Si Versailles m'était conté ...
Air, c’est l’histoire maintes fois répétée de la
citrouille qui se transforme en carrosse. Ici, celle de deux potes (Nicolas
Godin et Jean-Benoît Dunckel) qui font de la musique ensemble depuis toujours,
au gré de formations disparues sans laisser de traces (Orange notamment, avec
Xavier Jamaux, futur Phoenix et Alex Gopher, futur lui-même ). Et à un moment, plutôt que de
faire comme à peu près tout le monde, copier ce qui est dans l’air du temps,
Dunckel et Godin vont partir tête baissée dans leur truc, sans trop se soucier
du résultat et des conséquences …
Leur truc à eux, entre mille autres choses, c’est un
disque, le « Melody Nelson » de Serge Gainsbourg. Que de leur aveu
ils trouvent tellement parfait qu’ils se forcent à ne l’écouter qu’une fois par
an, pour ne pas galvauder sa magie … Et plutôt que d’essayer de le
« refaire » (les Air n’ont jamais eu la grosse tête), ils vont s’en
inspirer, partir dans de savants assemblages de cordes éthérées (des vraies, enregistrées
dans les studios Abbey Road, pas des synthétiques sorties d’un Moog), de nappes
mélodiques, de voix susurrées et (ou) vocoderisées. D’autres influences
pointent sur « Moon Safari », leur premier disque, celle du Floyd des
longues plages oniriques (rien que le titre du Cd), cet art de la chanson
mélodique très arrangée copyright Hal David et Burt Baccharah …
Dunckel et Godin dos au mur, à l'abri des courants d'air ... |
Les circonstances de l’enregistrement (les deux
entendent garder la maîtrise totale du projet, pas question d’élargir le
« groupe », même si un bassiste, un batteur et une chanteuse
participent sur certains titres), feront que ce disque comportera beaucoup de
synthés, et rattachera Air à la mouvance électronique. Même si la musique
produite par Air n’a que peu à voir avec les expérimentations et bidouillages
sonores (forcément, la plupart des joueurs de disquettes de la concurrence
n’ont jamais su écrire une chanson) de rigueur dans la mouvance electro de
l’époque. Leur origine (Versailles) fera bêtement jaser (« ouah, les
bourges des beaux quartiers, …sont pas crédibles, … c’est que de la muzak
d’ascenseur … », ce genre de niaiseries répandues par leurs détracteurs).
Et comme les Air ont pas l’habitude de bâcler le
boulot, et qu’ils recherchent le beau plutôt que le joli, quand tout s’emmanche
bien ça donne de superbes titres qui ne subissent pas des ans l’irréparable
outrage. Ce « Moon Safari » est hors du temps et des modes, et donc
forcément ne se démode pas. Des choses comme « La femme d’argent »,
entre ambient et new age qui ouvre le disque avec force Minimoog est resté une
des pierres angulaires de leurs concerts (car oui, les Air ne sont pas
ridicules sur scène, l’exercice live ne leur fait pas peur) ;
« Talisman » est juste très beau avec ses arrangements de cordes, « Ce
matin-là » pareil, avec son improbable tuba. Ce qui est frappant, c’est
que les titres soient chantés ou pas, on a toujours l’impression d’avoir à
faire à des chansons, par leurs formats, leurs structures, leurs mélodies
toujours soignées et mises en avant. Il suffit d’une voix susurrée (« New
star in the sky ») ou trafiquée (Sexy boy », gros hit) pour qu’un
titre décolle. Et parfois même, ces chansons n’avancent plus masquées, et
s’imposent comme ces rengaines qui enluminaient les lointaines sixties (« All
I need », « You make it easy », « Kelly watch the
stars », cette dernière étant la seule du disque dont les arrangements
font un peu vieillot, malgré une mélodie first class) …
Ce « Moon Safari » sur lequel pas
grand-monde aurait mis un kopeck est devenu assez vite une référence que
s’est accaparée d’abord la mouvance électronique, avant de gagner le domaine
tout public. Et plus que le succès populaire, les Air sont devenus les figures
de proue d’un mouvement musical, bêtement baptisé « french touch »,
englobant des gens comme Daft Punk ou Laurent Garnier, et bénéficiant d’une
reconnaissance, d’une notoriété, et de ventes conséquentes au niveau mondial,
choses inédites jusque-là pour des productions musicales françaises …
Tu ne manques pas d'Air...
RépondreSupprimerPour une fois que tu aimes un disque "électro", ben... moi pas. Décidément...
J'aime bien ... peut-être parce que c'est pas vraiment de l'electro ...
SupprimerC'est mesquin la pique au passage sur les "joueurs de disquettes" (ce qui d'ailleurs ne veux rien dire, d'autant que le format "chanson" n'y est pas valable à a base, donc...), et c'est de la mauvaise foi que de nier à cet album son statut d'album électro. Très agréable, mais pas mon préféré (ce sera Talkie Walkie, après je décroche). Je ne crois pas que "personne n'aurait misé un kopeck". Les Air ont sorti leur album dans un vent de hype (mais on ne disait pas ça à l'époque) très fort, je me souviens encore de leur apparition à NPA, où ils ont fait leur toute première prestation live.
RépondreSupprimerLa French Touch, ça ne voulait vraiment rien dire, mais ça a fait vendre.
On ne peut pas nier le petit côté lounge de l'affaire, surtout sur ce premier album, et quand on dit lounge, l'ascenseur n'est pas si loin. Les morceaux un peu trip-hop sentent bon le cocktail à 12 euros.
Impossible de ne pas mentionner la désormais classique sortie de Jean-Louis M., auteur compositeur interprète : "Et ça donne des triple merdes genre AIR. Ils auraient du s'appeler Vent."
Je viens de regarder le clip de NPA, c'était le jour de la sortie de ce disque ... (http://www.dailymotion.com/video/x6b72r_air-sexy-boy-live-1998-npa-canal-mo)... Si on veut jouer sur les mots et les codes, déjà pour leur 1ère apparition live, ça a beaucoup plus à voir avec un concert de groupe de rock, qu'à une "performance" de joueur de disquettes ...
RépondreSupprimerAh, encore "joueur de disquettes" qui émeut ... Kraftwerk par exemple n'avait que des machines et faisait des chansons, et des plus que bien foutues ... Le problème vient pas des disquettes, mais de ceux qui en jouent ...
Je suis pas fan au-delà, de Air, mais j'aime bien ...
Il est pas un peu aigri et jaloux, Murat ?
Faut-il obligatoirement faire des chansons, là est la question...
RépondreSupprimerAh ouais, Murat il tacle tout le monde, Björk, Renaud, Souchon...
Ah ah, jaloux de qui ? Il est largement au dessus de la mélée. Je ne crois pas qu'il ait jamais taclé Souchon. Voulzy oui, qu'il a traité de gros branleur. Ce qui est u peu vrai. Sur Renaud, je tirerais pas sur les ambulances, et puis c'est un peu toute mon adolescence. Je suis passé à autre chose depuis longtemps, même si voir sa tête en couverture de Paris Match ça fait de la peine...
RépondreSupprimerJe sais pas où c'est que t'as vu des disquettes à propos Lester. Tu sais que la techno, ce sont d'abord des instruments mythiques. Et puis ensuite le travail sur ordinateur qui recré les instruments. Suffit de voir Rebotini actuellemnt, il fait de la techno. Il n'a aucun laptop avec lui sur scène, il ne joue qu'avec des instruments. Même les gratteurs de guitare en bois ils finissent dans des studio avec des disquettes, des ordi pour mixer...
A la question, faut-il faire des chansons, la réponse ets évidemment non, c'est une conception bien réductrice. On peut, mais on n'est pas obligé. Et ceux qui font de belles chanson ne serait sans doute pas capable de faire No UFO.
Obispo, Maé, Grégoire, voila de grands faiseurs de chansons... :)
RépondreSupprimerOui, il a taclé Souchon (source : Closer)
"Je ne suis jamais arrivé à me faire à ce milieu", voilà pourquoi Jean-Louis Murat s'est toujours tenu éloigné du système et voilà pourquoi il n'a jamais participé aux Enfoirés : "Je trouve ce système dégoûtant. Les jolis cœurs, les plus-généreux-que-moi-tu-meurs, je n'y crois pas du tout. Tous ces artistes sont des monstres d'égoïsme. La vraie générosité, elle est silencieuse. Tu fais, mais tu fermes ta gueule. Ça ne doit pas devenir un élément de promotion. (…) Ils font de la promo. N'importe quelle maison de disque te dira que la meilleure émission de variétés, c'est 'Les Enfoirés', et qu'il serait bien d'y être. Tout est dit."
Ou presque ! Pour Jean-Louis Murat tout ça est une affaire d'hypocrisie où l'égoïsme règne : "Ces hommes de gauche patentés, je connais leur mode de fonctionnement. Le plus grand des jolis cœurs, Renaud, je l'ai vu faire un truc qui te conduit normalement en prison. Il est devenu mon ennemi de base, même si on ne tire pas sur une ambulance. J'ai vu aussi des hérauts de la gauche jouer au poker une petite nana perdue, une nana de 16 ou 17 ans. 'Elle est pour toi ou elle est pour moi ?' Je les ai vus faire ça, ces mecs qui hurlent à la mocheté du monde dès qu'un chien se fait écraser."
Et si le chanteur se défend de n'être ni de gauche ni de droite, il fustige avec hargne les artistes qui se disent socialistes : "Les chanteurs se mettent toujours du côté du manche. La vie d'artiste est beaucoup plus confortable si tu es vaguement contre. Ils essaient de se placer sous une sorte de lumière marxiste. Ils disent : Je suis un rebelle, je suis socialiste. Tous les cons font ça."
Et même ceux qui se positionnent plus à droite ? "Tu peux aussi faire une carrière de lèche-cul à la Souchon. C'est le plus grand stratège de la chanson française. Il est passé de Pompidou à Sarkozy sans broncher. C'est un centriste, si on veut. Souchon, c'est le Lecanuet de la chanson, ou alors, pour être plus moderne, c'est le Bayrou de la chanson. Un exemple à suivre si on veut vendre des disques."
A 59 ans, Jean-Louis Murat, qui s'est retiré en Auvergne, n'a rien perdu de sa verve légendaire, quitte à déplaire. De toutes les manières "c'est un milieu où il faut se taire. Ils ne peuvent pas me supporter, je le leur rends bien. Je n'ai pas d'amis là-dedans."
"A la question, faut-il faire des chansons, la réponse ets évidemment non, c'est une conception bien réductrice" ...
RépondreSupprimerC'est sûr, on n'est pas obligé, c'est comme quand tu joues attaquant au foot, t'es pas obligé de marquer des buts ... Après, faut pas non plus s'étonner si messi se fait applaudir et gignac siffler ... et si grégoire vend plus de disques que plastikman ...
Ouf, Closer, ça c'est de l'investigation, de l'info, et du culturel ... Il se confie à ces torchons, Murat ? Il vieillit très mal, le misanthrope auvergnat ...
C'est pas joli joli ce que tu fais Lester, c'est du travail de faussaire, mais la mauvaise foi c'est ton truc.
RépondreSupprimerEn tant que diplomé en Histoire (ah ah!), je me dois de rectifier la réalité de la situation. Murat ne s'est pas confié à Closer. Murat à donné une Interview au Point, média traditionnel. Le site de Closer ne fait que citer quelques passages, les plus croquignolets bien sûr. Donc non, Murat ne se confie pas à Closer, qui de toute façon n'en a rien à carrer, tu crois que les lecteurs de Closer écoutent Murat ?
Quant à l'interview du *Point*, ben il a pas tort, je suis d'accord avec tout ce qu'il dit (sauf sur Souchon, qui est un type bien, celà dit Lecanuet de la chanson c'est une formule !).
Le souci de toute façon c'est que les gens qui ne l'écoute pas n'ont de lui que deux images : "Regrets" avec Mylène Farmer il y a plus de vingt ans, et ses déclarations assassines dans les interviews. Pour l'avoir vu sur scène il y a quelques mois, il vieillit au contraire très bien, il n'a jamais été meileurs qu'aujourd'hui en live, et son dernier album est son plus beau depuis 10 ans.
Qu'est ce que tu me parles de foot d'abord ? Autant me parler chinois. Je ne sais même pas qui sont ces gens. Et puis quoi, le format chanson n'est pas le seul valable, je ne vois même pas en quoi c'est débattable.
Fin de l'interview (du Point donc...)
RépondreSupprimerL'une de vos chansons, sur votre dernier album, proclame ceci : "Dans ce monde moderne je ne suis pas chez moi". Vous êtes misanthrope ?
Je dis ensuite : "Merci pour tant de peine, mais je ne t'aime pas." C'est ce que je pense vraiment. C'est même vicieux, puisque ça me plaît assez qu'on ne m'aime pas. Être une vedette dans ce monde pourri, je n'apprécierais pas tellement ! C'est plutôt un honneur d'être détesté. Mais je ne suis pas suicidaire. Je suis un mec simple. Je garde les valeurs paysannes : se lever tôt, travailler. Et ce que les autres en pensent, à vrai dire, on s'en fout.
Autre extrait :
RépondreSupprimer"Le lundi qui suit la défaite de Jospin en avril 2002, par exemple, je suis en concert à la Cigale. J'attaque par une blague où je dis : 80 ans de communisme, 80 millions de morts, on est bien débarrassé ! Silence de cathédrale dans la salle. Le public ne supporte pas ce genre de truc ! En fait, j'aime beaucoup déclencher le rire jaune, j'aime bien aller à la limite. Il faut être créatif."
Excellent souvenir, j'y étais. Grand concert. Je ne me souviens plus du silence de mort, moi ça m'avais fait marrer.
Pfff ... lire Le Point et écouter Murat ... quelle perte de temps, alors que tu pourrais lire l'Equipe et regarder des matches de foot ...
RépondreSupprimerMiles Davis non plus, il faisait pas de chansons... What else ?
RépondreSupprimerTiens Del, un blog sans chanson ou presque :)
RépondreSupprimerhttp://emoiselectroniques.blogspot.com/