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METALLICA - GARAGE, INC. (1998)

Karaoké de métal ?

Les Metallica, comment dire … bon, je dis rien, vous avez compris … que dans leur période tignasse folle, jeans sales, trash-speed-machin métal à fond, je m’en foutais complet … et qu’ensuite (après le très successful « Metallica – The Black Album »), avec leur look tout en cuir destroy genre figurants de « Mad Max – Fury Road »), j’ai trouvé leur musique pas trop moche, mais bon …
Il y a un truc commun à tous les chevelus qui jouent vite et fort, c’est que ce sont des bosseurs (les masses laborieuses du rock), t’es fan et t’en as pour ton argent (sur skeud, en live, on sabote pas le taf) et des types qui aiment bien rendre hommage à leur héros. Alors après les millions de dollars et une paire de disques siamois de classic rock lourd (« Load / Reload ») ayant laissé quelques franges de leur public dubitatif, les Metallica payent leurs dettes. A tous ceux qu’ils aiment. Et sortent donc un disque entier de reprises, ce « Garage, Inc. ». Et pour que la fête (?) soit complète, rajoutent une autre rondelle argentée regroupant les reprises déjà commises depuis leurs débuts …

Bonjour le pavé. Deux fois plus d’une heure de Metallica qui joue autre chose que du Metallica. Quoique … ceux qui attendaient un medley Etienne Daho ou Culture Club seront déçus, mais ils doivent pas être nombreux … Le « Garage, Inc. » stricto sensu (la première rondelle) c’est du Metallica « d’avant ». Tous les potards sur onze et à fond la caisse, de quoi ravir les fans des débuts. Surtout qu’on peut subodorer vu les groupes de quatrième zone repris, que les versions des quatre de la Bay Area sont supérieures aux originaux. Qui hormis quelques malentendants bas du front en a quelque chose à cirer des punks crétins de Discharge, ou des hardeux de fond de tiroir comme Mercyful Fate ou Diamond Head ? Groupes moqués à l’époque par leurs congénères, alors, presque vingt ans après … Quand Metallica s’attaque à des références autrement moins comiques, la situation se complique. Reprendre du Black Sabbath ou du Blue Öyster Cult de la « grande époque » (« Sabbra Cadabra », « Astronomy »), c’est prendre le risque de se frotter à la comparaison avec les originaux. Et la comparaison n’est pas flatteuse pour Metallica. Manque évident de comment dire, finesse ? Surtout à cause de Lars Ulrich, bourrin comme c’est pas possible derrière ses peaux, qui envoie un tempo systématiquement frénétique que les autres doivent suivre. Mais comme c’est lui le boss, ça moufte pas derrière. Hetfield, lorsqu’il ne braille pas de façon gutturale montre des lacunes vocales béantes (moduler c’est pas son fort) …

On peut quand même reconnaître aux Metallica d’avoir des cojones quand ils vont baguenauder en dehors de leurs sentiers battus et rebattus. Se frotter à du Bob Seger, du Thin Lizzy, du Lynyrd Skynyrd ou plus improbable encore, du Nick Cave, si c’est pas de la prise de risque, je veux bien rejoindre le fan club d’André Rieu … et qui dit prise de risque dit aussi sortie de route. Reprendre Seger sans avoir rien de soul ou de bluesy dans le buffet, ça le fait pas … Reprendre Thin Lizzy sans un minimum de groove dans la besace, ça le fait pas non plus, d’autant plus qu’il s’agit de l’ultra classique de Lynott et ses boys (« Whiskey in the jar »). Pour le morceau des Lynyrd, y’a de la triche, les quatre de Metallica étant rejoints (la reprise a été faite pour les besoins d’une émission de radio) par une cohorte de potes plus ou moins hardeux (venus de Alice in Chains, Primus, Corrosion of Conformity, …) auxquels se rajoute le vétéran survivant de Skynyrd, le guitariste originel Gary Rossington. Du coup, avec des claviers, des chœurs et des types qui essayent pas de jouer plus vite que leur ombre, la farce prend et ce « Tuesday’s gone » revisité, il est pas mal du tout …Reste à débattre du cas du « Loverman » de Nick Cave. Titre anecdotique d’un disque anecdotique (« Let love in ») de l’Australien, il est traité façon Nick Cave des débuts quand il foutait les jetons à son public par son extrémisme du temps de Birthday Party. Et même s’il n’y a pas cette folie hurlante, (la reprise des Metallica se contente d’un quiet / loud braillé), je trouve ce traitement réussi et ce titre est pour moi le meilleur de ces deux rondelles …
Le second Cd, c’est du déjà vu (et entendu). Se trouvent compilés toutes les reprises déjà parues depuis leurs débuts. En commençant par le sympathique « Garage days re-revisited » de 87 (dont le recto de pochette sert de verso à « Garage, Inc. »), à une époque où les Metallica fonçaient d’abord et réfléchissaient ensuite s’ils avaient le temps. Suivent une litanie de titres disséminés sur des faces B, titres sur lesquels on (re)trouve les références habituelles du groupe, les catastrophiques punks 80’s anglais (Anti-Nowhere League), la seconde division du hard 70’s (Budgie), et la troisième du hard 80’s (les inévitables lourdauds de Diamond Head).
Qui a dit que les Metallica n'avaient aucun humour ?
Restent (j’en zappe volontairement quelques-uns) une reprise de Queen et quatre de Motörhead. Bon, Queen. Faudra que les gens comprennent une bonne fois que Queen c’est un des très rares groupes à prendre au second degré (comme les Mothers de Zappa et peut-être les vingt dernières années de Bob Dylan). C’est du mauvais goût poussé dans ses derniers retranchements (mais sans le dire, ce qui permet le malentendu). Donc livrer une version métal bourrin de « Stone cold crazy », c’est totalement crétin et totalement à côté de la plaque … Quant aux titres de Motörhead, ils sont révélateurs de l’écart qui peut exister entre un maître et des élèves appliqués mais pas très doués. Première victime sur « Overkill », le Lars Ulrich, incapable de reproduire le tir de barrage de la double grosse caisse de Philty. Pourtant il nous les avait bien brisé depuis deux heures avec sa frappe de mammouth en rut. Passons sur le bassiste (de toutes façons la pièce rapportée de Metallica depuis la mort de Burton) qui n’arrive pas à la cheville de Lemmy (et on ne parle là que du jeu de basse). Hetfield a beau essayer de grogner et Hammett de mitrailler des solos bruyants, ça le fait pas … trop tendres, les Metallica …
Arrive dès lors la question cruciale : à quoi peut bien servir cette double galette ? A mon humble avis à pas grand-chose, les fans retrouveront le Metallica « perdu » depuis le « Black Album » (« Garage, Inc. » s’est bien vendu, leur banquier a été ravi), et les autres auront la démonstration qu’en plus de faire généralement des disques insupportables, les Metallica aiment des trucs tout autant insupportables … CQFD ?



BLACK MIDI - SCHLAGENHEIM (2019)

Midi à quatorze heures ?

Y’a du monde dans les Black quelque chose sur les étagères chez moi … Les Angels, les Crowes, le Flag, les Keys, les Kids, la Mountain, l’Oark Arkansas, le Rebel Motorcycle Club, le Sabbath, l'Uhuru plus Big Black et Frank Black pas très loin. Bon, y’a pas Black M ou les Black Eyed Peas … Mais il y a donc Black Midi, ce qui n’est guère mieux que les deux derniers cités …
Putain, l’autre là, comment il y va … il a pas l’air de savoir que les mags musicaux anglais (enfin ceux qui existent et survivent encore) s’ébaubissent de ces Black Midi qui avant cette rondelle n’avaient sorti qu’une poignée de titres … pensez, des jeunes de vingt ans, avec une technique instrumentale folle, et qui sortent des morceaux tarabiscotés, y’a de quoi sauter au plafond. Et c’est vrai qu’il y a des années qu’on avait pas entendu des machins comme ça … depuis les débuts de Muse …
Les recrues d'été du Qatar Saint-Germain ? Non, les Black Midi ...
Voilà, c’est lâché, on va pas tourner trois heures autour du vieux pot. Le putain de retour de la vengeance du vilain prog … maquillé comme une bagnole de sport volée, mais comptez pas m’avoir avec ce genre de couillonnades, passer entre les mailles du filet du mauvais goût …
On pourrait dire qu’ils auraient pu faire pire. Nous pondre un revival Genesis ou Marillion (qui a dit que c’était la même putain de bouillasse … bien joué, tu marques un point) … ou pourquoi pas, manière de pousser la farce jusqu’au bout, se revendiquer de Yes, se faire produire par Steve Howe, inviter Rick Wakeman sur un titre, et faire designer la pochette par Roger Dean … ça fout les jetons, hein, les frissons sous la canicule …
Non, ça se voit gros comme une réforme du régime des retraites qui va t’obliger à bosser jusqu’à cent vingt ans, que les Noirs Douze Heures ils se revendiquent du diamant noir de Fripp, le « Red » de King Crimson. Et ce dès le premier titre « 953 », de bien loin le meilleur du disque. Sauf que malgré toute leur démonstration technique, ces breaks tarabiscotés, ces changements de tempo, et ces accélérations de dragster, ben … il en manque. Notamment parce les gratteux c’est pas Fripp (jamais on ne trouve sur ce « Schlagenheim » la folie mathématique du Robert), et que le chanteur c’est tellement Daffy Duck qu’à côté Phil Collins passerait pour Placido Domingo. Par contre, les Midi Noir il ont un putain de batteur que, sans remonter aux temps où leurs parents étaient pas nés des Bonzo, Moon, Paice, Vander ou Appice, on a pas entendu ce genre de tabasseur de rondins de bois et qui pèse autant sur les titres depuis Stewart Copeland ou Dave Grohl.

Bon, faut être honnête et comme je m’appelle pas de Rugy (goodbye Rugy Tuesday, mais gaffe, il a dit que maintenant que son honneur a été rétabli (???), il envisageait de revenir en politique … comme c’est pas un mec de convictions bien arrêtées, peu importe l’étiquette, du moment qu’il y a du crustacé dans les assiettes pour les copains et des pétales de roses sur la nappe pour la Saint-Valentin, il est (re)partant …), y’a pas que du prog crimsonien chez les Black Machin, y’a aussi du Talking Heads (dont ils ont baptisé un de leurs premiers singles). Parfois au ralenti (le mal nommé « Speedway »), ou sinon « Of Schlagenheim » (le phrasé épileptique) ou « Years ago » (les Heads violés par un groupe métal). Même si tout ça se tient, le Fripp ayant joué pour la bande au Byrne à la fin des seventies. Tiens et sur la lancée, genre titre mal venu, on a « Reggae », qui ressemble plutôt à un mauvais morceau de Vander Graaf Generator ou du P.I.L. des débuts, qu’à un déhanchement chaloupé de Bob Marley. Puisqu’on cause P.I.L. et Lydon, on a envie de rire devant cette sorte de dub pour autistes qui clôt la rondelle, « Ducter » que ça s’appelle. On a aussi « Near DT MI. » (pour « Near Detroit Michigan » je présume) qui ne ressemble ni aux Stooges ni à MC5, mais beaucoup plus au hard prog ésotérique des Mars Volta, les types qu’auraient bien voulu être Muse à la place de Muse mais qu’ont pas réussi …
Tout ce disque semble vouloir démontrer que les Black Midi préfèrent se vautrer en essayant de faire compliqué, alors qu’ils ont manifestement les moyens de faire du haut de gamme dans des choses beaucoup plus simples (savent composer et jouer, c’est certain).
« Schlagenheim » semble en équilibre très instable entre plein de choses. Chez moi, il est en équilibre très instable sur le rebord de la poubelle …

PS Exceptionnellement, une vidéo live d'un titre ("953"), très proche de la version studio (putain cette voix ...)


 

PETER HAMMILL - NADIR'S BIG CHANCE (1975)

Hammill & Images ?

Ils t’entraînent au bout de la nuit, les démons de minuit … ça fout les jetons, hein… ben Peter Hammill, c’est un peu pareil. Rien qu’à voir son nom, ou celui de son groupe Van der Graaf Generator, n’importe qui d’à peu près normal (ce qui exclut gilets jaunes, sympathisants LaREM, supporters du Qatar St-Germain, chasseurs à courre, joueurs de golf, numismates et clients de McDo, liste entière contre intégrale de Led Zep en premier pressage vinyle état mint), se doit de détaler au plus vite. On est censé se retrouver en face d’un type qui faisait du prog différent, mais enfin du bordel de fuckin’ prog quand même. J’ai réussi à passer plus d’un demi-siècle de nuisances sonores en évitant soigneusement d’exposer mes fragiles conduits auditifs à VdGG (et je compte bien persévérer), mais bon, Peter Hammill je me suis laissé tenter.

Sur la seule foi de déclarations moultes fois répétées de John Lydon, gueulard des Pistolets Sexuels, vomissant à tue-tête que Peter Hammill était le chanteur qui l’avait le plus influencé et que c’était lui le vrai ancêtre de tout punk digne de ce nom. Conclusion, que tout le monde devrait connaître : John Lydon est un con, mais sur ce coup-là, il a pas tout faux. Même s’il faut de sacrées contorsions cérébrales pour ranger sur la même étagère les – au hasard – Ramones et Peter Hammill.
« Nadir’s … » est avec une paire d’autres (« Fool’s mate », « In camera ») s’il faut en croire les spécialistes des disques qu’il ne faut jamais avoir écouté dans sa vie, une rondelle représentant ce qu’Hammill a fait de mieux. Parce que Hammill, tel une sorte de Rod Stewart – Faces prog, sortait en même temps des disques solo et des disques de son groupe. Tout ça parce qu’étant le principal compositeur, en plus d’être chanteur et guitariste, et d’avoir un caractère de cochon, il n’en faisait qu’à sa tête (de lard), et que s’il avait fait où on lui disait de faire, il aurait été plus célèbre et plus riche que Phil Collins et Genesis réunis … 
« Nadir’s … », moi j’aime bien. D’abord parce que ça a peu à voir avec le funeste prog, et puis parce que le mec Hammill, il a une présence vocale qui marque son territoire. Capable de chanter dans des registres très différents, et d’habiter ses chansons. Et puis, il est capable d’envoyer le bois (le morceau-titre, « Open your eyes », « Birthday special »), s’appuyant sur de gros riffs de guitare, parfois doublés par un sax.
On pense au glam-rock qui commence à partir en sucette en 75, parfois à Alice Cooper (le phrasé malsain et psychotique, comme sur « Nobody’s business), d’autre fois à Scott Walker (ou Jacques Brel, les folk-blues morbides du Belge rameutent de nombreux fans qui le reprennent, de Bowie à Ange, en passant par Steve Harley) sur « Shingle song », par ailleurs superbe ballade, moins évidente que la fabuleuse « Been alone so long », pour moi le sommet du disque. Et évidemment, toutes ces parties chantées qui inspireront très fortement, c’est le moins qu’on puisse dire le Rotten cité plus haut (« Nadir’s big chance », ou « Birthday Special » qui aurait pu figurer tel quel sur « Nevermind the bollocks »).
On n’échappe pas aux tristes marqueurs du prog (le concept fumeux de l’album construit autour de Rikki Nadir, double de Hammill, « People … », le final pénible de « Airport » aussi pénible que du Radiohead à venir, le trop long « Two or three spectres », dernier titre du skeud et manifestement titre de trop.
Pour ceux qui sont pointilleux, on précisera que la plupart des titres ont été écrits avant la formation de Van der Graaf Generator, ou qu’ils avaient été laissés de côté par le groupe.
Pas l’épiphanie, mais une bonne surprise inattendue …



NINE INCH NAILS - THE FRAGILE (1999)

Le syndrome des Citrouilles Ecrasées ?

Trent Reznor, ou Nine Inch Nails si vous préférez, pour faire simple, c’est pas un abonné de l’almanach Vermot. Pas le genre à reprendre « Tirelipimpon sur le chihuahua ». Et sa musique lui ressemble. Il a commencé à la fin des années 80 dans l’étroit créneau du rock-metal-machin industriel et n’a pas drainé un gros public sur son nom. Par contre la « chose » de son copain Brian Warner, Marylin Manson, dont il était pour beaucoup dans le succès (concept + production pour faire simple) lui a valu des retombées positives. Adoubement suprême, David Bowie s’est révélé être le fan number one de NIN et l’ancien Mince Duc Blanc et Reznor ont sillonné ensemble les Etats-Unis en 1995 alternant d’un soir à l’autre la tête d’affiche … de quoi aider à faire grandir sa notoriété.
Trent Reznor
La phase bassement matérielle de la carrière étant dès lors réglée, Reznor a entendu laisser au monde une œuvre destinée à marquer son époque. Cette œuvre va revêtir la forme d’un double Cd totalisant presque une heure trois quart de musique. Nom de la bestiole : « The Fragile ». Le bon peuple s’est rué sur la chose dès sa sortie et puis … gros coup de frein très vite au niveau des ventes. Que ce soient les premiers acheteurs ou la critique, ça a froncé du sourcil …
Il y a sur « The Fragile » un boulot colossal accompli par Reznor. Qui a tout écrit, enregistré, produit, ne tolérant que de rares apparitions extérieures sur des bribes de titres. Parmi ces invités, deux noms reviennent sur quelques morceaux, ceux d’Adrian Belew et Mike Garson. En gros le guitariste à la six-cordes folle du « Stage » de Bowie et le type au piano cinglé de « Alladin Sane » de … encore Bowie (vous avais-je dit que Bowie et Reznor avaient tourné ensemble, oui, il me semble ...). Et Reznor s’est retrouvé dans la situation de tous ces types que le monde entier (ou juste la petite amie, mais ça revient au même) a un jour trouvés géniaux et qui ont voulu à tout prix montrer à quel point ils l’étaient, géniaux. Passent ici les ombres aux ailes carbonisées de quelques Icare du rock qui ont pris un gros melon, genre Brian Wilson des Beach Boys ou Billy Corgan des Smashing Pumpkins. Qui ont tellement voulu réaliser leur plafond de la Chapelle Sixtine à eux qu’ils y ont laissé les neurones, Wilson et son « Smile », Corgan et sa logorrhée en double Cd – tiens tiens – « Mellon Collie and the Infinite Sadness ».
NIN au complet en studio
 
Reznor ne fait pas dès le départ une musique très abordable, très radiomicale, c’est un fait. Là, sur la durée, il vire souvent pénible, reproduisant comme on pointe à l’usine les recettes qui ont fait son succès. Ces sonorités noirâtres, caverneuses, tout en borborygmes saturés et parasités, comme si l’électricité du studio ne fonctionnait pas bien. Et quel que puisse être son talent de programmateur en bruits étranges, ses empilages colossaux de séquences rythmiques, ce raffut qui met les hauts parleurs de la stéréo à rude épreuve, à la longue ça finit par lasser.
Pour deux raisons principales.
Reznor s’attache à déconstruire ses morceaux, ne veut pas tomber dans l’écriture « traditionnelle », sauf qu’il utilise toujours les mêmes recettes, reposant sur des montées en tension qui s’achèvent invariablement par un mur de guitares saturées tous potards sur onze, et des paroles braillées. Et Reznor n’est pas un grand chanteur, loin s’en faut.
Et cette alternance quiet / loud, le modèle a été sinon inventé du moins popularisé par les Pixies et amené en haut des charts par Nirvana quelques années plus tôt. On a l’impression que NIN surfe sur la vague grunge alors que celle-ci retombe. Et ce n’est pas l’habillage industriel qui change quoi que ce soit.
Il y a sur « The Fragile » un problème de compositions. Sur presque deux douzaines de titres, la moitié aurait gagnée à rester dans les tiroirs, on a souvent l’impression de redites, de séquences interminables (les quatre derniers titres, enchaînement de ballades déglinguées et syncopées), une demi-douzaine d’instrumentaux « atmosphériques » interchangeables.
En concert, NIN se paye un choriste blond anglais
Il n’empêche que « The Fragile » est un choc sonore frontal, rendant bien le malaise et l’angoisse existentielle de Reznor à travers ces plages dévastées et ces scories de métal en fusion. Et puis il y a dans « The Fragile » deux titres qui sont dans la poignée de ce que Reznor a fait de mieux. La fantastique chanson d’amour enragée et violente « We’re in this together » et la revendicative « Starfuckers, Inc. » ou des couplets rappés sur une rythmique hip hop précèdent un refrain nucléaire drivé par des riffs de guitare colossaux. Un titre qui renvoie dans les cordes tous les Red Hot Machin ou Rage Against Bidule de la Terre à leurs études …
Ça ne rattrape pas toutes les longueurs inutiles du disque, malheureusement … Reznor s’est quelque peu fracassé sur le mur de ses ambitions. Il en tirera les leçons, devenant plus « classique » et finissant par signer des disques, qui bien que gardant leur dose d’étrangeté malsaine, seront beaucoup plus abordables (les B.O. de « The social network » ou « Gone girl ») …
Tout compte fait, il s’en sortira quand même mieux avec ce demi-ratage (et je suis gentil) que le type des Smashing Pumpkins


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JANE'S ADDICTION - RITUAL DE LO HABITUAL (1990)

Casser les codes ...

Jane’s Addiction, c’est une de ces références que l’on s’échange sous le manteau. Pas vraiment underground (2 millions de copies de ce « Ritual … » dépotées rien qu’aux States), mais suffisamment borderline pour faire fuir l’amateur de binaire lambda. Une existence et une discographie erratiques (le groupe n’a fait paraître que deux albums studio à ses débuts), des retrouvailles épisodiques sous haute tension, bref une entité qui passe à côté de toute logique mercantile et commerciale, de tout plan de carrière… Même si tous les festivals « indépendants » du monde plus ou moins libre découlent du Lollapalooza initié au début des 90’s par Perry Farell, le frontman de Jane’s Addiction …
Dites-le avec des fleurs, Jane's Addiction 1990
Jane’s Addiction, c’est l’accouplement du hard zeppelinien des 70’s avec la génération indie. Un crossroad, avec le diabolique pacte faustien pour les guider. Arrivée trop tôt ou trop tard selon les humeurs, la musique de Jane’s Addiction est une sorte de totem, un pont entre les générations. Non pas que ces types aient inventé quoi que ce soit (il y a bien longtemps que dans les années 90 tout avait déjà dit et redit), mais leur approche est apparue et est restée assez unique et originale. Personne ne veut des Jane’s Addiction, ne les cite comme référence. Et surtout pas ceux qui les ont copiés, imités, plagiés (rayer les mentions inutiles …). En premier lieu les Red Hot Chili Machin. Des copains paraît-il. Des copains bien plus riches aujourd’hui certes. Mais qui n’ont jamais fait aussi bien que « Stop ! » et « No one’s leaving » qui ouvrent « Ritual … », les deux titres engloutissant hard, rap et funk dans leur folle sarabande. Et si les Jane’s Addiction n’étaient pas particulièrement discrets niveau look, souvent vêtus des fonds de tiroir de leurs grand-mères, ils ne se sont jamais ridiculisés à plastronner en tongs et bermudas qui sont depuis leurs débuts la tenue officielle des RHCP et les décrédibilisent à jamais …
Jane’s Addiction, c’est surtout Farell et Navarro, certes. Que l’on me permette de citer Stephen Perkins et Chris Chaney qui constituent une section rythmique malléable, capable de tout jouer. Car même s’ils sont considérés comme un groupe de hard, Jane’s Addiction, c’est beaucoup plus que ça, ils ne se cantonnent pas à deux titres, un lent et un rapide, joués jusqu’à la nausée. Chez eux, ça swingue, ça chaloupe, ça funke, ça passe du coq à l’âne, ça déchire sa race … On trouve toujours un OVNI dans leurs rondelles. Sur celle-ci, il s’appelle « Of course », et on dirait avec quelques années d’avance (le rythme oriental, le violon omniprésent, la mélodie zigzagante, …) ce que feront Page et Page lorsqu’ils se « réuniront » pour « No quarter ».
Farell, Chaney, Perkins & Navarro : Jane's Addiction
Tiens, et puisque le nom du dirigeable est quasiment lâché, autant signaler que Jane’s Addiction est de tous ceux qui se sont inspirés de Led Zep, ceux qui s’en sont le mieux approchés. A cause de Navarro d’abord. Sur lequel l’influence de Page est évidente, et pas seulement sur le look (l’air ténébreux et la même tignasse noire que le Jimmy de la fin des 60’s). Navarro tire vers la stratosphère tous les titres avec ses extraordinaires parties de guitare (énormissime sur « Ain’t right », le titre le plus speed du disque). Ce type plutôt très mal dans sa peau (il a de quoi, sa mère a été tuée sous ses yeux) est sans conteste et de loin le guitar hero des 90’s.
Les Jane’s Addiction sont capables de partir dans des directions improbables, dans des expériences qu’en d’autres temps on aurait qualifiées « d’acides ». Témoins les deux titres au cœur du disque, qui flirtent avec les dix minutes, « Three days » et « Then she did … ». Le premier est même l’inspiration de la pochette (bien évidemment censurée dans la puritaine Amérique), et raconte une « expérience » vécue par Farell avec deux femmes dans une orgie de sexe et de drogue qui dura trois jours. Débuté lent et acoustique, le morceau vire à la débauche électrique sous l’impulsion de Navarro qui tronçonne des riffs métalliques ahurissants de puissance. « Then she did … » c’est le titre zeppelinien par excellence (« The Rover » sur « Physical Graffiti » semble le modèle évident) avec vers la fin sa partie de piano au second plan qui renvoie à celles de Mike Garson chez Bowie époque « Alladin Sane ».

Deux titres ont poussé le disque vers le succès commercial « Stop ! » et surtout « Been caught stealing », groove machine avec aboiements de chien en intro et titre le plus connu et emblématique du groupe. Manière d’être exhaustif, il convient de citer « Obvious » avec ses arrangements de synthé et ses faux airs à la U2 (sous amphétamines) dans le genre hymne psalmodié de stadium rock. Enfin, « Classic girl » qui clôt la rondelle est une ballade vénéneuse, parasitée par un final plein de breaks et d’accélérations…
Les Jane’s Addiction auraient pu, auraient du devenir énormes. Les quatre types ont cessé d’émettre collectivement quelques mois après la sortie de « Ritual … ». Deux personnalités écrasantes (Farell l’atypique chanteur de hard, et Navarro l’introverti) ça faisait déjà beaucoup d’egos surdimensionnés au mètre carré. Une consommation effrénée de drogues (on parle pas là d’un petit pétard le samedi soir, mais de dépendance féroce à l’héroïne) ont accéléré la débâcle forcément prévisible dans le contexte.
Même s’ils se retrouveront des années plus tard (Strays » en 2003), rangés plus ou moins des poudres blanches, ce sera sans la magie qui habitait « Ritual de lo habitual ».

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BLACK SABBATH - VOL 4 (1972)

Heavy ...
Dans tous les sens du terme … Tout est dit dans les notes de pochette : « We wish to thank the great COKE-Cola Company of Los Angeles ». No comment … D’ailleurs le disque devait à l’origine s’appeler « Snowblind », tout un programme …
Faut dire que l’évolution a été rapide, trop pour les quatre prolos de Birmingham. Un succès, improbable mais bien réel, a fait de Black Sabbath une institution d’abord chez eux, puis en Europe, et cerise sur le gâteau et montagnes de dollars qui vont avec, aux States. Pas très finauds, les gros cigares de Vertigo et de la Warner, offrent au groupe des séances d’enregistrement à Los Angeles. Les Black Sabbath vont se faire péter les cloisons nasales, sniffant des montagnes de coke. Et la coke, si elle speede son homme, lui fait perdre en lucidité.
Black Sabbath 1972
« Vol 4 » s’en va donc à toute blinde, en tout cas beaucoup plus vite que les trois précédents. Finis les ambiances lentes et malsaines, place aux cavalcades hard sur fond de guitares avec pédale fuzz enfoncée en permanence. Ce qui en ravit certains. « Vol 4 » est pour eux l’avant-dernier des « très grands disques » du Sab, tous les fans vous le diront …
Ouais, bof … On trouve de tout dans la quincaillerie « Vol 4 ». En premier lieu, de la technique. Black Sabbath assure, fini les approximations, les morceaux expédiés à la va-comme-je-te-pousse. Ici, tout est « écrit ». Pensé, pesé, pour que le jeune kid féru de vacarme hardos s’y retrouve. Avec quelques dérives bien de leur temps (le début des seventies). Le sinistre prog et ses tentations démonstratives pointent le nez de son vilain museau. Notamment sur l’inaugural « Wheels of confusion » qui ravira les nigauds fans de Yes en version heavy. Aussi sur l’instrumental « Laguna sunrise » sur lequel Iommi se livre à un numéro de virtuosité pénible à la guitare acoustique, ce qui renvoie aux numéros dans le même exercice du très vain Steve Howe (Yes again). Et tant qu’on est dans l’instrumental, il est fortement conseillé de zapper « FX », assemblage brinquebalant de bruitages crétins (à base de guitare électrique ?).
Rayon dispensable, on passera assez vite sur « Changes » (rien à voir avec Bowie), qui pue la ballade imposée par la maison de disques, pour un résultat empilant des lieux communs à la tonne. Le rock mid-tempo de « Snowblind », le pénible « Cornucopia » sont assez insignifiants, en tout cas en nette régression par rapport au Sabbath « d’avant ».
Rayon entre chèvre et chou, on trouve le single (le second de la production du Sab, peu enclin à cet exercice pour hit-parades, le premier de leur carrière étant le gigantesque « Paranoid ») « Tomorrow’s dream », mignonne mélodie (si, si), intro au piano, arpèges tarabiscotées, gros riffs qui dépotent, mais bon, enfin, vous me comprenez.

Il y a quand même du bon, voire plus, dans ce « Vol 4 ». Trois titres irradiés par la guitare en fusion de Iommi qui y délivre quelques riffs qui feront date. « Supernaut », qui dépote, avec un cours solo très voodoo style du batteur Bill Ward. « St Vitus dance » est une folle sarabande, un rock’n’roll très heavy, mais un rock’n’roll quand même, que tous les trashers adorent (faut avouer que ça a un peu plus de gueule que les crétineries speedées de Slayer). Last but not least, le dernier titre, « Under the sun » est pour moi le meilleur de tous. Sur une rythmique boogie, Iommi finit par balancer un riff de la mort qui tue, sur fond de roulement de toms herculéens de Ward. Un titre qui n’a rien à envier à la concurrence, pourtant nombreuse et valeureuse à cette époque-là.
Ah, je m’aperçois que j’ai même pas écrit le nom de l’Ozzy. Ouais, rien à dire (de bon) sur lui, toujours ses borborygmes de crécelles et son petit filet de voix doublée pour lui donner un minimum de consistance. J’ai toujours pensé que ce type était plus un showman totalement niais et déglingo qu’un chanteur, et n’en déplaise au fan-club, je persiste et signe…
Avec « Vol 4 », le Sab atteint les sommets en terme de popularité. Il ne reste à la formation originale (Iommi, Osbourne, Butler, Ward) qu’un disque à sortir (l’également bancal « Sabbath bloody Sabbath), avant l’éparpillement façon puzzle des protagonistes sous l’effet conjugué des tonnes de coke et des séances de tribunal.

Avec « Vol 4 ») la messe (noire) était quasiment dite …

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ZZ TOP - ELIMINATOR (1983)

You play the guitar on the MTV ...
« Eliminator » est le disque le plus connu, celui qui s’est le mieux vendu de ZZ Top. Et bien évidemment pas leur meilleur. Pour ça, il faut aller piocher (au hasard, ça marche à tous les coups) dans ceux d’avant…
ZZ Top 1983
Faut resituer un peu le machin, le contextualiser comme disent les hipsters. ZZ Top, au début des années 80, c’est le « little ol’ band from Texas » (c’est quelquefois écrit au cul de leurs disques). Et que la musique qu’ils aiment, excuse-moi partenaire, elle vient de là, elle vient du blues. Dès les débuts de leur carrière, les Top n’ont jamais renié leur côté rustique, voire rustaud. Le belouze, y’a que ça de vrai, et au Texas, on est pas des tafioles. Moins cons que la moyenne (on y reviendra), le trio a fait un gimmick exacerbé de son côté plouc, en rajoutant une couche à chaque disque (la pochette de « Fandango » avec la carte du Texas brodée sur les vestes, la tournée « Deguello » - il me semble – avec sur scène crotales, bisons, chacals, et toutes sortes de bestioles made in Texas). Petit à petit Hill et Gibbons ont pris l’habitude de se fringuer de la même façon et de se laisser pousser la barbe, mais pas Beard (que ceux qui n’ont pas compris s’inscrivent en cours de rattrapage en 6ème, avec anglais première langue …), et de commencer à se livrer sur scène à des chorégraphies étranges, qu’on croirait mises en scène par un handicapé moteur (à côté de Gibbons et Hill, Rossi et Parfitt dans Status Quo, c’est les ballets du Bolchoï, et il m’étonnerait pas que ce soit pour se foutre de leur gueule que les ZZ Top se soient lancés dans cette agitation au ralenti derrière leurs micros...)
Et le trio se retrouve dans les 80’s avec sa bonne petite réputation, son public tout de même conséquent, mais dans une décennie qui apparemment n’est pas du tout faite pour lui. Le prototype du truc qui marche vers 82, quand les ZZ Top entrent en studio pour mettre bas leur prochaine rondelle, c’est Culture Club. Et force est de reconnaître qu’il y a quand même un monde entre Boy George et Dusty Hill. A priori, ZZ Top fait partie des dinosaures des 70’s et doit comme tant d’autres, plus ou moins disparaître.
Une bien belle carrosserie ...
Ce sera compter sans la capacité d’adaptation des trois mousquetaires texans (qui comme ceux de chez nous, sont en fait quatre, leur D’Artagnan à eux s’appelle Bill Ham, et sera leur producteur attitré et exclusif jusqu’à sa mort) qui vont sortir le disque le plus malin de leur carrière, après avoir consciencieusement analysé la situation et humé l’air du temps. Leur musique est has been au possible, ils ont pris des kilos, ont des barbes imposantes de Père Noël boogie, se trouvent confrontés à la technologie envahissante (le synthé, soit a priori l’ennemi juré), et épine sur le cactus, la montée en puissance de MTV, chaîne prétendument musicale qui balance en heavy rotation les rengaines pop de jeunes beaux gosses, et qui devient incontournable pour prétendre à un succès commercial important.
ZZ Top va résoudre cette quadrature du cercle. Non sans faire grincer les dentiers de leurs vieux fans. « Eliminator » sera de très loin leur plus grosse vente. Bon, ils y sont pas allés avec le dos de la cuillère. Le son général est étrange, très mécanique, robotique, électronique et synthétique. Plus particulièrement tout ce qui est rythmique. A tel point que la rumeur a longtemps couru que « Eliminator » était un disque solo de Billy Gibbons à la guitare, tout le reste était fait par des machines. Finauds, les barbus ont laissé se répandre la rumeur, du moment qu’on causait d’eux, c’était bon à prendre, et n’ont jamais (du moins à l’époque, j’ai plus suivi leurs prises de parole depuis des siècles) confirmé ou démenti. Vraisemblablement, ils ont été parmi les premiers à émuler de vraies parties de basse-batterie, les ont fait bouffer à des ordinateurs et ont reconstruit leurs morceaux à partir des boucles obtenues (un indice : comme la puissance de calcul informatique était loin de celle dont on dispose aujourd’hui et pour ne pas avoir à faire de raccords aléatoires, quasiment tous les titres ont un final en fading, sans coda). Le bon son, le gros son, n’importe quel tocard peut l’avoir. Là où le trio texan a fait fort, c’est dans les compos. Toutes d’une finesse mélodique étonnante, des atours hardos appliqués sur de l’orfèvrerie pop.
Difficile de pas se faire remarquer
Le matériau de base pour le hold up parfait était prêt. Ne restait plus qu’à le diffuser au niveau planétaire. MTV sera le vecteur idéal. Là, ZZ Top n’aura pas grand-chose à faire. Niveau visuel, ils se reconnaissent à des lieues à la ronde. Leur sens de l’humour et leur intelligence (Gibbons est un spécialiste universitaire d’Art Moderne et a donné des conférences dans le monde entier) feront le reste. Leurs chorégraphies de plus en plus absurdes et empesées, les guitares en fourrure, les bagnoles des années 30 (comme la Ford de la moche pochette stylisée), les blondasses à mini short et décolleté sur forte poitrine dont ils s’entoureront dans leurs clips, leur vaudront un succès inattendu et imprévu.
Qu’en est-il et qu’en reste t-il de ce « Eliminator » ( un titre gag, en faux espagnol, alors que jusqu’à présent toutes leurs rondelles étaient nommées dans la langue de Cervantès), outre son aspect sonore particulier ? Des hits à la pelle « Gimme all your lovin’ » « Got me under pressure », « Sharp dressed man », « Legs », « TV Dinner ». Et des hits même pas honteux, malins, vifs, entraînants, mélodiques. Avec Gibbons et sa Strat en meneuse de revue. Parce qu’il y a quand même quelques trucs à ne pas oublier. Notamment le fait que le trio texan est une redoutable machine à boogies graisseux et que dans ce genre ils laissent quand même Status Quo loin derrière (d’ailleurs je me demande s’ils se moquent pas un peu d’eux dans « If I could only flag her down » plus Quo que nature). Et puis ne jamais oublier que derrière sa barbe et ses guitares en moumoute le sieur Gibbons est un très grand guitariste, laissant délibérément de côté les rodomontades électriques bavardes et égoïstes au profit de courts soli et chorus incisifs. A ses débuts, il n’a pas impressionné Hendrix soi-même tout à fait par hasard (à tel point, anecdote hyper connue mais qu’il n’est jamais inutile de rappeler, que le Voodoo Chile lui a offert une guitare qu’il a conservé comme une relique). Gibbons est un maître discret de la six-cordes et c’est pas à l’écoute de « Eliminator » qu’on affirmera le contraire. C’est lui qui tient la baraque ZZ Top au bout de ses doigts agiles.
Avec option dégivrage sur les binocles et air conditionné sur les grattes ?
Il y a quand même un côté obscur de la farce, pas insignifiant. Cette litanie de compositions linéaires, fades et sans saveur malgré leur côté radiofriendly. Dont quelques unes qui ont du mal à tenir la distance. « I need you tonight », c’est mieux par INXS, même si les deux morceaux, à part leur titre, n’ont rien en commun. Ici, on a un slow blues fadasse qui s’éternise, à des kilomètres du feeling d’un « Blue Jean Blues » (sur « Fandango »). « Thug » est bien pourrie par ses synthés, on dirait du Phil Collins (énervé, mais du putain de Phil Collins quand même).
Un mot sur le dernier morceau du disque, « Bad girl ». Compte tenu du sens de l’humour aiguisé des barbus, je vois dans ce titre à part (faux live avec ses hurlements et ses cris rajoutés), aspect sonore et mélodique bien différent du reste, un pastiche (voire un hommage au énième degré) d’AC/DC avec sa voix hurlée dans les aigus, ses guitares rythmiques tronçonneuses et son solo à la Chuck Berry. Ils devaient bien rigoler sous leurs barbes en l’enregistrant …
Pour rester dans l’imagerie Auto Plus du disque, « Eliminator » est un virage dans la carrière de ZZ Top. Plutôt pas trop mal négocié, sans sortie de route. Le suivant, « Afterburner », enverra tout le monde dans le décor




BLACK SABBATH - PARANOID (1970)

Doom Doom Boys ...
J’avais jamais accroché à Black Sabbath. Mon psy m’a dit que ça remontait à mes années collège. En ces temps-là (début des 70’s), les gars qui écoutaient de la musique étaient soit Led Zep, soit Purple (les has been en étaient restés aux Beatles et aux Stones, les cons …). Moi je faisais tourner en boucle le premier Maxime Le Foxterrier, sa poésie gentiment baba (« San Francisco ») et libertaire (« Parachutiste »)... Nobody's perfect… Et puis y’avait trois quatre mecs patibulaires mais presque, tignasse plus longue et plus sale que la moyenne, jeans pattes d’eph à la propreté douteuse, et treillis pourris de l’armée US avec écrit au feutre noir le nom de Black Sabbath, et qui toisaient toute la cour de récré d’un air méchant et d’un œil noir. Comme les filles ne les regardaient pas, ou dédaigneusement, j’ai logiquement conclu que Black Sabbath, c’était de la musique de cons faite pour des cons.
Black Sabbath 70
Des lustres plus tard, j’ai jeté une oreille distraite sur leurs premières rondelles, bof … Et puis de toutes façons, ils étaient vite devenus totalement ringardisés, l’espèce de machin qui subsistait encore sous ce nom était l’objet des moqueries des hardeux. Si même eux en voulaient pas … Encore plus tard, le nom de Black Sabbath est revenu avec insistance, des nuées de gonzos créaient de multiples chapelles de l’église hard (heavy, dark, doom, death, sludge, que sais-je encore …) et citaient les quatre corniauds de Birmingham comme la référence ultime, ceux qui avaient mis au monde la frange la plus noire du rock …
Afin d’assurer ma réputation partagée par moi d’encyclopédiste du binaire, j’ai rouvert le dossier Sabbath. Au début. Et là, y’a un skeud qui clignote, « Paranoid », parce que quasiment tous ses titres se retrouvent dans les Best of et compiles diverses consacrées au quatuor originel.
Autant y aller franco, « Paranoid », c’est du lourd. Beaucoup mieux, beaucoup plus fort, plus lourd, plus fou, que dans mes souvenirs. Bon, ça relève pas non plus de l’épiphanie, mais ça déchire proprement. Pourtant, c’est bête comme chou, la musique du Sab.
C’est d’abord une réaction. Une réaction au Swingin’ London. Les quatre de Black Sabbath viennent de Birmingham, cafardeuse cité industrielle des Midlands. Un patelin où si t’as de la chance, ton avenir c’est une silicose la cinquantaine venu dans la mine, ou une vie dans une boîte métallurgique (Iommi a laissé quelques phalanges sur une machine à l’usine). Alors quand tu vois les Beatles de la pochette de « Sgt Pepper » ou les Stones de « Satanic Majesties », c’est un monde inaccessible pour toi, petit prolo fumeur de joints et buveur de pintes le week end. Iommi, toujours lui, a pu juger sur pièces le Swingin’ London, puisque pendant le court laps de temps où il a fait partie de Jethro Tull, il a participé au raout psyché du « Rock’n’roll circus ». Ces types (Iommi, Osbourne, Ward, Butler) qui commencent à se croiser dans des groupes du dimanche à Birmingham, ils prennent une grosse baffe à l’écoute des Ricains lourds et violents genre Vanilla Fudge, Iron Butterfly, Blue Cheer. Le son du Sab, il vient de ceux-là, et pas des fanfreluches londoniennes…
Les mêmes en couleur
Les rythmiques de plomb, la lourdeur lancinante, seront leur signature musicale. Coup de bol (ou de génie), ils vont barbouiller tout ça de satanisme à deux shillings véhiculé par les films de la Hammer. Cette provocation potache, leur rock violent au ralenti, les feront immédiatement remarquer. En 1970, ils sortiront deux disques, le premier éponyme et ce « Paranoid ».
Black Sabbath prend le rock à rebrousse-poil. Faisant de leur défauts (une technique plus qu’hésitante, un look anti-glamour au possible, une crétinerie assumée, de la provocation simpliste, du satanisme de pacotille, …) des qualités dans lesquelles vont se reconnaître tous ceux qui jamais ne risquent de monter dans l’ascenseur social. Le Sab des débuts est le groupes des prolos, des asociaux, des cons et des moches. Plus tard viendront les dérangés et bas du front séduits par l’occultisme de carnaval …
Les Sab sont incapables d’écrire une chanson « dans les règles de l’art », de concevoir des ponts, des arrangements. Ils font se succéder des séquences (on fait tourner un riff en boucle, on enchaîne sur un mini solo de batterie, on change brutalement de tempo ou de mélodie, et on accole tout ça à la va comme je te pousse), privilégiant bien sûr les down ou mid tempo (c’est plus facile de trouver les notes quand ça va pas vite) aux accélérations façon dragster d’Hendrix ou à la virtuosité des power trio genre Cream. Et dans un logique réflexe spinaltapien, le Sabbath joue fort et très saturé. Réunissant par là-même tous les ingrédients pour sortir des disques grotesques avec une régularité métronomique. Sauf que là, à leurs débuts, et plus particulièrement sur « Paranoid », la sauce prend et tous ces titres fonctionnent.
On attaque avec « War pigs », le morceau anti-guerre. Qui n’arrive pas à la cheville de « Masters of war » ou de « Machine gun », mais l’important n’est pas là. On est bluffé par cette ambiance brute, noirâtre, les riffs lancinants de Iommi, les roulements de toms de Ward, cette affreuse voix de crécelle dans les aigus de l’Ozzy.
Il y a là une patte sonore, une recette assez unique. Que le groupe va répéter sur quasiment tous les titres du disque. « Paranoid » est un bloc, un pavé lourd, mal dégrossi, mais un putain de pavé quand même …
Les mêmes live
Huit titres. Dont cinq parpaings de metal lancinant. « War pigs », « Iron man » et son riff d’anthologie, le mid tempo aplatissant de « Electric funeral », « Hand of doom » qui a généré un sous-genre du hard, le classic heavy rock « Fairies wear boots ». Une remarque à propos de ce dernier. Soit les paroles (en principe c’est Butler qui est l’auteur des lyrics) sont complètement stupides, soit pires (fairies, c’est normalement les fées, ou alors les tarlouzes en argot).
« Planet caravan », c’est le slow façon Black Sabbath. Pas exactement aussi lascif que « Whiter shade of pale » si vous voyez ce que je veux dire. « Planet caravan » ça pue les types hébétés qui ont fumé trop d’herbe (« Sweet leaf » de leur premier disque, ode à la ganja des Midlands), ça fait l’effet d’un château de cartes sonore qui va s’écrouler, porté par la voix gémissante et inexpressive d’Ozzy. Tellement décalé que ça en devient génial. Tous ces titres taquinent ou dépassent les cinq minutes. Il y en a deux de beaucoup plus courts. « Paranoid », de l’aveu du Sab, a été rajouté à la hâte pour arriver au timing recommandé d’un trente trois tours. C’est un rock’n’roll violent, très proche dans l’esprit du « Speed King » de Purple, qui deviendra un hit et lancera la carrière du groupe all over the world. L’instrumental « Rat salad » semble lui totalement décalqué (la virtuosité en moins) sur le « Moby Dick » du Zeppelin avec son riff immédiatement mémorisable et son solo de batterie.

Conclusion : « Paranoid » est un disque crétin. Et génial à la fois. Dans un genre radicalement différent, il me fait penser au premier Ramones. Et ça c’est vraiment un compliment …

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QUEENS OF THE STONE AGE - VILLAINS (2017)

Mort d'Homme ?
Autant préciser les choses. QOTSA, pour moi, c’était les Smashing Pumpkins des années 2000. Et aujourd’hui, dans les années 2010, ils en sont là où en étaient les Pumpkins dans les années 2000. Vous suivez ? Non ? Bon, je m’explique …
Les QOTSA furent le temps de deux-trois disques la référence en matière de grosses guitares (leur évident et assez incontournable « Songs for the deaf » restant leur apex). Servies dans une ambiance sérieuse (voir le sort réservé à l’allumé bassiste Nick Oliveri, vite éjecté du groupe). S’il y a bien un mot qu’on ne risque pas de mettre en avant pour parler d’eux, c’est celui de fun. La musique des QOTSA est pour moi froide, clinique et mathématique. Peuvent multiplier les tempos frénétiques et monter le son, ça n’y changera rien. Et QOTSA comme Pumpkins n’existent qu’à travers un leader omnipotent, Homme ou Corgan, un de ces types pontifiants et lapidaires qui s’imaginent détenir une vérité et avoir une sorte de mission à accomplir. Par charité, on ne reviendra pas sur les déclarations orgueilleuses (en fait totalement cons) qu’ils ont pu éructer l’un comme l’autre.
QOTSA 2017
Si Corgan semble rangé des vélos et avoir compris que le monde continuera de tourner sans lui, Homme se multiplie, enchaînant disques et collaborations. Des surmédiatisés (c’était juste un groupe fun, donc pas sérieux) Eagles of Death Metal, bataclanisés par une exposition bien involontaire que Jesse Hugues est incapable de gérer, en passant par le dernier Iggy Pop (gros battage médiatique pour un résultat tout juste passable, comme la plupart des disques solo de l’Iguane, comme quoi n’est pas Bowie qui veut …). On n’extrapolera pas sur les déclarations risibles de Homme pour la sortie de ce « Villains » (« c’est un disque qui va marquer ce siècle », ce genre …), on s’en tiendra à l’écoute des neuf titres de cette rondelle.
Suffit de voir les réactions embarrassées des fans dans les forums et sites divers où on cause zizique pour comprendre que la montagne a accouché d’une souris. Homme et ses QOTSA auront essayé… Sentant qu’il commençait à pédaler à côté du dérailleur, le grand rouquin a voulu marquer les esprits en allant chercher un metteur en sons « moderne », Mark Ronson. Se ménageant ainsi une porte de sortie. Si le disque est pas bon, c’est la faute à ce tocard, qui bosse avec Adele, Maroon 5, Bruno Mars, ou autre cataplasme de ce genre pour lycéens … Les fans hardcore ont évidemment saisi la grosse ficelle et font feu de tout bois sur l’Anglais. Dont on oublie de dire qu’il a aussi bossé avec Amy Winehouse ou les Black Lips (groupe punky et rigolo, référence en la matière, et antithèse des pesants QOTSA) pour un résultat excellent. Non, les gars, si t’as de bons titres, même un gâte-sauce aux manettes te pourrira pas un disque. Par contre, si t’arrives avec des compos minables, même George Martin, Spector et Lee Perry réunis pourront rien pour toi …
QOTSA & Mark Ronson
« Villains » est un disque … vilain. Pas nul de chez nul, juste sans intérêt … de toute façon, à l’époque où le vinyle revient à la mode avec ses pochettes XXL (par rapport aux timbre-poste qui empaquettent les Cds), les QOTSA réussissent à enrober leur rondelle d’une visuel hideux digne du bon goût d’un Venom en son temps (Dick Rivers avait fait à peu près la même horreur, mais avait au moins l’excuse d’avoir mis un bon disque, « Rock and roll Star », à l’intérieur …).
Autre sujet à circonlocutions sémantiques du fan de base, il y a sur « Villains » des synthés, un quatuor à cordes et des cuivres. Même si ça sonne pas comme Kraftwerk, une sonate de Litz, ou un morceau de chez Stax, on s’éloigne sensiblement du Motörhead sound. La faute à Ronson, maugréent quelques uns … hum, plutôt un cache-misère, un paravent à la médiocrité des compos, dont une bonne moitié est à jeter sans autre forme de procès. « Domesticated animals » est une ballade plombée et plombante, la quasi gothique « Fortress » est introduite par des cordes, ce qui est son seul intérêt, la pompière « Un-reborn again » réveille les fantômes de Simple Minds et Boston, ce qui est loin d’être une bonne idée. Mention particulière à un « Hideaway » sans queue ni tête avec ses synthés über alles. A l’attention du sieur Homme qui il y a quelques lustres, claironnait qu’il fallait « déclaptoniser » le rock, « Hideaway » est un titre utilisé par Clapton (sur "Blues Breakers with John Myall", rondelle d’un autre niveau que « Villains »). Signe qui ne trompe pas, le titre placé en ouverture (« Feet don’t fail me ») qui se doit de ferrer l’attention de l’auditeur est un machin linéaire bruyant à grosses guitares après une longue litanie de synthés hululants, un titre dont la structure initiale (où sont les couplets et le refrain là-dedans ?) était bien inconsistante. Enfin, la ballade geignarde qui clôture la rondelle aurait mieux sonné si Adele l’avait chantée, sans compter que les avocats de feu Lou Reed peuvent trouver matière à procédure à l’écoute de la ligne de basse, qui rappelle étrangement celle de « Walk on the wild side » …
Homme commence à entrer dans l'ombre ...
Il reste quand même quelques pistes bien foutues, sans que l’on puisse pour autant s’extasier à leur sujet. Le rockab punky de « Head like a haunted house », la remuante « The way you used to do », comme du ZZ Top funky, le bon vieux méchant rock « The evil has landed » et son final cuivré à la « Suffragette City » de Bowie. Ce qui fait quand même pas beaucoup, et me fait penser, à l’opposé des aficionados de QOTSA, que ce sont les petits chichis et gimmicks de Ronson, qui empêchent « Villains » de sombrer corps et biens.

Va falloir se reprendre Mr Homme. Ça commence à faire désordre … On est à la limite du poubelle direct …


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RED HOT CHILI PEPPERS - BLOOD SUGAR SEX MAGIK (1991)

Magik, vraiment ?
Autant être clair d’entrée. Ce disque, plus je l’écoute, plus il me gave. Pour plein de raisons, forcément bonnes, puisque ce sont les miennes. Attention, je touche quasiment au bon Dieu là, tant ce groupe est devenu une institution. A cause de sa musique ? Un peu, mais putain ça craint …
J’ai rien contre le fait que des types tatoués en tongs et en bermudas aient du succès. Non non, vraiment, mais faut juste qu’ils passent dans les émissions de Patrick Sébastien, quoi … A t’on déjà vu Keith Richards, Bowie, Lou Reed, Dylan, Lemmy Motörhead accoutrés de la sorte hein ? Et qu’on vienne pas me rétorquer que c’est mesquin, juger les gens sur leur apparence, que c’est un argument de facho en puissance… Non, le look des types qui font de la musique, c’est un peu comme les notes de pochette des 33T à l’époque, ça compte autant que ce qu’il y a à l’intérieur. Et quand tu ressembles au jeune beauf en vacances au camping, ben pour moi c’est rédhibitoire. Et c’est pas par hasard qu’on retrouve pareille hérésie vestimentaire chez des rappeurs, des DJs ou des nu-métalleux. Cette décontraction de bon aloi c’est niet pour moi …
On va au bal masqué, ohé, ohé ...
Et la zique, dans tout ça ? Ben elle aussi elle est tatouée, en tongs et bermudas, à l’image des types qui la font …
Une bouillasse (qui a fait fureur en son temps, on en recausera plus bas) qui a placé les Red Hot sur le toit du monde, faisant de ces nigauds une « valeur sûre », en gros des types capables de vendre des tickets pour remplir un stade en deux temps trois mouvements. On appelé ça de la « fusion » et ça n’a rien à voir avec les choses fabuleuses que pouvait sortir un Sly Stone en son temps. En gros un type qui rappe sur un raffut à base de basse slappée, de plans de batterie lourdingues, avec de la guitare hardos qui tronçonne des riffs …
N’importe quel groupe peut faire ça au bout de trois heures de répét. Rendons justice aux Red Hot, ce sont eux qui y ont pensé les premiers dans les nineties. En s’appuyant sur ce qui vendait : du rap et de grosses guitares. Et les gros cigares de la Warner qui venait de les signer alors qu’ils étaient jusque-là réservés à un public « avant-garde branchée et décontractée » leur ont filé un gros budget et surtout Rick Rubin. Faut dire que le gros barbu était a priori l’homme de la situation : c’était lui qui avait mis en sons les faux potaches Beastie Boys et les vrais connards de Slayer.
Sur « Blood … », ils s’en donnent tous à cœur-joie pendant une heure et quart. Putain, une heure et quart … Même à l’époque, malgré tout le tapage médiatique qui entourait le groupe et son skeud, je trouvais çà un peu longuet. Vingt cinq ans après, c’est juste insupportable. Kiedis est tout sauf un bon chanteur, ces rythmes et ces cocottes funky groovent à peu près autant qu’un séminaire de centenaires. C’est juste du putain de gavage, de la répétition ad nauseam de gimmicks aussi éculés qu’insupportables. Et pour que le supplice soit complet, tous les titres sont enchaînés, certains ayant la mauvaise idée d’être des copier-coller de ceux qui précèdent.
Comme la musique est d’une banalité assez affligeante, on a fait de ces zozos des sorte de super-héros, et on peut trouver partout des histoires qui se veulent édifiantes sur leurs problèmes de cul, de dope, de dépressions … on n’oublie pas de citer leurs concerts bites à l’air à leurs débuts, de faire verser une larme sur le sort de Hillel Slovak, leur premier guitariste overdosé, de décrypter la bisexualité de l’héroïnomane Kiedis, de s’interroger sur les départs et retours de son successeur, « l’enfant terrible » John Frusciante (c’est quand il s’est barré et quand Dave Navarro l’a remplacé qu’ils ont sorti pour moi leur meilleur disque, mais chut, ne le dites pas fort, les fans et le groupe bavent depuis des siècles sur Navarro et « One hot minute »).
Payer pour voir un mec en slip kangourou ?
Moi je sauve deux morceaux (et demi). Ouais, sur dix-sept, ça fait pas bézef, je sais. Et surtout pas leur putain de premier numéro un, l’insupportable « Give it away ». Non, le talent que je veux bien reconnaître aux Red Hot, il est dans les ballades tristes. Comme « Breaking the girl » ou le très excellent « Under the bridge ». Voire un peu dans « I could have lied ». Tout le reste, c’est poubelle et surtout le carnage qu’ils font subir (traitement hardcore-punk en une minute chrono) au « They’re red hot » de Robert Johnson. Dommage qu’on l’ait pas foutu dans un cercueil capitonné de soie le Robert, ça lui ferait moins mal quand il se retournerait dans sa tombe à l’écoute de cette chose grotesque.
La plaisanterie aurait pu vite finir. Trois mois après « Blood Sugar … », sortait « Nevermind » de Nirvana qui du coup offrit quelque chose de bien plus consistant à se mettre entre les oreilles. On sait ce qu’il advint rapidement de Cobain et de Nirvana. Une fois le blondinet sous terre, tous les couillons se tournèrent vers les Red Hot, Pearl Jam, Smashing Pumpkins ou je ne sais quels autres tocards. La messe des nineties était définitivement dite. La décennie serait tous tattoos et pantacourts en avant …

Tiens, une info dont vous ferez ce que vous voudrez : toutes les photos des tatouages du groupe qui fourmillent dans le livret ont été shootées par Gus Van Zant …