King for a day, fool for a lifetime ?
Adam & The Ants n’est pas un groupe … ou si peu. Derrière cette pignolade, un sujet arriviste de Sa Très Gracieuse (?) Majesté. Répertorié à l’état-civil Stuart Goddard, il s’affuble du sobriquet Adam Ant (jeu de mots genre Alladin Sane / A lad insane). Adamant ça veut dire inflexible, intransigeant. Comme dirait Brassens, la suite lui prouva que non.
Pirates des Caraïbes ? Non, Adam & The Ants |
Arrivé sur le « marché » trop tard pour
faire partie de la première vague punk, il monte un groupe (Adam & The
Ants,) qui œuvre dans le style et sort un disque que personne ne remarque. Prêt
à tout pour réussir, il colle au train de Malcolm McLaren pour que
« l’inventeur » des Sex Pistols le manage. Affaire conclue et marché
de dupes. Tel un tamanoir, McLaren aspire les Ants et en fait Bow Wow Wow,
backing band d’une (très jeune) nymphette asiatique du nom d’Annabella Lwin,
laissant l’Adam seul à son triste sort … Mais le garçon est obstiné, remonte
une nouvelle mouture des Ants, court les friperies et les salons de coiffure et
de maquillage, et se crée un look d’un mauvais goût tout britannique, à base de
peinture sur le museau genre Bowie-Aladdin Sane (who else ?) et de tenues
militaires à brandebourgs début XIXème siècle (just like Hendrix).
Ainsi grimé et affublé Adam et ses Fourmis part à la
conquête des charts … et l’arriviste arrive à ses fins. Quelques singles
(mauvais ou pire) classés, quelques passages télé, quelques papiers et unes des
hebdos musicaux, l’affaire est dans le sac et tourne un temps à plein régime.
L’Adam prend un melon monumental, s’imagine un prophète musical pour les
décennies à venir et après deux albums très bien vendus, vire les Ants pour
continuer solo l’aventure. Forcément, dans un pays (l’Angleterre) et une époque
(le début des années 80) où une nouvelle mode se dessine tous les trois mois,
la mayonnaise tourne vite vinaigre et malgré quelques piteuses tentatives de
come-back en solo ou avec des Ants, le sieur Goddard retourne dans le néant
dont il n’aurait jamais dû s’extraire, laissant au passage l’image d’un crétin
ultra-prétentieux …
« Kings of the wild frontier » est le second disque des Ants, et le premier après l’interlude McLaren. Ne reculant devant aucune sottise, l’Adam élabore un concept : sa musique destinée à émerveiller le monde est inspirée par the real thing, les – on ne rit pas – percussions tribales du Burundi. En fait, dans le meilleur des cas, c’est un ersatz de Diddley beat avec un batteur et un percussionniste limités. Et l’Adam chante comme une casserole, secondé par des chœurs « tribaux » et moults effets de studio.
Adam Ant & Marco Pirroni |
Malgré ce, pas de poubelle direct. Non pas qu’il y
ait un grand hit qui a traversé les décennies ou même quelque compo point trop
mauvaise. Non, l’arme fatale des Ants s’appelle Marco Pirroni et joue de la
guitare. Les tâtillons noteront des passages éclairs dans des embryons du Clash
ou de Siouxsie & the Banshees, mais c’est dans les Ants qu’il se révèlera.
Il sera à l’Adam ce que Steve Stevens sera à Billy Idol, le rouage essentiel
qui œuvre dans l’ombre. Pirroni est un des maîtres riffeurs de ce début des
années 80, c’est bien simple, moi je n’entends que lui sur ce disque … Il
tronçonne des riffs monumentaux sur « Dog eat dog », « Killer in
the home », « The magnificent five », pastiche carrément les Shadows
avec guitare twang sur « Los rancheros », et s’évertue à sauver les
compos (il les co-écrit toutes d’ailleurs) du vide abyssal auquel elles
semblaient vouées. Aussi talentueux (et d’un caractère de cochon) que soit le
Pirroni, il restera avec le baltringue Adam, le suivra en solo, même si
prudemment il lui fera quelques infidélités, se faisant remarquer en tant que
session man (sur les deux premiers Sinead O’Connor notamment).
Il faut croire que malgré tout Adam And The Ants a
conservé quelques vieux fans, ce disque ayant été souvent réédité, avec force
bonus (démos, versions single, alternate mix, …) aussi dispensables que les
titres de la version originale …