PARQUET COURTS - WIDE AWAAAAAKE! (2018)

Mea culpa ?

Bon, j’ai relu ce que j’avais écrit d’eux à propos de leur « Sunbathing animal » il y a quatre ans. Je l’ai même réécouté (en travers). Bof, toujours bof … Entre temps, j’ai bien aimé la rondelle solo quasi confidentielle de Adrian Savage, auteur et chanteur principal des Parquet Courts. Bon disque, en démarquage total de ce qui l’avait rendu almost famous.
« Wide Awaaaaake ! » dernière livraison en date Des Parquet Machins, avec sa pochette BD ligne claire pour école primaire, ça m’inspirait pas du tout a priori. Tel l’opportuniste de Dutronc, et avant de retourner mon futal, je retourne ma veste. « Wide Awaaaaake ! » est un excellent disque… pour les temps qui courent, des temps en perpétuelle recherche d’un avant qui était forcément mieux. En gros, « Wide … », il s’adresse aussi aux vieux … enfin, surtout aux vieux, j’ai l’impression.
In bed with Parquet Courts ...
« Wide Awaaaaake ! », c’est rien de moins que le « London Calling » des Parquet Courts, un « London Calling » des lendemains qui déchantent, un « London Calling » d’une époque broyée par le nombrilisme et les héros de pacotille, un « London Calling » désespéré où on s’énerve pour la forme, parce que ça servira plus à rien, que les cyniques et les hipsters ont gagné, mais que ça fait du bien de gueuler sans espoir que notre pauvre monde est pourri par ceux qui le/nous gouvernent … Parquet Courts ne sont pas les premiers depuis que le simili facho à perruque orange déblatère tel le cuistre qu’il est, a toujours été et sera toujours. Les Parquet Courts sont en colère, se fendent de quelques titres politico-écolos à messages forts. Même si ça sert à rien, ça fait du bien, et ces gars me semblent loin  d’une « opposition » de circonstance, ils ont la rage et le font savoir.
« Wide Awaaaaake ! » aurait pu être signé d’un Offspring (ou des Black Lips, je suis pas sectaire) pour une génération en quête de combat(s) à mener. Manière de prendre un peu de monnaie et de se casser vers d’autres destinations. Je sais pas pourquoi, je trouve ces types plus crédibles (moralement) et moins chiants (musicalement) que tous ces anciens combattants des bonnes causes  (Beyoncé, Springsteen, Jackson Browne & Kanye West même combat ? et pas ou plus vraiment rock). En gros les Parquet Courts me paraissent éviter le piège de la BernieBonvoisination qui était passé de « Antisocial » au fan-club de Bayrou.
Ah ouais, quand même ... c'est pas gagné niveau look ...
Tout ceci en essayant de raison garder. Non, bien sûr, « Wide … » n’arrive pas à la cheville de « London Calling ». Au mieux, il est au niveau de « Combat rock ». Et je parle même pas du look de Adrian Savage, avec ses binocles Sécu de premier de la classe. Même si je sais, Buddy Holly et Elvis Costello. Mais là, à l’ère des végan et des séances de sophrologie pour cadres sup surmenés (oh, les pauvres trésors, ils voudraient avoir leurs dix mille euros par mois et vingt heures de libres par jour, parce que la pression des rendez-vous importants dans les restaus chicos, ça use son homme, c’est infernal cette vie … ouais, tu préférerais être migrant, mon garçon ?), les Parquet Courts affichent un non look total, tellement que si ça marche pas leur truc, ils pourront aller bosser chez Ikea ou dans une compagnie d’assurance.
Comme quoi, même avec une tronche de carême, tu peux réussir dans la musique aujourd’hui. Et ça m’emmerderait pas que la roue de la fortune s’arrête sur les Parquet Courts plutôt que sur quelques autres qui en font pourtant des caisses pour se faire remarquer (Arcade Bidule, Muse, quelqu’un ?). Parce qu’ils viennent de sortir un disque qu’on pourra même réécouter dans six mois ou trois ans. On les a annoncés punk, ils font du punk. L’opportuniste ( ? ) « Total football » ouvre la galette et n’a que peu à voir avec les milliardaires capricieux et égotiques qui ont couru derrière le ballon dans le riant pays de Vlad le Poutine. Ça pourrait passer pour un bon titre d’Oasis (des vrais fans de foot pour le coup) lorsque leur affaire fraternelle commençait à sentir le sapin et le réchauffé (circa « Be here now »). « Almost had … / In and out … » commence par un carnage très 77 spirit avant de virer colossale power pop, et rien que pour ça on regrette pas d’avoir lâché quelques euros Macron pour cette rondelle. « Normalisation », slogan braillé punk-rap offre un raccourci et une passerelle entre RATM et PIL, sans les rodomontades de pacotille des premiers et le côté muezzin sous LSD de Rotten.

Mais ce pourquoi ce « Wide Awaaaaake ! » est intéressant, c’est pour toutes ces embardées hors des sentiers que le groupe battait jusqu’à présent. Et ceci sans faire dans l’inaudible arty et le conceptuel lourdingue. On voit (enfin moi) ressurgir l’ombre des vieux rebelles hardcore Bad Brains sur le ska-rap de « Violence », ce qui me donne l’occasion de souligner ce son de basse moelleux et prenant qui est l’élément sonore majeur de ce disque. On parle de ska, et le reggae (écolo) n’est pas très loin avec « Before the water », et le dub pointe le bout de son tarin (toujours cette basse caoutchouteuse) avec le morceau titre. Les Parquet Courts s’en tiennent prudemment à ces trois titres d’obédience jamaïcaine, évitant de tomber dans le cliché d’Epinal du blanc opportuniste qui donne dans la musique à dreadlocks …
Ils sont aussi capables de verser dans la ballade dévastée et déglinguée (« Mardi Gras Beads ») comme ça ils surprendront personne si le prochain coup ils se prennent pour Keith Richards et nous sortent un truc à la « Exile on Main Street ». Tant qu’on parle vieux pots et vieilles peaux, les Parquet Courts ont aussi écouté l’axe Who-Kinks-Jam (« Extinction »). Ils jettent de fausses pistes, « Freebird 2 » n’est pas un hommage à Lynyrd Skynyrd et au southern rock, ça ressemble plutôt à un gospel païen. Ces blancs-becs nous sortent même (auraient-ils vraiment du, c’est pas le meilleur morceau de la rondelle) une samba-funk ( ? ) qui évoque à la fois Chic et Stevie Wonder, sans toutefois le génie des uns ou de l’autre. Ça s’appelle « NYC Observation » et on peut la zapper …
Les Parquet Bidule, même si Andrew Savage en est la figure proéminente, sont deux à composer, comme dans tout grand groupe pop qui se respecte (les Beatles, XTC, Sheila & Ringo). Peut-être qu’un jour on dissèquera les chansons de l’un ou l’autre (l’autre étant Austin Brown), mais pour le moment, ça leur permet d’ouvrir agréablement leur spectre sonore, évitant la redite monolithique. Et comme ils ont capables de vocaliser tous les quatre, ils peuvent même ressembler aux Beach Boys tristes et mélancoliques de la fin des 60’s (« Death Will Bring Change »). Autrement dit, y’a de la mélodie et pas que du boucan, comme en atteste le dernier titre (« Tenderness ») qui bien qu’un peu foutraque et alambiqué, renvoie aux meilleures vignettes de Madness (et non, je parle pas des ska festifs et crétins à la « One step beyond », mais plutôt de « My girl » ou « Our house »).
Rien dans « Wide Awaaaaake ! » ne me semble en mesure de devenir le tube de l’été. Tant mieux. Faudra le prendre pour ce qu’il est, une  superbe collection de chansons, et non pas un engin assemblé derrière un arbre mignon qui cache la misère de la forêt.
Question con : et si les Parquet Courts devenaient le groupe majeur des années à venir ? Elles seraient peut-être moins chiantes que les années Radiohead …

Des mêmes sur ce blog :



ANDY & LARRY WACHOWSKI - MATRIX (1999)

Bruce Lee et la Matrice ...

« Matrix », moi ça me dépasse. Enfin, surtout son succès. La référence de la fin du siècle dernier en matière de culture geek. Un vaste gloubi-boulga où se mêlent science-fiction angoissante forcément angoissante (avec des pompages éhontés de « Alien » et « Terminator »), histoires pour petits nenfants (les mangas, Alice au pays des Merveilles, la Belle au Bois Dormant, …), bastons taekwandesques pour attirer les fans endeuillés de Bruce Lee, bouillasse techno et/ou hardcore en fond sonore, j’en passe et des trucs plus pénibles encore.
C A Moss, Andy & Larry Wachowski
« Matrix », c’est lors de sa parution l’œuvre d’une vie des pas encore sœurs Wachowski (et comptez pas sur moi pour en rajouter une couche sur l’histoire des deux mecs qui se sont fait implémenter une matrice). Qui mettent cinq ans pour accoucher du bestiau. A grands renforts d’effets numériques et spéciaux en tout genre à la pointe de la modernité, d’un scénario abracadabrant mais suffisamment malin pour nourrir en même temps QI négatifs et réflexions métaphysiques (la vie est-elle un songe, la virtualité peut-elle agir sur la réalité, vous avez trois heures et une boîte de Doliprane pour répondre). Et aussi d’un casting qu’on jurerait issu des premiers prix d’une comice agricole, multipliant profils bovins inexpressifs. Et qu’on me dise pas que c’est le jeu des acteurs, Reeves (pas l’astrophysicien, le Keanu), Fishburne et la Moss sont au taquet, au maximum de leurs possibilités …
Pour appréhender « Matrix », faut retomber en enfance, débrancher le cerveau, et regarder les images. Et là, ça peut fonctionner. Tu suis le lapin blanc, tu passes à travers le miroir, tu arrives dans un autre monde, tu deviens un mutant (ou un vrai humain, allez savoir) qui file des torgnoles plus vite que son ombre, tu évites les balles, tu bousilles de l’androïde indestructible... Tu peux même mourir virtuellement et ressusciter réellement (à moins que ce soit le contraire), pour finir, après avoir sauvé l’humanité (qui a disparu), par t’envoler tel Superman qui aurait troqué son survêt moulant rouge et bleu contre un long manteau de cuir noir, vers de nouvelles aventures … Elles est pas belle, ta nouvelle vraie vie ?
Les gentils
Reste que « Matrix », c’est même pas si mauvais que ça au final… Comparé à des « Hulk », « Captain America », et les suites interminables des super-héros Marvel (à quand le 25ème Batman et le 72ème Spiderman ?). Même si comme de bien entendu, on connaît la fin dès le début. Neo / Reeves, c’est comme Macron, c’est l’Elu. Celui qui mine de rien, va sauver la galaxie. Avec la Moss (pas la Kate, la Carrie Ann) dans le rôle de Brigitte, et Laurence Poissoncouille dans celui d’Edouard Philippe. Y’a même le traître qui va les abandonner au cours de la mission (non, pas Hulot, Joe Pantoliano), passer du côté obscur de la farce et faire copain-copain avec les hybrides fringués à la Blues Brothers – Reservoir Dogs – Men in Black – Laurent Delahousse, mais bien fait pour lui, il se fera dégommer par un type qu’il vient pourtant de tuer … Vous avez rien compris, c’est pas grave, vous allez quand même lire jusqu’au bout. C’est comme ça, « Matrix », y’a rien à comprendre, c’est bête comme chou, mais tu regardes jusqu’à la fin …
Le méchant
Le seul truc qui sauve le film, c’est le rythme. Ça commence très fort, et ça accélère toujours (contrairement à la série des « Speed » qui avait « révélé » le beau gosse ombrageux Reeves). Les Wachowski y sont pas allés avec le dos de la cuillère (vous savez, la fameuse cuillère, celle que le gosse fringué en dalaï lama explique à Neo qui rend visite à l’Oracle qui fait des cookies, comment il faut faire pour la tordre rien qu’en la regardant), les frangins ont utilisé des kilomètres carrés de rideaux verts devant lesquels, filmés par des caméras hyper high tech disposées concentriquement et qui prennent des photos pour donner les fameux effets de ralenti accéléré chers à John Woo, s’agitent des acteurs suspendus à des câbles façon trapézistes chez les Gruss, … et que il va vite falloir que je mette un point quelque part pour finir cette phrase ...
La Warner a mis un gros paquet de pognon devant le museau des Wachowski, assorti d’un contrat bien ficelé (là, les mecs, ils sont bien dans le réel, l’espèce sonnante et trébuchante), anticipant un gros succès populaire, et toute une litanie de déclinaisons, dont deux épisodes supplémentaires si le premier volet de ce qui était conçu comme une trilogie fonctionnait … Jackpot. On compte plus les millions de dollars de cash rien que sur l’exploitation du film en salles, sans parler de la multitude d’éditions VHS, Dvd, Blu-Ray, les produits dérivés (BD, bouquins, jeu vidéo, …). Côté business, on n’est pas dans la matrice, mais bien dans le monde réel …
Welcome to the machine & have a cigar ?