Un des disques les plus importants des années 70 … Qui à lui seul siffle la fin de la récréation punk, et annonce beaucoup de sons des années 80. Un disque indissociable de son leader tourmenté Ian Curtis.
Un prolo de la banlieue de Manchester, fasciné par les destins tragiques de Jim Morrison et James Dean, et musicalement très impressionné par le Velvet, les Stooges, et forcément leur plus grand prosélyte David Bowie. D’ailleurs Joy Division (un nom qui fera froncer quelques sourcils, car il fait allusion à des convois de prostituées remontant le moral des troupes du front Russe et des gardiens de camps de concentration) se nommera d’abord Warsaw, d’après « Warsawa », un des titres de « Low » … Un Ian Curtis fortement impressionné par un concert des Sex Pistols, qui le décidera à se lancer lui aussi dans la musique…
Tous ceux qui sont impliqués dans « Unknown pleasures », seul disque publié du vivant de Curtis, deviendront des acteurs-clés de la scène musicale anglaise des années 80. Albretch (guitares, claviers), Hook (basse), Morris (batterie) formeront New Order, le producteur Martin Hannett sera un des plus cotés de la décennie suivante, Tony Wilson patron d’une boîte de nuit et d’un label (tous deux nommés Factory) sera un incontournable du music-business, l’auteur de la pochette Peter Saville un des graphistes les plus courus … « Unknown pleasures » était pour tous ces gens le premier contact avec le milieu de la musique …
« Unknown pleasures » est un disque sombre, noir, laissant peu de place à l’espoir, à l’image de sa pochette représentant l’écho radar d’une étoile en train de mourir. Evidemment, le suicide de Curtis moins d’un an après la sortie du disque, fera hurler au signe prémonitoire, ainsi que certains textes de chansons … Classique. Même si la fin tragique de Curtis (il souffre d’épilepsie, devient rapidement une star alors qu’il est marié, père de famille, a une maîtresse, vit le quotidien de Mr. Tout Le Monde, et n’a pas toujours le moral au beau fixe ), sans être vraiment surprenante, n’était pas pour autant inéluctable …
« Unknown pleasures » est le disque du mal-être, du tourment intérieur. Le son est particulièrement novateur, même si on peut trouver quelques similitudes avec quelques passages de Can, Pere Ubu, Residents, tous groupes que les Joy Division connaissaient. En fait, la seule référence à peu près évidente se retrouve sur le dernier titre « I remember nothing », longue dérive noirâtre comme en ont fait les Doors (« The End », « When the music’s over »). Tout le reste crée son propre univers sonore, avec la basse très en avant de Hook qui définit la mélodie, la batterie métronomique de Morris, apparemment souvent doublée lors de la production par des percussions électroniques, et une guitare n’entretenant loin dans le mix qu’un long tapis de striures lancinantes. Et par dessus, la voix grave, souvent lente et monocorde de Curtis installant un climat de douloureuse tristesse … Le résultat donne un disque dense, compact, dans lequel les variations de tempo sont infimes, tout au plus peut-on trouver que « Shadowplay » est le plus lancinant et « Interzone » le plus rythmé, le plus « rock » …
Ce disque, même s’il n’a pas bénéficié de ventes colossales (le groupe est à peu près inconnu, Factory est un label indépendant), aura rapidement un gros succès, marquera au fer rouge toute une génération de mals dans leur peau, victimes de la dévastation économique dans les métropoles anglaises, et sera annonciateur d’une grosse part des productions new wave, cold wave, gothique, influençant durablement des groupes comme Cure ou Bauhaus …
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