MADONNA - LIKE A VIRGIN (1984)

Touched for the very first time ...
C’était un temps que les moins de trente ans (putain trente ans déjà …) risquent pas de connaître. C’était il y a donc une éternité, en pleine misère de partout. On parlait de guerre nucléaire possible en Europe entre les Russkofs et les Ricains (Reagan et Thatcher d’un côté, Andropov et Tchernenko de l’autre, qu’à côté de ces demeurés les fadas barbus lobotomisés de Daech aujourd’hui, c’est des bisounours, bon passons …). Ici, on avait déjà de la gauche au pouvoir qui faisait pour pas vraiment changer une politique de droite, d’ailleurs y’avait déjà la chiffe molle Fabius Premier Ministre ou un truc du genre, c’est dire si on était mal barrés.

Musicalement, c’était le putain de désert, et on trouvait même une daube de Yes (putain Yes, quand même, faut pas déconner …) numéro un mondial, rien que ça. « Owner of a lonely heart » était le titre de cette purge. Faut dire que ça déconnait plutôt grave. Le crash du Clash avait suffi à éradiquer la guitare électrique de la surface de la Terre, on voyait plus que des garçons coiffeurs (généralement par paire, Wham, Tears for Fears, OMD, … liste complète contre un sac à vomi neuf), mèche dans les yeux, s’escrimer laborieusement sur des synthés Roland de leur unique doigt valide. Non, je déconne, y’avait pas que ces types, y’avait aussi Sting et Phil Collins … euh, c’est pas de bons exemples. Bon, je reprends. Y’avait des trucs bien, et on s’aperçoit maintenant qu’il y avait toute une scène indé dans tous les pays dits libres qui faisait du bon rock syndical réglo, mais personne, même pas les médias spécialisés en disait un mot.
On commençait à compter les morts du Sida, et MTV commençait à déglutir ses clips à la chaîne.
Et Madonna, donc, t’en causes, connard ? Justement, Madonna, elle est arrivée au bon endroit (New York, ses clubs branchés et décadents post disco) au bon moment (l’apex de la décennie fric, pendant laquelle les disques se vendaient par dizaines de millions, qu’ils soient de Michael Jackson, Prince ou Springsteen). Née Louise Madonna Ciccone et débarquée depuis cinq-six ans de son Michigan natal, avec la farouche volonté de réussir dans la grande tradition du rêve américain. N’hésitant pas à faire tout et n’importe quoi pour subsister (d’un film porno soft à l’audition pour devenir danseuse de Patrick « Born to be alive » Hernandez entre autres). Elle se fait un look de hipster bohème et délurée à base de trucs moulants, nombril à l’air, dessous apparents, sorte de Marylin Monroe des caniveaux et bas-fonds newyorkais. Elle fricote dans les endroits branchés avec les Dj’s et remixeurs résidents (« Like a virgin » est entre autres dédié à son mec de l’époque, le pousseur de disques Jellybean Benitez). Jusqu’au jour ou bingo, elle tape dans l’œil et/ou l’oreille de Seymour Stein, patron du label Sire Records, filiale de la multinationale Warner Bros. Un premier disque « Madonna », très orienté disco-dance fait peu de vagues hors certains clubs de New York.

Et puis Stein avec Madonna tente le coup de poker rarement perdant en ces temps-là. Livrer sa chanteuse au duo Nile Rodgers – Bernard Edwards. Leaders de Chic, certes, mais surtout producteurs de disques au succès énormes (ceux de Sister Sledge ou le « Let’s dance » de Bowie), ou pas (Sheila, oui oui, notre chanteuse à couettes nationales). Rodgers (celui qui s’occupe de la partie studio) et Edwards (le côté financier et business) sont des musiciens certes, mais aussi des hommes d’affaires sans scrupules. Ils encaissent le chèque mais ne croient guère au succès de cette fille plutôt inconnue, qui chante juste malgré une voix aigue limitée. Mais contrat oblige, les types de la Chic Organization font le taf, emmènent dans leurs bagages leurs complices habituels (leur batteur Tony Thompson, les frangins choristes Frank et George Simms, …). La moitié des titres du disque sont signés Madonna, le reste est amené par de plus ou moins augustes inconnus.
La patte Chic est bel et bien là. L’éléphantesque rythmique tchac-poum disco (Edwards-Thompson), le groove dance, la voix qui monte dans les aigus, toute la quincaillerie synthétique la plus moderne sont de la revue. Des ballades emphatiques tire-larmes un peu surchargées en pathos dramatique sont aussi de sortie (« Love don’t live … »). Rien d’extraordinaire en soi qui puisse laisser prévoir le raz-de-marée Madonna qui va submerger le monde. Le timing certes dont j’ai causé il me semble quelque part plus haut, et puis la rage de réussir et le sens des affaires de Madonna elle-même.

Qui n’hésitera pas à en faire des brouettes sur son côté sexy-libérée (« Like a virgin » tu parles …), se mettant en scène en Monroe hyper-glamour dans « Material girl » (à quel degré prendre ce titre, hein, je vous le demande …), se posant en symbole féminin absolu des années 80 (son rôle dans le film « Into the groove » dont la chanson-titre finira très vite dès l’année suivante rajoutée aux neuf titres initiaux lors des rééditions de « Like a virgin »). Madonna est beaucoup plus une actrice mettant en scène son propre destin qu’une chanteuse ou compositrice. Elle deviendra vite l’idole voire l’icône de toutes les gamines de la planète, sortira de bons disques de variété dans les années 80 (le meilleur sera celui d’après, « True blue »), génèrera pendant des décennies des bataillons de rivales-clones (de Cyndi Lauper à Miley Cyrus, série en cours), saura toujours faire parler d’elle, même (et surtout) quand il n’y aurait rien à dire. Résultat des courses, après trente ans de carrière (c’est vraiment le mot), c’est l’artiste (ben oui, quand même un peu) féminine qui a le plus vendu de disques au monde.
Même si j’ai toujours plus aimé le personnage que sa musique, et qu’on le veuille ou pas, il y a des choses, des souvenirs (les premières écoutes de « Like a virgin » le morceau, le premier visionnage du clip de « Material girl » et non, pas sur YouTube), qui ont marqué, même si ça fait mal au derrière de le reconnaître, toute une génération.

T’étais fan ou tu détestais, mais tu te positionnais par rapport à elle ou Michael Jackson (même combat et même bataille d’Hernani concernant les deux). Fallait avoir un avis et tout le monde avait un avis sur Madonna. Ce qui montrait que c’était elle qui avait gagné …

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