RADIOHEAD - OK COMPUTER (1997)


Computer blues ...

Alors là, attention chef-d’œuvre … c’est ce que vous diront avec des trémolos dans la voix tous les maniaco-dépressifs, et tous ceux qui n’écoutent que de mauvais disques.
Non, non, mes petits chéris, il n’y a pas de quoi se relever la nuit. Tout au plus je serai d’accord avec vous pour dire que c’est un disque intéressant, le meilleur des tristos Radiohead. Des types pourtant prometteurs, dont j’attends encore qu’ils sortent un bon disque. Qui ne viendra jamais, ils sont maintenant trop vieux, trop rances, trop perdus dans leur cérébralité neurasthénique …
« OK Computer » est un disque qui n’eut pas grand mal à surnager dans cette seconde moitié des années 90, à la qualité musicale en chute libre (on avait commencé avec Nirvana et fini avec Mumuse, c’est dire l’ampleur des dégâts) et globalement très affligeante. « OK Computer » est un ramassis assez bien torché de tout ce qui pouvait « fédérer » la génération désenchantée comme disait l’autre. Des choses, des sons, des structures de titres déjà entendus mille fois chez d’autres, vaguement ripolinés d’une humeur morose et d’un pathos geignard. Et comme point de ralliement, la voix sous Prozac pleurnicharde de Thom Yorke. Que je ne supporte pas, il y peut rien et moi non plus …
Musicalement, ça tient globalement assez bien la route. « OK Computer » sera certainement le dernier grand disque conçu pour les chaînes hi-fi, avant que l’hyper compression pour mp3 et iPod lamine tout. Les Radiohead et leur producteur Nigel Godrich, de fait le sixième membre du groupe, ont effectué un travail considérable et le plus souvent réussi sur la structure sonore. « OK Computer » est un disque qui s’écoute, qui ne se subit pas. Avec suffisamment de prise de risques pour se démarquer du troupeau indie-rock dans lequel s’ébrouait jusque-là le groupe.
On a souvent qualifié ce disque de « floydien ». Ouais, si on veut, quand bien même « Subterranean homesick Alien » doit autant à Dylan par son titre qu’aux disques solo de Roger Waters des 80’s. Comparaison plus pertinente quand il s’agit des brouillages radios de l’intermède « Fitter happier » et surtout du très « Echoes » « The Tourist ». Rayon seventies, « Lucky » me semble inspiré par le « Red » de King Crimson, même s’il est juste pleurnichard quand le disque de la chose à Fripp suintait le tragique et le désespéré. Les deux titres les plus révérés m’ont toujours gavé, que ce soit le patchwork « Paranoid android » (du folk, du bruitisme, du chant grégorien, etc, etc …, me fait penser au fuckin’ prog ce machin …), et la ballade qui s’énerve sur la fin comme il y en a des milliards de « Karma Police ». J’ai aussi beaucoup de mal avec cette sorte de heavy metal qu’est « Electioneering », et avec la bouillasse free-rock sans intérêt de « Climbing up the walls ».
Le reste, je suis preneur. Avec mention particulière pour « No surprises » la comptine mélodique simple mais efficace, « Exit music for a film », qui réveille le fantôme de l’excellent Jeff Buckley, pour une fois bien chantée (comme quoi il en est capable, mais pourquoi diable alors ces sempiternels funestes gémissements ?) par Yorke, et la pop-rock de « Let down », sorte de « Ruby Tuesday » des années 90.
Au vu et surtout à l’entendu de ce qu’ils ont fait par la suite (curieusement, j’ai toujours apprécié un de leurs plus ignorés, le politisé « Hail to the thief »), il semble aussi que les Radiohead aient voulu conclure avec « OK Computer » un cycle de leur carrière, s’acheminant de façon de plus en plus kamikaze vers l’électronique envisagée par eux de façon quasi lugubre. Rien que pour ça, ce pied de nez à tous les schémas de rentabilité immédiate, ils auront gagné ma miséricorde …

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