Où la Terre serait ronde, et la Lune blonde … Ou un
truc de ce genre, car il carburait pas au Vichy-fraise Jason Pierce. Parce que
malgré un casting pléthorique (les Spiritualized se sont adjoints cordes,
cuivres, grands orchestres et quelques guests de renom, comme Dr. John qui n’a
pas l’habitude de se déplacer pour des baltringues), il ne fait aucun doute que
ce disque est d’abord le sien.
D’ailleurs, pour bien montrer qu’on est là dans le
vécu, et que cette musique, avant de l’enregistrer en studio, Jason Pierce l’a
bien des fois entendue dans sa tête, il s’est rebaptisé, bêtement et pas très
modestement « Spaceman ». Et plutôt qu’un hommage aux Byrds ou à
Babylon Zoo ( ? ), il faut voir dans ce nouveau choix patronymique peu
finaud un règlement de comptes avec son ancien complice Pete « Sonic
Boom » Kember, son alter ego dans les Spacemen 3. Pierce semble peu
modestement s’arroger l’héritage entier de son ancien groupe, ce qui me semble
quelque peu présomptueux et démesuré … Et tout cela fait finalement querelle de
cour de récréation …
Il n’empêche que ce « Ladies & gentlemen
… » est pour moi le meilleur des Spiritualized. Déjà le packaging est une
merveille de trouvaille. La pochette
pastiche le design d’une boîte de médicaments, et le livret en devient la
notice (formule active, posologie, recommandations d’administration, effets
secondaires, persistance des symptômes, …). Gimmick génial d’amateurs éclairés
de pilules de toutes les couleurs …
Spiritualized live Black Sessions 1997 |
La tonalité globale du disque repose sur des
mélodies planantes « spatialisées », noyées dans l’écho et la reverb,
modèle déposé et breveté par Barrett aux débuts du Floyd … on reste dans la
« famille » (des amateurs de substances). Les ronchons diront que tout
ça n’est que shoegazing au ralenti (« I think I’m in love » est à peu
près le seul titre qui corresponde à cette définition), ce serait faire fi de
tout un travail pour jouer dans toutes les nuances du rock à guitares, qu’elles
soient furieuses ou accompagnent de lentes ballades. « Ladies and
gentlemen … » est un disque beaucoup plus varié que l’on pourrait croire.
On passe du « Come together » qui n’a rien
à voir avec les Beatles, mais plutôt avec les Stones, et en tout cas reprend
les choses là où les à peu-près cousins de Primal Scream les avaient laissées
avec « Screamadelica » ou de « Electricity » (évidemment
pas une reprise d’Orchestral Manœuvres), tout en guitares saturées qui me fait
penser à Clapton quand il était le soliste des Bluesbreakers circa 1965, à des
titres beaucoup plus apaisés (la traîtresse « Stay with me » lente
ballade qui finit par s’engloutir dans un maelström de guitares, « Broken
heart » qui pourrait passer pour le meilleur titre du Floyd post
« Wall ».
Et entre rage et accalmie, on a droit à toute la
panoplie des émotions musicales, du trou noir « Home of the brave »
dans lequel tous les instruments semblent aspirés, titre enchaîné avec
« The individual » très marqué lui par le krautrock bruyant (Can,
Faust, Amon Düül, ce genre …). Evidemment un disque de Jason Pierce aurait un
goût d’inachevé s’il n’y avait pas quelque envolée mystique genre gospel ou
prière. Ici, c’est « Cool waves » qui s’y colle, et même si on s’y
attend, ça le fait, ce titre est un des plus beaux du disque. En fait, il n’y a
à mon avis qu’une balourdise qui cache derrière un bon titre (« No God only
religion »), une sorte de vilain free jazz manouche …
La conclusion de ce « Ladies and gentlemen
… » est une longue pièce (17 minutes tout de même), débutée par un piano
jazzy (Dr John ?), zébrée par des chorus de guitares zeppeliniennes, qui
s’abîme dans une purée de pois électrique, avant de revenir au thème initial.
Bel exercice de style tout de même un peu vain mais qui ravira les fans de prog
(si tant est qu’il en reste).
Le chef-d’œuvre de Jason Pierce et de ses
Spiritualized, et comme c’est écrit dans le livret :
For
aural administration only
Protect from light
Keep
out of reach of children …
Un de ces albums culte sur lequel je lorgne depuis 10 ans... J'ai écouté Nowhere de Ride pour la première fois il y a quelques semaines, donc tout espoir est permis.
RépondreSupprimerCeci étant, si tu connais My Bloody Valentine, Ride risque pas d’être une révélation ...
SupprimerOui mais "Nowhere" est sorti en 1990, un an avant "Loveless". Mais après le premier MBV, d'accord...
SupprimerDe toute façon, après Loveless, y a plus rien, même plus la peine d'essayer.
SupprimerCeci dit Nowhere est quand même un album magnifique qui mérite sa réputation.
Ouh la, ça lui a plu ça, à Lester, il a mis 4 extraits ! :)
RépondreSupprimerDois-je rappeler que le guitariste Coxon (me souviens plus du prénom) s'est ensuite illustré au sein du duo Spring Heel Jack qui oeuvra dans la drum'n'bass avant de bifurquer vers le jazz contemporain ?
Merci François, mais c'était pas la peine de le rappeler, on s'en cogne de Spring machin ...
SupprimerComme dirait Chichi : cela m'en touche une sans déranger l'autre...
SupprimerY'a pas à dire, Miles c'est quand même autre chose que toutes ces baltringues. Remarque, il y a des fans visiblement dans cet espace...
RépondreSupprimerBonne soirée braves gens !