Pas vraiment stratosphérique ...
Par le réalisateur de « Juno », c’est écrit en gros sur la jaquette du Dvd. « Juno », jamais vu mais je sais à peu près de quoi il retourne, une comédie sur une gamine en cloque. Le réalisateur, donc, c’est Jason Reitman. Un fils de. En l’occurrence Ivan Reitman, lui aussi manieur de caméras, auteur de quelques comédies plutôt neuneues mais à succès (« Ghostbusters »), et souvent avec Schwarzenegger à contre emploi (« Junior », « Jumeaux », « Un flic à la maternelle », ce genre …).
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Clooney & Reitman |
Ce qui est aussi écrit en gros sur la jaquette,
c’est le nom de George Clooney. Et au final on se pose la question :
« Mr Nespresso peut-il tenir un film à bout de bras ? » Yes, he
can … Et donc « In the air » est un bon film ? Euh, comment
dire, ça se discute …
Ouvrons donc la discussion.
La thématique de base du film aurait pu être mieux
exploitée. Le scénario est tiré d’un bouquin de Walter Kirn (il fait une paire
d’apparitions, dans les réunions de cadres, il est assis à côté de Clooney)
« Up in the air » (titre du film en V.O.). Le personnage central est
Ryan Bingham, cadre sup dans une entreprise (jamais nommée) spécialisée dans
les licenciements expéditifs. En gros quand une boîte fait un plan
« social », elle fait appel à des gens comme Bingham pour procéder aux
entretiens de licenciements. Et aux States, ça rigole pas, t’as la journée pour
faire tes cartons et dégager le plancher quand Bingham tout en sourire
compatissant te convoque dans un bureau, te sort un baratin convenu et
transposable à tous les cas, t’explique qu’on n’a plus besoin de toi, te remet
un fascicule pour t’aider à « rebondir », coche ton nom sur la liste
et appelle le suivant. A noter que dans « In the air », la plupart
des licenciés sont des acteurs amateurs qui ont connu cette situation.
Bingham passe sa vie dans les avions, il a une carte coupe-file dans les aéroports, il a bien un appart quasi vide où il ne passe que quelques jours par an, et vit seul hormis quelques coups d’un soir au gré des escales. Il est aussi conférencier, sorte de gourou new age qui veut insuffler à ses auditeurs un mode de vie dégagé de contingences matérielles et affectives, de fait son mode de vie à lui. Son but secret, qu’on n’apprend que vers le milieu du film, est d’avoir la carte Gold personnalisée chez American Airlines, qu’on n’obtient qu’après avoir parcouru dix millions de miles sur les lignes de la compagnie. Quand il débarque dans une nouvelle ville, il descend à l’hôtel Hilton du coin où il a aussi le statut de VIP et peut profiter des cadeaux, avantages et soirées privées, destinées à des personnalités importantes comme lui.
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Clooney & Farmiga |
Ça coince un peu, là. Au lieu de chercher à
comprendre les tenants et aboutissants de son boulot de coupeur de têtes, tout
cet aspect où il y aurait quand même beaucoup à dire (et à montrer), que dalle.
Par contre, on a quelquefois l’impression plutôt gênante que « In the
air » est une pub (on n’est même plus dans le placement de produits) non
stop pour American Airlines et Hilton, et la vie « merveilleuse »
qu’ils proposent à leurs plus fidèles clients. Sans oublier leur Blackberry que
les protagonistes tapotent à tout moment … Evidemment, Clooney, toujours dans des
costars impeccables, donne une touche de glamour sexy à son personnage, et pour
ça, force est de reconnaître qu’il sait faire, il est quasiment de toutes les
scènes.
C’est là que le manque de courage (?), d’ambition
(?) de Reitman devient criard. « In the air » aurait pu être une
parabole sur ce capitalisme sauvage qui justifie l’existence de gens comme
Bingham et les fait prospérer sur la misère qu’ils créent. Le côté
professionnel n’est pas éludé, il est quand même bien biaisé quand est recrutée
une jeune surdiplômée Natalie Keener (interprétée par Anna Kendrick), qui
entreprend d’optimiser la rentabilité de la boutique. Exit les déplacements en
avion onéreux, et place au licenciement par visio grâce à internet, ce qui
évidemment ne fait pas les affaires de Bingham et de ses millions de miles. Là
aussi, Reitman préfère nous montrer la gamine se frotter à la vraie vie plutôt
que s’appesantir sur ce qu’elle représente.
On se retrouve pour « meubler » avec une amourette de Bingham et d’une commerciale croqueuse de miles comme lui, Alex (Vera Farmiga). Ils se rencontrent of course au bar d’un Hilton, font connaissance en étalant sur une table leur cartes de crédit, d’abonnement, master, VIP, etc … (scène la plus drôle du film), se donnent des rendez-vous au gré de leurs déplacements et escales … et contrairement à ce que professe Bingham dans ses conférences, il va s’attacher à Alex et envisager de faire sa vie avec elle. L’atterrissage sera violent. Entre-temps, elle l’aura accompagné au mariage de sa sœur avec un quidam qui hésite au dernier moment. Cadeau-gage des participants au mariage : faire comme dans « Amélie Poulain » avec le nain de jardin (le plagiat est énoncé), prendre des photos du couple de fiancés (en carton) dans le plus d’endroits possibles des States (ce qui donnera le gag navrant et ultra prévisible de Clooney qui tombe à l’eau lors d’une séance de shooting).
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Keener & Clooney |
« In the air » avait pourtant bien commence, avec
son générique fait d’un montage de vues aériennes et en fond sonore une reprise
pour le moins tonique du « This land is your land » (de Woody
Guthrie) par Sharon Jones & The Dap-Kings. Mais bon, c’est une gentillette
comédie douce-amère, la dureté du monde dans lequel évoluent les personnages
n’est là qu’en filigrane (les plans fugaces sur des entassements de chaises et
de téléphones mis au rebut après les plans sociaux, le suicide d’une femme
virée sans ménagement par Natalie n’est semble t-il là que pour donner une
« conclusion » à son personnage). « In the air » serait un
film français, on aurait Souchon au générique, comme acteur il y a quelques
années, avec ses chansons maintenant, voire les deux (double peine, c’est quand
même plus marrant de voir une Natalie bourrée chanter étrangement sur un
karaoké le « Time after time » de Cyndi Lauper).
On sourit quelques fois, avec l’impression du verre
à moitié plein ou vide, car il y avait matière à une belle comédie, ou à un
brûlot sociétal. Encore eut-il fallu faire des choix, ce que Reitman n’a pas
voulu (ou pas osé). Si j’en crois son suivant (« Young adult », avec
une magnifique Charlize Theron), cette « transparence » semble être
sa marque de fabrique. Reitman n’imprime pas …
J'avais vu ça, dans mon souvenir je n'avais pas mal aimé, le couple d'acteurs faisait le job. L'aspect social, bien qu'édulcoré comme tu les dis, était bienvenu à l'époque dans le cinéma (de studio) américain. Mais Jason Reitman est effectivement assez fade. Par contre avec Clooney, je conseille "The Descendants" d'Alexandre Payne, très beau film.
RépondreSupprimerJe connais The Descendants, effectivement bon film. Clooney est capable de faire des choses très sympa, en dehors de ses blockbusters (o'brother, les rois du désert, ocean's 11,12,24,87, ...), mention particulière à good night & good luck qu'il a aussi réalisé.
SupprimerReitman fils, il a quand même réussi à foirer young adult, malgré une charlize theron des grands jours ...