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FRANK ZAPPA - HOT RATS (1969)

 

Ailleurs ...

Le rock au sens le plus large, c’est le truc le plus basique qui soit. A prendre au premier degré. Et dans quelque genre qu’ils œuvrent, ceux qui en font ne dérogent jamais à la règle, il faut faire ce que le fan, le public, la maison de disques, … attendent (y compris n’importe quoi). Les plus doués (Dylan au hasard) peuvent parfois mélanger sérieux (la musique) et loufoque (les paroles). Ceux qui donnent dans le second degré (cas d’école Kiss et Queen) avec des cohortes imposantes de fans, sont méprisés par tous ceux qui considèrent que faut pas déconner, la musique c’est sérieux.

Et puis, y’a ceux qui dépassent le second degré pour amener les gens qui se hasardent à écouter leurs disques dans des contrées sonores incompréhensibles. Palme du point d’interrogation majuscule, les Residents, dont personne ne sait qui se cache derrière leurs masques oculaires et dont la musique est totalement hermétique et incompréhensible. Et puis Zappa …

Frank Zappa

Qui pour moi est une énigme. Une discographie pharaonique, que ce soit de son vivant ou post-mortem, à coups de double ou triple albums live ou en studio. Pour moi à peu près tous inécoutables (enfin, la demi-douzaine que je connais), mais le type a ses fans. Et bizarrement, chaque fan de Zappa a son propre Top 3 de ses meilleurs disques. Qu’ils ressemblent à de la pop, du rock, du jazz, du classique, du contemporain …

Zappa, c’est un potache sérieux, un mormon festif, il faut une litanie d’oxymores pour le définir. Son truc ultime, c’est le doo-wop (il en possédait des milliers de 45T), il n’y a pas plus d’une poignée de morceaux qui en soient inspirés dans son imposante production. Le doo-wop, c’est surtout vocal, et Zappa a l’habitude de tartiner des triples vinyles d’instrumentaux, voire de bruitages et de dialogues abscons. Comprenne qui pourra. Zappa, c’est le type détaché de tout à grands coups de formules décapantes, et puis capable d’aller devant les tribunaux à la rescousse des besogneux hard-rockers de Twisted Sister pour défendre leur liberté d’expression. Zappa, il a repris tous les codes du rock’n’roll circus, mais il virait impitoyablement et à jamais tout musicien de son band qui n’était pas absolument sobre (picole et drogues totalement prescrites en studio et en tournée…). Zappa, c’est un peu la théorie des contrastes et des contraires …

« Hot Rats » c’est officiellement son premier disque solo. Ceux d’avant, ils étaient parus sous les intitulés de Mothers of Invention ou Frank Zappa & the Mothers (of Invention). La différence ? En fait, y’en a pas, Zappa est la pièce centrale, le cerveau de tout ce qu’il a fait paraître. Despote libertaire, il donne la direction, écrit, arrange et produit, et une litanie de musiciens qui tournent dans le band en heavy rotation viennent ajouter leur patte à l’édifice. Ces musiciens sont soit des virtuoses reconnus priés de « déjouer », soit d’illustres inconnus sommés « d’inventer » leur technique instrumentale. Au milieu de tout ça, Zappa, grand adepte des contradictions dadaïstes mène la danse à la guitare électrique (dont il est considéré comme un des maîtres, alors qu’il ne cesse d’afficher son mépris pour les guitar heroes).

Ian Underwood

« Hot Rats », à la base, c’est le projet d’un duo. Zappa à la baguette, assisté de Ian Underwood, complice du moustachu depuis son album-pastiche des Beatles (entre autres) « We’re only in it for the money ». La place importante occupée par Underwood (piano, claviers, flûte, saxos, …), ancien élève-disciple d’Ornette Coleman (autre célèbre déconstructeur de gammes), n’est pas tout à fait due hasard. Les deux hommes sont à l’origine du projet « Hot Rats », entourés par une escouade de participants (trois batteurs, deux bassistes, deux violonistes), dont sur un titre l’ami-complice (à cette époque-là, la brouille retentissante entre les deux approche) de Zappa en termes de dadaïsme sonore, Don Van Vliet alias Captain Beefheart. Un des deux violonistes est un jeunot français, Jean-Luc Ponty (lui aussi se fâchera avec Zappa dans les seventies), et l’éminence grise du projet, qu’aurait beaucoup consulté Zappa est Johnny Otis, reconnu dans les milieux du rhythm’n’blues et du jazz, et dont le fils Shuggy (quinze ans) jouera de la basse sur un titre, « Peaches in Regalia ».

Pour faire simple, au vu du casting hétéroclite, on peut subodorer que ça peut partir dans tous les sens. Et effectivement, « Hot Rats » offre une musique inédite pour l’époque. « Hot Rats » est un disque que beaucoup considèrent comme le premier disque de « fusion ». Considéré par certains comme un disque pionnier du jazz-rock, on y trouve aussi des relents de blues, de rhythm’n’blues, de rock psychédélique, voire du funeste prog à naître sans oublier la musique contemporaine (Zappa finira groupie de Boulez) … Bon, pareil attelage incite à sauter au plus vite de la monture, sauf qu’avec « Hot Rats » c’est assez souvent supportable …

Mais pas toujours. Le « Peaches in Regalia » qui ouvre la rondelle, considéré par les fans comme « fondateur », désolé mais j’y vois qu’une bouillasse tourbillonnante, instrumentale et psychédélique, pas spécialement finaude, plutôt genre boucan plus ou moins organisé. Heureusement, ça dure pas très longtemps. Arrive ensuite ce qui est moi la masterpiece du disque (et du peu que je connais de Zappa), « Willie the Pimp ». Seul titre chanté (enfin façon de parler) du disque par Beefheart, morceau généralement honni par les jazz rockeux. Parce que « Willie … » c’est du violent. Un fond de heavy blues, un couplet psalmodié par Beefheart pendant une minute, une autre minute de grognements et borborygmes divers, et sept minutes de solos saturés de Zappa. Ce seul titre suffit à assoir la réputation de guitar hero du moustachu, c’est un titre à écouter une fois dans sa vie pour pas crever idiot, et ça enterre pas mal de la concurrence à six cordes … Par contre, le « Son of Mr Green Genes » qui suit, accumule tous les clichés insupportables (pour moi en tout cas) du jazz-rock, voire du prog. Ce titre clôturait la première face du vinyle original.


La seconde partie du disque repose sur un long titre, « The Gumbo variations » (rallongé de quelques minutes sur les éditions remastérisées par Zappa lui-même). Comme son nom l’indique (le gumbo est une espèce de ragoût louisianais aux multiples ingrédients), on passe du coq à l’âne, avec comme fils rouge les saxos de Underwood entrecoupés de solos de guitare de Zappa. Pas forcément captivant sur la durée (17 minutes quand même), mais souvent intéressant. « Gumbo … » est encadré par deux pièces plus courtes, « Little umbrellas » le plus jazzy du lot (bof …) et l’ultime « It must be a camel » qui met en avant le piano, pour un titre évoluant aux frontières du jazz, de la musique contemporaine, et du n’importe quoi …

Force est de reconnaître que « Hot Rats » est foncièrement différent par rapport à ce qui se faisait en son temps, en tout cas beaucoup plus rock et électrique que les pensums de Miles Davis rangés sous les mêmes étiquettes jazz-rock, fusion, etc …

Ce qu’on ne peut reprocher à Zappa, c’est d’être un type borné, uniquement intéressé par le monde musical qu’il se construisait disque après disque. Capable de financer les rondelles de ses proches (le très décapant « Trout Mask Replica » de Beefheart, de signer sur son label une bande de zozos dérangés et bruyants de Detroit (Alice Cooper), de faire enregistrer un groupe plus ou moins gag entièrement féminin (les GTO’s, entendre Girls Together Outrageous, groupe emmené par Pamela Des Barres, future groupie number one des seventies). C’est d’ailleurs une autre fille de GTO’s, Miss Christine, qui émerge façon inquiétant monstre aquatique d’une piscine (vide) sur la pochette de « Hot Rats » …


SANTANA - SANTANA (1969)

Chicano Revue ...
Aujourd’hui, Santana (le Carlos) est aussi chiant que les disques qu’il fait. Vous me direz , c’est pas le seul de sa génération et qu’on peut pas être et avoir été, ce genre de choses … N’empêche, voir ce pépé après des années de mutisme méprisant revenir tout sourire devant des journalistes pour faire vendre sa dernière daube jazz-rock-zen-cool-bouddhiste et les concerts qui vont avec où se rendent tous les hipsters En Marche (les mêmes qui vont voir les « performances » de Souchon et de la Dion et vont nous niquer profond pendant cinq ans avec leur autre façon de faire de la politique participative et diverses couillonnades du même genre), montre que vieillesse et dignité ne sont pas deux mots qu’on peut accoler facilement dès qu’il s’agit de rock ou de quelque chose qui est censé y ressembler.
Vérification faite, le dernier disque en date de Santana sur mes étagères, c’est le très mauvais « Amigos », plus de quarante piges au compteur. Et pourtant, ça avait plus que bien commencé … Flashback …
Santana, le groupe
Quartiers « populaires » de San Francisco, fin des années 60. Deux jeunes passionnés de musique traînent toujours ensemble. L’Américain pur jus Greg Rolie et le Mexicain de naissance Carlos Santana. Ils passent leur temps à écouter les Beatles, les Doors, Hendrix, et toute la scène psyché qui explose en Californie. Rolie a une formation de pianiste et se régale de maltraiter son orgue Hammond. Santana est guitariste. Des groupes sans lendemain sont montés sous l’égide des deux potes. A moment donné, parmi ces orchestres à géométrie variable, une tendance se dessine. Il y a beaucoup de batteurs ou de percussionnistes, beaucoup de métèques pour en jouer, le plus souvent comme Santana ayant leurs racines de l’autre côté du Rio Grande, et les rythmes latinos se mêlent aux rythmes rock.
Sentant qu’ils tiennent un truc, Rolie, Santana et leurs potes réussissent à faire venir à une répète une « star » chicano comme eux, un certain Gianquinto, dont le titre de gloire est d’accompagner parfois l’harmoniciste James Cotton. Le verdict du pro est sans appel : les titres sont trop longs, chacun y allant de son solo égomaniaque. Première baffe (ils ne lui en voudront pas, il sera recruté comme arrangeur lorsqu’ils iront pour de bon en studio). Les basanés ne se découragent pas, tournent inlassablement là où on veut bien d’eux à Frisco. Apothéose, leur réputation scénique finit par parvenir aux oreilles de Bill Graham (le patron du Fillmore et le Parrain de toute la scène musicale psyché, celui qui peut faire ou défaire les stars) qui lui aussi vient écouter les bestiaux. « C’est quoi votre bordel, vous faites que des instrumentaux, mettez des paroles si vous voulez que quelqu’un vous écoute un jour ». Deuxième baffe dans les rêves de gloire.
Santana, le Carlos
Mais les gars s’obstinent, suivent ces deux conseils, raccourcissent leurs compos et chantent (enfin, si on veut, voir plus loin) par-dessus (Rolie avec Santana aux backing vocaux). Fin 68, le groupe baptisé définitivement Santana rentre en studio pour un single qui sort début 69. « Evil ways » va scotcher tous les hippies. Et définir le Santana sound. Un rythme très chaloupé, des percus de partout, le B3 de Rolie et la Gibson SG du Carlos étant obligés de faire des prodiges pour se faire une place dans tout ce bordel tambouriné. Petit succès dans les charts, et le groupe entre-temps signé par la Columbia part en studio enregistrer son premier 33T. Bon, à cette époque-là, il sortait des singles fabuleux tous les jours et des albums de légende toutes les semaines ou quasiment. « Evil ways » et ses auteurs sont plus ou moins oubliés quand début Août paraît « Santana » le disque.
Coup de bol, Santana a été retenu pour ouvrir une journée à Woodstock. Le 16 Août en début d’après-midi, sous un soleil de plomb, les Santana prennent la scène d’assaut. Avec son guitariste qui a envie d’en découdre devant cette foule de festivaliers en train de se réveiller. Faut dire qu’on l’a vu avant le gig discuter avec Jerry Garcia, pape-gourou des hippies, et descendre une quille de Mezcal. Le groupe à l’unisson suit son leader, et le Santana band va livrer un des cinq morceaux de légende du festival, une version cataclysmique de leur pièce de bravoure « Soul sacrifice ». (Pour info, les quatre autres titres historiques de Woodstock sont le « No rain, no rain » du public, « I’m goin’ home » d’Alvin Lee et de ses Ten Years After, « I want to take you higher » de Sly et sa Famille Stone et le « Star spangled banner » concassé par Hendrix à l’aube blême du quatrième jour devant des rescapés hébétés). En tout cas, sur la foi de cette seule prestation enragée, l’histoire de Santana (le groupe et son leader) va prodigieusement s’accélérer.
« Santana » le disque est excellent, voire plus. Aurait-il permis à ses auteurs la gloire qui fut la leur sans leur prestation explosive à Woodstock, the answer my friend is blowin’ in the wind … Assez intelligemment, la réédition de 1998 a la bonne idée de rajouter au 33T studio trois titres joués à Woodstock dont évidemment « Soul sacrifice ». A noter que live, les titres durent le double que leur version studio, chassez le naturel et il revient au galop …
Aujourd’hui ce « Santana » premier du nom reste une des pierres angulaires du groupe (et de son leader), et avec son successeur « Abraxas » un des trucs à avoir absolument sur ses étagères. On y trouve, quarante siècles avant Fishbone, les Red Hot Machin et tous les autres balourds en pantacourt ce que doit être une fusion de genres musicaux réussie. A tel point que le débat fait encore rage (voir les notes de livret de la réédition) : Santana a-t-il inclus des rythmes latinos au rock ou le contraire ? Vous avez deux heures avant que je ramasse les copies, c’est coefficient 6 je vous rappelle…
Santana, Woodstock,16/08/1969
Parce que jusqu’à présent, les sonorités chicanos dans le rock, ça se limitait à « La bamba » de Ritchie Valens et au Farfisa hispanique de Sam « Wooly Bully » the Sham (qui était Texan) ou de Question Mark « 96 Tears » & the Mysterians (qui eux étaient du Michigan). « Santana » n’est pas un disque communautariste (comme en feront plus tard Los Lobos), il participe juste à faire avancer le schmilblick, à ouvrir d’autres portes, d’autres espaces au rock, pour reprendre la terminologie doorsienne de l’époque.
« Santana » est d’une redoutable cohérence. Neuf titres qui explorent ce mix entre culture latino-américaine et rock, les deux qui s’en écartent un peu (« Shades of time » plutôt soul et « Persuasion » heavy rock psyché à la Cream) semblant bien fades et convenus à côté du reste, alors qu’ils ne sont loin d’être indignes. Le reste, c’est emmené par des percussions qui sortent de partout (trois types, Carabello, « Chepito » Areas et Shrieve aux diverses batteries, percus, congas, timbales). Fidèles à leur idée de départ, les Santana couchent sur vinyle quatre instrumentaux (et les textes du restant seront très concis et d’une valeur littéraire proche du zéro absolu, mais on s’en cogne) « Waiting » en intro, le court « Savor », « Treat » comme un avant-goût du Carlos roi du sustain, et évidemment « Soul sacrifice ». On pourrait même y rajouter le single « Jingo » qui se contente de quelques onomatopées, un titre repris au percussionniste nigérian Olatunji (déjà plagié par Gainsbourg avec « Marabout »), voire la jam bordélique soul de « You just don’t care », tant les deux titres se composent du minimum syndical niveau paroles.
La mythique pochette avec sa tête de lion stylisée est signée Lee Conklin, un des illustrateurs (affiches, pochettes de disque) les plus connus du mouvement psychédéliques.
Conclusion : comme pas mal de choses, Santana, c’était vraiment mieux avant …


Des mêmes sur ce blog :
Amigos



WEATHER REPORT - HEAVY WEATHER (1977)


Loin des poncifs du genre ?

Ils sont velus, ils sont tous là ... Weather Report 1977

J’aime pas le jazz et encore moins le jazz-rock, tous ces moustachus bedonnants à chemise hawaïenne se complaisant dans la vaine démonstration de leur virtuosité. Alors, a priori, c’était forcément mal parti. Avis de tempête sur les Weather Report. Les yeux bandés, contre un mur, et feu à volonté.
Ce « Heavy Weather » me donne l’occasion de réviser (momentanément, manquerait plus que je me convertisse) mon opinion. Ce Cd est bon, varié, pas ennuyeux. Le funky « Birdland » d’entrée, la soul jazzy de « A remark you made », l’intéressant patchwork sonore « Harlequin », l’entêtant thème de « The Juggler » surnagent pour moi du lot.
Bon, évidemment, il y a de la « technique » (Zawinul, Shorter, Pastorius et les autres ne sont pas des instrumentistes débutants et ça s’entend), mais leur technique est utilisée pour tirer les compositions vers le haut, et non pas pour être jetée en pâture à un auditoire conquis d’avance. Et puis, pas de morceaux de trois-quarts d’heure, on reste dans un format « chanson ».
Allez, une dernière pour la route et agacer les puristes du genre : s’il y en avait un dans Weather Report qui avait pensé à chanter, ce « Heavy Weather » pourrait passer pour un bon disque de Steely Dan.

JEFF BECK - WIRED (1976)


Vous avez vu comment qu'on est techniques ?

Au bout de quelques minutes, une question angoissante surgit : « Quand est-ce qu’ils chantent ? ». La réponse arrive demi-heure plus tard : jamais. Car « Wired » est un disque instrumental. Qui plus est un disque instrumental de jazz-rock (pléonasme). Autant annoncer la couleur, pour moi, le jazz-rock, c’est le fond du trou musical (à égalité avec le prog, qu’ils croient pas que je vais les oublier, ces pénibles), toutes ces bandes de crétins moustachus, velus et techniques faisant de manière redondante la démonstration de leur savoir-faire (ceux qui pensent au Santana de la même époque n’ont pas tout à fait tort). Ce qui me chagrine en fait dans cette histoire, c’est d’y retrouver Jeff Beck.
Jeff Beck et Jan Hammer, chauve qui peut !
Comment le type qui envoyait la foudre sur « Shapes of things » avec les Yardbirds, qui surclassait avec ses deux disques du Jeff Beck Group les deux premiers Led Zep de l’« ennemi » Page, qui assénait le déluge de plomb en fusion du BBA avec la section rythmique la plus aplatissante des USA (Tim  Bogert et Carmine Appice), a t-il fini par s’écouter jouer en 76 au sein de ce band de lourds virtuoses où l’on trouve les pénibles usual suspects habituels (Jan Hammer, ancien complice de McLaughlin dans le Mahavishnu Machin par exemple) ? La réponse est dans le caractère cyclothymique de Beck, caractériel instable toujours en perpétuelle quête de nouveauté (et de reconnaissance, parce que c’est pas un modeste), adepte des fuites en avant qui plus souvent que raison finissent droit dans le mur.
Certains, et pas des cas isolés, considèrent que Jeff Beck est le meilleur guitariste du siècle passé. Dommage qu’il ait perdu l’essentiel de son temps à utiliser son indéniable virtuosité, dans des daubes soporifiques dont ce « Wired », adulé par les « musiciens ». Et que Sir George Martin soit aux manettes de cette chose n’arrange rien …
Pendant que Beck et ses potes ripolinaient leurs purges, les murs pisseux du CBGB de New York résonnaient des accords crétins des faux frères Ramones. Y’a des fois où il faut choisir son camp …
1, 2, 3, 4, Hey Ho, Let’s Go !!! Gabba Gabba Hey !!!

Du même, un chef-d'oeuvre : Beck-Ola


MAHAVISHNU ORCHESTRA - THE INNER MOUNTING FLAME (1971)



D'abord une grande aventure humaine

Avant d’être du jazz-rock, Mahavishnu Orchestra, c’est la réunion de cinq personnalités hors du commun …

John MacLaughlin en est le leader. Après une enfance difficile, il plonge très tôt dans la drogue et à la puberté devient accro au PCP (Page Centrale de Playboy), se livrant toutes les nuits sous les draps à des pratiques onanistes effrénées, expériences qui lui seront profitables lorsque plus tard il astiquera le manche de sa guitare à des vitesses jamais approchées. Un guitar hero …

Jan Hammer, citoyen de la riante République Populaire Tchèque, aura lui l’adolescence difficile de ceux grandis de l’autre côté du Rideau de Fer. Comme tous les jeunes des pays de l’Est, il se destinera d’abord à une carrière dans le cinéma porno, mais le rachitisme des ses attributs virils le feront échouer à tous les castings, dans lesquels il ne réussira qu’à gagner le peu glorieux sobriquet de « Pine d’Acarien ». Vexé et déçu, il abandonnera dès lors le hard pour se consacrer au jazz …

Billy Cobham, tout petit, rêvait d’être architecte d’avant-garde, et était passionné par tous les jeux de construction de type Lego. Il n’aura de cesse, lorsque par hasard devenu batteur, d’empiler selon des échafaudages par lui seul maîtrisés et défiant toutes les lois de l’équilibre et du bon sens, des kyrielles de doubles grosses caisses, fûts et cymbales diverses sur lesquels il cognait de façon inconsidérée …

Morituri te salutant
Comme si cela ne suffisait pas, le Mahavishnu Orchestra devait se composer de deux batteurs et Rick Laird était pressenti pour prendre place sur l’autre tabouret. Las, des hémorroïdes aussi douloureuses que chroniques lui interdirent à son grand dam la position assise, et il se résolut à opter pour la guitare basse, dont la pratique convenait mieux au soulagement de son postérieur douloureux.

Le matériel des quatre, surtout la batterie de Cobham, fort encombrante, laissait peu de place dans le combi Volkswagen du groupe, qui hésita longtemps à se doter d’un autre musicien, ceux présents envisageant tour à tour un harmoniciste et un joueur d’ukulélé. Sur un de ces coups de tête qui font s’écrire les plus belles pages de la légende du jazz-rock, ils choisirent un violoniste et Ivry Gitlis et André Rieu n’étant pas libres,c’est finalement Jerry Goodman, un brave type, qui fut retenu.

Restait pour les cinq hommes à choisir un nom de scène. Grands amateurs de cinéma en noir et blanc et de westerns, ils souhaitèrent un nom à consonance indienne. « The Sitting Bull Orchestra » fut un moment envisagé, avant que l’unanimité se fasse sur Mahavishnu Orchestra, d’après le nom d’un des Trois Lanciers du Bengale, le classique d’Henry Hathaway …

S’apercevant un peu tard qu’aucun d’entre eux ne savait chanter, ils décidèrent de se contenter de morceaux instrumentaux. Leurs tenues de scène surprirent le public, qui pourtant en ce début des années 70, en voyait de toutes les couleurs. Les musiciens du Mahavishnu Orchestra se présentaient à leurs concerts serrés dans des polos jaunes à rayures noires (ou le contraire), et se livraient  à de curieuses chorégraphies scéniques rappelant le vol des insectes. La raison est fort simple, les cinq hommes étaient fans de Maya l’Abeille, dessin animé auquel la pièce centrale de ce Cd (« The Dance of Maya ») est bien évidemment dédiée. En hommage à un autre grand musicien, le créateur de « Kind of Blue », ils adoptèrent tous la coiffure de leur idole Miles, la fameuse coupe Davis …

Tout était dès lors en place pour que la légende s’écrive …


Ben non, c'est pas les Mahavishnu Machin ... Faut pas abuser quand même ...