Marche à l'ombre ?
Autant le préciser d’emblée, voici le genre de
rondelles que j’aborde avec circonspection. Le Zakk est maintenant célèbre (?)
pour être le leader de Black Label Society, qui me semble être une bande de
chevelus bien bourrins (mais je sais pas trop, j’ai écouté que deux-trois
morceaux en travers). Auparavant, Wylde s’est fait remarquer de ceux qui
trempent leur slip dès qu’un solo de guitare apparaît à l’horizon en étant
l’accompagnateur de Ozzy Osbourne (après Randy Rhoads, … bâillements). Le moins
qu’on puisse dire, c’est qu’il fallait une bonne dose d’abnégation pour
accompagner l’ancien chanteur de Black Sabbath, précocement sénile et rendu
totalement cinoque par l’alcool et la coke dans les années 80 et suivantes. Il
paraît que cette promiscuité a laissé des traces chez Wylde, le poussant vers
la picole à forts volumes et (sans doute pour contrebalancer et éliminer les
toxines) la gonflette musculaire. Le type est baraqué et joue de son physique
schwarzeneggerien … Les spécialistes pourraient vous tartiner trois feuillets à
vous dire l’importance de Wylde live, of course, mais aussi en studio, où il
aidait beaucoup son demeuré de patron à écrire et arranger des chansons …
Quand les cures de désintox de l’Ozzy lui laissaient du temps libre, il avait monté un groupe dont j’ai oublié le nom (et que j’ai la flemme de rechercher) qui a duré quelque temps avant de disparaître. Son label Geffen lui a signifié qu’il avait signé un contrat qu’il se devait d’honorer et qu’il lui était redevable d’un disque. D’où de « Book of shadows » en solo. Se méfier des disques de fin de contrat, les artistes ayant souvent tendance à saboter le boulot pour aller plus vite voir ailleurs. Aux dires des spécialistes du Wylde, « Book of shadows » n’a que peu à voir avec ce qu’il avait produit auparavant. Fini les trucs hardos et place à un country-rock viril. Ce qui à titre tout à fait perso me convient mieux.
Et ça commence plutôt très bien. « Between
heaven and hell » premier titre de la rondelle, débute par une intro à la
guitare acoustique renforcée par un harmonica. Une référence clignote instantanément,
celle de « Harvest » de Neil Young. On a connu des débuts de disque moins
intéressants. Et petit à petit dans ce titre, l’électricité arrive pour
culminer par un solo court et intéressant de guitare électrique. Du bon classic
rock, en formation serrée (ils sont que trois en studio, Wylde, un bassiste
qu’on retrouvera chez Megadeth (soupirs …), et un batteur, Joe Vitale, habitué
des sessions dans le gotha du rock West Coast (CSN, Eagles, Walsh, …). En plus
de leurs instruments de prédilection, ils malmènent également pianos et
claviers divers. On peut souvent lire que Zakk Wylde en solo pratique du rock
sudiste. Amen … sauf que je vois pas bien en quoi ce disque peut ressembler aux
premières rondelles des frères Allman ou de Lynyrd Skynyrd.
Pour moi, le premier titre est l’arbre qui cache la forêt. Globalement, « Book of shadows » est supportable. Sauf que Wylde décline toujours la même chose. Une intro acoustique (guitare ou piano), et un crescendo électrique trouvant son aboutissement dans un solo de guitare dans la ligne du parti (entendez par là qu’on n’est pas dans le superfétatoire démonstratif ou l’expérimental forcené). En fait, comme la plupart des titres sont sur un tempo lent ou médium, on a grosso modo un album de classic rock ricain … du genre de ceux que tartine Springsteen depuis la fin des années 80. Sauf que quand le Boss arrive plus ou moins à faire prendre la sauce en mettant ses tripes et son feeling dans le chant, le Wylde, il a pas vocalement le coffre pour insuffler de l’épique dans ses titres. C’est un chanteur juste correct et limité, et à force de pas être capable de varier la voix, ça finit par être redondant. Tous ces titres qui se ressemblent, qui sonnent tous de la même façon, si on n’est pas fan absolu, ça lasse … et c’est pas l’ésotérisme mystique de pacotille des thèmes des chansons (le Bien, le Mal, la culpabilité, la mort, la rédemption, …) qui peut sauver l’affaire.
Je suis guitariste, capito ? |
Alors fatalement, ont tendance à ressortir du lot des
titres qui essaient de se démarquer du moule uniforme. Comme le strict
country-rock énervé de « The things you do », ou l’ultime « I thank you
child » qui fait le grand écart entre les gentilles comptines de Donovan et un
riff monumental accompagné d’un gimmick de batterie qui évoque le « Kashmir »
de Led Zeppelin … Bon titre également, « Throwin’it all away » sous
forte influence Dylan période « Knockin’ on heaven’s door » et doté d’un
bon solo bluesy sans trop d’esbrouffe ou de fioritures superflues … Quelque
part vers le milieu du disque on trouve aussi enchaînés une paire de titres quasi
strictement acoustique, assez mignons mais qui courent un peu vainement sur les
traces du Neil Young du même genre. Quant au reste, bof …
Comme si ça ne suffisait pas avec l’album original (onze
titres, plus de cinquante minutes) la plupart des éditions de « Book of
shadows » fournissent un Cd bonus avec trois titres qui n’apportent rien
de plus ni de mieux (peut-être un chouia plus acoustique et une déception avec « Evil
ways » qui n’est malheureusement pas une reprise du classique de Santana).
Il existe aussi un « Book of shadows II» … Euh,
tout compte fait, non merci …