Comme une sorte d’effet Trump dans le rock américain
… Il sort tous les jours des rondelles de types qui montent au front pour
dénoncer l’aggravation de la misère sociale, morale, intellectuelle, etc…,
etc…, au pays de Donald …Comme si ce crétin avait à lui tout seul inventé le
foutu système … comme si tout ça n’existait pas depuis des décennies, voire des
siècles … comme si un disque pouvait changer le monde, ou quoi que ce soit …
C’est pas le discours d’un vieux con désabusé que je tiens (enfin, pourquoi
pas, si ça peut vous faire plaisir), juste un constat … Et j’ai écouté les
disques, lu les bouquins, vu les films, tous ces machins « engagés »,
censés éveiller ou réveiller les consciences. Et j’ai vu les modèles
politiques, russes, chinois, yougoslaves, cubains, nord-coréens, dans leur
quête du monde idéal socialiste … j’ai aussi vu ce qu’ils sont devenus … Alors
aujourd’hui quand je vois la rébellion et les bons sentiments affichés comme
une posture, juste comme une posture, désolé, je marche plus …
J’ai rien contre Ezra Furman, y’a quelques jours je
savais même pas qu’il existait … par contre, ce qu’il dit et la façon dont il
le dit, je l’ai entendu des centaines de fois. Bien souvent en mieux, d’autres
fois en pire …
Ezra Furman se balade en robes imprimées, comme
avant lui Bowie (sur la pochette de « The man who sold the world »),
Brian Molko de Placebo ou Martin Gore de Depeche Mode (pour faire comme Bowie),
Robert Smith (pour emmerder Michel Drucker), Kurt Cobain (pour emmerder les
organisateurs de festivals). Ezra Furman revendique sa bisexualité, comme Lou
Reed (dont il est paraît-il fan), Bowie, Molko, Gore, et des centaines d’autres
dans le music-business (qui en font pas forcément un point voyant de
ralliement). Ezra Furman a décidé de faire un disque de punk-rock … faut-il
vraiment détruire des hectares de forêt amazonienne pour imprimer les noms de
types qui ont déjà fait ça avant lui ?
Conclusion : un discours et un format musical
entendus jusqu’à l’écœurement.
Je pourrai dégommer cette rondelle sans rémission,
appuyer là où ça fait pas du bien … le pompage éhonté des chœurs de
« Sympathy for the devil » sur « Calm down » (pour te
mettre de mauvaise humeur d’entrée, c’est le premier titre) … le coup de la
voix dédoublée (comme sur « Ziggy Stardust » le morceau, ici sur
« Evening prayer » sauf que Furman est pas synchro, incapable de
chanter deux fois exactement la même chose) … tous ces gimmicks pompés sur
Black Flag, ou pire, Green Day, Offspring et FIDLAR … cette calamiteuse chute
en forme d’aveu d’impuissance (le dernier titre s’appelle « What can you
do but rock’n’roll ») … ces mauvais décalques de Frank Black – déjà dans
ses meilleurs moments en retrait de ce qu’il faisait avec les Pixies –
(« Transition from nowhere to nowhere »), du Cobain « In
Utero » (les cinquante-cinq secondes chrono, larsen final compris
de « Blown »)…
Ça fait déjà une bonne moitié de la rondelle
problématique. Le reste (et il en reste pas beaucoup, les onze titres de
« Twelve Nudes » n’atteignent même pas la demi-heure), ma foi,
pourquoi pas, en le jouant bien fort (y’a une autre façon d’écouter de la
musique ?) … Et je me rends compte que « Calm down » et
« Evening prayer » dont j’ai déjà causé sont supportables, de même
que « In America » (plus posé et construit que le reste, même si un
peu trop linéaire), ou l’excellente (la seule à ce niveau) « I wanna be
your girlfriend », qui avec un peu de chance pourrait devenir un hymne
queer avec ses gimmicks accrocheurs (le titre référence aux Ramones, le rythme
de valse doo-wop, et la mélodie qui emprunte par moments au « Rock’n’roll
suicide » de – who else – Bowie).
De toutes façons, dans notre monde de mormons
bien-pensants (et très mal-agissants), dire du mal de ce disque, c’est se
retrouver avec une fatwa signée par quarante ministres, soixante secrétaires
d’Etat, et six cents douzaines d’associations …
Ceci étant, maintenant que Freddie Mercury et Elton
John sont morts (on a fait des biopics révisionnistes sur eux, c’est dire s’ils
sont morts … qu’est-ce que tu dis toi, pas tous … ah bon …), y’a une place à
prendre … Votez Furman … Ou Villani, tellement « étrange » qu’il doit
être un genre à lui tout seul, improbable croisement entre Bozo le Clown et
Tryphon Tournesol …
Mais que vient faire Villani là-dedans, dans
une notule sur un disque de punk-rock large d’idées et bas du front ? Bof,
au point où on en est …