Spinal Tap boogie ?
Non, sérieux, y’a des gens qui
font encore ce genre de trucs, là, aujourd’hui ? Ce genre de trucs, c’est
(facile à deviner, tout est dit dans le nom du groupe) un boogie rustique à
faire passer Canned Heat pour Beyoncé (ou Culture Club, on n’en est plus à çà
près …).
Endless Boogie donc. Baptisés
ainsi en hommage à un titre de John Lee Hooker. Pour moi un des trois plus
grands du blues (pour ceux que ça intéresse, comment ça, personne ? les
deux autres sont Robert Johnson et Muddy Waters) et une source d’inspiration
dont il peut sortir des merveilles (« L.A. Woman » des Doors). Un
Hooker qui a plus ou moins inventé le boogie aussi, certes. Bon, le boogie,
c’est pas le truc le plus captivant et original qui soit, mais là, avec Endless
Boogie, on touche le fond … ou le sublime, ce qui revient au même.
Les types (quatre ?
cinq ? c’est assez fluctuant) de Endless Boogie doivent considérer Status
Quo comme des hérétiques (Status Quo, c’est pas difficile, je vous explique,
faut être deux guitaristes, les cheveux longs, des jeans pattes d’eph, écarter
les jambes à 60-70°, se serrer l’un contre l’autre, secouer la tête d’avant en
arrière, mouliner le même accord pendant cinq minutes en répétant ad lib
« whatever you want, whatever you want, whatever you want … »).
Endless Boogie, j’y mets ma main à couper, leur morceau de référence c’est le
« Refried boogie » de Canned Heat. Onze minutes et des brouettes en
version studio, quarante en public (sur « Living the blues ») et
vingt-huit à Woodstock (rebaptisé pour l’occasion « Woodstock
boogie »). Mais le Heat, à côté de Endless Machin, c’est du fuckin’ rock
progressif. Endless Boogie, ils sont vomis d’une faille spatio-temporelle,
horloges bloquées en 1968. Ça fait foutrement penser aux furieux répétitifs de
l’époque, les Iron Butterfly de « In-A-Gadda-Da-Vida », les Vanilla
Fudge de « You keep me hangin’ on », les Blue Cheer pour l’ensemble
de leur œuvre, tous les ancêtres du hard-rock et du stoner en somme…
Vous avez dit rustiques ? |
Endless Boogie, on imagine une
bande de rustiques venus d’un coin paumé d’Arizona, Nouveau-Mexique ou Texas et
se prenant pour les ZZ Top de leur trou du cul du monde. Sauf qu’ils sont de
New York (Long Island ?) qui est bien un des derniers endroits où l’on
imaginerait des ploucs, le museau dans le buvard d’acide, jouer leurs machins
primitifs. Parce que les Endless Boogie, ils doivent jamais avoir vu un Cd. Ils
raisonnent encore en terme de 33T. Sur ce « Long Island », huit
titres (entre 6 et 14 minutes), groupés par deux en tranches de 20 minutes pour
faire une face de vinyle. J’en vois un qui suit et qui me fait remarquer que
donc, « Long Island » est l’équivalent d’un double 33T… c’est bien
petit, si les gorets te prennent pas pour un topinambour, t’as de l’avenir.
Ce disque serait excellent si
… la pochette était belle. Elle est horrible.
Ce disque serait excellent si
… il y avait un bon chanteur. Y’en a bien un qui de temps en temps grogne ou
parle. Mais chante jamais. Un éclair de lucidité lui fait apercevoir ses
carences et y’a une paire de titres instrumentaux (« Occult banker »
et « On cryology »).
Ce disque serait excellent si
… y’avait des musiciens techniques qui t’en foutent plein les oreilles. La
section rythmique swingue comme un super tanker par calme plat, les fans
(t’imagines, un fan de Endless Boogie, moi j’y arrive pas) vous diront qu’elle
est sobre mais efficace. Les guitaristes, quand ils partent en solo (ben à peu près
tout le temps, qu’est-ce que vous voulez foutre pendant dix minutes sur un
titre, à part un solo ?), entre deux notes, t’as le temps d’aller pisser,
boire un café et fumer une clope. Autant dire que c’est pas des virtuoses,
découvreurs de talents à la recherche du prochain Hendrix, vous êtes pas à la
bonne adresse. Les types tartinent des trucs psyché-baveux plein de distorsion
sur une rythmique imperturbable. Du boogie de chez boogie quoi. Plutôt niveau
maternelle que Sciences Po …
En pleine réflexion : je tire ou je pointe ? |
Quand c’est très mal joué (à
moins qu’ils aient de l’humour et qu’ils fassent semblant de jouer encore plus
mal que ce dont ils sont capables), cette bouillasse sonore s’apparente un peu
aux Stooges de « Funhouse » (le premier titre « The
savageist »). D’autres fois, on a l’impression qu’ils essayent d’imiter ZZ
Top (« Taking out the trash »), voire AC/DC période Bon Scott
(pourquoi, y’en a une autre ?) (« General admission »). Toutes
ces similitudes fonctionnent jusqu’à ce qu’ils se mettent à
« jouer », en gros le temps de l’intro, qui vu la durée des titres,
peut durer pas mal …
Soyons fous et optimistes, ce
genre de rondelle absurde pourrait plaire aux fans de tous les soporifiques jam
bands dont le Sud des USA se délecte, des Allman Brothers à Gov’t et sa Mule.
« Long Island », c’est tellement mauvais que ça en devient génial,
l’idée fixe stupide qu’on pousse dans ses derniers retranchements, le jeu de
mots pourri qu’on place toutes les cinq minutes. Il faut donc l’acheter. En
plusieurs exemplaires. Pas pour les écouter, surtout pas malheureux, mais c’est
le genre de crétinerie qu’on trouvera originale dans vingt ans, et que des
nigauds s’arracheront à coups d’enchères délirantes sur eBay.
Du coup, je le fous pas à la
poubelle ce « Long Island ». Je le garde et commence ma carrière de
futur rentier rock’n’roll, tendance boogie … Mise à prix : trente euros …
Faire offre …
Ca a l'air super. Ou pas du tout, je sais oas trop, le retour dans un Paris caniculaire m'a flingué les nerfs... faudrait jamais revenir...
RépondreSupprimerOu jamais partir ... welcome back !!
SupprimerIci Morvandieu, les coupables sont jeunes (?), ont les cheveux LONGS, portent des blousons NOIRS !
RépondreSupprimerOn a du mal à l'imaginer en costard-cravate chez son banquier, le gars...
Il a une tronche à même pas avoir de compte en banque ... c'est vrai qu'ils font un peu (beaucoup) cliché ces chérubins ...
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