Dave Grohl est un type bien. Alors qu’il doit avoir
mis sa famille à l’abri du besoin pour des générations grâce aux royalties de
Nirvana et des Foo Fighters, il se la joue pas jetsetter arrogant, qui continue
dans le music business juste pour la caillasse. On le voit pas tirer une
tronche de dix mètre sur scène ou sur les photos, et il est toujours prêt à
cabosser une batterie si on lui demande (QOTSA, Probot, voire derrière Sir
Macca pour une reprise d’un classique de Nirvana). Ce type, pour moi le meilleur
batteur de rock vivant, prend son pied guitare en main quand c’est lui qui mène
la danse avec les Foo Fighters.
Et mine de rien, ce chien fou des années 90 est
devenu un dinosaure du rock. Parce qu’il est toujours là (des nouvelles de
Soundgarden, Pearl Jam, Smashing Machins , QOTSA ou Radiohead ?), et
peut-être parce qu’il s’est jamais embourbé dans la cérébralité, la
conceptualisation, ou l’auto-glorification de son auguste personne (j’ai les
noms …). Les Foo Fighters, ça casse peut-être pas trois pattes à un canard,
mais au moins tu peux poser n’importe lequel de ses disques sur la platine, tu
vas pas te faire chier au bout de deux titres … Du bon rock sans prétention …
Jusqu’à ce « Sonic Highways » … comme
faute de combattants, il est quelqu’un qui « compte » maintenant, il
se retrouve avec ses Foo Fighters à la tête d’un projet balèze. Le concept
(aïe), c’est à travers huit titres de capter à chaque fois
« l’essence » d’une ville qui a compté dans la carte du rock US. En
se faisant « aider » par une figure locale, généralement de la six
cordes, et le plus souvent plus un perdreau de l’année (on est tout à coup ravi
que Clapton ou Santana soient pas nés aux States), ce qui peut conduire à des
morceaux avec 4 (quatre !) gratteux (enfoncés, les Ramolly Hatchet). Et
cerise confite sur le cake aux raisins, chaque escapade citadine donnera lieu à un
doc d’environ une heure payé et diffusé par la chaîne HBO. En gros ce que dans
les années 80 on appelait un projet multimédia. Rajoutez à la production une
des figures de proue des 90’s aux consoles (Butch Vig, pousseur de boutons pour
Nirvana ou Garbage), et on s’attend à voir débarquer la grosse machine de
guerre qui va récolter le brouzouf, avec une partie musicale plus ou moins à la
ramasse …
Bon, « Sonic Highways », ce sera pas le
disque du siècle. Mais c’est loin d’être de la daube. D’abord, y’a un son qui
risque de faire date, qui déchire bien sa race comme disaient les jeunes à
l’époque, une puissance de feu décibélique assez impressionnante. Les compos,
on peut bien leur reprocher d’être assez mainstream, de vouloir plaire aux
« kids » (le serpent du mer du wockanwoll, tout le monde en cause,
s’adresse à eux, mais personne en a jamais vu un) et à leurs parents, voire
leurs grands parents, s’ils étaient pas fans des concerts du Grateful Dead. Du
consensuel, oui, mais dans des genres assez pointus, le titre « The feast
and the famine » pouvant passer pour du hardcore centriste. Généralement,
les morceaux sont très typés 90’s, nostalgie quand tu nous tiens. A noter quand
même que Grohl peut se le permettre, parce que le son des 90’s, il y
était un peu beaucoup au cœur.
Malgré ce, j’ai rien trouvé dans « Sonic
Highway » qui me force à appuyer frénétiquement sur la touche Repeat.
C’est correct, voire très correct, ça reste dans la ligne Foo Fighters, et évidemment,
vu les moyens engagés, ça sonne très carré, très pro (c’est pas une insulte). De
temps en temps, des influences assez évidentes remontent à la surface, le
phrasé du Bowie des 70’s au début de « Something for nothing », allant
même jusqu’à un démarquage du « All the young dudes » (sur le très
glam « What did I do ? / God as my witness »). L’essentiel est
cependant bien ricain, bien classic rock (« Congregation »), jusqu’à
un final épique (7 minutes), ce « I am a river » comme un mix réussi
entre le Springsteen de « Born in the USA » et les U2 dans leur
période américaine (« The Joshua tree »).
Vu les moyens déployés, on peut sans trop se
mouiller annoncer que les Foo Fighters seront les incontournables têtes d’affiche
des festivals de l’été prochain. Live et en formation moins pléthorique, les
titres de ce « Sonic highways » devraient bien envoyer le bois. On
peut aussi, et c’est un sacré bon point par ces temps de délayage permanent,
savoir gré à Grohl de s’être cantonné à huit titres et quarante minutes, alors
qu’il aurait été facile au vu des moyens engagés de se vautrer dans un
interminable double Cd.
PS. Même si le batteur crédité sur tous les titres
est l’habituel Taylor Hawkins, y’a un tel niveau de drumming sur « Outside »
que je serais pas surpris si c’était sur ce titre Grohl aux baguettes.
Et la pochette, collage-montage de monuments remarquables des villes "inspiratrices", elle me fait bigrement penser à celle de "Breakfast in America" de Supertramp ...
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