Définitif ... en attendant ...
6 Cds pleins à la gueule (7 h 50 au total) sur LE festival de rock.
Dont on commence à connaître pas mal de choses … La BO du film de Wadleigh, les 2 Cds rajoutés (« Woodstock Vol 2 »), l’édition « 25th Anniversary », plus tous les titres sortis sur des compilations, coffrets, … des participants. Plus en 2009 (40ème anniversaire, bonjour le prétexte) l’intégrale des concerts des artistes Sony (Sly & The Family Stone, Santana, Joplin, Airplane, J. Winter).
En fait, ce qui m’a poussé à l’achat, c’est le label. Ces Cds sortent sous l’étiquette Rhino, les maîtres de la réédition et du traitement du son. Car ce qui posait problème dans le cas Woodstock, c’était cette sono au souffle effrayant qui bouffait la moitié de la musique. Les rééditions Sony avaient « nettoyé » et compacté le son sans discernement pour un résultat peu convaincant. Ici, et les gens de Rhino s’en expliquent sur le somptueux livret, tout a été conservé (les « pains » des musiciens, le bruit des ballets d’hélicoptère, et surtout la moindre bribe musicale). Mais le son a été « spatialisé », ce qui donne un rendu superbe, notamment sur les concerts acoustiques. Comme d’habitude un travail d’orfèvre des gens de Rhino.
Il y a quand même quelques trucs qui agacent. Rien que le titre du coffret déjà : « 3 Days of Peace & Music ». Alors que le slogan d’époque de Woodstock c’était « 3 jours de paix, d’amour et de musique ». 40 ans après, l’amour a disparu (plus bankable ?). Pourtant, il s’est pas mal pratiqué si l’on en juge par le film de Wadleigh … Et puis, il y a les absents de cette réédition : le Band comme souvent (ils n’étaient que sur une compilation « 25th Anniversary »), mais aussi Ten Years After dont le « I’m Going home » fut un des moments forts du festival. Etrange, même si ce titre est bien connu (il est sur la BO du film). Manquent aussi à l’appel quelques seconds couteaux (les oubliés Keef Hartley Band).
Malgré tout, ce coffret constitue la vision d’ensemble la plus complète à ce jour et montre une chose : c’est que si le festival est pour plein de bonnes raisons mythique, toute la musique produite dans ces trois jours n’a pas été au top.
Certains cas sont connus. Janis Joplin, desservie par un Kozmic Blues Band minable s’était de son vivant opposée à la parution des bandes la concernant, Daltrey a publiquement qualifié la prestation des Who comme étant le pire concert de leur carrière, le Band a joué dans l’indifférence générale car tout le public attendait l’apparition de Dylan qui n’est pas venu …
Un certain nombre d’autres n’occupant pas le haut de l’affiche démontrent pourquoi : prestations anecdotiques de Sweewater (mauvaise copie de l’Airplane), ou des oubliés Bert Sommer, Quill, John B. Sebastian, Butterfield Blues Band …
Quelques uns plus connus sont pénibles (Ravi Shankar, le Dead en petite forme, ou les 28 ( !! ) minutes d’une statusquonnerie boogie improvisée par Canned Heat, …).
Surnagent évidemment ceux que l’on savait excellents pour l’occasion (Santana, Sly Stone, Hendrix, …). Auxquels il faut ajouter les superbes extraits peu connus des concerts de Creedence et Mountain (avec un magnifique Leslie West). Mais pour moi, la révélation de ce coffret, c’est Joan Baez. Pratiquement la doyenne du festival, enceinte jusqu’aux yeux, les quatre morceaux présents filent le frisson tant sa présence vocale est fabuleuse. On a trop souvent oublié à quel point c’est une immense chanteuse, au profit de son image de pasionaria combattante de toutes les causes perdues.
Le copieux livret, en plus d’une iconographie first class fourmille d’anecdotes souvent peu connues.
Ainsi le rôle joué par l’armée américaine. Alors que Woodstock se voulait une manifestation « alternative » contre l’engagement militaire US au Vietnam, ce sont les hélicoptères de l’armée qui ont permis l’acheminement des musiciens perdus dans les gigantesques embouteillages autour du site, qui ont permis le transport d’une structure médicale, d’eau, de nourriture, … autant de choses que l’organisation du festival avait laissées de côté. Faute de quoi Woodstock aurait été une catastrophe humanitaire totale.
Ou l’attitude ultra-mégalo des lourds Iron Butterfly, prévus à l’affiche, mais que leurs caprices de divas ont condamné à rester sur le tarmac de l’aéroport de La Guardia à New-York.
Ou comment les atermoiements d’Arlo Guthrie renâclant à jouer alors que la pluie n’était pas arrêtée, ont permis à Melanie, inconnue totale qui n’avait rien enregistré mais traînait backstage avec sa guitare, d’aller sur scène faire un triomphe et lancer sa carrière …
Ceci posé, il n’en reste pas moins que cet objet est typique du mercantilisme à tout crin d’une industrie musicale moribonde, qui préfère recycler ses archives ad nauseam qu’investir sur de jeunes créateurs. Et dont les arguments « vendeurs » sont souvent faux. Certains encarts publicitaires affirment que ce coffret présente l’intégralité des concerts. Une trentaine de Cds seraient nécessaires pour cela (c’est écrit dans le livret). Pour les 50 ans ? Contrairement à ce qui est annoncé au verso du coffret, il n’y a pas la moitié des titres inédits (ils ne sont inédits que dans les compilations génériques estampillées Woodstock). Je n’ai pas fait un pointage, mais la plupart des titres prétendus inédits sont sortis officiellement sur des compilations ou coffrets d’artistes participant au festival. Des vrais inédits, il y en a au maximum une poignée.
Donc en conclusion, arrive la question qui fâche : faut-il lâcher un peu plus d’un billet orange pour cet objet ?
Oui, si l’on n’a rien (film, compilations précédentes) concernant Woodstock.
Eventuellement, si l’on veut quelques morceaux rares ou inédits de ses artistes et groupes favoris.
Non dans tous les autres cas.