, ça me dit strictement rien). Lequel film montre une série de meurtres sans motifs, et son titre fait référence à l’expression « elephant in the room », littéralement, tout le monde identifie le problème bien visible, mais personne ne cherche de solution.

Bon, c’est quoi l’éléphant dans la pièce chez Van Sant ? Ce qu’aujourd’hui on appelle harcèlement scolaire (le plus déterminé, le « cerveau » du carnage est brimé et rejeté par les autres lycéens). Le libre accès aux armes, y compris de guerre. On commande sur internet, on est livré à domicile, et c’est le jour où les deux reçoivent leur dernier fusil d’assaut maousse qu’ils passent à l’action. Malin, Van Sant ne se contente pas des faits établis qui ont généré le massacre de Columbine. On a des allusions au jeux vidéo de FPS (en gros, on flingue tout ce qui bouge, en « étant » le personnage qui tire), Van Sant avait voulu utiliser une franchise bien connue (« Doom ») qui a mis son veto. Un truc basique en noir et blanc vite créé par un informaticien de passage est montré dans le film, un des deux tueurs y joue (sans conviction, il balance assez vite son ordi portable). On a aussi en attendant le camion de livraison qui amène le dernier flingue, un reportage, un documentaire historique sur la montée du nazisme qui passe à la télé, mais les deux ados ne le regardent pas vraiment, un des deux sait même pas à quoi ressemble Hitler. On a aussi la notion de rite sacrificiel, les deux se promettent de ne pas en réchapper, et toutes leurs frustrations d’ados rejetés se traduisent par un baiser échangé sous la douche avant de s’équiper de treillis et de trimbaler leur arsenal dans des sacs. Van Sant évoque de possibles et plausibles mobiles du passage à l’acte, il n’en définit aucun comme crucial. D’ailleurs, pour brouiller les pistes, les deux tueurs semblent (sans que cela soit explicité) deux fils de bonne famille, le « leader » Alex vit (avec ses parents ?) dans une maison cossue aux grands espaces, et joue bien du piano (en l’occurrence des sonates de Beethoven qui servent de B.O. au film).


La présentation des deux tueurs (les derniers moments avant la commission de l’acte) est située vers la fin du film, et apparaît comme la litanie des causes pouvant générer un massacre de masse. Van Sant n’analyse pas, il livre des éléments.

« Elephant » ne se résume pas aux derniers préparatifs du duo d’assassins et au carnage dans le lycée, le film nous fait vivre quelques moments de différents lycéens victimes – ou pas – du gunfight. Avec un procédé original, la caméra suit souvent les protagonistes (donc filmés de dos) dans l’enfilade de couloirs du lycée et nous les présente (juste leurs prénoms) par un intertitre. Et comme certains des élèves se croisent, échangent quelques mots, on a droit à la même scène filmée sous deux angles différents (parfois trois même, on a le blond peroxydé et le photographe qui discutent quelques secondes pendant que passe en courant la moche complexée) et en faisant la plupart du temps abstraction de toute chronologie). Le contraste est saisissant entre la banalité du train-train quotidien de lycéens (les trois jeunettes amatrices de ragots, qui touchent à peine à leur plateau-repas par peur de grossir avant d’aller se faire vomir dans les chiottes, ce qui se révèlera être une bien mauvaise idée).


« Elephant », c’est aussi un casting de jeunes amateurs (de Portland, ville fétiche de Van Sant dans laquelle il a longtemps vécu et où ont été tournés nombre de ses films) dont bien peu ont continué leur carrière devant la caméra. Le seul qui a vraiment fait « carrière » (dans des rôles mineurs et souvent dans des films de seconde zone) est John Robinson (celui qui joue John, le blond peroxydé à tee-shirt jaune imprimé d’un taureau), Alex Frost (celui qui joue Alex, quasiment tous les acteurs ont gardé leurs vrais prénoms) s’étant contenté de quelques rares apparitions dans des séries B).

A noter qu’une des personnes les plus impliquées dans le projet « Elephant » est Diane Keaton, l’ex et principale égérie de Woody Allen, qui a mis des billets pour la production du film. Lequel est un peu à part dans la filmo de Van Sant, sorte de film « politique », « engagé », deux genres auxquels il ne s’est guère frotté, mis à part avec le biopic « Harvey Milk » sur l’activiste homosexuel candidat à la mairie de San Francisco.

A noter que malgré la répétition des scènes (même si elles sont filmées avec des angles différents), « Elephant » ne dure même pas une heure vingt. Comme quoi on peut être concis et dire (ou sous-entendre) beaucoup de choses.

Film crucial de Van Sant, à ranger à côté de son autre coup de poing en images « Drugstore cowboy » …


Du même sur ce blog :

Last Days



LARS VON TRIER - ANTICHRIST (2009)

 

Chemin de croix ...

« Antichrist » de Lars von Trier est un film qui suscite des réactions très variées, tant par son contenu que par sa forme. Ce long-métrage, sorti en 2009, est souvent décrit comme une œuvre provocante et dérangeante, mêlant horreur psychologique et drame existentiel.

D'un côté, certains critiques saluent la manière dont von Trier aborde des thèmes profonds tels que la douleur, la perte et la nature du mal. Les performances de Charlotte Gainsbourg et Willem Dafoe sont souvent mises en avant, leur intensité émotionnelle apportant une profondeur au récit. La cinématographie, avec ses images saisissantes et symboliques, contribue également à créer une atmosphère oppressante et troublante.

Cependant, le film a également été critiqué pour sa violence graphique et son approche parfois jugée misogyne. Les scènes explicites peuvent choquer et déranger, ce qui peut amener certains spectateurs à se sentir mal à l'aise ou à rejeter le film. De plus, la narration non linéaire et les éléments symboliques peuvent laisser certains spectateurs perplexes, rendant l'expérience cinématographique difficile d'accès.

En somme, "Antichrist" est un film qui ne laisse pas indifférent. Il peut être perçu comme une œuvre d'art audacieuse et réfléchie ou comme une provocation gratuite, selon la sensibilité de chacun. C'est un film qui invite à la réflexion et à l'interrogation, mais qui nécessite une certaine ouverture d'esprit pour en apprécier pleinement les nuances. »

Von Trier & Dafoe

Ah que voilà une analyse centriste, on sort tous les parachutes. Bon cette critique est signée Chatgpt, j’avais jamais testé l’A.I., et j’ai vite compris que n’importe qui avec trois neurones connectés sortira quelque chose de moins neuneu … Alors cher Chat etc …, voici ma contribution.

Allons droit au but comme on dit à La Jonquera. « Antichrist » est une purge, une vraie. Prétentieuse, grotesque, malsaine, et je pourrais continuer la liste. Ce qu’on voit et entend à l’écran, et pire, ce que ça sous-entend apportera une citerne d’eau au moulin de ceux qui aiment pas Lars Von Trier … moi, perso, je m’en fous de Von Trier, de ses dépressions à répétition, de ses problèmes de bibine, de ses déclarations douteuses. J’aimerais pas boire une bière avec lui, c’est un type qui m’intéresse pas.

Ses films, par contre j’en ai vu quelques-uns. De ses premiers « dogmatiques » jusqu’à ces démonstrations techniques dont « Melancholia » me semble être l’apogée.

La fille de Serge
« Antichrist » se présente sous des atours chiadés. Du gros travail sur le son, encore plus sur les images. Du noir et blanc très contrasté et hyper ralenti du « prologue », à son pendant, le ralenti en moins dans les dernières images, en passant par du traitement numérique high tech (les optiques lensbaby, genre de fish-eye à l’envers, l’insertion d’images subliminales, les bords de cadre mouvants, les rajouts ou effacements numériques, …), ça a du sens, ça voudrait prouver que le taf est pas bâclé …

J’ai poussé la conscience professionnelle (ou conscience bénévole plutôt) jusqu’à m’offrir (pour pas cher du tout d’occase) une version Dvd avec pléthore de bonus et d’extras, il faut deux disques pour tout caser. Premier truc intrigant, alors que Arte a mis des sous dans la production du film, c’est M6, pas vraiment réputée pour ses choix cinématographiques pointus, qui édite les deux rondelles. Chacun en tirera les conclusions qui s’imposent (ou pas). On a droit au commentaire audio du film par Von Trier, interviewé par un critique (et surtout fan) anglais. Le Lars a pas grand-chose à dire (peur du dérapage ?) et tape en touche genre « j’avais pas pensé à ça, là c’est juste pour plaisanter, c’est pas moi qui tenais la caméra, ça c’est juste un hommage, … ». Dans le genre langue de bois de SAV, Charlotte Gainsbourg fait dans la marqueterie d’art pendant une interview promo de trois-quarts d’heure quelques temps après avoir reçu le prix d’interprétation féminine à Cannes (pour son talent ? pour son courage ? son inconscience ? sa démarche suicidaire ?) pour son rôle dans le film, où non, franchement, elle ne pense pas du tout que le film soit choquant ou véhicule une image hyper misogyne de la femme … Bon soit. Passons et attachons-nous à ce qu’on voit à l’écran.


Première séquence (en hyper ralenti donc, genre clip « torride » de George Michael). On y voit un couple (Willem Dafoe et Charlotte G.) faire l’amour nu sous la douche. Avec pendant quelques secondes un gros plan du machin qui rentre dans le truc (effectué par des hardeurs). Arrêt sur image. C’est quoi l’utilité de ce gros plan X ? Peur que les gens comprennent pas ce qui se passait, ou première provoc totalement gratuite ? Et pendant que le couple se livre à une partie de va-et-vient comme ils disent dans « Orange mécanique » leur bambin de deux-trois ans ouvre les barrières de son lit, monte sur le rebord de la fenêtre, bascule dans le vide et va s’aplatir sur le bitume enneigé quelques étages plus bas.

Séquence suivante, image couleur classique à l’enterrement du bambin (bonne idée, procession filmée depuis l’intérieur du corbillard) et là, Charlotte (comme dans « Hiroshima mon amour », le couple n’a ni nom ni prénom) s’effondre. Des jours plus tard, elle reprend ses esprits à l’hôpital, on comprend qu’elle a complètement dévissé émotionnellement et psychologiquement. Ça tombe bien, Dafoe est thérapeute et va l’aider à remonter la pente. Pas l’idéal, c’est lui-même qui le dit, un thérapeute ne doit pas soigner un proche ni baiser avec son patient, et donc il va commettre deux fautes professionnelles.

Et avoir une très mauvaise idée. Le couple va partir se retirer au milieu des bois dans une cabane coupée du monde. Et là tout va déraper. Et pas qu’un peu ... Arrêt sur image. Ce qui va survenir dans cette cahute en rondins c’est encore plus con que ce qui arrive aux promeneurs dans « Evil dead », film qui au moins revendiquait la grosse blague gore. « Antichrist » vise plus haut que « Evil dead », c’est pas dans la cave qu’il faut pas aller, ici c’est dans le grenier, et « Antichrist » n’est évidemment pas un hommage au film qui a rendu célèbre Sam Raimi. « Antichrist » est dédié, accrochez-vous, c’est inscrit après la dernière image, à Tarkovski. Pourquoi ? Accrochez-vous bis, c’est le Lars qui le dit, parce que Tarkovski est son cinéaste préféré (soit), parce qu’il y a beaucoup de scènes en forêt (ouais, comme dans « Stalker », mais c’est pareil dans tous les Tarzan ou « Délivrance ») et parce qu’à moment donné … il pleut (parce qu’il pleut souvent dans les films de Tarkovski, mais dans « Seven » ou « Limbo » aussi, et encore plus, et c’est pas des films de Tarkovski).


Par contre ce que vous verrez pas dans la filmo de Tarkovski et que vous verrez en gros plan dans « Antichrist », c’est une espèce de torture porn à base de coups de bûche sur le gourdin, de perçage de mollet à la chignole rouillée, de fixation d’une meule au dit mollet, de plantage de ciseaux dans le dos, pour finir par une excision en très gros plan, avant strangulation définitive. Le tout entrecoupé de copulations frénétiques et d’images d’animaux sauvages en voie de putréfaction, de bras et de jambes sortant des racines d’un arbre, un renard qui parle … et pourquoi donc tout ça me direz-vous, pour démontrer quoi ?

Oh, un truc bien basique, bien vieux et bien rance. Que la femme est par nature hystérique, et peut être facilement possédée (non, pas dans ce sens, bande de pervers, dans l’autre, par le démon). Et pour que ce soit bien évident, Von Trier nous dissèque tout ça dans sa cabane dans les bois (hommage littéral de ma part à un autre nanar horrifique). Construisant pas à pas, plan par plan, sa théorie misogyne qui voit la Charlotte passer de la prostration à l’abattement, aux visions, à la perte de contrôle, à l’échafaudage secret de plans diaboliques, aux pétages de plombs hystériques du final, le tout servi par des indices grotesques (le « souffle » de Satan par la fenêtre ouverte, les manuels de sorcellerie planqués, les passages à l’acte, jusqu’à sa fin « flamboyante »). Sans oublier les théories fumeuses des « trois mendiants » (la corneille, la biche et le renard, manquait plus que la belette pour se croire dans une chanson de Manau), les pluies de glands (non, non, ceux qui tombent du chêne), et jusqu’à la dernière scène de nouveau en noir et blanc où une foule de femmes sans visage monte sur une colline dans la forêt.

« Antichrist » est un film prétentieux. Visuellement réussi. Mais c’est surtout un film très con … A fuir … J’espère au moins que ça a aidé Von Trier à sortir de sa dépression à lui …


Du même sur ce blog :

Breaking The Waves
Les Idiots


ALBERT DUPONTEL - ENFERMES DEHORS (2006)

 

Dans la peau d'un flic ...

Dupontel, on compte plus les récompenses obtenues par ses films, c’est devenu un incontournable des Césars, apprécié par le public et la critique. C’est pourtant loin d’être un acteur, un réalisateur et un scénariste mainstream. Dupontel, il a construit patiemment sa carrière, n’obtenant ses grands succès qu’à la cinquantaine. « Découvert » par Patrick Sébastien, ce qui n’est pas forcément une ligne glorieuse sur un CV (ce qui n’empêche pas Dupontel de le remercier au final du générique d’« Enfermés dehors », en compagnie entre autres de Chaplin et des Monty Python), il a beaucoup tourné (dans plein de genres, des films à gros budget, des séries B, …) avant de se lancer dans l’écriture et la réalisation, et comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, de se donner le premier rôle dans ses films.

Albert Dupontel

Son tiercé majeur c’est à ce jour « 9 mois ferme », « Au revoir là-haut » et « Adieu les cons » (chronologiquement mais aussi artistiquement). Un peu avant cette trilogie, était sorti ce « Enfermés dehors ». Qui est un film brouillon, confus, où l’on a l’impression que le scénario abracadabrant n’est là que pour assurer les liaisons entre des scènes d’un burlesque délirant. On se dit (c’est sans doute le but poursuivi) que « Enfermés dehors » n’est pas un film, mais un dessin animé joué par de vrais acteurs. Le point de départ, qui revient de temps en temps, c’est la confrontation du monde des SDF avec « l’autre monde », celui des gens plus ou moins « normaux », et du monde de la finance et du gros business. Bon, on n’est pas chez Ken Loach, ou alors chez Ken Loach revisité par Tex Avery.

Les gags sont totalement cartoonesques (les vols planés, les chutes, et d’une façon générale ceux qui les exécutent ou les subissent) sont totalement irréels et constituent le ressort comique majeur du film. D’autant que certains sont des running gags (les personnages des panneaux d’affichage qui s’animent lorsqu’on sniffe de la colle, les pans de murs qui s’effondrent sur le casting, la collision avec le motard, les vols planés qui se finissent toujours dans la boutique de l’épicier du coin, …). Rajoutez un casting de « gueules », Hélène Vincent et Roland Bertin en kidnappeurs d’enfants, une bonne partie des Deschiens en SDF (Yolande Moreau, Bruno Lochet, Philippe Duquesne), quelques apparitions fugaces de Bouli Lanners, Jackie Berroyer, Gustave Kervern, deux Monty Python (Terry Gilliam et Terry Jones).

Les beaux-parents indignes, Vincent & Bertin

Et l’histoire dans tout ça ? Ben y’en a pas, ou plutôt y’en a trois. Roland (Dupontel) est un SDF devenu flic. Il s’entiche d’une plaignante au commissariat Marie (Claude Perron, seul personnage « normal » du film, elle bosse dans un sex shop et se sert de godes pour faire du tapage nocturne …) qui vient signaler que sa fille est séquestrée par ses beaux-parents. Il veut l’aider à retrouver sa gamine mais homonymie oblige, va traquer un puissant homme d’affaires à la place des deux vieux …

Le point de départ est un classique de la comédie, le quiproquo. Roland assiste au suicide d’un type qui se pend en sautant d’un pont dans un fleuve (même si la corde est trop longue, il finit dans la flotte). Roland, SDF qui dormait sur les quais, monte sur le pont, ouvre une valise que le type avait laissé. Cette valise contient des habits de flic. On a beau être un SDF défoncé à la colle, on n’en reste pas moins un honnête homme et Roland va rendre la valise à l’hôtel de police, d’où son look et son odeur le font expulser avant qu’il ait pu en placer une. La vision par un soupirail du mess des pandores et la faim qui le tenaille lui feront endosser les habits du flic, d’abord pour aller bouffer copieusement gratos, et ensuite s’intéresser par hasard à la plainte de Marie, se servant de son bel uniforme (une chemise bleue et un béret classiques de pandore, mais une improbable salopette de conchyliculteur par-dessus …) pour entamer une enquête rocambolesque à sa façon. Avec des alliés (souvent contraints à cause des vertus de l’uniforme bleu) « recrutés » dans le milieu qu’il connaît le mieux, celui des SDF. Et évidemment avec des méthodes assez peu orthodoxes (un squat finit par devenir une sorte de ZAD gérée par des faux flics qui sert des repas aux jeunes mères démunies), et quelques visions assez particulières de faire régner l’ordre dans la société (Yolande Moreau : « il faut les lapider à coups de hache »).

Yolande Moreau

Forcément tout est bien qui finit bien, au prix d’acrobaties vertigineuses sur le rebord d’un toit de clinique privée (Roland accroché à une antenne télé pendue dans le vide rattrape Hélène Vincent en chute libre avec ses dents, les crochets de fixation de l’antenne n’arrêtent pas de céder, …), et notre héros de plastoc va réussir sa mission impossible (enterrées les cascades de Tom Cruise …).

On est avec « Enfermés dehors » dans le registre de la comédie pure, l’affrontement « social » entre les déshérités qui vivent dans la rue et les gros requins capitalistes est réduit à quelques gags ubuesques (on est loin de la finesse, des magouilles et des arnaques de « Au revoir là-haut »), il y a beaucoup de personnages « inutiles » au scénario, qui sont juste là par copinage …

Reste un univers délirant assez unique dans le cinéma actuel qui doit quand même un peu (beaucoup ?) à Caro et Jeunet (« Delicatessen » notamment) et une imagination sans limite quand il s’agit de trouver des angles de prises de vue totalement azimutés, la bizarrerie visuelle venant s’ajouter au comique de situation …

Bon point aussi, les plaisanteries les plus courtes étant les meilleures, quand avant le générique s’inscrit « Faim » (sic) sur l’écran, on n’est là que depuis une heure vingt.

Conclusion : Dupontel pouvait mieux faire … et il a fait mieux par la suite …





ALAIN BASHUNG - BLEU PETROLE (2008)

 

The Last Waltz ...

On le savait, il était cuit Bashung. Les poumons rongés par le crabe. Une fois ce « Bleu pétrole » paru, il a fait ce qu’il a pu pour assurer. Livide, un chapeau pour masquer les effets de la chimio, ayant du mal à se déplacer, annulant séances photo, promo, concerts, il était un sexagénaire débordé par la maladie. La « profession » (l’establishment comme diraient ceux qui se rassemblent pour être haineux) dans un grand élan d’œcuménisme quelque peu forcé, allait en faire le Victorieux de la Musique millésime 2009. Il était venu pour recevoir ses colifichets. Deux semaines plus tard, ceux qui l’avaient applaudi au Zénith y allaient à qui mieux-mieux de leur épitaphe pendant que les illustres macchabées du Père-Lachaise se serraient un peu pour lui faire une place …

De toutes façons, cette première décennie du nouveau siècle n’était pas la sienne. Il n’avait sorti qu’un seul disque sous son nom, « L’imprudence » (un machin noir et glauque devant lequel certains sourds s’étaient prosternés), une paire avec sa moitié Chloé Mons (silence gêné, personne les a écoutés), avant de mettre ce « Bleu pétrole » en chantier. Pour lequel Bashung fait avec les moyens du bord. Ses deux paroliers historiques, Bergman et Fauque ayant disparu de ses radars, c’est sur le nouveau partner in crime Gaétan Roussel que va reposer la confection du disque.


Le Roussel, je supporte pas sa voix, et son énorme succès avec Louis Attaque, ces boy-scouts des rengaines pour ados attardés, on peut pas dire que ça m’ait transporté. Sur « Bleu pétrole », thanks God, il chante pas le Roussel (mais la voix de Bashung, … bougez pas, on y reviendra), mais il signe une grosse moitié des paroles et des musiques, joue de plein d’instruments, et co-produit la rondelle. Bashung a pas mis tous ses œufs dans le même panier, il a aussi collaboré avec Manset. Monsieur Gérard Manset. Un type responsable pendant une vingtaine d’années (à partir de la fin des 60’s) d’une dizaine de disques sans rien à jeter. Un type qui ne se livre ni aux interviews, ni aux séances photo, refuse tout passage télé et n’a jamais donné le moindre concert. Et pourtant un type qui n’a rien d’un misanthrope asocial, il peut apporter son talent à d’autres qu’il choisit rigoureusement. Bashung innove donc, ne gardant que son guitariste américain « déconstructeur » Marc Ribot (longtemps complice de Tom Waits). Pour être exhaustif, quelques troisièmes couteaux (Joseph d’Anvers, Arman Meliès) co-signent une paire de titres.

Le son global du disque est assez sombre, ce qui est somme toute assez compréhensible. Des batteries mates, des mélodies linéaires, une ambiance poisseuse pour pas dire morbide, des cordes et beaucoup de machines qui moulinent des schémas rythmiques élaborés et des arrangements tarabiscotés. On sent le gros budget, sans que ça vire pour autant à la démonstration narcissique. Un son qui accompagne la noirceur devenue habituelle de Bashung, noirceur aggravée par un état de santé qui se dégrade. Il suffit d’écouter la voix (très très en avant) au fil des titres pour la voir devenir de moins en moins malléable avec un timbre de plus en plus grave. On pourrait retracer la chronologie des enregistrements rien qu’en analysant ces prises vocales.

Salut l'Artiste ...

« Bleu pétrole », ce doit être l’album le mieux vendu de Bashung. Les morts vendent bien, et c’est pas Barclay (label) et Universal (distribution) qui diront le contraire. Etonnant que cette rondelle bien sombre ait poussé autant de monde à l’achat, même si tout du long de sa carrière, Bashung n’a jamais rien eu de l’artiste festif. Pour moi, « Bleu pétrole » ne mérite pas le concert de louanges qu’il a recueillies. Trop de compositions monotones, ternes, tenant beaucoup plus de la mélopée que de la chanson (l’enchaînement « Tant de nuits » et « Hiver à Sousse », cumulent fond sonore invertébré et mélodies indigentes, je cherche encore où sont les mélodies, les couplets, les refrains, les ponts, en gros tout ce qui fait une chanson dans ces deux titres). Déception idoine pour deux titres auxquels a participé Manset, « Vénus » et « Je tuerai la pianiste ». Du Manset méconnaissable (c’est quoi ces thèmes et leurs textes, jamais rien entendu de ressemblant chez le Gégé, et il s’est pas foulé pour les grilles d’accords), le premier étant le pire (la voix agonisante de Bashung fait peine à entendre), le second étant porté par un gros riff de guitare (le seul du disque et donc fatalement plutôt incongru, que sont les rockabs rigolos du Bashung des 80’ devenus ?). Guère mieux avec « Le secret des banquises » (Bashung-Roussel) qui fait cependant l’effort de rechercher du rythme et de la mélodie.

Il y a deux reprises sur « Bleu pétrole ». Le « Suzanne » de Léonard Cohen (adapté en français par Graeme Allwright), dans une version musicalement squelettique (et pourtant la version de Cohen était loin d’être exubérante). Et puis ce que j’appellerai un outrage fait à « Il voyage en solitaire », chanson la plus connue de Manset, et pour moi un des chefs-d’œuvre ultimes de chanson française. La version originale cumulait thème triste (la solitude évidemment), mais voix chaude suivant une mélodie first class jouée par un piano légèrement désaccordé. Ne subsiste (hormis les paroles) rien de tout cela dans la version de Bashung, juste une ambiance mortifère dans un minimalisme sonore. Le plus étonnant est que Manset est ressorti de cette collaboration fasciné par Bashung, au point de lui consacrer un bouquin, essai assez court et comme toujours chez Manset parfois abscons, joliment intitulé « Visage d’un dieu Inca ». Petite remarque, Bashung avait fait par le passé de belles reprises (« Nights in white satin », « Les mots bleus »), cette fois-ci, il passe quelque peu à travers.


Cette collaboration Manset-Bashung a quand même accouché d’un bon titre, située au cœur du disque. Les plus de neuf minutes de ce « Comme un lego » sont du pur Manset (la mélodie, la poésie simple et émouvante). C’est aussi la meilleure prestation vocale de Bashung, qui retrouve même les intonations chaudes du Gérard. Rayon bonnes chansons, l’introductif « Je t’ai manqué » laissait pourtant bien augurer du reste, ambianche rêche electro acoustique, jolis arrangements de banjo signé Marc Ribot. Le hit « Résidents de la République » suivait, belle compo – une fois n’est pas coutume – de Roussel. Chanson qui a fait jaser pour son pain lexical (« je courirai », volontaire ou pas, le débat a fait rage), et ses paroles assez hermétiques. Deux versions circulent, la première arguant qu’il n’y a aucun sens particulier, la seconde y voyant une allusion aux piteux débuts (pléonasme) du mandat de Sarkozy. Qu’il me soit permis d’échafauder une autre vision, à savoir une chanson traitant de l’immigration (et pas selon les théories de Re-Taïaut-Taïaut …). Autre bon titre signé Roussel, l’agréable « Sur un trapèze », mélodie simple et efficace, et un Bashung exceptionnellement en bonne forme vocale. Autre titre sorti en single, sans atteindre la reconnaissance de « Résidents … ».

Vous avez compris, je suis pas vraiment en extase devant cette rondelle …


SPIKE LEE - 24 HEURES AVANT LA NUIT (2002)

 

Demain dès l'aube ...

Ce film est répertorié sous plusieurs titres. Aux USA et parfois en français c’est « The 25th Hour » (« La 25ème Heure » pour ceux qui avaient pris estonien en première langue), mais si on veut pinailler son titre original c’est « Spike Lee’s 25th Hour ».

En fait, « 24 Heures avant la nuit » (ça, faut avouer que c’est un titre qui claque et intrigue à la fois), c’est le titre du bouquin qui a été adapté. Le type qui vient de publier « 24 Heures … » (mais pas trouvé le titre, c’est son éditeur qui le lui a suggéré) est un jeune trentenaire inconnu du nom de David Benioff. Qui restera pas trentenaire et encore moins inconnu puisque c’est lui le showrunner (adaptation et production) derrière la série événement de ce premier quart de siècle, « Game of Thrones ».

Norton, Hoffman & Lee

Son bouquin est typiquement newyorkais, toute l’action s’y déroule (hormis le final du film on y reviendra), tous les personnages sont viscéralement attachés à cette ville, que pour la plupart ils n’ont jamais quittée. « 24 Heures … » raconte la dernière journée de liberté de Monty Brogan qui doit le lendemain se présenter dans la prison d’Etat d’Otisville pour y purger une peine de sept ans (vente, recel et détention de drogues et du pognon qui va avec).

Premier intéressé par l’adaptation au cinéma, Tobey Maguire qui souhaite produire et tenir le rôle principal. Sa participation dans le rôle titre de la franchise Spider-Man l’empêchera de jouer dans le film mais il restera coproducteur. Se pointe alors Spike Lee qui a lu le bouquin. Il lui a plu, et il se doit de faire avancer le projet (selon lui, seul un réalisateur newyorkais peut réaliser, c’est pas le style de Woody Allen, Scorsese est occupé ailleurs, c’est donc à lui de s’y coller). Tours de table infructueux, Lee met un peu de pognon, cherche des distributeurs et trouve un improbable partenariat avec Disney, avec qui il faudra discutailler parce que « 24 Heures … » a peu à voir avec les histoires de Mickey … Et Lee et les acteurs principaux le confirment, ils ont joué pour pas grand-chose (soi-disant 10% de leurs cachets habituels).

Brian Cox & Edward Norton

Avec Spike Lee derrière la caméra, on a affaire à un réalisateur « clivant ». Une bonne part de sa filmo est plus ou moins « communautariste » (tous ses premiers, de « Nola Darling … » à « Malcolm X », et quelques-uns ensuite), l’homme est adepte de déclarations parfois « embarrassantes », et ses clashs avec notamment Tarantino et Eastwood ont secoué le petit monde du 7ème art hollywoodien. Avec « 24 Heures … » Spike Lee va s’attacher à un nouveau genre qu’il développera par la suite, le polar (« Inside Man », « BlacKkKlansman », …). Quoiqu’on pense du type Spike Lee (je suis pas très fan), il faut reconnaître qu’il sait faire des films. Et qu’il a une « patte », ces tics qui l’identifient immédiatement. Ici, ce sont les faux raccords (genre le Godard de « Pierrot le Fou ») quand les protagonistes se donnent l’accolade (embrassades doublées avec prise de vue différente, ça dure un quart de seconde, c’est pas une erreur de montage), et les travelling « immobiles » (l’acteur statique et la caméra sur les rails, c’est le second plan qui bouge et s’éloigne).

Autant le dire, « 24 Heures … » est un des meilleurs Spike Lee. D’abord, parce que contrairement à ce que pourrait laisser penser le titre, tout se passe pas dans une journée et une nuit. Il y a beaucoup de personnages principaux (le dealer, sa copine, son paternel, son principal intermédiaire, ses deux amis d’enfance, une lycéenne) et donc nécessité de quelques flashbacks pour comprendre tout ce qui va se passer dans ces fameuses 24 heures. On est dans la tragédie, souvent cornélienne, mais pas strictement dans la règle des trois unités.

Norton & Dawson

Le personnage principal, c’est Mont(gomer)y Brogan, interprété par Edward Norton qui trouve là un rôle « fort », à l’image de ceux qui l’ont révélé dans « American History X » et « Fight Club ». Monty est un dealer « chic », bien sapé, bel appart, jolie meuf (une Portoricaine d’origine, Naturelle Riviera jouée par Rosario Dawson). Son meilleur pote dans ce business est un massif Ukrainien, Kostya (le monumental Tony Siragusa, ancien lutteur et joueur pro de foot américain, presque deux mètres et 0,15 tonne). C’est eux que l’on voit dans la première scène du film, récupérer à l’initiative de Monty un chien bâtard tabassé et abandonné au bord d’une rue, quelques mois (années ?) avant les fameuses « 24 Heures … ». Le clébard, qu’on voit parfois avec Brogan sur l’affiche du film est de plusieurs scènes, mais n’apporte rien à l’histoire. Il est là pour souligner le côté humain de son nouveau maître. Qui certes n'est pas dans les clous vis-à-vis de la loi, mais qui passe pas les « limites ». Il a pas de flingue, c’est pas un violent, il est un jeune mec smart qui « dépanne ».

Il est resté pote avec ses deux copains de lycée voire d’avant, Frank (Barry Pepper), beau gosse trader plein aux as, et Jacob (Philip Seymour Hoffman) prof dans le lycée qu’ils ont fréquenté, a des relations assez conflictuelles avec son père veuf (Brian Cox), ancien alcoolique repenti et tenancier de bar. Pour sa dernière journée (et nuit) de liberté, Monty entend renouer avec son père et souhaite que ses deux vieux potes l’accompagnent avec sa copine dans un bar chic et ensuite dans une boîte tenue par ses fournisseurs de dope (des Russes forcément mafieux) qui lui ont préparé une belle soirée …

Pepper, Hoffman & Norton

C’est pas avec ça qu’on tient plus de deux heures à l’écran. L’intrigue principale (l’angoisse de la taule, sept ans pour la première fois, ça travaille l’esprit et va forcément jouer sur sa relation avec ses proches), accessoirement le pourquoi de la taule (découvrira t-il qui l’a balancé, parce que les flics chez lui sont allés droit au canapé où étaient planqués les billets et la dope).

Ce qui rajoute de l’intérêt à ce film, ce sont les longues discussions entre les protagonistes (Frank et Jacob se donnent rendez-vous chez Frank, ils vont manger un morceau dans un restau asiatique, ils attendent avec Naturelle au bar l’arrivée de Monty, puis vont à la soirée en boîte). Norton est très bon, dans le type au bord de l’abîme. Pepper aussi, dans le rôle du beau gosse friqué sûr de son charme et de sa réussite sociale. Et Philip Seymour Hoffman, comme toujours crève l’écran. Timide et complexé maladif, on le voit en cours se faire allumer par une gamine de seize ans (belle composition d’Anna Paquin), que pas de bol pour lui, il va retrouver par hasard dans la soirée en boîte. Chaque apparition de Hoffman est un régal. Il faut le voir avec ses deux potes beaux gosses tirés à quatre épingles, lui avec sa casquette de baseball, ses binocles, ses fringues informes et son allure rondouillarde, subissant totalement toutes les situations. Effet renforcé par Spike Lee qui le filme le plus souvent en plongée alors que ses interlocuteurs sont filmés en contre-plongée.

Et puis, y’a encore autre chose. « 24 Heures … » est un des premiers films (si ce n’est le premier) sorti après le 11 Septembre et qui y fait référence à de multiples reprises. Passée la première scène avec le chien, on a le générique sur fond de rayons lumineux qui se croisent, puis des vues panoramiques de New York la nuit. Et quand les immenses rayons lumineux reviennent à l’écran, on s’aperçoit avec le zoom arrière qu’ils proviennent des gigantesques projecteurs éclairant le ciel et situés à l’emplacement des deux tours du World Trade Center dégommées par les terroristes kamikazes de Ben Laden. Et tout au long du film, on voit les drapeaux américains accrochés aux fenêtres, aux murs, sur le vieux break du paternel à Monty dont le bar est le « siège social » d’une escouade de pompiers décimée lorsque les tours se sont effondrées. Il y a une scène magnifique lorsque Jacob et Frank se retrouvent dans le très chic appartement de celui-ci. Ils discutent face à une grande baie vitrée, la caméra est dans leur dos, se rapproche, passe par-dessus leurs épaules et nous montre en plongée les gros engins de déblaiement qui travaillent sur Ground Zero. Après de longues minutes de discussion, fin de la scène avec un gros plan sur des hommes avançant en ligne et balayant le terrain dégagé à la recherche du moindre débris humain permettant grâce à l’ADN l’identification des restes de la victime. Tout cela réalisé sans trucage, la scène a été tournée dans un immeuble à proximité immédiate de Ground Zero …

Ground Zero

Une autre scène est indissociable du film. Il s’agit d’un long monologue de Norton, face à un miroir (ce sont ses pensées, grâce au numérique, il est de trois-quarts dos et parle, tandis que son reflet reste muet), qui hurle quasiment sa colère, voire son mépris et sa haine pour tous ceux qui défigurent, ont défiguré, en gros sont indignes d’habiter dans « sa » ville. C’est pas nationaliste, c’est pas raciste, mais tous ceux qui sont pas « dans l’esprit » en prennent pour leur grade (des épiciers coréens aux chauffeurs de taxis pakistanais, en passant par les jeunes Blacks qui jouent bêtement au basket, sans oublier Ben Laden, j’en passe et des furieuses répliques cinglantes, ça dure bien cinq minutes). Et le dernier tête à tête entre les trois potes à la sortie de boîte alors que le jour se lève vaut aussi le détour …

Le scénario est millimétré, ça fait pas auberge espagnole où on passe du coq à l’âne, il y a une grande fluidité, aucune histoire dans l’histoire n’est oubliée. Perso, y’a juste un truc sur lequel j’émets des doutes. Lorsque son père conduit Monty à la prison, il lui propose de tracer la route et de disparaître à l’autre bout des States au lieu d’aller en taule. Des scènes oniriques (tournées au Texas) nous montrent ce que seront les décennies suivantes si Monty choisit cette option. Je trouve ça plutôt long et maladroit, ça a surtout donné du boulot aux maquilleuses chargées de vieillir Norton. Spike Lee y tenait à ces scènes (c’était pas dans le bouquin de Benioff). Le dernier plan de quelques secondes nous indique le choix qu’a fait Monty.

Grand et beau film, un des deux ou trois meilleurs de Spike Lee, jusque dans son générique final, rythmé par une superbe version réarrangée avec grand orchestre de « The Fuse », validée par son auteur, remercié en tant que Bruce « Da Boss » Springsteen …


Du même sur ce blog :

Do The Right Thing


LOU YE - NUITS D'IVRESSE PRINTANIERE (2009)

 

Bizarre love triangle(s)

Bon, « Nuits d’ivresse printanière » n’a rien à voir avec la chanson de New Order (ni avec le nanar franchouillard où s’agitent devant la caméra Balasko et Lhermitte). C’est un film « interdit » du Chinois Lou Ye. Qui récolta à Cannes (where else ?) la palme du meilleur scénario. Meilleur scénario ? Ouais, si on veut …

Wu Wei, Tan Zhuo, Lou Ye, Cannes 2009

« Nuits … » est un étrange mix de plein de films déjà vus. De « Jules et Jim » (influence principale selon Lou Ye), « My own private Idaho », « Macadam cowboy », « Brokeback Mountain », les œuvres de Larry Clark ou Harmony Korine. Dans « Nuits … » sur fond d’amours homosexuelles, d’improbables ménages à trois, on a un portrait de la jeunesse de la génération post Tien-An Men, dans une ville de province chinoise. Même si quand on parle d’un bled de province en Chine, c’est pas exactement Châteauroux ou Epinal. L’action se situe à Nankin (sept ou huit millions d’habitants dans les terres, à trois cent bornes de Shangaï).

Lou Ye, dont peu de choses ont été remarquées en « Occident », est un cinéaste suivi de près par la censure chinoise. Son film précédent « Une jeunesse chinoise » en 2006, lui a valu un « bannissement culturel » (la Chine est un pays de libertés, on ne censure pas … et on ne ricane pas non plus), soit une interdiction de sortir des films pendant cinq ans. Hors de question de demander donc du fric à l’Etat, Lou Ye en est réduit au do it yourself. Pour faire un film, il faut des moyens. Techniques et financiers. Pour la technique, on va faire simple, petite caméra numérique au poignet, équipe réduite au strict minimum, acteurs amateurs et/ou inconnus. Pour le pognon, un petit tour de table permet de trouver l’argent à Hong-Kong (ville certes rattachée à la Chine mais plus ou moins autonome, surtout côté business) et en France (le CNC).

Ils ont pas l'air heureux ensemble ...

Bon, un film fait à la sauvette sans moyens, a forcément peu de choses à voir avec un Marvel. Tout est filmé en extérieurs, et donc l’histoire est forcément contemporaine. L’histoire ? Ou plutôt les histoires, il y a un personnage hyper central autour duquel gravitent quatre personnages secondaires et une paire de troisièmes couteaux. Au début deux jeunes mecs sont en voiture sur une route de campagne. On comprend qu’ils sont amants, ils rejoignent une villa isolée, font l’amour (avis aux pervers qui auraient lu jusque là, on est en Chine, le mec Lou Ye est interdit de tourner, donc les scènes de baise, y’en a plein, mais elles sont soft, no boobs, ass, or dicks), se baladent dans les sous-bois, puis retournent à Nankin. Il s’est passé six minutes et pas une parole n’a été prononcée. « Nuits … » est un film plutôt taiseux, ce qui donne encore plus d’impact aux scènes dialoguées. Remarque : j’ai l’impression que son et image ont été enregistrés par la caméra numérique, quand il y a du bruit extérieur, les dialogues sont tout juste audibles, et la V.F. suit la V.O. sur ce point (je me demande si c’était nécessaire, si on entend mal en V.O., c’est pas fait exprès). Bon, et tant qu’on est dans l’aspect technique (je déteste çà) et là je pense que c’est voulu, mais j’ai pas saisi pourquoi, les scènes en intérieur ont une image à gros grain, quasi en noir et blanc. Autrement dit, pas la peine d’investir dans un home cinéma 7.2 et dans un support 4K pour regarder « Nuits … ».

Revenons à l’histoire. Un des deux gars travaille dans une bibliothèque ou une maison d’édition, l’autre est marié. Sa femme qui se pense trompée le fait suivre par un détective, et découvre assez vite la double vie de son bisexuel de mari. Excellente et terrible scène de ménage, elle envoie bouler son mec. Pas de bol pour lui, il se fait larguer par le bibliothécaire qui replonge dans son hédonisme passé (son truc, c’est se travestir en femme et faire du karaoké dans les boîtes de nuit). Fin du premier triangle amoureux, même si le mari et la femme réapparaîtront plus tard chacun leur tour. Entrent alors dans la danse le détective et sa petite amie, qui vont entamer une étrange relation de copinage-amour-haine avec le travelo bibliothécaire.

Eux non plus ...

Même si ces histoires ne sont à mon sens là que pour montrer autre chose, une jeunesse chinoise de la classe moyenne inférieure à la dérive (les protagonistes ont la vingtaine, au max trente piges), et une société chinoise qui malgré tout le flicage et la rigidité du pouvoir, tourne effrontément le dos aux valeurs « saines » du communisme. Les personnages du film évoluent à Nankin, mais ça pourrait être dans n’importe quelle autre ville du monde, l’homosexualité et les couples qui partent en quenouille sont des thèmes universels. Le mérite de Lou est de montrer que ça existe aussi en Chine.

C’est aussi le problème de « Nuits d’ivresse printanière ». On a déjà beaucoup vu ce genre d’histoires, avec des scénarios plus étoffés, de meilleurs acteurs, et un rendu esthétique beaucoup plus travaillé (au hasard et en Chine aussi « Adieu ma concubine »).

Regarder « Nuits d’ivresse printanière » tient à mon sens beaucoup plus de l’acte militant (soutien aux LGBT, aux artistes censurés, à la jeunesse brimée et muselée, … liste inépuisable, y’a tellement de cause de cause plus ou moins perdues à défendre) que d’une curiosité de cinéphile. C’est plutôt bien vu, ces histoires et ces gens qui s’imbriquent (ouais, c’est de mauvais goût, mais je m’en balance), mais c’est sûrement pas le film du siècle …



Bande annonce de qualité déplorable par le distributeur français. Si même lui fait pas le job ...