Pour le côté duo de perfectionnistes maniaques … pour le
reste, XTC sont aussi Anglais que faire se peut, sont un vrai groupe, n’ont pas
vraiment laissé le souvenir de sessions de studio sous des montagnes de coke …
Les XTC sont apparus en même temps que les punks
dont le remuant boucan désorganisé a dû les laisser dubitatifs. XTC, c’est tout
le contraire des punks, ils ne rêvent que de pop sophistiquée. Le problème de
la pop, c’est que par essence, elle se nourrit de succès populaires. De
singles, de hits, de titres classés dans les charts. Oh certes des hits, XTC
vont en avoir un de balèze, « Making plans for Nigel », issu de leur
déjà troisième album. Et les XTC vont s’accrocher, « jouer le jeu »,
multiplier disques, promos et tournées. « Making plans … », malgré
leurs efforts, n’aura pas de suite. Non pas que les XTC n’aient pas été
capables d’écrire de bons titres, mais parce qu’aucun ne retrouvera le haut des
charts.
XTC 1982 |
« English settlement » est leur cinquième
disque. Celui sur lequel les XTC ont tout donné. Double vinyle, quinze titres,
plus de 70 minutes. Le disque du « ça passe ou ça casse ». Ça va
casser, mais pour d’étranges et imprévisibles raisons… XTC sont quatre, plus ou
moins multi-instrumentistes en studio. Deux seuls écrivent, Colin Moulding et
Andy Partridge. Ce dernier commence à prendre une part prépondérante, sur
« English settlement », les deux tiers des titres sont de lui. Autrement
dit, il a la pression, celle de la maison de disques (Virgin) qui aimerait que
le groupe concrétise en terme de succès son potentiel. Et celle qu’il se met
tout seul. Maniaque pointilleux en studio, hyper-stressé dès qu’il s’agit de
monter sur scène. Andy Partridge va littéralement exploser lors d’un concert à
Paris, au Palace, pour la promotion de l’album dont le premier single extrait
« Senses working overtime » commence à « frissonner » dans
les hit-parades. Partridge, paralysé par le trac, quitte la scène au bout de
quelques minutes, fait un malaise, est évacué par le SAMU. La version
officielle sera une crise d’hépatite. Toujours est-il que le reste de la
tournée est annulé, et plus jamais Partridge et XTC ne se produiront sur scène.
Faute de promotion, « English settlement » deviendra un « succès
d’estime », dans les faits un quasi bide commercial. Très vite, Virgin
lâchera le groupe, qui va errer deux décennies dans un circuit indépendant
confidentiel, publiant de loin en loin des disques le plus souvent fantastiques
qui passeront inaperçus. XTC deviendra un duo (Moulding – Partridge). Moulding
aurait semble t-il jeté l’éponge, en tout cas le dernier disque de XTC date de
2000 …
« English settlement » dans un contexte
« normal » aurait-il été le disque de la consécration ? Même pas
sûr, ce n’est pas un disque « facile ». Il y a une telle
sophistication, un refus de tous les instants de toute forme de simplicité
(hormis peut-être « Senses … », le plus évident du lot) qu’on voit
mal ce genre de galettes se vendre par millions. « English
settlement » s’adresse à la « famille », ceux qui de Buddy Holly
à Badfinger, ont disséqué toute la culture pop. Sans pour autant négliger les
dernières trouvailles techniques (beaucoup de claviers et synthés) ou les structures
rythmiques complexes (Peter Gabriel était à cette époque-là dans la même
démarche). Suffisamment doués pour ne pas faire des copier-coller de choses
déjà entendues, les XTC innovent à chaque titre. La seule comparaison qui me
vienne à l’esprit, c’est le Blur des disques d’après le méga-succès
(« Blur », « 13 », « Think Thank ») quand Damon
Albarn s’appliquait à détruire méticuleusement cette image de britpop pour
minettes dont il ne voulait plus …
Andy Partridge, la tête ailleurs ? |
« English settlement » part dans tous les
sens tout en restant homogène. Il y a une base commune à tous les titres, la
recherche de la mélodie, la construction même sophistiquée en couplet-refrain,
un gros son de batterie mis en avant. Ensuite, une ou plusieurs trouvailles,
gimmicks, arrangements confèrent à chaque titre son originalité. Les
polyrythmies africaines mènent la danse sur le bien nommé « It’s nearly
Africa », la guitare classique imprègne « Yacht dance », on
distingue des influences celtiques et orientales sur l’introductif « Runaways »,
des choses chaloupées de la famille reggae sur « Down in the
cockpit ». Les singles auraient pu être là ( la fausse pop bubblegum de
« Ball and chain », la fabuleuse ritournelle de « Knuckle
down »). Bon, faut pas se la jouer non plus, genre je vous cause de la supra-hypra
merveille méconnue, il y a dans le lot des morceaux moins réussis. « Melt
the guns » ne ravira que les adeptes du King Crimson des 80’s ce qui doit
pas faire grand-monde, « Fly on the wall » veut coller au plus près
au détestable son tendance du début des 80’s et fait donc aujourd’hui très
daté, l’ultime « Snowman » comme du Talking Heads en pilotage
automatique me semble le plus faible du disque…
Il n’empêche que « English settlement »
qui clôt le premier chapitre de l’histoire de XTC est le meilleur de leurs
débuts, et qu’il survole assez facilement la concurrence de l’époque (pas
grand-monde de toutes façons, Squeeze, Madness, le tour du proprio pop circa 82
est vite fait …).
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"Sans pour autant négliger les dernières trouvailles techniques (beaucoup de claviers et synthés)"
RépondreSupprimerT'es sûr ? D'après les extraits, j'ai l'impression qu'ils sont plutôt comme Maxime Le Forestier : "plutôt guitare"...
Oui, beaucoup de claviers et synthés ... mais pas que des claviers et des synthés ... heureusement ...
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