U2, le retour ...
Après une décennie (très) bien commencée
(« Achtung baby »), qui avait viré à la déception
(« Zooropa »), avant de sombrer dans le ridicule (« Pop »),
les U2 dont hormis les fans (quelques millions around the world tout de même),
plus personne de sensé n’attendait quoi que soit, et surtout quelque chose de
bon, se pointent pour inaugurer le nouveau siècle avec un disque, comment dire,
très bon …
Parce qu’à force de les voir donner dans le Barnum
scénique, d’expérimenter malheureusement techno et electro, d’être obligé de
supporter le nobelisable Bono et ses marottes de chef d’Etat, de voir les
quatre prendre le melon et se ringardiser grave, on avait oublié un certain
nombre de choses, essentielles dès lors qu’il s’agit de musique en général, et
de U2 en particulier.
Un, les U2 sont un groupe, un vrai. Des potes depuis
toujours, et qui malgré les trillions de dollars amassés, sont ensemble depuis
le début, et n’ont pas besoin d’une armée d’avocats pour communiquer entre eux
(pourquoi vous toussez, Mick et Keith ?)
Deux, les U2 en ont fait la démonstration depuis le
début des 80’s, ils sont capables d’écrire de bonnes chansons, dont la qualité
ne doit rien au hasard ou à l’accident heureux.
Trois, Bono est un sacré putain de bon chanteur,
l’Edge est un guitariste instantanément reconnaissable (et ils sont pas
nombreux dans ce cas, les joueurs de six-cordes originaux), Mullen et Clayton
savent tenir les fondations musicales du groupe.
Quatre, les U2 ne sont jamais aussi bons que quand
ils font du U2.
Coup de bol ce « All that you can’t leave
behind » nous montre des U2 remisant au placard tout effet démonstratif et
présentant un disque simple, basique, limite austère. Même si on est très loin
du son d’un garage band (Eno, Lanois et Lillywhite aux manettes, ne sont pas vraiment
les premiers venus, plutôt des habitués de longue date). Et malgré un budget de
production que l’on devine illimité, point de surenchère, le groupe la joue
profil bas, pas d’orchestre classique ou de fanfare mariachi en guest, tout du
long du disque, c’est eux quatre et c’est tout. La photo de pochette (Anton
Corbjin, lui aussi un habitué des Irlandais) nous le montre le groupe quelque
peu perdu dans une aérogare impersonnelle (Roissy ?). C’est sûr, les U2 se
sont posé des questions, et ont décidé d’enrayer cette fuite en avant
perpétuelle qui les menait droit dans le mur artistique. Et donc les U2
reviennent à leurs fondamentaux, ceux qui leur avaient si bien réussi entre
« War » et « Achtung Baby ».
La doublette inaugurale (« Beautiful day »
et « Stuck in a moment … ») ne laisse guère d’ambiguïté sur ce qu’ils
vont nous proposer et les deux titres deviennent instantanément des classiques
du groupe, comme également « Walk on ». Et si tout ce qui suit sonne
très années 80, on sent le groupe mature, qui ne va pas s’auto parodier. C’est
dans l’esprit de …, mais pas du copier-coller. Inutile donc de chercher dans ce
disque quelque hymne à la « Sunday bloody Sunday »,
« Pride », « New year’s Day », ce genre de poses héroïques
appartiennent définitivement au passé. Mais, car on ne se refait pas du jour au
lendemain, les thèmes « engagés » du groupe sont là, témoin
« Walk on », dédié à la militante Birmane Aung San Suu Kyi, bien
avant qu’elle soit « à la mode ». Côté émotion, on a droit à la
ballade « Kite », qui même si elle ne lui est pas spécifiquement
destinée, sera dédicacée lors des concerts au père de Bono, mort peu après la
sortie du disque. Autres réussites, la très pop et mélodique « Wild
honey », et la très « Joshua Tree », très américaine donc,
« New York ». Un peu à part, « Elevation », dans laquelle
les U2 font s’entrechoquer le riff de guitare le plus sale et garage du disque
(dérivé de celui de « Louie Louie »), avec des sons de machines
réminiscents de leurs précédentes parutions.
Deux-trois titres me semblent un peu en-dessous,
« In a little while » assez anecdotique, « Peace on
Earth », qui rien que par son titre fait craindre à un John « Imagine » Lennon revival, et c’est bien de cela qu’il s’agit, sauf que le
morceau de U2 ne vaut pas tripette ; rayon dispensable également, la
dernière ballade « Grace », avec son léger crescendo emphatique,
tente de reprendre les choses là où « With or without you » ou
« One » les avaient laissées, sans toutefois y parvenir…
Au final, on se retrouve avec les trois-quarts du Cd
d’un excellent niveau, par des quadras qui s’assument, qui ne cherchent pas à
jouer la carte de leur propre revival, mais qui s’inspirent de ce qu’ils ont
produit de meilleur. A ce jour, « All that you can’t leave behind »
est le dernier grand disque en date de U2.
Des mêmes sur ce blog :
War
Achtung Baby
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