DEF LEPPARD - HYSTERIA (1987)

 

Les premiers de la classe ...

Dans le monde très concurrentiel du rock, comme dans une finale olympique de 100 m, c’est jamais bon de prendre un mauvais départ. C’est pourtant ce qu’avaient fait les Def Leppard, groupe de minots de Sheffied (ville industrielle sinistrée du milieu de l’Angleterre, patrie de Joe Cocker, puis plus tard de Pulp et des Arctic Monkeys entre autres) lorsqu’ils avaient débuté au début des années 80, dans ce que l’on a imaginativement appelé la New Wave of British Heavy Metal. Les grands gagnants furent très vite Iron Maiden, Saxon et Judas Priest récoltèrent les accessits, et seuls les complétistes forcenés s’intéressèrent au cas Def Leppard.


Un groupe de potes, boys next door, moulinant gentiment un hard-rock de série B. Ils auraient pu devenir les Budgie ou les Wicked Lady de leur génération, jusqu’à ce qu’une bonne fée Clochette (en l’occurrence celle de « Hells Bell ») se penche sur leur berceau. Robert John « Mutt » Lange fut le catalyseur et l’accélérateur de la carrière de Def Leppard. Un producteur très radio friendly (il venait de « domestiquer » le son d’AC/DC en produisant « Highway to hell » et « Back in Black », et en faisant passer les Australopithèques au niveau supérieur question ventes), mais aussi un producteur « intrusif » (capable de participer à l’écriture et de « réorienter » le son du groupe).

Dès « High & dry » en 1981, Lange s’était occupé de la production de Def Leppard. Changement de braquet et d’implication avec le suivant, « Pyromania » (1983). Le succès du groupe devient exponentiel (plus de dix millions de copies/monde dépotées), tournées incessantes all around the world, Def Leppard devient une grosse machine qui compte dans le music business. Et puis l’accident industriel. Rick Allen, grand amateur de vitesse au volant de voitures de sports, se plante grave et y laisse un bras. Assez gênant quand on est batteur. Qu’à cela ne tienne, les autres musicos, dans un réflexe plus Spinal Tap que nature, le conservent, il aménage son kit, et après les moins connus garagistes sixties américains Moulty & The Barbarians, Def Leppard devient un groupe avec un batteur manchot …


« Hysteria » sera dès lors mis en chantier avec le difficile challenge de succéder au multi platiné « Hysteria ». Pour cela, Lange et Def Leppard vont pousser un peu plus loin le bouchon du son mainstream. Globalement, on s’écarte du hard rock stricto sensu. Aucun risque de confusion avec les grands anciens (le Zep, Purple, Le Sab, Aerosmith, …), pas plus qu’avec les contemporains dans une surenchère de bruit et de fureur (Maiden, les nouveaux arrivants Metallica, avec tout le speed-trash-machin dans leur sillage). S’il fallait trouver quelque chose d’approchant, ce serait les Scorpions de « Love at first sting », et tout le hard FM américain (Foreigner, la Bénatar, …, ce genre de choses). Intéressant (?) de constater que sur douze titres (pour plus d’une heure), pas la moindre trace d’un solo de guitare (quand on veut en foutre plein les oreilles et qu’on a pas de virtuoses des six-cordes dans le groupe, on a pas vraiment le choix). Rien que ce détail suffit à montrer que l’on quitte subrepticement le monde du hard … et qu’on lorgne effrontément vers celui des passages radio.

« Hysteria » en fout plein les oreilles. Trop à mon avis, mais bon comme personne en a rien à secouer de mon avis … L’intro accrocheuse, une marque de fabrique de Lange, est minutieusement travaillée. On n’oublie pas de mettre dans le tracklisting une paire de balades viriles (l’énorme succès « Still loving you » est passé par là). Et même si on communique pas là-dessus (quoi que …) en ce milieu des 80’s où les synthés sont rois, on n’en met pas un seul dans le disque. Tous ces arrangements tarabiscotés, ces enjolivures sonores sont faites en poussant dans ses derniers retranchements technologiques le traitement des guitares.

Le succès de « Hysteria » sera équivalent, voire meilleur que celui de « Pyromania » et Def Leppard entrera dans le club très très fermé des gens ayant vendu plus de dix millions de copies de deux albums consécutifs (on parle là de gens comme Michael Jackson, les Eagles, les Spice Girls, Madonna, autrement dit du très beaucoup mainstream). On est avec ce genre de disques dans l’irrationnel le plus complet, ainsi sept (oui, quatre et trois) singles en seront extraits (comme sur « Thriller » de Michou J.), chose inimaginable pour une rondelle sortie sous l’étiquette « hard ». Les boys next door, même s’ils ont pas grand-chose de sexy, vont faire la une des journaux et magazines (spécialisés ou pas), et on verra beaucoup leurs trombines, coiffures chiadées, fringues de bad boys milliardaires, brillants comme une Dacia neuve (ils ont rien de Ferrari du rock, les pauvres gosses).

Bling-bling attitude sur scène ...

Bon, trente cinq ans plus tard, il faut en retenir quoi, de cette histoire ? Un son peaufiné à l’extrême, un truc bien propre, bien joli, et, comment dire, bien ringard aujourd’hui. Tout ce déluge d’effets sonores, ces montées chromatiques hyper-prévisibles étaient bien là pour ratisser large, et tant pis pour l’art (l’hard ?).

De la litanie de singles, on peu retenir, par ordre d’apparition, « Rocket » (hymne, comme la plupart d’ailleurs, de stade), « Animal » (le plus effrontément FM ?), « Pour some sugar on me » (très bêtement et méchamment efficace, mix entre « We will rock you » de Queen et « I love rock’n’roll » de Joan Jett), et la ballade mid-tempo « Hysteria ». De toutes façons, tout se ressemble, la recherche de l’hymne à stades semblant être le plus grand dénominateur commun de tout le tracklisting, mais sur la longueur, tout ce formatage finit par être quelque peu épuisant …

« Hysteria », c’est le sommet et aussi un peu le chant du cygne des Def Leppard. Condamnés, comme Sisyphe, à pousser pour l’éternité leur gros caillou sonore ripoliné. De toute façon, ils étaient cuits. Les Metallica allaient enclencher la vitesse supérieure, et l’espèce de glam metal des Leppard, allait se voir copier (Motley Crue et une ribambelle d’autres), avant de se faire déborder par cinq toxicos teigneux traînant dans tous les endroits chelous de Sunset Boulevard … On ne remerciera jamais assez les Guns’N’Roses et leur premier disque d’avoir fait le ménage dans le genre …



2 commentaires:

  1. Oooouupsss...Def Leppard...par où commencer?
    Je vais faire court: écouté en 82, High 'n' Dry me fout une baffe monumentale, aussi durable que Rebel Yell de Billy Idol, mais plus que Blackout de Scorpions, To Fast for Love de Motley Crue, le 1er Accept et le 1er Stray Cats ou Screaming for vengeance de Judas Priest. En même temps fallait subir Thriller de MJ, For Those d'AC/DC, les cochonneries sucées 3 fois des Stones et j'en passe...
    Le problème de Def Leppard, c'est l'alcool. Pete Willis se fait éjecter because son accoutumance après High'n' Dry, ciao les riffs qui tuent. Donc Pyromania très très sympa mais le Mutt Lange cartonne aussi avec 4 de Foreigner donc il colle des chœurs partout. Thriller bastonne plus au niveau vente, le Lange met 3 ans à pondre Hysteria ( aussi à cause des problèmes dont tu causes comme le batteur qui perd un bras...).
    Donc on nage dans le délire boursouflé avec Hysteria, t'as un peu tout dit.
    Un carnage niveau ventes, les mecs ont leur jet privé...et Steve Clark, dernier riffeur (étude piano classique et solfège pour ta gouverne) disjoncte comme un vulgaire Bon Scott...
    Depuis c'est un gâchis consternant qui fait pitié.
    J'ai été trop long?
    Bonne année

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    1. Non, t'as pas été trop long ...
      Moi Def Leppard, j'ai pas commencé, j'ai pris le train en marche ...high'n'dry, je l'ai écouté c'est sûr, au moins une fois, une rondelle qui avait pas du tout imprimé chez moi ... j'ai pris (ou subi) le train en marche avec Pyromania (qui est bien) et celui-là que j'avais trouvé too much (trop de tout en fait) à sa sortie et qui a pris un gros coup de vieux je trouve ...
      En 82, je commençais à m'éloigner du hard, alors quand ils sont sortis, les Motley, Judas, Accept et toute la clique en blousons cloutés, j'ai zappé ...j'ai réécouté bien plus tard, j'ai aps l'impression d'être passé à côté de quelque chose d'essentiel avec ces zozos ... j'avais viré garage, Cramps, Fleshtones, Gun club, et le 1er stray cats, j'avais bien aimé ...
      Et évidemment bonne année, faut vraiment être optimiste pour souhaiter une bonne année, mais bon, ... faisons comme si ...

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