Band of Gypsys ?
A lui tout seul … Y’en a qui disent que Paco De Lucia
c’est le Jimi Hendrix du flamenco …
Mais je sens poindre la perfide question : de quoi il nous cause le Lester ? Mea culpa, mea culpa … c’est quand mes TOC me reprennent, j’ai lu trois lignes quelque part sur le Net d’un type qui disait que Paco Machin, c’était ‘achement bien, j’ai pas cherché à voir si le mec (ou la nana, je suis pas zemmourcompatible) était fan de Gilbert Montagné ou pire, et trois clics plus loin, j’avais acheté ce bazar d’occase pour le prix d’un demi (il faisait pas chaud ce jour-là, j’avais des excuses).
Le flamenco, à peu près tout ce que j’en connais, c’est
au gré de zappings forcenés sur les chaînes de « Grande Musique » du
câble (Mezzo, Classica, Djazz TV, ce genre …). Quand y’a pas des Castafiore qui
s’appellent Carmen, Aïda ou Tosca, des danseuses en turlututu chapeau pointu,
ou des moustachus bedonnants en chemise hawaïenne en différé depuis Antibes, La
Villette, Marciac ou Juan-les-Pins qui donnent dans le solo concerné de sax
alto, on peut parfois tomber sur du flamenco … à savoir des mecs basanés qui
jouent de la guitare sèche, et des nanas tout aussi basanées, plus très jeunes
généralement, habillées en rouge et noir, cambrées comme des hippocampes,
tapant du talon sur un parquet ciré et poussant des cris comme si on venait de
leur piquer le sac à main ou arracher la culotte, le tout dans une
semi-obscurité… généralement, je zappe au bout de deux secondes trois dixièmes
…
Tout ça pour dire que le Paco, ben, j’aurais pas dû …
parce que je suis pas aussi con et inculte que j’en ai l’air, j’avais moultes
fois vu son nom au gaillard. Généralement accolé à celui d’Al Di Meola, parfois
à ceux de Santana, Beck, ou Clapton … Le premier donnant dans le jazz fusion à
plein temps, le second à temps non complet, le troisième à temps perdu, et le
quatrième passant son temps à jouer avec n’importe qui … autrement dit, quand
il faisait pas du flamenco le Paco, il faisait rien de bon, et vous connaissez
l’adage, mauvais un jour, mauvais toujours … Même si c’est pas aussi mauvais
que prévu.
Après trois cent quatre-vingt-deux mots pour rien dire, venons-en au fait. Le flamenco, c’est la musique des gitans (les gitans, on dit comme ça quand ils vivent pas trop loin de la Méditerranée, ailleurs on dit des roms si j’ai bien compris) espagnols. Plus précisément ceux d’Andalousie, Algesiras étant la capitale mondiale du flamenco. Or Paco De Lucia il est pas gitan, mais il est né à Algésiras, ça a dû compenser pour se faire accepter dans ce milieu ultra traditionnaliste. Et en plus d’être un peu une pièce rapportée du machin, De Lucia l’a paraît-il totalement dépoussiéré, rénové, réinventé …
C’est déjà un guitariste d’exception, ça je confirme. Un
peu comme Robert Johnson, on dirait qu’ils sont plusieurs à jouer. Et De Lucia
joue aussi des machins à cordes ressemblant à des guitares, genre ouds,
bouzoukis, mandolines … Le résultat c’est du flamenco, mais pas celui pour beaufs
en goguette (Gipsy Kings, Kenji Girac, cette sorte de daubes) ou chaînes du câble.
La technique du Paco lui permet de s’éloigner du convenu et amener ses titres
autre part. Tout en restant dans la ligne du parti, les stars du genre (la star
vocale Camaron de la Isla, le guitariste Tomatito, les autres participants
jamais entendu causer, ce sont peut-être des stars aussi …) se bousculent pour
jouer les guests sur quelques titres.
Ça donne l’impression d’être improvisé autour d’un thème (les
jazzeux seront en terrain connu) mais c’est pas sûr, De Lucia il joue des trucs
tellement stratosphériques techniquement, ça m’étonnerait que tout soit fait en
une prise, les parties vocales arrivent généralement sous forme d’onomatopées et
pas forcément quand on les attend …
Sur les huit titres de la rondelle, y’en a deux ou trois
que je supporte, « Patio custido » (bonne entrée en matière),
« Que venga el alba » (All Flamenco Stars Band ?), et l’ultime
et plus accessible du lot « Casa Bernardo » …
Voilà, voilà, j’ai un disque de Paco De Lucia sur mes
étagères …
Et tel le proverbial corbeau, je jure, mais un peu tard,
qu’on ne m’y reprendra plus …