Garagistes du bayou
Dans la série de disques du label Eva consacrés à la
scène garage U.S. des mid-sixties, escale en Louisiane, où comme partout
ailleurs, les jeunes américains prennent en pleine poire la British Invasion,
achètent des instruments, montent des groupes et essayent la plupart du temps
d’imiter les Anglais. Avec des résultats variables … Faut dire que les
compilations sur ce thème et cette période, il y en a déjà beaucoup, et
d’excellentes (Nuggets, Peebles). Et quel qu’ait été le foisonnement créatif
underground, les quelques-uns qui auraient mérité une reconnaissance de plus
grande ampleur sont connus depuis longtemps. Inutile de chercher dans ce Cd le
colossal groupe culte oublié par tous dont l’écoute va vous changer la vie …
aucune légende en devenir, juste des bandes de potes qui jouent du rock …
Tenaces ...les Bad Roads en 2008 |
Les Bad Roads représentent une tendance du mouvement,
celle des copieurs des Anglais … Ron Gray & The Countdowns, un titre excellent, les One Way Street
(un bon « Tears in my eyes »), les cinéphiles ( ? ) Gaunga Dyns,
les peu imaginatifs Satans procèdent de la même démarche …
L’autre tendance majeure, c’est celle des possesseurs de
Farfisa, les Persian Market, Playgue, Surrealistic Pillar (bonne joke en
référence à un fameux disque de l’Airplane), Moon-Dawgs …
Quelques uns, enfin, et ce sont les plus intéressants,
tentent de fuir les stéréotypes, en affichant des références peu souvent de
mise. Les Bad Boys livrent un bon rythm’n’blues très Stax, les douze cordes
acoustiques d’Al Michael & The Medallions font penser aux Byrds…
Et puis il y a vers la fin un titre fabuleux, la reprise
du « Smokestack lightning » de Lightnin’ Hopkins. On dirait
exactement (le son, la rythmique, la voix, tout en fait) du Creedence repris
par le Gun Club (« Run through the jungle »). L’auteur de ce miracle
sonore prémonitoire s’appelle Joe DeGrinda, il est retourné aux oubliettes,
mais là, l’espace de trois minutes, il a tutoyé les étoiles …
Ce « Louisiana punk », à l’origine un 33T sorti
au début des années 80, est réédité depuis peu en « vinyl replica »,
soit un Cd dans une pochette cartonnée identique à l’originale, ce qui permet
de profiter du visuel le plus repoussant (scanné sur un planche de
Rahan ?) ayant jamais servi à enrober un disque. Niveau sonore
incroyablement bas, notes de pochette illisibles sans microscope, même pas les
dates d’enregistrement (tout entre 1965 et 1968 je dirais, mais c’est quand
même le genre de détails qui compte pour les rares personnes que cet objet peut
intéresser). Il est peut-être plus judicieux de rechercher d’occase les
rééditions Cd du début des 90’s qui comprenaient des titres bonus …