Du boogie woogie avant vos prières du soir ...
A une époque où l’on nous a gavé grave avec les
prédictions apocalyptiques de zozos cannibales qui avaient même pas été foutus
de prévoir la fin de leur monde à eux, il serait maintenant temps de
s’intéresser à quelques cultes païens autrement plus cools. Et pourquoi ne pas
réhabiliter la Sainte Eglise rockabilly du Reverend Horton Heat ? Après
tout, on en connaît qui s’extasient devant l’Elvis de pacotille Jon Spencer (le
type qui se prend pour le King et donc pour forcément quelqu’un qui compte dans
le rock, et qui interdit aux gens de fumer dans ses concerts, rock’n’roll
attitude quand tu nous tiens pas …) ou les braillards de la Jim Jones Revue, …
ou qui vous voudrez qui se réclame de la musique vintage des 50’s, ce genre qui
revient épisodiquement à la mode, et dans lequel les Sray Cats avaient au début
des années 80 touché le jackpot. C’était pas les premiers, Sha Na Na dans les
sixties (les ancêtres de Au Bonheur Des Dames), Crazy Cavan et Robert Gordon
dans les seventies, les Cats donc, et puis après … que dalle (qui a dit les
Forbans, tu dégages, et vite …), jusqu’au bon Reverend.
Qui n’est pas plus curé que moi, et qui ne s’appelle
pas Horton Heat. Mais on s’en cogne, il joue à merveille le rôle du prêcheur
électrocuté, traumatisé à jamais par les Cramps. D’où parfois quelques libertés
avec les stricts codes du rock’n’roll originel, ni vraiment un puriste, pas
franchement un revivaliste. Souvent étiqueté psychobilly (psycho quoi ? on
s’en fout aussi, l’essentiel c’est que ça dépote …).
Et pour dépoter ça dépote. La seule limite à la
vitesse que ce trio semble connaître, c’est la rapidité des bras du batteur, au
taquet tout le temps. D’ailleurs le Reverend est signé chez Sub Pop, label
méticuleux qui n’avait pas l’habitude d’engager des poseurs. Fallait des types
concernés, et les curetons y vont à fond. Tiens, s’ils ont une drôle de bobine
sur la photo de la pochette, c’est qu’elle est pas retouchée par Photoshop, ils
se sont immergés dans une rivière glacée pour cette mise en scène de cérémonie
baptismale. Des furieux, je vous dis …
Suffit d’écouter le dragster rockab « Livin’ on
the edge (of Houston) », la tuerie garage punk « 400 bucks » ou
la country épileptique de « Bales of cocaïne » pour s’apercevoir que
l’on n’a pas affaire à des enfants de chœur, mais à des types qui jouent comme
si le sort du monde dépendait de la conviction qu’ils mettent dans leurs
morceaux. Des fois, on a même l’impression qu’ils se mélangent les accords,
« The devil’s chasing me » tourne à la jam furieuse, et ce titre peut
passer pour le « I’m going home » des années grunge (ceux qui étaient
à Woodstock lors du passage de Ten Years After comprendront, même si ici il y a
moins de technique et plus de burnes …). Il y a même du strict rock’n’roll
(« You can’t get away from me »), du foutage de gueule de l’auditeur
qui pense qu’il va avoir un répit quand se pointe « Lonesome train whistle »
avec son titre qui empeste la ballade country, mais tu parles Charles, la
ballade elle se fait au sprint.
En fait il faut attendre les trois derniers titres
pour reprendre sa respiration. « Loaded gin » est un boogie-blues au
ralenti qui revisite intelligemment le genre, « Nurture my pig » (une
reprise des Locos Gringos, fallait aller la chercher celle-là, et ne me
demandez pas qui sont les Locos Gringos) qui a des espèces d’atours jazzy, mais
du jazz revisité par un chœur de hooligans, et l’ultime « Gin & tonic
blues » qui laisse quand même perplexe (electro-blues spatialisé ? on
dirait du Zappa c’est dire si c’est zarbi) et est pour moi la seule bêtise du
disque.
Les Reverend Horton Heat évoluent dans un trio
strictement basique (guitare, contrebasse, batterie), se passent de tout
musicien additionnel en studio, et au fil des ans le personnel a varié autour
de l’inamovible Jim Heath.
Le genre de disque quand même, mes biens chers
frères, mes bien chères sœurs, autrement plus sympa en ce jour que la fuckin’
messe de minuit avec les mioches et la belle-famille …
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