THE ROLLING STONES - THE ROLLING STONES, NOW ! (1965)

 

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Pfff … tu nous causes encore d’une vieille rondelle des Stones ? ‘tain, comme s’il y avait pas des trucs intéressants qui sortent ces jours-ci, comme euh … attends, y’en a plein des super trucs récents, comme … bof, tout compte fait, allons-y pour un disque des Stones …

Donc, à l’usage des jeunes générations, les Stones, Rolling de leur prénom, étaient un orchestre de jeunes anglais au début de la sixième décennie du siècle dernier. Orchestre qui eut un certain succès dès ses débuts et qui a compris, dès le départ, que recycler plein de vieux machins de nègres américains c’était bien, remplir des salles de concert londoniennes de fillettes en extase, c’était bien aussi, mais qu’il y avait un truc, tout rond, tout noir, qui s’appelait un disque vinyle, et que si on en vendait à plein de gens, eh bien on gagnerait plein de fric …

Bon, je suis pas en train de dire que les Stones étaient un groupe qui louchait vers le commercial, juste qu’eux (ou plutôt à cette époque-là ceux qui géraient ou accompagnaient leur carrière) ont vite entrevu l’importance de l’aspect commercial, parce qu’on était dans un monde aux infinies possibilités, mais qui restaient à inventer. Cas le plus marquant, Elvis le pas encore bouffi et le Colonel Parker, du commerce façon rouleau compresseur. Cas qui montrait que du pognon de dingue comme dirait l’autre tanche, te tombait dans les poches rien qu’en s’intéressant qu’au marché américain (par la force des choses, voir la bio du Colonel).


Les Stones avaient un manager, et pas un mauvais, Andrew Loog Oldham. Qui grâce à une communication maline (« laisseriez-vous votre fille sortir avec un Rolling Stone ? »), avait démarqué ses poulains du reste du troupeau anglais. Les Rolling Stones étaient les mauvais garçons, comparés aux gentils Beatles. Et même si l’histoire a démontré que les Beatles avaient beaucoup plus « vécu » (les concerts dans les boîtes de strip-tease de Hambourg, ça forme le caractère, mais pas que …) alors que les Stones n’avaient pas commencé d’enregistrer. Les Stones étaient le groupe transgressif, agressif, méchant, le son bordélique de leurs disques renforçant leur aspect bad boys. De plus avec leur leader l’angelot blond Brian Jones et leur chanteur Mick Jagger, ils remportaient haut la main le trophée des beaux gosses photogéniques. Enterrés tous les groupes jouant dans le même registre, tous ces Animals, Pretty Things, Them, Kinks, Who, … pourtant pas moins sauvages musicalement, et vulgairement débraillés pour leur époque.

Une fois les jalons et la suprématie posés dans la perfide Albion, les Stones, à l’instar des Beatles, sont partis à l’attaque du juteux marché américain. Dont les paramètres ne sont pas ceux de l’Europe. Coup de bol, autant Beatles que Stones n’avaient dans leur genre musical au début des 60’s, soit pas de concurrents (Beatles), soit pas d’équivalent (Stones). Les Beatles inventaient un idiome (la pop), les Stones, reprenaient l’affaire côtés blues et rock’n’roll sur un champ de ruines désertiques. Tous les bluesmen historiques qui les avaient inspirés, tous les pionniers du rock, étaient soit déjà morts, soit retirés des affaires, soit pas au mieux. Et bien que les sources de leur musique soient noires, les Stones allaient évidemment viser le marché des jeunes blancs. Il fallait pour cela mettre sur pied communication et logistique, en gros dégotter leur Colonel Parker. L’homme des Rolling Stones aux USA sera Allen Klein, au moins aussi bon vendeur de ses artistes et aussi bon escroc que le Colonel. C’est Allen Klein qui va hériter de ce « Rolling Stones, now ! ».


Pour ne rien simplifier, les disques américains des Stones sont différents des disques anglais. Pour plusieurs raisons. Le format roi du vinyle de l’époque, c’est le 45 tours quatre titres. Quand on en a sorti trois, on les met à la suite et ça donne un trente-trois tours. Toutes ces rondelles, il faut en assurer la promo. Et à cette époque-là, y’avait pas internet pour permettre le don d’ubiquité, fallait décaler les dates de sortie Europe-US, pour pouvoir faire partout le service après-vente. Sauf qu’entre-temps, d’autres titres étaient sortis et les nouveautés étaient bien évidemment prioritaires sur les 33 T. D’où des disques qui ne portent pas le même nom et n’ont pas exactement les mêmes titres sur un continent ou l’autre … « … Now ! », c’est le petit frère américain de « Rolling Stones N°2 » en Europe.

Les deux disques ont sept titres en commun, et côté hits, « …Now ! » fait l’impasse sur « Time is on my side » pour inclure son quasi siamois « Heart of Stone » (qui plus est, les deux font partie des rares titres signés Jagger -Richards, parce qu’il faut penser en termes de vente mais aussi en retombées de droits d’auteur).

Comme tous les disques de leurs débuts, les reprises sont majoritaires. Et « … Now ! » commence par « Everybody needs somebody to love », le classique de Solomon Burke, alors référence ultime de Jagger pour le chant et le jeu de scène (il y aura ensuite James Brown et Tina Turner, avant que le Mick s’émancipe et fasse du Jagger depuis plus de cinquante ans). Version plus enlevée, plus « blanche » que l’original (mais moins accrocheuse que celle des Blues Brothers). Les Stones de la fin 64 sont surtout un groupe de reprises, livrent des versions brouillonnes, à l’arrache, dans une bouillasse sonore caractéristique. C’est cette approximation (renforcée par un mixage volontairement « sale ») qui sera leur marque de fabrique pendant des décennies.

Octobre 64, Ed Sullivan Show, 1ère télé américaine

Ils reprennent dans «  … Now ! » du Chuck Berry (« You can’t catch me ») et leur version contraste avec la netteté des enregistrements originaux du grand Chuck. De toutes façons, même s’ils le reprennent pas directement, ils ne manquent pas de s’en inspirer. Surtout Keith Richards pour ses parties de guitare (d’où la fameuse anecdote du bourre-pif reçu par l’Anglais lors de leur première rencontre). Le même traitement sonore est réservé à une reprise du « Mona » de Bo Diddley, avec le si caractéristique Diddley beat noyé sous les couches « sales » de guitares. Les Stones peuvent remonter encore plus loin dans le temps en reprenant « Down the road apiece » qui fut un Top Ten (américain, of course) dans les années 40. A contrario, ils peuvent reprendre des choses toutes récentes, ici le « Pain in my heart » un des premiers titres du débutant Otis Redding. C’est pas la peine d’en rajouter, mais ça va mieux en le disant, Jagger n’a pas le coffre soul du grand Otis. Last but not least, on a aussi droit à la cover d’un des classiques du blues, le « Little red rooster » de Willie Dixon popularisé par Howlin Wolf, ici plus up-tempo et sans l’aspect sépulcral de la voix du Loup.

A côté de ça, les compos originales de Jagger / Richards font un peu piètre figure, hormis le « Heart of stone » déjà évoqué. Ces « What a shame », « Off the hook » et « Surprise, surprise », sont loin de faire partie de ce que les futurs Glimmer Twins ont écrit de mieux. Mais c’est en se forçant à écrire (bien aidés par la pression que leur mettait en permanence Andrew Loog Oldham), qu’ils finiront par trouver leur voie et l’originalité de leur démarche. Même pas six mois après ce « Rolling Stones Now ! » sortira « Satisfaction » et leur histoire et celle du rock prendra une tout autre tournure.

En attendant, « Rolling Stones Now ! » nous montre un groupe ambitieux, cherchant la reconnaissance des deux côtés de l’Atlantique. Intéressant mais pas indispensable …


Des mêmes sur ce blog : 

The Rolling Stones
Aftermath 
Between The Buttons
Beggars Banquet
Let It Bleed
It's Only Rock'N'Roll 
Blue & Lonesome






1 commentaire:

  1. De ces années-là j'ai "Out of your head" où il y a aussi le titre Heart of stone (version anglaise) et déjà Satisfaction sur la version US. Pffff... trop compliqué, je vais me recoucher.

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