MIOSSEC - BOIRE (1995)


 Rue de la Soif

Ce premier disque de Miossec au milieu des années 90 avait marqué le Landerneau de la chanson rock. On y découvrait un type plus tout jeune (30 balais), balançant contre vents, marées et sons ambiants ses folk songs avinées. Le fantôme de Gainsbourg fut réquisitionné pour un étiquetage facile. Certes, on trouve des choses « écrites » sur les disques de Miossec (il a été journaliste et nègre pour une maison d’édition), il se fait photographier clope au bec et regard éteint par l’alcool de la veille pour une pochette qu’on peut faire voisiner avec celle de Gainsbarre en trave sur « Love on the beat » … et c’est à peu près tout. Les univers esquissés par les deux n’ont rien à voir.

Il est des nooôôôtres ...
Miossec vient d’une culture folk. Pas le folk engagé et à message des Guthrie ou Dylan destiné à changer le monde ou la vie des gens, ici il est seulement question de raconter le quotidien du vulgaire pékin, de sa vie moche et de son existence morose, avec la picole comme fil rouge. Miossec ne charge pas non plus la mule sur le côté breton de l’affaire et ne s’empêtre pas dans la facilité d’un pénible revival celtique, avec en point de mire les bardes barbus comme Stivell ou Dan Ar Braz.

Le cadre musical qui entoure les courtes tranches de vie décrites s’articule autour d’une orchestration minimale, à base seulement de grattes acoustiques et d’une basse au service d’un talent mélodique indiscutable. Pas la moindre trace de batterie au long de ce Cd, et seuls quelques accords martelés de piano sur « Recouvrance » ou de très rares guitares électriques sursaturées et stridentes (sur « Crachons veux-tu bien », « Des moments de plaisir », « La fille à qui je pense », ou le dernier titre caché  plutôt expérimental) sont présents.

On pense quelquefois au minimalisme des Violent Femmes, à une version acoustique de Noir Désir et forcément à ce que feront plus tard par ici les Louise Attaque, le pénible crin-crin de la bande à Gaetan Roussel en moins…

Le talent mélodique, un Cd assez court (les 40 syndicales minutes), et les titres s’enchaînent sans donner l’impression de répétition … quelques uns surnagent du lot, les deux premiers, « Non, non, non, non, je ne suis pas saoul » qui définit le cadre acoustique et ce phrasé de Miossec entre voix parlée et chantée, et « Regarde un peu la France », le moins intimiste de tous, qui cabosse les portraits du Ministre de l’Intérieur de l’époque, homme de SAC et de corde et de l’entiaré du Vatican … La meilleure réussite du disque étant pour moi « La fille à qui je pense », reprise à Johnny Hallyday et transformée en  une sorte de folk-grunge avec ses couplets acoustiques et son irrésistible refrain hurlé et électrifié.

A noter que Miossec, souvent réduit à son chanteur et leader Christophe Miossec est un groupe (Miossec, Guillaume Jouan et Bruno Leroux).

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L'Etreinte