KELLEY STOLTZ - QUE AURA (2017)

Un petit tour dans les années 80 ?
Quand elle passe à la télé, Chimène Badi porte un tee-shirt Led Zeppelin. Qu’en pensent Jimmy Page et Robert Plant ? Quand elle chante ( ? ), Carla Sarkozy reprend « Highway to hell ». Qu’en pensent Bon Scott et son petit Nicolas de mari ? Et le rapport avec Kelley Stoltz ?
Il n’y en a aucun … quoique … lui, il s’habille comme un Clapton qui aurait pas trouvé la boutique Armani, et il a autrefois repris un disque entier de Echo & the Bunnymen. Assez bizarrement, il est signé chez Castle Face Records, plutôt spécialiste des groupes revivalistes tendance sixties heavy psychédélique. Et ça, on peut pas vraiment dire que ce soit son truc, au Stoltz. Avec « Que aura », il a signé un des meilleurs disques des années 80 … sorti trente ans trop tard.
Kelley Stoltz
Y’a deux trucs, qui mieux que le carbone 14, permettent de reconnaître le « fameux son » des 80’s : les grosses batteries en avant (Steve Lillywhite chez U2 ou Simple Minds, Springsteen dans « Born in the USA », et les autres ont suivi …), et ces synthés stupides dont absolument tout le monde tartinait ses disques. Stoltz, s’il a laissé de côté les kicks pachydermiques, par contre, les synthés vintage, il s’en donne à cœur joie. Mais comme on a affaire à un type cultivé et qui traîne depuis plus de vingt ans dans l’indie rock, il les emploie plutôt à bon escient. Enfin, pas toujours, témoins « Feather falling » et « Same pattern », où ses pianos électroniques sont beaucoup trop en avant. Et pas de bol, c’est « Same pattern » que le label a choisi pour promouvoir la rondelle … ça risque d’en rebuter plus d’un, et comme a priori y’a pas des milliards de types qui attendaient cette rondelle, tout ça sent le bac à soldes.
Ce qui est con, parce que « Que aura » est un bon disque, voire mieux. Figurez-vous que ce clampin, il a pas fait comme la plupart de ses congénères, il a pas mis onze morceaux sur son disque, il a mis onze chansons. Et ça change tout, tellement on a perdu l’habitude d’entendre une intro, des couplets, un refrain, un pont, une mélodie, un solo au bon endroit au bon moment, toutes sortes de choses qu’avant plein de gens savaient faire et dont les générations plus ou moins actuelles semblent avoir perdu à jamais la recette (Radiohead – ou Kanye West -  quelqu’un ?)
Kelley Stoltz, lucidement, la joue low profile, même si on sent le type déterminé à rien lâcher. Il fait son truc, dans son coin, et on le sent pas vraiment très concerné par tout ce qui est charts et chiffres de vente… Et pourtant, celui qui achètera sa galette regrettera pas d’avoir lâché quelques euros Macron-Merkel. Stoltz est un guitar hero inconnu, mais que ses potes vont chercher quand il y a une partie de gratte à jouer (il a d’ailleurs fait une tournée avec les Echo & the Bunnymen devenus vieux, ce qui pour lui doit être la panacée). Et en plus de la guitare, il joue aussi de tout le reste (basse, batterie, synthés), fait ses disques tout seul dans son studio perso et les produit … Just like Macca, Prince, Stevie Wonder, Rundgren … le genre d’exercice qui  ne pardonne pas. Parce qu’on ne peut pas être un virtuose de tout ce qu’on touche. Ici, ce sont les parties de batterie qui sont plutôt simples, voire simplettes, très certainement clickées. Pour le reste, le type se débrouille plutôt bien. Et si le son est bien celui des 80’s, c’est pas du côté de Jeanne Mas ou Début de Soirée qu’il faut aller les similitudes.
Va bientôt falloir rajouter des doigts et des mains ...
Un exemple : la ballade brumeuse et arpégée « Get over » me fait penser à celles que miaulait l’immense Chrissie Hynde dans ses Pretenders. Un autre ? La mélodie parfaite et la facilité nonchalante de « No pepper for the dustman » devraient battre le rappel des fans d’Edwyn Collins (Edwyn Qui ? pff, laissez tomber, en plus il est moitié mort le pauvre …). Encore ? « Tranquilo », ballade pop mid-tempo, avec sa basse bien ronde et bien élastique, qui permet également de se rendre compte que si on risque pas de confondre Kelley Stoltz avec Otis Redding, il n’en demeure pas moins qu’il a une voix assurée et une présence intéressante au chant.
Et le reste de « Que aura » est à l’avenant, présentant derrière une base sonore commune, des variantes bien sympa. On a droit a du rock FM mid tempo (« Empty kicks »), qui fait clignoter le nom du vieil artisan de la chose Chris Rea, on trouve du classic rock qui louche qui vers la power pop (l’inaugural « I’m here for now »), un autre morceau réchauffe la mixture sonore brumeuse gothique des disparus et oubliés Lords of the New Church (« Looking for a spark » est dans la lignée d’un « Live for today »). Les titres restants, peut-être moins marquants, oscillent entre rock indie (« For you » et son riff alerte), et arpèges vaporeuses (« Possessor », titre le plus faible selon moi, gâché par une voix forcée dans les aigus).
Ce qui surnage comme impression de cette rondelle, c’est une certaine décontraction nonchalante, le type se la pète pas, prend manifestement plaisir à jouer ses titres, et espère en donner à ses auditeurs. Du rock peinard, envisagé façon laid back, la même démarche qu’avaient en leur temps des types comme JJ Cale ou Tony Joe White … Et je vais vous dire, même les fuckin synthés 80’s, ils ont rarement sonné aussi bien …

Kelley Stoltz est un type cool qui sort un bon disque. Que demande le peuple ?


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In Triangle Time