THE EVERLY BROTHERS - EB 84 (1984)


Brothers in arms ...

Fin des années 50, début des années 60, Don et Phil Everly étaient des stars aux States. Deux voix célestes qui chantaient à l’unisson. Vocalement, Beatles et Beach Boys leur doivent beaucoup, Simon & Garfunkel leur doivent tout, pour ne citer que les plus célèbres et les plus évidents …
Et puis, comme ça arrive à tous, le sweet smell of success a fini par les fuir jusqu’à ce que les deux frangins s’embrouillent et se brouillent à mort au début des seventies. Le temps passant et l’acharnement de quelques fans (anglais principalement) à recoudre les plaies les feront se rabibocher. Et en 1983, les deux frères réconciliés donneront leur « Reunion concert » dans le cadre du prestigieux Albert Hall de Londres. Un tour de chant magique où les deux voix toujours intactes revisitent classiques de leur répertoire et classiques des 50’s tout court …
Et tant qu’à faire, le sorcier des manettes, l’ambulance des héros cabossés du vintage, le sieur Dave Edmunds va les traîner en studio pour donner une suite au « Reunion concert ». Et alors que toutes les vieilles gloires sont dans le meilleur des cas soit passables et le plus souvent pathétiques dans ces reformations nostalgiques, les frangins Everly ont sorti un bon disque. Qui certes ne fera pas oublier un de leurs bons « Best of ». Mais qui a obtenu beaucoup de louanges justifiées à sa sortie. Et qui pour un disque paru dans ces maudites années 80 au son si daté aujourd’hui, a plus que bien résisté à l’épreuve du temps. Bon, c’était pas un disque « à la mode » lors de sa sortie, ceci explique sans doute cela.
Parce que les briscards réunis par Edmunds, des vieux de la vieille biberonnés au classic rock, allaient pas se vautrer dans les empilages de synthés analogiques alors de mise. Même si des claviers high tech, il y en a, mais ils sont là pour accompagner, pas pour occuper le cœur de l’espace sonore. Le rappel des fans a été battu. Sir Paul McCartney a offert un de ses plus beaux titres des quarante dernières années, ça s’appelle « On the wings of a nightingale », c’est une sucrerie pop comme lui seul sait les écrire, et ça ouvre le disque. Le sieur Jeff Lynne (un des dix « cinquième Beatles ») a mis dans la corbeille « The story of me », c’est une ballade un peu gluante, mais Don et Phil la sauvent de la noyade dans la soupe. La bluette de Dylan et Johnny Cash sur « Nashville skyline » (« Lay Lady Lay ») subit un traitement bien poppisant et  retrouve une seconde jeunesse.
Tout n’est pas stratosphérique dans ce disque. Don Everly a même composé quelques titres que l’on est bien obligés de qualifier de remplissage avec par exemple un « You make it seem so easy », sorte de reggae qui laisse assez dubitatif, les deux frangins étant faits pour les rythmes jamaïcains comme David Douillet l’est pour la lecture de Kant … « Asleep » qui clôt le disque, c’est un peu la ballade de trop (même si l’ensemble ne dépasse guère la demi-heure), d’autres sont plus réussies (« The first on line »). Sinon on alterne gentiment titres lents (pas les meilleurs) et titres plus enlevés (le bon pop-rock de « Danger danger », le mignon rockabilly « I’m takin’ my time »).
« EB 84 » n’était de toutes façons pas fait pour disputer le sommet des hit-parades à Michael Jackson ou Bruce Springsteen. C’était l’œuvre d’un groupe de fans (remarquable - comme presque toujours - Albert Lee à la guitare) qui « payaient leurs dettes » à un couple de vieilles gloires (bon, c’était pas des croulants non plus, ils avaient pas cinquante ans) qui les avait fait rêver. Le résultat aurait pu être juste passable, le talent vocal intact des deux frangins emporte quand même l’adhésion …
Et puis, vous en connaissez beaucoup, au bout de trente années passées dans le pop-rock-machin-tout-ce-que-vous-voulez, capables de sortir un disque correct ?  … Parlez pas tous en même temps …

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