The tree of life ?
« The tree of life », chacun le sait (?), est le premier film à peu près totalement foiré de Terrence Malick, quand il s’est mis à tourner à un rythme pour lui effréné, et qu’il a voulu barbouiller son pensum d’un mysticisme et d’un ésotérisme de pacotille.
Weisz & Aronofsky |
Du mysticisme et de l’ésotérisme à deux balles, y’en
a aussi dans le troisième film d’Aronofsky. Et aussi un arbre de vie. « The
fountain » est plutôt déroutant d’entrée, et le devient de plus en plus. D’abord,
il commence par une incrustation à l’écran d’une citation de la Genèse, qui
peut laisser augurer du pire à tout infidèle qui se respecte. Ensuite, on voit
un conquistador et une paire de ses soldats qui ont trouvé ce qu’ils
cherchaient : un temple maya à la silhouette menaçante gardé par une forêt
de crânes empalés sur des piques … comme dans n’importe quel Indiana Jones. Et comme
t’as déjà vu les Indiana Jones, tu te dis, putain n’y allez pas, c’est plein de
pièges … Et dans « The fountain » comme chez Spielberg, y’a évidemment
des pièges et des sauvages plus que menaçants. Les deux fantassins font pas
long feu, le héros (ou le type supposé tel) affronte bravement la meute, se
fait mettre à terre, et là, les Mayas le portent pas vraiment en triomphe, mais
ça y ressemble, au pied des marches du temple, qu’ils l’obligent à gravir. Sauf
qu’en haut, y’a une sorte de chef emplumé avec une épée enflammée qui l’attend,
qui lui enfonce un poignard dans le bide pendant leur baston et s’apprête à l’achever
… Fin de la première séquence …
Deuxième séquence : dans une bulle transparente qui semble dériver au fin fond des galaxies, une sorte de moine bouddhiste est en lévitation à côté d’un arbre vénérable et gigantesque, mais pas très en forme, il semble sec, qui remplit quasiment toute la sphère. Le type arrête sa lévitation, va près de l’arbre (on voit qu’il est vivant, l’arbre, il a les poils qui se dressent, non, je déconne pas …) et bouffe un morceau d’écorce …
Conquistador Jackman |
Troisième séquence. Dans un laboratoire, un groupe de
chercheurs fait des expériences sur des chimpanzés atteints de tumeurs au
cerveau. Un nouveau protocole est tenté, on va rajouter aux substances
chimiques habituelles un extrait d’écorce d’un arbre provenant des forêts du
Guatemala …
Soit trois séquences qui se déroulent à cinq siècles
d’écart (le conquistador en 1500, le chercheur en 2000 et le bonze dans l’espace
en 2500). Point commun, les trois sont joués par le même acteur, Hugh Jackman. Dont
on a dit beaucoup de mal parce qu’il avait fait fortune dans les films Marvel.
Ouais, d’accord, mais qui à part Daniel Day-Lewis et quelques rares autres n’est
pas allé cachetonner chez Marvel ? Vous voulez la liste, de tous ceux
affublés de fringues ridicules près du corps qui se sont agités devant des écrans
verts ?
De toutes façons, on s’en fout de Jackman (même s’il est très correct dans « The fountain »), on n’a bientôt plus d’yeux que pour l’actrice principale, Rachel Weisz (à l’époque compagne d’Aronofsky), tellement belle que même un macho comme James Bond en tomberait vraiment amoureux (ceux qui n’ont pas compris gagnent un abonnement à Gala). Et comme Jackman, Weisz intervient dans les trois époques. Elle est la Reine d’Espagne qui veut sortir son pays du joug des inquisiteurs et envoie le brave conquistador à la recherche de l’Arbre de Vie, et s’il le trouve, elle lui donnera son amour, ils auront la vie éternelle, et libèreront leur pays. Elle est la femme du chercheur, et elle souffre d’une tumeur au cerveau comme le premier chimpanzé de laboratoire venu, et elle est soit Reine d’Espagne soit femme de chercheur sous forme d’apparitions dans la bulle dans l’espace). D’ailleurs c’est pas une bulle, c’est un vaisseau spatial, finit-on par apprendre, en route vers une planète en train de s’éteindre et qui serait la matrice de la vie dans l’Univers, selon une légende maya, retranscrite par la femme du chercheur dans un bouquin qu’elle est en train d’écrire, et qui s’appelle « The fountain ». Comme quoi tout est dans tout, et inversement … vous suivez ?
Weisz et Jackman , années 2000 |
Et comme les trois histoires se chevauchent à l’écran,
et qu’à l’intérieur de ces trois époques la chronologie n’est pas respectée, tu
finis par te sentir gagné par un tenace mal de crâne. « The fountain »,
c’est un peu un brouillon des films à Nolan, la première fois tu regardes les
images, les fois suivantes, t’essaye de comprendre quelque chose …
Pour moi, après deux premiers films peu
conventionnels mais très réussis (« p » et « Requiem for a dream »),
« The fountain » est le premier (et pas le dernier, voir « The
wrestler » et surtout « Noé ») faux pas d’Aronofsky.
Alors on peut lui trouver des excuses, voire des circonstances atténuantes. « The fountain » devait être un film à gros budget. Aronofsky, avant même que les acteurs soient recrutés, avait fait construire des décors gigantesques en Australie et des scènes devaient être tournées un peu partout dans le monde. Coup de ciseau de la major qui in fine lui retire le budget, décors en Australie bradés à qui en voulait, et une petite coproduction americano-canadienne low cost pour finir.
Les mêmes dans le futur ... |
Le film a été
entièrement tourné à Montréal, et Aronofsky, qui est quand même un mec doué qui
sait s’entourer, a fait un film qui en fout plein les yeux (surtout dans sa
partie futuriste). Alors je sais pas quel était son projet de départ, mais là,
en une heure et demie générique compris, tout est fini. Même si une heure
supplémentaire n’aurait pas été forcément nécessaire (on finit par saisir tous
les tenants et aboutissants, toute la symbolique lourdingue du truc sur la vie
qui renaît de la mort, la chimère de l’immortalité, et autres balivernes
mystiques …).
« The fountain » est à mon sens sauvé du
naufrage par de belles prestations de Jackman et Weisz qui portent le film sur
leurs épaules. A cause de son budget riquiqui, peu de personnage secondaires
(tout juste quelques répliques d’Ellen Burstyn), le pognon étant englouti par
le cachet des deux vedettes, quelques raccourcis et twists narratifs assez
saugrenus, et une myriade d’effets spéciaux plutôt psychédéliques mais assez réussis.
Prévoir tout de même une boîte de dolipranes pour le
premier visionnage …
Du même sur ce blog :