Sir Paul McCartney, musicien anglais, né en 1942, et
donc 76 ans au compteur. Des types dans son genre qui étaient là au début du
machin, il en reste vivants, en comptant large, une paire de poignées dans le
rock-pop-bidule-truc … Et bizarement, la plupart continuent de sortir des
disques et de donner des concerts. Alors qu’ils sont multi-milliardaires et
pourraient se la couler douce en EHPAD en faisant sauter leurs arrière
petits-enfants sur leurs genoux …
Faut croire que pour continuer dans la musique à ces
âges canoniques, ils le font parce qu’ils aiment ça et que de toute façon ils
savent pas et n’ont pas envie de faire autre chose. Mourir sur scène semble être
la fin recherchée par les Jagger, Richards, Lewis, Little Richard, Townsend,
Daltrey, Davies, Morrison. Et Macca donc (ouais, je sais, j’ai oublié Ringo,
qui est plutôt bien sur scène avec son All-Star Band, mais qui a jamais sorti
un disque écoutable de sa vie en solo …).
Donc le dernier McCartney s’appelle « Egypt
Station », se présente sous la forme d’un carton dépliant genre accordéon
et est enluminé par des peintures du Paulo himself. Ah ouais, il y a un dique à
l’intérieur aussi. Certains disent que c’est son meilleur depuis « Chaos
and creation … », voire depuis « Band on the run ». Les plus
sourds de ses fans citent même « RAM » (ce qu’ils prouve qu’ils sont
sourds, « RAM » s’apparentant beaucoup plus à une purge qu’à un
chef-d’œuvre). Certains, perdant tout sens de la mesure et de la retenue
évoquent la seconde face de « Abbey Road »… Faut raison et oreille
objective garder, les enfants …
« Egypt Station », d’accord, il est pas
mal, et oui, c’est sûr, Sir Paul il en a sorti de plus mauvais que ça. De là à
miauler au génie retrouvé …
D’abord, le Paulo, il a plus toute sa voix. Il
chante toujours bien et juste, mais ne prend aucun risque (comme le Bowie de la
fin) et sa voix n’est plus reconnaissable à la première mesure, elle est
devenue quelconque.
Des fois aussi, le Paulo, il a plus toute sa tête,
ni toutes ses oreilles. Il y a dans « Egypt Station » des titres qui
auraient dû rester dans les tiroirs de Capitol. Surtout qu’il nous en sert
quatorze (plus deux courts intermèdes comme les rappeurs bas du front en
glissent dans leurs rondelles) pour quasiment une heure. Le calcul est simple,
un tiers de titres en moins, ça aurait fait quarante minutes qui auraient eu de
la gueule.
Yeux bandés et direction le poteau d’exécution, sont
appelés à comparaître « Hand in hand » ballade au piano comme Obispo
peut en écrire une chaque matin, l’idiotie new wave « Back in
Brazil » (on est plus en 1980, Paulo, c’est quoi ce machin ?).
« Caesar rock » n’est ni rock ni impérial (parenthèse subliminale, ça
me renvoie l’image d’un atroce disque d’Iggy Pop « American
Caesar »). Quand aux deux choucroutes à la chantilly et crème de marron
que sont « Despite … » (on dirait du Genesis des années 80, la honte
…) et le medley « Hunt you down … » gâché par une ignoble partie
centrale sur un rythme de valse électronique, ils montrent bien que Sir Paul ne
changera jamais, capable de temps à autre de livrer des machins d’une mièvrerie
et d’un je m’en foutisme édifiants (on peut pas refaire à chaque coup un
« Hey Jude » en étant en totale roue libre…).
Greg Kurstin & Sir Paul |
Ce qui fait quand même un gros de paquet de titres, qui
ne changeront certes pas la face du monde, mais qui se laissent écouter, et
plutôt plusieurs fois qu’une. Parce que Macca est un génie de la chanson
mélodique, que la recette c’est quasiment lui tout seul qui l’a inventée, et
qu’il est encore capable de la retrouver quand il veut … Meilleurs exemples,
des titres comme « Do it now » ou « Dominoes », la première
aurait pu être écrite il y a cinquante ans du temps de son groupe de jeunesse,
la seconde aurait pu figurer telle quelle sur « Band on the run »…
tant ça sonne en roue libre, d’une simplicité confondante. A priori des machins
totalement anecdotiques, mais les types capables d’écrire des chansons comme
ça, en comptant ceux qui peuplent les cimetières, il en a pas existé une
demi-douzaine. Surtout que sans avoir l’air d’y toucher, le Paulo est aussi
capable de sortir des titres qui te mettent l’eau à la bouche avant même d’en
avoir entendu la moindre note. On ne baptise pas impunément un morceau
« People want peace » sans que le fantôme d’un sien ami de jeunesse à
binocles rondes chantonnant « Give peace a chance » surgisse
immédiatement. Surtout quand le morceau en question sonne comme du Lennon du
début 70’s… « I don’t know » d’entrée, commencée sobrement au piano
et qui gagne peu à peu en ampleur, rien à dire, c’est bien foutu, même si Macca
a fait mieux dans le genre … « Happy with you » tu peux croire que
c’est un inédit de « Rubber soul » ou « Revolver », tous
les ingrédients sont là … Et « Fuh you » montre que McCartney peut
atteindre des sommets stratosphériques en faisant aujourd’hui encore aussi bien
que les plus doués de ses imitateurs (MGMT ou The Coral au hasard)
Tout ça nous fait un disque certes un peu longuet, doté
d’un son roboratif (Greg Kurstin, coupable d’avoir gagné sa vie en produisant
toutes les Lily Allen, Beyoncé, Britney Spears, Katy Perry, Pink, … qui
passaient à portée, avant de revenir ces derniers temps dans le droit chemin en
bossant pour les Shins, les Foo Fighters ou Liam Gallagher), de types qui
assurent (contrairement à ce qui est parfois annoncé, « Egypt
station » n’est pas un disque solo même si le Paulo est crédité de tous
les instruments, plein de gens, dont notamment les types qui l’accompagnent sur
scène jouent sur le disque), une grosse poignée de bonnes chansons…
On va pas lui jeter la pierre pour ça, ni d’un autre côté
présenter « Egypt Station » comme un mausolée musical. McCartney a
fait ce qu’il sait faire de mieux, un disque de McCartney …
Du même sur ce blog :
McCartney
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