Un sommet ... du kitsch
Et pourtant il y a un gros
poisson derrière la caméra. Stanley Donen, seulement vingt-sept ans au moment
où il commence le tournage, mais déjà chorégraphe superstar de la MGM et
réalisateur pour cette firme de deux comédies musicales au succès gigantesque,
« Un jour à New York », et surtout la référence absolue du genre
« Chantons sous la pluie ».
Et déjà, à l’époque, on peut
constater que l’industrie cinématographique hollywoodienne ne jetait pas les
dollars par les fenêtres, car tout Donen qu’il était, il se verra allouer un
budget quasi misérable pour son nouveau film. Tiré d’un bouquin, déjà
extrapolation d’un épisode de la mythologie romaine (l’enlèvement des Sabines),
et originellement nommé comme lui « The sobbin’ women ». So
what ? Des femmes qui chialent ? Cherchez autre chose comme titre a
dit la production. Titre suivant proposé : « A bride for seven
brothers », qui aurait certainement fait l’affaire chez Marc Dorcel, mais
là, nouveau refus. Le suivant sera le bon, « Seven brides for seven
brothers », évidemment traduit stupidement en français … et pourquoi
sept ? ben voyons, les sept nains, les sept femmes de Barbe-Bleue, tout
çà, le scénariste avait pas trop envie de se compliquer la tâche. Donen va se
retrouver en plus avec un cahier des charges compliqué. Il devra tourner en
Cinémascope (premier film dans ce format pour la MGM), lui qui n’est pas un
technicien de la caméra, et pour assurer le coup, retourner les scènes au
format « normal ». Deux films pour le prix d’un en sorte, c’est la
version en scope (et en stéréo) qui sera diffusée …
L’histoire se passe en 1850
dans l’Oregon et ses majestueux paysages naturels … en carton massif. Tout a
été tourné en studio et ça se voit très très beaucoup (scène gag involontaire
du film : une ouverture hors champ de cages aux oiseaux dans un cadre
bucolique, et les pauvres piafs qui vont se crasher dans le décor de fond, on
le distingue parfaitement …). Pire, Donen n’a que deux acteurs de comédies
musicales confirmés, Howard Keel et Jane Powell, qui auront les rôles
principaux. Le reste du casting, c’est pas une blague, sera pris parmi les gens
sous contrat avec la MGM et qui ne sont pas en train de tourner un autre film.
Il en manque encore, mais qu’à cela ne tienne, des danseurs venus du classique
tout ce qu’il y a de sérieux et des acrobates de cirque complèteront le
casting. Il en manque toujours ? Et bien quand tous les autres
multiplieront les acrobaties, ceux qui ne savent pas danser resteront assis et
taperont la mesure pendant que ceux qui savent danseront …
Forcément, tout ça finit par
laisser des traces à l’écran. Le genre en lui-même implique un scénario cousu
de fil blanc, faut pas trop chercher à s’intéresser à l’intrigue, c’est
obligatoirement une happy end. Point de départ : sept frères roux (pourquoi
roux ? on sait pas) et célibataires vivent dans une ferme perdue, et le
film nous narre leurs tribulations pour trouver épouse. Jeu des acteurs sommaire
assorti de force grimaces expressives, gags et répliques ultra-téléphonés, même
Christian Clavier aurait eu l’air bon dans ce truc, c’est dire … mais la
comédie musicale est un genre très codifié qui se doit de proposer un spectacle
populaire et familial, et ce film a rempli parfaitement son rôle, gros succès
en salle (cinquième meilleure fréquentation aux Etats-Unis en 1955), et les
producteurs doubleront leur mise …
Aujourd’hui, c’est le type même
de film qui a sévèrement morflé. C’est naïf, criard, furieusement kitsch, un
vestige d’un autre temps et surtout d’une époque où le public n’avait pas les
mêmes goûts et les mêmes attentes qu’aujourd’hui face à un film. D’autant plus
que « Les sept femmes … » est largement surestimé. Ses chansons n’ont
pas traversé le temps, l’intrigue est d’une niaiserie confondante, et les
faiblesses du casting font qu’on n’a pas droit à de grands numéros sophistiqués
de danse. A une exception près, Donen a mis le paquet sur une scène, dite
« de la grange », qui a nécessité trois jours de tournage plan par
plan, et où, tirant profit de l’hétérogénéité de ses acteurs, on passe de
quadrilles enlevés, à des numéros assez spectaculaires de danse classique ou
d’acrobatie.
Pour le reste, il n’y a pas
vraiment de quoi se relever la nuit …
La scène de "la Grange" ? ils dansent sur du ZZ Top ?
RépondreSupprimerJ'sais pas où tu as déniché ça !! Mais puisqu'on parle de Stanley Donen, il est toujours bon de rappeler, de répéter, de rabâcher : visionnez CHARADE avec Grant/Hepburn !!
J'en étais sûr que tu allais citer ZZ Top ...
RépondreSupprimerCharade, j'ai bien l'impression que j'ai jamais vu, mais je note ...