Les Beach Boys, c’est une trentaine de disques studio et
dix fois plus de compilations. Mais c’est pas très difficile de s’y retrouver
dans ce labyrinthe. Les compiles, elles reprennent les hits, car les Beach Boys
en ont eu un gros paquet, et c’est assez compliqué de mal tomber. Les albums
studio, hormis l’incontournable « Pet sounds », on peut quasiment
tous les oublier. D’ailleurs, pour un groupe ayant vendu des dizaines de
millions de disques, il a fallu attendre des années (2001 pour être précis)
avant que la plupart soient réédités en Cd.
Des premiers communiants ? Non, les Beach Boys |
Si après cette intro à faire fuir le chaland, il reste
encore quelqu’un, le skeud dont au sujet de lui que je vais causer « Summer
days … », il est paru un an avant « Pet sounds », et fait donc
partie de ces 33T qui sortaient à un rythme effréné (deux à trois par an, sans
compter les compiles) depuis les débuts du groupe. Un disque fidèle aux canons
de l’époque et à l’exploitation tous azimuts qui était faite des groupes
bankables. Deux-trois hits, quelques titres corrects, et du remplissage à base
de fonds de tiroir. « Summer days … » ne déroge pas à la règle. Ça
sent le truc assemblé vite fait, l’ensemble des douze titres dure 26 minutes.
Et malgré tout, faut faire le tri.
Le final du disque est calamiteux. Un instrumental
(rappelons quand même que ce qui a contribué à la légende des Boys, ce sont
leurs harmonies vocales, les meilleures du bon côté ( ? ) du Rideau de
Fer), un titre de doo-wop (« I’m bugged at my ol’ man ») qui n’est
vraiment pas le genre de prédilection du groupe, et pour finir un court machin
a capella totalement sans intérêt.
Le cœur du disque est construit autour d’une thématique
plus que prévisible (la plage, l’été, les meufs), toute la philosophie un peu
simplette des Beach Boys depuis toujours (maintenant, à 70 balais, ça le fait
encore moins pour eux). Et bizarrement, comme un signe prémonitoire de ce que
seront les dix premières années du groupe (après, vaut mieux laisser tomber),
on trouve tout ce qui a caractérisé le groupe dans les années 60.
Alors forcément, y’a des trucs qui ressemblent à Chuck
Berry (toute première source d’inspiration de Brian Wilson), et ils sont placés
au début (« The girl from New York City » et « Amusement Parks
USA »). Ensuite le travail sur les harmonies vocales, symbolisé à l’époque
par tous les girl-groups, qu’ils soient chez Spector ou la Tamla. Le
« Then I kissed her » des Crystals de Spector est la reprise qui
s’imposait. Ensuite les Beatles, qui ont traumatisé à jamais Brian Wilson. La
compétition se met en place avec « Girl don’t tell me » qu’on
pourrait prendre pour un inédit des Fab Four. A noter pour l’anecdote que c’est
le seul titre du disque entièrement joué par les Beach Boys, sans doute pour
présenter le côté « groupe » et imiter au mieux la technique précaire
des Beatles des débuts (en principe, ce sont des requins de studio à la
manœuvre, en particulier les habitués des sessions de Spector, Hal Blaine,
Carol Kaye, Leon Russell et toute la clique …). Au tournant des 60’s, un regain
d’inspiration du groupe (et surtout le retour en son sein de Brian Wilson)
donneront quelques disques intéressants (le superbe « Surf’s up »
notamment) et seront marqués par une certaine tristesse des mélodies. On en a
les prémisses sur ce « Summer days … », avec la quelque peu
désabusée et traînante « Let him run wild ».
Séance photo avec Al Jardine |
Et puis et surtout, les Beach Boys sont dans cette
première moitié des 60’s un groupe à singles. Issus de ce disque, deux ont
grimpé en haut des charts. « Help me Rhonda », déjà présent dans le
précédent album (« Beach Boys today ! ») l’est ici dans sa
version « radiophonique ». Pas grand-chose à dire, c’est un Beach
Boys classic, qui reprend toutes les formules (le gentil rock’n’roll, les changements
de rythme, les chœurs, le refrain en pièce montée) ayant déjà fait leurs
preuves. D’un tout autre calibre est « California girls ». Brian
Wilson a dit qu’il s’agissait là du meilleur titre qu’il ait écrit. Bon, il est
peu cinglé, le Brian, il doit plus se souvenir qu’il a écrit « Good
vibrations » … N’empêche, il a pas tout à fait tort, « California
girls » est un des meilleurs titres du groupe, et peut-être celui qui le
symbolise le mieux à ses débuts. Musicalement, il domine sans peine cet album,
et son thème contenu dans le titre (ça vole pas très haut les textes des Beach
Boys), il est récurent dans ce disque et lui aussi contenu dans le titre, les
« summer days », c’est fait pour draguer, en espérant que ça débouche
sur des « summer nights » torrides. Le tout très fleur bleue, dicté
par l’époque et l’image romantique que tient à cultiver le groupe.
Le groupe … il serait temps d’en parler. Les Beach Boys
sont une affaire familiale (les trois frangins Wilson, le cousin Love, le pote
Jardine, et l’autre pote Johnston, dont on sait pas trop s’il en fait vraiment
partie). Affaire chapeauté par papa Wilson, qui en bon Thénardier du rock,
envoie ses enfants au turbin et prend la monnaie. Ce qui n’empêche pas
certaines curiosités « stratégiques ». Pourquoi Jardine (Johnston, il
y est jamais) ne figure pas sur la pochette (il est sur des photos de la
séance, et « signe » comme les quatre autres, un texte sur la
pochette du 33T ?). la réponse est selon moi à chercher dans le fait que
les Beach Boys ne sont pas vraiment un « groupe » au sens rock du
terme, mais plutôt une trademark au son immédiatement reconnaissable, et les
accompagnateurs du plus doué du lot, Brian Wilson, qui signe toute la partie
musicale de l’affaire, ne laissant que les paroles à cousin Mike Love … Déjà le
germe de tout un tas de rancunes tenaces, qui donneront lieu à partir des 70’s
à des pitreries procédurières tout du long de l’interminable saga du groupe …
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