JACKSON BROWNE - LATE FOR THE SKY (1974)

Going to (Hotel) California ...

Donc Jackson Browne fut le gendre seventies idéal. Le beau gosse tombeur des filles de rêve (de Nico qui l’a paraît-il dépucelé à Darryl Hannah en passant par beaucoup d’autres de moindre renommée …). Beau gosse aux Etats-Unis, parce qu’ailleurs il était quand même un secret bien gardé. Beau gosse certes, mais en plus auteur de chansons (re)connues, que ce soit ses compositions pour d’autres (« Take it easy », premier gros succès des Eagles) ou pour ses disques à lui (« Doctor My Eyes », « Jamaica Say You Will »). Le genre de type qui a dû en rendre pas mal d’autres jaloux … Parce qu’en plus il était propre sur lui, bien élevé, et partie prenante pour plein de causes généralement bonnes (il sera la figure de proue du mouvement pacifiste No Nukes lorsque fin 70’s – début 80’s le risque de guerre nucléaire ressurgira …) et il a certainement pas voté Trump ...

Et donc en plus de tout ça, Jackson Browne a fait des disques et les a bien vendus, merci pour lui … Certes, pas dans le genre le plus risqué de l’époque. On parle là du style West Coast, celui qui ravagea les radios californiennes une décennie durant, avant que les Eagles et leur fameux hôtel de désintoxication n’en fassent la bande-son de la planète entière … D’ailleurs le visuel avec son bâtiment en clair-obscur de « Late for the sky » présente quelques similitudes avec celui prétendument hanté par Anton LaVey sur la pochette des Eagles … et la similitude avec la troupe à Glen Frey ne s’arrête pas là. Musicalement, c’est à peu près blanc bonnet et bonnet blanc. D’après cette signature sonore trouvant ses gènes chez Gram Parsons (avec les Byrds, les Flying Burrito Bros ou en solo), et tous ses descendants, disciples et autres enfants spirituels (Poco, Doobie Bros, Eagles, …). Et même s’il a jamais connu le risque de clochardisation, Browne est aujourd’hui (comme à l’époque d’ailleurs) le moins cité du lot. Parce qu’il a eu moins de succès commerciaux que les autres, et aussi parce qu’il a un trop bien stylisé un genre pas forcément décoiffant en ça. Browne, j’ai déjà écrit et je persiste, c’est le centriste du genre musical le plus centriste qui soit …
Inutile de chercher dans « Late for the sky » des guitares saturées, des fûts martelés, des arrangements décoiffants. Il y a derrière chaque instrument de solides mais conventionnels requins de studio californiens, emmenés par l’inamovible pote David Lindley, guitariste mais aussi (malheureusement) violoniste, ce qui fait qu’on entend un peu trop son foutu crincrin tout au long des titres. Jackson Browne n’est pas non plus une des grandes voix du rock, loin de là, il assure sans plus, et sans aucun dérapage …
Jackson Browne & David Lindley
« Late for the sky » se partage entre ballades et country-rocks pépères. Seuls deux titres sont un peu plus enlevés, le rockant « The road and the sky » (comme si l’Elton John de « Yellow Brick Road » reprenait le « Suffragette City » de Bowie), et « Walking slow », qui sort quelque peu des sentiers battus avec sa rythmique quasi reggae.
Des six autres compositions de « Late … », on notera le titre éponyme qui résume à lui seul parfaitement l’affaire, « The late show » ballade qui bien que (sur)chargée passe bien hormis son final encombré de violon et de chœurs de tous les potes West Coast (Henley, Shouter, Fogelberg, la femme à Lindley, …). Méritent aussi la citation « For a dancer » (dans un blind-test, tout le monde va dire que c’est les Eagles), ou l’ultime « Before the deluge » le seul ou Browne force un peu sa voix …
« Late for the sky » est un joli disque … Un peu beaucoup trop joli même …

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