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JANE'S ADDICTION - RITUAL DE LO HABITUAL (1990)

Casser les codes ...

Jane’s Addiction, c’est une de ces références que l’on s’échange sous le manteau. Pas vraiment underground (2 millions de copies de ce « Ritual … » dépotées rien qu’aux States), mais suffisamment borderline pour faire fuir l’amateur de binaire lambda. Une existence et une discographie erratiques (le groupe n’a fait paraître que deux albums studio à ses débuts), des retrouvailles épisodiques sous haute tension, bref une entité qui passe à côté de toute logique mercantile et commerciale, de tout plan de carrière… Même si tous les festivals « indépendants » du monde plus ou moins libre découlent du Lollapalooza initié au début des 90’s par Perry Farell, le frontman de Jane’s Addiction …
Dites-le avec des fleurs, Jane's Addiction 1990
Jane’s Addiction, c’est l’accouplement du hard zeppelinien des 70’s avec la génération indie. Un crossroad, avec le diabolique pacte faustien pour les guider. Arrivée trop tôt ou trop tard selon les humeurs, la musique de Jane’s Addiction est une sorte de totem, un pont entre les générations. Non pas que ces types aient inventé quoi que ce soit (il y a bien longtemps que dans les années 90 tout avait déjà dit et redit), mais leur approche est apparue et est restée assez unique et originale. Personne ne veut des Jane’s Addiction, ne les cite comme référence. Et surtout pas ceux qui les ont copiés, imités, plagiés (rayer les mentions inutiles …). En premier lieu les Red Hot Chili Machin. Des copains paraît-il. Des copains bien plus riches aujourd’hui certes. Mais qui n’ont jamais fait aussi bien que « Stop ! » et « No one’s leaving » qui ouvrent « Ritual … », les deux titres engloutissant hard, rap et funk dans leur folle sarabande. Et si les Jane’s Addiction n’étaient pas particulièrement discrets niveau look, souvent vêtus des fonds de tiroir de leurs grand-mères, ils ne se sont jamais ridiculisés à plastronner en tongs et bermudas qui sont depuis leurs débuts la tenue officielle des RHCP et les décrédibilisent à jamais …
Jane’s Addiction, c’est surtout Farell et Navarro, certes. Que l’on me permette de citer Stephen Perkins et Chris Chaney qui constituent une section rythmique malléable, capable de tout jouer. Car même s’ils sont considérés comme un groupe de hard, Jane’s Addiction, c’est beaucoup plus que ça, ils ne se cantonnent pas à deux titres, un lent et un rapide, joués jusqu’à la nausée. Chez eux, ça swingue, ça chaloupe, ça funke, ça passe du coq à l’âne, ça déchire sa race … On trouve toujours un OVNI dans leurs rondelles. Sur celle-ci, il s’appelle « Of course », et on dirait avec quelques années d’avance (le rythme oriental, le violon omniprésent, la mélodie zigzagante, …) ce que feront Page et Page lorsqu’ils se « réuniront » pour « No quarter ».
Farell, Chaney, Perkins & Navarro : Jane's Addiction
Tiens, et puisque le nom du dirigeable est quasiment lâché, autant signaler que Jane’s Addiction est de tous ceux qui se sont inspirés de Led Zep, ceux qui s’en sont le mieux approchés. A cause de Navarro d’abord. Sur lequel l’influence de Page est évidente, et pas seulement sur le look (l’air ténébreux et la même tignasse noire que le Jimmy de la fin des 60’s). Navarro tire vers la stratosphère tous les titres avec ses extraordinaires parties de guitare (énormissime sur « Ain’t right », le titre le plus speed du disque). Ce type plutôt très mal dans sa peau (il a de quoi, sa mère a été tuée sous ses yeux) est sans conteste et de loin le guitar hero des 90’s.
Les Jane’s Addiction sont capables de partir dans des directions improbables, dans des expériences qu’en d’autres temps on aurait qualifiées « d’acides ». Témoins les deux titres au cœur du disque, qui flirtent avec les dix minutes, « Three days » et « Then she did … ». Le premier est même l’inspiration de la pochette (bien évidemment censurée dans la puritaine Amérique), et raconte une « expérience » vécue par Farell avec deux femmes dans une orgie de sexe et de drogue qui dura trois jours. Débuté lent et acoustique, le morceau vire à la débauche électrique sous l’impulsion de Navarro qui tronçonne des riffs métalliques ahurissants de puissance. « Then she did … » c’est le titre zeppelinien par excellence (« The Rover » sur « Physical Graffiti » semble le modèle évident) avec vers la fin sa partie de piano au second plan qui renvoie à celles de Mike Garson chez Bowie époque « Alladin Sane ».

Deux titres ont poussé le disque vers le succès commercial « Stop ! » et surtout « Been caught stealing », groove machine avec aboiements de chien en intro et titre le plus connu et emblématique du groupe. Manière d’être exhaustif, il convient de citer « Obvious » avec ses arrangements de synthé et ses faux airs à la U2 (sous amphétamines) dans le genre hymne psalmodié de stadium rock. Enfin, « Classic girl » qui clôt la rondelle est une ballade vénéneuse, parasitée par un final plein de breaks et d’accélérations…
Les Jane’s Addiction auraient pu, auraient du devenir énormes. Les quatre types ont cessé d’émettre collectivement quelques mois après la sortie de « Ritual … ». Deux personnalités écrasantes (Farell l’atypique chanteur de hard, et Navarro l’introverti) ça faisait déjà beaucoup d’egos surdimensionnés au mètre carré. Une consommation effrénée de drogues (on parle pas là d’un petit pétard le samedi soir, mais de dépendance féroce à l’héroïne) ont accéléré la débâcle forcément prévisible dans le contexte.
Même s’ils se retrouveront des années plus tard (Strays » en 2003), rangés plus ou moins des poudres blanches, ce sera sans la magie qui habitait « Ritual de lo habitual ».

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INSECURE MEN - INSECURE MEN (2018)

Rebirth of cool ?

Même s’il s’agit d’un premier disque, la matrice des Insecure Men, la paire Saul Adamczewski (guitariste) et  Lias Saoudi (chanteur) commence à être bien connue de ceux qui prennent la peine de lire les notes de pochette … ben ouais, y’a pas de notes de pochette quand on écoute Deezer ou un mp3, z’avez qu’à les acheter les skeuds, ça peut vous rendre sinon intelligents, du moins un peu plus cultivés, et je dis pas ça pour faire gagner de la thune aux maisons de disques, rien à foutre …
Romans Hopcraft et Adamczewski, du boulot pour les dentistes ...
Bon, Adamczewski et Saoudi, c’est les deux zozos plus ou moins leaders des very surestimés Fat White Family, mais aussi ceux que l’on retrouve sur le projet (sans lendemain ?) Moonlandingz, rondelle sortie l’année dernière et dont je dis le plus grand bien quelque part sur ce blog, z’avez qu’à chercher, j’ai la flemme de foutre un lien … Même si pour les Insecure Men dont il est question ici, la paire décisive c’est Adamczewski (‘tain, il pouvait pas s’appeler Page ou Beck ou Young, comme tout le monde …) et un pote à lui Ben Romans Hopcraft, entourés de toute une raya de dépenaillés électriques (treize !! d’après les notes, encore elles, de pochette) parmi lesquels figure Sean Lennon (oui, le fils de son père) qui produit la rondelle.
Et ça ressemble à quoi, le bruit que font les Insecure Men ? Pas facile à décrire, y’a plein de choses a priori hétéroclites et disparates qui agissent sur le cerveau telles les proverbiales madeleines du Marcel en ce qui concerne l’habillage sonore. Point commun à tous les titres, ils sont écrits et produits à l’ancienne, avec une intro, une mélodie, des couplets, un refrain qui arrive pile poil quand on l’attend, des breaks bienvenus et malins, toute cette sorte de chose qui sont autant d’énigmes insolubles pour … plein de gens qui sortent des disques aujourd’hui.
La dominante c’est une ambiance cool, peinarde (pour la musique, les textes semblant un peu plus, heu … clivants, comme souvent chez cette bande d’énergumènes, mais qui cependant semblent sur ce coup-ci avoir mis quand même pas mal de flotte dans leur piquette nationaliste rance un peu trop voyante chez la Fat White Family). Les rares embardées électriques, comme « Mekong glitter » (effectivement glitter avec ses riffs martiaux qui soulignent la mélodie pop, et sa trame rythmique siamoise de celle de « We will rock you » de Queen), sautent immédiatement à l’oreille. Alors qu’à l’opposé le talking blues sur fond de piano bar jazzy de « Ulster » donne envie de piquer un petit roupillon tellement ce genre de machins soporifiques a été commis des milliards de fois par des types plus doués (le Tom Waits des débuts s’il ne fallait en citer qu’un), alors qu’il suffit de pas grand-chose dans un registre très similaire pour que ça fonctionne (« Cliff has left the building »).
Insecure Men live (et pas Jamiroquai)
C’est quand ils s’adonnent à une pop à synthés voyants sans être vulgaires (exercice délicat) que les Insecure Men sont les meilleurs. Ça tombe bien, c’est l’essentiel du disque, et dans un genre pourtant plutôt rebattu depuis plus de trente piges, ils réussissent à capter l’attention. Que ce soit  dans la langueur de l’inaugurale ballade « Subaru nights », dans la terminale « Whitney Houston & I » (hommage tellement narquois qu’on ne sait plus si c’est de l’art ou du cochon) qui donne envie de se servir une autre bière juste pour le plaisir de chialer dedans, le groupe évolue dans un genre qu’il maîtrise à la perfection. On pense à l’esprit des Stranglers de « Feline » assez souvent, parfois à celui des Cars (« Teenage toy ») tant les ficelles sont grosses (mais bien utilisées d’une façon quasi chirurgicale), les chœurs féminins (en plus d’être treize, il y a sur quelques titres une chorale féminine) et le sax de « All women love me » renvoient à Roxy Music ou au Bryan Ferry en solo des 80’s (ce qui on en conviendra est blanc bonnet et bonnet blanc). Même si le rythme s’énerve (« I don’t wanna dance ») avec un chant maniéré, la merveille de la mélodie et les arrangements subtils font passer la sauce, les cuivres sont parfois de sortie (« The saddest men … ») et alors on dirait un inédit du 3ème Velvet en version rythmn’n’blues.
Même s’il y a des fois où ça coince (« Heathrow » fait penser aux pénibles titres du Clash tartinés par Mick Jones sur « Sandinista ! »), les Insecure Men ont sorti un disque qui s’il ne révolutionnera certes pas le binaire électrique, est plutôt plus réussi que la plupart des rondelles contemporaines. A preuve le titre bonus rajouté sur la version Cd (« Buried in the bleak ») qui ne fait pas comme c’est bien trop souvent le cas remplissage miséreux ou blague en roue libre qu’on rajoute parce qu’il  reste de la place sur la rondelle argentée …
A noter que les Insecure Men sont signés par le label Fat Possum, que l’on connaissait plus comme maison de retraite de bluesmen de seconde zone que comme repaire de revivalistes 80’s…



BEECHWOOD - SONGS FROM THE LAND OF NOD (2018)

East - West ...

Selon la Bible, la Terre de Nod est située à l’Est d’Eden. Je vois à votre mine ébahie que vous savez pas ou est l’Eden, alors ce qu’il y a à l’Est, hein … Remarquez, j’en sais pas plus que vous, je lis pas l’Ancien Testament tous les matins. Ce que je sais, c’est que les Beechwood sont de New-York, donc de l’Est des Etats-Unis. Mais qu’ils sont aussi un peu à l’Ouest. Mais non, pas de Los Angeles ou San Francisco, à l’Ouest quoi, autrement dit ailleurs … Vous pigez ? Pff, c’est bon, laissez tomber …

Heureusement, maintenant que le vinyle revient à la mode, on fait des pochettes qui parlent, qui en disent parfois plus long qu’un discours vaseux. Et que voit-on, sur celle de « Songs from the Land of Nod » ? Trois gugusses qui prennent la pose sur un trottoir, au ras du caniveau, attifés comme des New York Dolls version Emmaüs. Le grand blond en rouge et noir (no Jeanne Mas fan) se fait appeler Gordon Lawrence, c’est lui qui écrit tous les titres et joue de la guitare, en se prenant pour Johnny Thunders, Tom Verlaine ou Lou Reed (au hasard - enfin, non, pas au hasard - trois newyorkais). Le métèque à l’Ouest, enfin, à gauche, c’est son pote batteur, plus tatoué qu’une Amy Winehouse qui serait devenue centenaire. Au milieu, le bassiste prétend se prénommer Sid, ça vous pose un bassiste, n’est-ce pas …
Ces trois déglingués par une vie sociale ricaine apparemment pas faite pour eux, sortent donc un disque aussi bordélique que leurs références et que leur parcours dans la vie, si l’on en croit une bio (plus vraie que nature ?), sorte de chanson de geste du zonard post X Generation.
L'art de se faire remarquer vestimentairement
Leur musique leur ressemble, débraillée, dépenaillée, mais pas honteuse, s’assumant et assumant ses influences. Le Velvet et sa multiple descendance, les Dolls et les Heartbreakers de Thunders, les punks, le rock garage, et les drogues qui aident à faire la musique pour des gens qui aiment à écouter cette musique en prenant des drogues (merci Spiritualized). Autrement dit, avec les Beechwood, on avance au moins d’une demi-décennie par rapport au gros de la production actuelle, faite par des types au calendrier spatio-temporel bloqué entre 65 et 68.
Il y a chez les Beechwood des éjaculation punk (« Melting over you »), louchant parfois vers le côté Ramones de la chose (« This time around »). On sent que parfois, ils aimeraient aller encore plus loin, taquiner les winners des années 2000, las, leur « All for naught », pourtant point trop mauvais, fait penser à du Strokes sous Lexomil.
Des fois, ils se prennent les pieds dans le tapis persan (« Land of Nod », musique mystique pour fumeurs de crack avec ses déconstructions brinquebalantes). Logiquement et comme souvent quand on est pas très sûr de son coup, on met tous ces titres un peu mal accouchés vers la fin du skeud, et les meilleurs d’entrée.

Et force est de reconnaître que se « Songs from the Land of Nod » commence plutôt bien. « Ain’t gonna last all night » est déglinguée juste ce qu’il faut , « I don’t wanna be the one you love », téléporte les New Yorks Dolls dans notre siècle (oui, je sais, les vrais ou ceux des vrais qui sont pas encore morts y sévissent déjà). Pour moi, trois titres surnagent du lot. Une reprise garage punk foutraque la tête dans le sac à vomi du « I’m not like everybody else » des Kinks, montre que ces trois zozos connaissent aussi leurs classiques d’Outre Atlantique.
Mais les deux cerises sur cette galette sont deux morceaux très typés Velvet Underground. « Heroin honey » d’abord. Mettre « heroin » dans un titre de chanson suffit à situer la référence, même si musicalement on est assez loin de ce qu’à pu produire Lou Reed. Et puis, il y a un extraordinaire morceau, « C/F », ballade vénéneuse comme en a chanté Nico sur l’album à la banane, avec une guitare slide qui remplace le violon de John Cale tout en étant aussi grinçante. Et là, c’est toute la famille qui arrive en filigrane et en rangs serrés, tous les Mazzy Star et autres Jesus & Mary Chain. « C/F » est malgré ses références évidentes un titre rare, précieux, comme on n’en écrit pas beaucoup dans sa vie …
Les Beechwood, qui mettent en avant une philosophie de je m’en foutistes déglingués ont fait un disque à leur image, je m’en foutiste et déglingué. Un disque à l’Ouest,  … ou à l’Est … un disque du pays de Nod, quoi …



KING GIZZARD & THE LIZARD WIZARD - POLYGONDWANALAND (2017)

Du prog écoutable ?

King Gizzard Etc … est un groupe totalement à part, donnant une couleur musicale différente à chacun de ses disques. Et des disques, ô bonne mère, ils arrêtent pas d’en sortir. Le groupe (ils sont sept quand même, ça fait des bouches à nourrir, ceci explique peut-être cela, quoi que …) depuis ses débuts discographiques en 2011 a sorti quatorze, oui quatorze Cds. Avec comme objectif annoncé d’en faire paraître la bagatelle de cinq en 2017. Et vous savez quoi, ils y sont arrivés (limite, le dernier est sorti le 31 décembre).
Famille nombreuse, famille heureuse ?
Evidemment, pareil stakhanovisme ne doit pas faire rire la maison de disques. C’est pourquoi ils ont décidé de faire sans. Encore plus forts que Radiohead qui avait initié le truc avec « In rainbows », les King Machin ont foutu les morceaux de ce « Polygondwanaland » direct gratuitement sur Internet. Mais là où les tristes sires de Radiohead demandaient une facultative participation financière et avaient quelques semaines plus tard sorti le Cd physique, les King Gésier mettent leurs titres en version flac (le meilleur format audio sans aucune déperdition par rapport à la source originale), y joignent les visuels en images haute définition, et donnent en plus à tous les téléchargeurs la licence de distribution. Résultat des courses, des dizaines de petits labels, certains créés pour l’occasion, sortent des éditions à petit tirage dans les formats les plus improbables (vinyles colorés, transparents, Cds gatefold, cassettes audio) de ce « Polygondwanaland ». Leur maison de disques, si tant est qu’ils en aient encore une, a dû vachement apprécier. Mais les King Truc s’en foutent …
Bon, ils ont beau être doués ces zozos (presque tous sont multi instrumentistes, et des instruments que vous risquez pas de trouver dans le Leclerc du coin, genre glass marimba, mais késako ?), on sort pas une soixantaine de titres dans une année sans qu’il y ait quelques déchets …
Surtout que là, avec « Polygondwanaland », ils versent dans le côté obscur de la farce, ils donnent dans le prog. Et le prog de chez prog, celui des seventies. Mais comme cette horde australienne est composée de gens de goût, ils ne s’abaissent tout de même pas à recréer les daubes à la Yes ou Genesis. Ils regardent plutôt du côté du kraut, ou alors des groupes évoluant plutôt à la marge du genre, genre le Floyd, Crimson, Magma … Bon, forcément, y’a pas de quoi s’agenouiller et crier au génie devant tous les titres, quelques-uns peuvent être laissés de côté, comme « The castle in the air » (se sont pas trop foulés sur celui-là, on dirait bien qu’ils ont samplé le son du vieux jeu d’arcade « Space Invaders »), ou le bordélique et ultime « The fourth colour » qui semble un collage de tous les trucs qu’ils avaient pas réussi à caser sur les morceaux précédents.
King Gizzard & The Lizard Wizard live
Le reste se laisse écouter, à condition d’aimer les ambiances sonores chaloupées orientales, et la flûte (tel un Ian Anderson des Antipodes, Stu McKenzie, le leader du groupe, en fout un peu trop partout). Si l’on n’est pas allergique au schémas rythmiques des premiers Peter Gabriel en solo, on appréciera « Searching … », si l’on n’est pas réfractaire au King Crimson des 80’s on trouvera « Tetrachromacy » plutôt intéressant. Même si ces titres font un peu remplissage, sont moins travaillés et élaborés que les autres.
Je sais pas comment ils font (et je m’en tape) mais les King Bidule sortent des disques finis, même si c’est à une cadence infernale, ça sonne pas du tout maquette approximative, y’a du boulot sérieux sur le son et les arrangements. Et ils réussissent à accoucher de choses intéressantes, voire plus. Rayon réussites, « Deserted dunes … », avec son pilonnage martial et répétitif, évoquera au choix Magma (pour les fans de prog) ou les Thee Oh Sees (auxquels les King Chose semblent vouer un véritable culte). « Inner cell » planerie mélodique orientalisante, pourrait être un morceau de chevet pour Robert Plant. Et puis il y a dans ce « Polygondwanaland » une merveille absolue. Elle dure plus de dix minutes, est placée au début du disque et s’appelle « Crumbling Castle ». Derrière un fracas de batteries rythmant une tournerie garage psyché, ce titre revisite (clin d’œil au énième degré ?) tous les tics du prog seventies, enchaînant sous des synthés sifflants ponts et breaks tarabiscotés en tous genres, des accélérations  dévastatrices avant un final tout en saturation barbouillée. De telles cavalcades ne s’écrivent pas par hasard, faut du talent pour pondre des trucs comme ça sans donner l’impression de se prendre le melon et de laisser transparaître une vanité prétentieuse satisfaite.
Mais bon, faudrait qu’ils se calment un peu les King Gizzard, parce qu’on va finir par avoir du mal à suivre leur folle cadence …


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NIRVANA - NEVERMIND (1991)

L'enfer, c'est les autres ...

10 Septembre 1991. Un single, « Smells like Teen Spirit », d’un obscur groupe bruyant de Seattle, Nirvana, sort dans l’indifférence générale. Deux semaines plus tard, paraît l’album « Nevermind », dans une indifférence tout aussi générale.
Quelques mois plus tard, presque tous les titres de ce disque, dont bien évidemment « Smells like Teen Spirit », passent quasiment en boucle sur tous les médias de diffusion, « Nevermind » s’est vendu par millions, le monde entier découvre le grunge, et des millions d’ados la tête dans le sac et l’esprit désabusé, se sont trouvé une rock-star iconique, le chanteur-compositeur de Nirvana, Kurt Cobain …
Ce conte de fées, version cheveux gras et Fender Jaguar, tous ceux qui ont eu un jour l’occasion de sortir un skeud avec leur nom écrit dessus en ont rêvé. Tous sauf Cobain … on connaît la suite et la fin …

Un triomphe totalement improbable en provenance des USA, colonisés en ce début des années 90 par le rap sous toutes ses formes et la musique middle of the road. A l’ombre desquels quelques zozos « différents », rêvant de rocks énergiques sur fond de guitares stridentes essayent de tracer leur route, réfugiés sur des labels aussi motivés que fauchés. Un des plus courus est Sub Pop, basé à Seattle. La tête d’affiche de Sub Pop est Mudhoney, dont quelques rares types s’échangent le nom sous le manteau. Et dans cette ruche électrique, on trouve Nirvana qui en plus de quelques singles, a même sorti un album « Bleach », encensé par les huit fans du groupe et ignoré par le reste de l’humanité. Rétrospectivement, « Bleach » se verra qualifié de brouillon génial, ce qui est quand même pousser le bouchon un peu loin pour cette bouillasse sonore bruyante et bâclée.
« Bleach » participe avec les autres parutions de Sub Pop d’un effet de bouche à oreille qui finit par intéresser les majors. Il existerait au Nord de la Côte Ouest, autour de Seattle, la brumeuse et pluvieuse cité qui a vu naître Jimi Hendrix, toute une scène énervée balançant son indolence rageuse sur fond de guitares saturées. Toutes les majors veulent un groupe de cette scène, et si possible celui qui va devenir célèbre, surclasser ses concurrents et collègues dans cette mouvance que l’on qualifie de grunge (un mot qui ne veut rien dire, dérivé de l’argot « grungy » que l’on peut traduite par sale, craspec, un truc de ce genre …). Sur les conseils de Kim Gordon, bassiste de Sonic Youth (qui sait ce qu’est la musique bruyante et dissonante), David Geffen (qui sait ce qu’est faire du pognon avec de la musique, lui qui a signé par le passé les Eagles et Guns N’Roses) pose un contrat devant le museau des types de Nirvana.
Et Cobain, parce que Nirvana c’est Cobain, accepte le deal. Il a de nouvelles compos, un nouveau batteur, un certain Dave Grohl, et le vieux poteau Chris Novoselic fera l’affaire à la basse. Ah oui, je vous ai pas dit, Nirvana est un trio. Pas un power trio à la technique superfétatoire, genre Cream ou Experience, non, juste trois types qui envoient la sauce avec leurs moyens sans trop se soucier de comment sonnera le résultat … Un studio est réquisitionné en Californie, un producteur pas très couru, Butch Vig (qui vient de bosser sur une rondelle des à peu près inconnus Smashing Pumpkins) dépêché aux manettes. Souci, Cobain n’aime pas le son que Vig met en place. Palabres et médiation de Geffen, le mixage sera assuré par Andy Wallace, habitué des sessions des trashers crétins de Slayer, la production restant confiée à Butch Vig. Depuis, des milliards de types nous refont le coup de « Raw Power » (mix de Bowie ou d’Iggy, choisissez votre camp), que « Nevermind » est surproduit, avec un rendu commercial, bla bla bla … Que je sache, il n’existe qu’une version de « Nevermind » donc tout ce baratin, c’est juste pour strictement rien. Et puis, jeunes ( ? ) puristes ( ?? ), sachez que si à moment donné le type qui fait le disque a l’imagination aussi sèche qu’un vagin de centenaire (pas la peine de téléphoner à Marlene Schiappa, j’assume mes vannes pourries rétrogrades et machistes), tu peux foutre à la console les fantômes de George Martin, Phil Spector, Lee Perry et Rick Rubin (je sais, ils sont pas tous morts, faites chier avec vos remarques à la con), tu te retrouveras avec une daube au final …

Cobain a écrit seul tous les titres de « Nevermind », acceptant juste des participations minimes sur deux morceaux. Rien ne prédispose ce type ténébreux, asocial et mutique, à donner dans le radio friendly. Même si tout gosse il reprenait Led Zep, ses héros depuis l’adolescence sont les Pixies, Sonic Youth, Husker Du, pour les plus connus, et tout un tas de seconds couteaux du rayon punk hardcore. Plus deux bizarreries assez confidentielles, les Meat Puppets (indé éparpillé passant du coq à l’âne) et les Young Marble Giants (anglais minimalistes). Et Cobain n’a rien à foutre du succès et du star system, ce serait plutôt un puriste du « do it yourself » cher au punk originel.
« Nevermind » repose sur une technique d’écriture qui a fait ses preuves, l’alternance quiet/loud, technique portée à son pinacle par les Pixies. La mélodie et la douceur de la voix sur les couplets, l’explosion hurlée sur le refrain. La majorité des titres de « Nevermind » suivent ce concept à la lettre. Cobain a les mélodies (ouais, Nirvana, c’est pas seulement une sorte de boucan vaguement hardos, écoutez le « Unplugged », et vous vous rendez compte que là, ces titres à poil, sans le moindre artifice ni gimmick, sont naturellement bien foutus, bien écrits) et la voix rauque qui poussée dans ses derniers retranchements ou hurlements, traduit toute la misère qui repose sur ses épaules. Parce que les thématiques sont pas exactement joyeuses, jetant à la face du monde que oui, dans le pays magique des Etats-Unis, y’a pas que des blackos qui font du rap qui sont laissés de côté, il y a aussi toute une jeunesse blanche qui se trouve en totale déconnection avec le modèle social que le monde entier est censé envier et dupliquer. Cette génération que les sociologues auront vite fait de qualifier de X Generation, s’est trouvé un son et un héros.
Même s’il est facile et réducteur de qualifier Nirvana de types arrivés au bon endroit au bon moment. Ce serait oublier que contrairement aux utopies hippies, jamais la musique n’a changé le cours du Monde. Ceux qui se sont retrouvés en haut de l’affiche étaient peut-être plus malins que des collègues moins chanceux, mais parfois aussi ils avaient du talent, et plutôt que de surfer sur l’air du temps, ils contribuaient à le définir. C’est à mon sens ce dont il s’agit avec Nirvana.
Cobain et sa bande auraient pu être les U2 d’une génération dépenaillée, les Sex Pistols d’une nouvelle jeunesse de taudis humains, des Pink Floyd énervés pour minots désabusés. Ils se sont contentés d’être eux-mêmes. « Nevermind » s’appuie sur des morceaux imparables, tellement simples que tout un tas de types ont dû se demander mais putain, pourquoi j’y avais pas pensé. Novateurs dans le ton et l’esprit, mais pile aux confluences du rock, du punk, du hardcore, de la pop.

Il suffit d’écouter les imparables et archi connus « Smells like Teen Spirit », « In bloom », « Come as you are », « Lithium », « Drain you », « Stay away », tous construits sur le quiet/loud. Ils sont l’ossature du disque, de la chair à bande FM et MTV sans que ces considérations commerciales aient seulement été envisagées par Cobain. Le versant fan de punk hardcore de Cobain est représenté par « Breed » ou « Territorial pissings », tempo frénétique, grattes hurlantes et toujours ces lignes mélodiques absentes chez les cadors du genre, genre Bad Brains ou Dead Kennedys, et ne parlons des énervés et énervants de la chapelle hard …
Et puis il y a la façon de jouer ces titres. Cobain double ses guitares, lâchant ses riffs au-dessus des parties rythmiques, sans se laisser à la démonstration (il n’en est pas capable, n’est pas un guitar hero et ne veut surtout pas en être un, voir son solo « étrange » sur « In bloom »). Mais le plus impressionnant sur « Nevermind », c’est pas lui, c’est ce nouveau batteur inconnu Dave Grohl. Tout repose sur ses baguettes, ce type booste tous les morceaux, obligeant les autres à suivre, il crée une dynamique qui fait immédiatement penser aux macchabées Bonham et Moon.
Avec « Nevermind », on a affaire à un des derniers grands disques « à l’ancienne » pensé comme un 33T. Témoins les deux ballades acoustiques, « Polly » et « Something in the way » (avec même un violoncelle sur cette dernière), placés respectivement en sixième et dernière position sur le Cd. Elles concluent bien évidemment chaque face de l’édition vinyle. A noter que sur le Cd original, il y a un titre caché après un long silence, tout en hurlements et stridences, incongru dans le contexte, mais annonciateur du terrorisme sonore que Cobain allait mettre en place pour le successeur de « Nevermind », le très rêche « In Utero ».
Comme disait Neil Young, un adorateur de Nirvana (la réciproque était également vraie) : « Hey Hey My My, Rock’n’roll never die » …



MATTIEL - MATTIEL (2017)

Brown, his name is Brown ...
Comme l’autre, le Jaaames … et comme lui quelques fois, elle a enregistré à ce disque Atlanta, Géorgie … Et … c’est tout, les similitudes avec le Godfather s’arrêtent là …
Mais par contre, si vous voulez secouer la boîte à souvenirs, elle se pose un peu là, la Mattiel, puisque c’est son prénom qu’elle a choisi comme nom de scène. Apparemment, c’est sa première rondelle, y’a pas de livret et des infos aussi rares que les vols d’autruches au Groenland dans le digipack. Juste une page Facebook entretenue par quelque geek qui poste des trucs sans intérêt tous les quarts d’heure. Seule issue possible : tu mets le freesbee dans le tiroir, t’appuies sur « Play » et tu te démerdes …

Et au bout d’à peine plus une demi-heure, tu restes un peu tourneboulé par ce que tu viens d’entendre. Douze titres et rien à jeter … les grincheux diront que le dernier titre (« Ready to think »), avec sa voix parlée et ses synthés trop en avant n’est pas génial. OK, je vous l’accorde, mais on en connaît beaucoup qui s’en contenteraient et bomberaient le torse s’ils étaient capables de foutre un morceau de ce calibre sur leurs rondelles.
Parce que les autres … on voit pas très bien parmi les jeunes « génies » (rires) de la pop-rock-machin-truc, ni d’ailleurs parmi les plus anciens qui peut espérer ce niveau.
D’abord, Mattiel, c’est une présence vocale mixée très en avant qui transperce les enceintes. Une shouteuse blanche, toujours à fond, ou alors encore plus à fond. Dont la façon d’interpréter renvoie assez fréquemment à Aretha Franklin. Et puis quand elle gueule pas, on pense irrémédiablement à la rétamée Amy Winehouse, ces feulements soul tout en retenue, en présence, au feeling … Impressionnant…
Et c’est pas que de la technique vocale, Mattiel. Y’a de la chanson, derrière tout çà. De la chanson sixties évidemment, la décennie où l’on  a écrite les meilleures. Mais contrairement à tous ces djeunes qui se focalisent sur une période et un genre précis (des groupes de heavy psych, il s’en monte trois cent douzaines par jour, et sortis de leurs gros effets fuzz, que dalle …), la Mattiel survole toute la décennie, touchant à tout avec un égal bonheur.

Vous voulez de la Tamla Motown genre « Please Mr Postman » des Marvelettes ? Ecoutez « Baby Brother » et vous m’en direz des nouvelles, y’a tout, la rythmique chaloupée, les chœurs, les cuivres … Vous vous souvenez du « San Francisco » de Scott McKenzie (ou de Jojo H.), alors « Cass Tech » est pour vous. Vous vous souvenez des blues tribaux aux riffs sales des White Stripes avant qu’ils virent mariachi (oui, je sais, ils enregistraient pas dans les 60’s mais les recopiaient eux aussi intelligemment), « Send dit on over » ou « Fives and tens » sont ce qu’il vous faut. Vous aimez le style Otis Redding (le plein d’octaves et de décibels sous le capot, mais toujours en retenue classieuse), jetez les deux oreilles sur « Just a name ».
Non contente de sonner comme les légendes, la Mattiel se paye aussi le luxe de ridiculiser en un seul titre ceux et celles qui avant elle s’étaient adonnés au même genre d’exercice. Le premier titre, « Whites on their eyes », c’est de la PJ Harvey des deux premiers disques, quand elle enregistrait et chantait toutes tripes en avant … quand le tempo s’accélère façon dragster, genre punk mélodique d’il y a trente ans, c’est le fantôme des disparus Supergrass qui s’agite (« Bye bye »). Cette Mattiel, même si sa voix est beaucoup plus aigue, c’et la Winehouse de cette fin de décennie (« Not today », « Count your blessings »). Et on reste bouche bée à l’écoute de « Salty words », dans le Top Ten des meilleures chansons sixties sorties trop tard …

Disque de l’année … au moins …



JOSH RITTER - THE HISTORICAL CONQUESTS OF JOSH RITTER (2007)

A moitié conquis ...
De Josh Ritter, je ne sais quasiment rien. Singer-songwriter folkeux de la « nouvelle génération », la trentaine au moment de la rondelle dont au sujet de laquelle il est question. Encensé à ses débuts comme un génie en devenir, genre Ron Sexsmith ou Rufus Waingright, avant que ses laudateurs d’un jour passent à autre chose … Et ce disque acheté au hasard, sur la foi de quelques dithyrambes venus de sites ricains, parce que la notoriété du bonhomme a oublié, comme celle de nombre des ses congénères, de traverser l’océan …

« The historical conquests … » (et ne demandez pas pourquoi ce titre à la con, j’en sais rien) est bluffant d’entrée. Mais vraiment bluffant. Le premier titre (« To the dogs of whoever ») convoque instantanément le Dylan circa 65, que ce soit dans le rythme de la chanson, ou dans la voix, à s’y méprendre. C’est pas un décalque, parce que ça évolue en une sorte de gigue celtique qui fait penser à des Pogues au ralenti. En tout cas, effet garanti, ça capte l’attention.
Et ça continue. « Mind’s eyes », qui suit est plus que bien foutu, avec son gimmick de guitare-sirène à la « London calling » (le morceau) du Clash. Et pendant la première moitié du disque, rien  à jeter. Et pas grand-chose qui renvoie à un tristos égrenant sur sa gratte acoustique un pathos dégoulinant pour faire chialer dans sa bière. « Right moves », c’est du Supergrass avec une partie cuivrée (trompette ? trombone ?) à la Love (ou aux Pale Fountains, ce qui revient au même). C’est électrique, mélodique, entraînant, finement produit (le dénommé et inconnu pour moi Sam Kassirer).
Et ça continue, encore et encore. Quatrième morceau, le springsteenien par son titre (« The temptation of Adam »), semble en fait tout droit sorti d’un inédit de Nick Drake (l’épure mélodique parfaite). « Open doors », drivé par un gros shuffle emporte la chanson bien au-delà du folk à papa. « Rumors » est une petite tuerie pop.
Et puis, alors qu’on se dit qu’il va falloir faire un triomphe à cette rondelle et tresser une couronne de lauriers à son auteur, se pointe un court instrumental, genre bouton sur le pif de Miss France. On est prêt à pardonner ce qui pourrait passer pour une faute de goût mineure, un péché de jeunesse. Sauf qu’arrive pile poil derrière « Wait for love », un truc avachi entre folk et ragga hindou, qui te fait immédiatement réviser à la hausse l’œuvre pénible d’un Devendra Banhart. Impression dubitative renforcée avec « Real long distance » qui fait penser aux Kinks, mais gros hic, aux Kinks des années 80, avec mélodie tarabiscotée limite pénible et batterie herculéenne.
Le reste est à l’avenant, soupe à la grimace sonore. On voit bien où le Ritter veut en venir, piochant dans des références (bonnes, voire plus) pour les ressortir à sa sauce. Sauf qu’à force de faire des titres « à la façon de », tu te caches, oublies de montrer de quoi tu es vraiment capable, et l’ensemble finit par sonner comme une auberge espagnole musicale (« Next to the last romantic », comme si Johnny Cash reprenait du Creedence, ou le contraire, à quoi ça sert, sinon à montrer que tu es capable de sonner comme les deux…). Et là, ça défile dans le commun, voire le balourd, avec dans cette seconde partie du disque, le seul « Still beating » (classic folk, mais qui sonne « personnel ») à sauver.

Heureusement que le Ritter a la bonne idée de donner dans le concis (14 titres pour quarante minutes), sinon y’a des fois où on finirait par trouver le temps long … Etrange, cette construction symétrique (pour moi, lui doit pas envisager les choses de la même façon), où après un début sur les chapeaux de roues, on termine dans le bac à sable (l’inconsistant mantra folk « Wait for love » en point final).
Dans l’esprit « t’as vu comme je suis doué et malin, je peux tout jouer … », Josh Ritter me fait penser à Wilco. Sauf que dans Wilco il y a (en plus d’une cohorte de redoutables instrumentistes) Jeff Tweedy qui évite de se perdre dans les hommages trop voyants pour toujours rester au-dessus de ses influences. Et depuis dix ans, il me semble pas que la notoriété de Ritter soit en passe de rattraper celle de Kanye West …

Conclusion : si vous tombez sur cette rondelle pour pas cher, vous pouvez tenter le coup. Sinon, écoutez … autre chose.



KELLEY STOLTZ - QUE AURA (2017)

Un petit tour dans les années 80 ?
Quand elle passe à la télé, Chimène Badi porte un tee-shirt Led Zeppelin. Qu’en pensent Jimmy Page et Robert Plant ? Quand elle chante ( ? ), Carla Sarkozy reprend « Highway to hell ». Qu’en pensent Bon Scott et son petit Nicolas de mari ? Et le rapport avec Kelley Stoltz ?
Il n’y en a aucun … quoique … lui, il s’habille comme un Clapton qui aurait pas trouvé la boutique Armani, et il a autrefois repris un disque entier de Echo & the Bunnymen. Assez bizarrement, il est signé chez Castle Face Records, plutôt spécialiste des groupes revivalistes tendance sixties heavy psychédélique. Et ça, on peut pas vraiment dire que ce soit son truc, au Stoltz. Avec « Que aura », il a signé un des meilleurs disques des années 80 … sorti trente ans trop tard.
Kelley Stoltz
Y’a deux trucs, qui mieux que le carbone 14, permettent de reconnaître le « fameux son » des 80’s : les grosses batteries en avant (Steve Lillywhite chez U2 ou Simple Minds, Springsteen dans « Born in the USA », et les autres ont suivi …), et ces synthés stupides dont absolument tout le monde tartinait ses disques. Stoltz, s’il a laissé de côté les kicks pachydermiques, par contre, les synthés vintage, il s’en donne à cœur joie. Mais comme on a affaire à un type cultivé et qui traîne depuis plus de vingt ans dans l’indie rock, il les emploie plutôt à bon escient. Enfin, pas toujours, témoins « Feather falling » et « Same pattern », où ses pianos électroniques sont beaucoup trop en avant. Et pas de bol, c’est « Same pattern » que le label a choisi pour promouvoir la rondelle … ça risque d’en rebuter plus d’un, et comme a priori y’a pas des milliards de types qui attendaient cette rondelle, tout ça sent le bac à soldes.
Ce qui est con, parce que « Que aura » est un bon disque, voire mieux. Figurez-vous que ce clampin, il a pas fait comme la plupart de ses congénères, il a pas mis onze morceaux sur son disque, il a mis onze chansons. Et ça change tout, tellement on a perdu l’habitude d’entendre une intro, des couplets, un refrain, un pont, une mélodie, un solo au bon endroit au bon moment, toutes sortes de choses qu’avant plein de gens savaient faire et dont les générations plus ou moins actuelles semblent avoir perdu à jamais la recette (Radiohead – ou Kanye West -  quelqu’un ?)
Kelley Stoltz, lucidement, la joue low profile, même si on sent le type déterminé à rien lâcher. Il fait son truc, dans son coin, et on le sent pas vraiment très concerné par tout ce qui est charts et chiffres de vente… Et pourtant, celui qui achètera sa galette regrettera pas d’avoir lâché quelques euros Macron-Merkel. Stoltz est un guitar hero inconnu, mais que ses potes vont chercher quand il y a une partie de gratte à jouer (il a d’ailleurs fait une tournée avec les Echo & the Bunnymen devenus vieux, ce qui pour lui doit être la panacée). Et en plus de la guitare, il joue aussi de tout le reste (basse, batterie, synthés), fait ses disques tout seul dans son studio perso et les produit … Just like Macca, Prince, Stevie Wonder, Rundgren … le genre d’exercice qui  ne pardonne pas. Parce qu’on ne peut pas être un virtuose de tout ce qu’on touche. Ici, ce sont les parties de batterie qui sont plutôt simples, voire simplettes, très certainement clickées. Pour le reste, le type se débrouille plutôt bien. Et si le son est bien celui des 80’s, c’est pas du côté de Jeanne Mas ou Début de Soirée qu’il faut aller les similitudes.
Va bientôt falloir rajouter des doigts et des mains ...
Un exemple : la ballade brumeuse et arpégée « Get over » me fait penser à celles que miaulait l’immense Chrissie Hynde dans ses Pretenders. Un autre ? La mélodie parfaite et la facilité nonchalante de « No pepper for the dustman » devraient battre le rappel des fans d’Edwyn Collins (Edwyn Qui ? pff, laissez tomber, en plus il est moitié mort le pauvre …). Encore ? « Tranquilo », ballade pop mid-tempo, avec sa basse bien ronde et bien élastique, qui permet également de se rendre compte que si on risque pas de confondre Kelley Stoltz avec Otis Redding, il n’en demeure pas moins qu’il a une voix assurée et une présence intéressante au chant.
Et le reste de « Que aura » est à l’avenant, présentant derrière une base sonore commune, des variantes bien sympa. On a droit a du rock FM mid tempo (« Empty kicks »), qui fait clignoter le nom du vieil artisan de la chose Chris Rea, on trouve du classic rock qui louche qui vers la power pop (l’inaugural « I’m here for now »), un autre morceau réchauffe la mixture sonore brumeuse gothique des disparus et oubliés Lords of the New Church (« Looking for a spark » est dans la lignée d’un « Live for today »). Les titres restants, peut-être moins marquants, oscillent entre rock indie (« For you » et son riff alerte), et arpèges vaporeuses (« Possessor », titre le plus faible selon moi, gâché par une voix forcée dans les aigus).
Ce qui surnage comme impression de cette rondelle, c’est une certaine décontraction nonchalante, le type se la pète pas, prend manifestement plaisir à jouer ses titres, et espère en donner à ses auditeurs. Du rock peinard, envisagé façon laid back, la même démarche qu’avaient en leur temps des types comme JJ Cale ou Tony Joe White … Et je vais vous dire, même les fuckin synthés 80’s, ils ont rarement sonné aussi bien …

Kelley Stoltz est un type cool qui sort un bon disque. Que demande le peuple ?


Du même sur ce blog :
In Triangle Time



DREAM MACHINE - THE ILLUSION (2017)

Juste une illusion ?
Sur la pochette dans un exercice de lévitation, un moustachu et sa greluche. Lee Hazlewood et Nancy Sinatra ? Euh, non … John & Michelle Phillips ? Non plus, mais à la réflexion, il pourrait y avoir un peu de ça … Et la couleur de pochette est d’un profond … pourpre (on y reviendra). Les Dream Machine (y’en a deux autres, chevelus genre roadies de Hawkwind dans les 70’s, tellement moches qu’ils sont pas sur le recto de la pochette, d’ailleurs c’est pas sûr qu’ils fassent de vieux os dans cette histoire), comme des milliards d’autres, regardent en arrière, seconde moitié des années 60. Bâillements … Sauf qu’ils ont deux trucs pour se faire remarquer.
Mr & Mrs Melton
Premièrement, ils suscitent la controverse et la polémique. En s’affichant ouvertement réacs, tenant des propos aussi cons que ceux de Ted Nugent et Donald Ier réunis. A tel point qu’ils se sont fait lourder par leur label, ce qui est peu commun. Un brin pervers aussi parce que Castle Face, label en question, continue de vendre le disque. Qui se vent pas trop mal aux States. Business is still business. D’où un déchaînement assez peu  commun sur les pages pourtant consensuelles d’Amazon US, entre défenseurs et contempteurs de Dream Machine, appels au boycott de Castle Face et au soutien via Bandcamp du groupe. (Mini) évènement dans le Landernau du rock indé, une polémique verrait-elle le jour ?
Faut dire que maintenant tout est bien huilé. L’immense majorité des gugusses qui ont des chances de vendre plus de quatre rondelles se voient illico briefés par des conseillers en communication, leurs propos et leurs moindres faits et gestes sont surveillés par des multitudes d’attachés de presse qui n’hésitent pas à faire connaître aux journalistes les listes de questions qu’il ne faut surtout pas poser à leurs poulains. Alors quand arrivent deux crétins qui livrent leurs réflexions simplistes cash, une agitation s’empare du « milieu ». A l’attention de tous les anciens étudiants d’école de commerce qui « gèrent » le rock aujourd’hui, il convient de signaler que depuis les déhanchements censurés d’Elvis à la télé, le rock n’a prospéré que sur des polémiques et des querelles d’Hernani sur fond de trois accords. Et niveau déclarations plus ou moins imbéciles, les rockers ou prétendus tels ont depuis six décennies placé la barre très haut (à quand une anthologie des citations des frères Gallagher, Ozzy Osbourne ou du chanteur des Eagles of Death Metal ?)
Dream Machine
Et donc, quel crédit ou quel intérêt accorder au (on y revient) couple leader de Dream Machine, Matthew et Doris Melton, quand ils se lancent dans des tirades anti-immigration ? Surtout quand on sait que Doris Melton est d’origine bosniaque, émigrée durant la guerre en ex-Yougoslavie, passée par les pays scandinaves avant d’immigrer aux USA. Les Dream Machine se revendiquent anti Facebook, ce qui au jour des réseaux sociaux rois est un crime sans conteste abominable. Quel crédit (ou quel sérieux) leur accorder quand ils se prétendent (sur la page d’accueil de leur site internet officiel !!) opposés aux médias sociaux qui font ressortir le pire de la nature humaine ? Et à la limite, même si les Melton pensent vraiment ce qu’ils disent, combien de stars qu’on s’efforce de nous présenter bien sous tous rapports sont capables (parfois sans l’aide d’alcool ou de poudres blanches) de déclarations bien pires ? Maintenant, et dans l’autre sens, faut pas aller crier à la conspiration, à la censure, où à je ne sais quel complot destiné à empêcher l’humanité de profiter de leur musique … Parce qu’on pourrait en causer des heures et regarder ce qu’on nous sert par ici au nom d’une « droite décomplexée » ou d’une « extrême-droite dédiabolisée ». A côté de ça, les raisonnements à la con d’un couple de rednecks pas très fufutes dans un groupe de rock indé, hein …
Et la musique de ces guignols, tu vas en causer un jour ? Voilà, voilà, ça vient…
Leur musique, figurez-vous, elle me plaît bien. Mais avis, y’a au moins un pré-requis. Figurez-vous que j’ai mis leur Cd dans le lecteur, et que je l’ai arrêté au second titre pour aller écouter les morceaux sur le Net, tant ce que j’entendais au niveau son me paraissait provenir d’un Cd foireux, d’une erreur de pressage. Non, pas du tout, ce qui était sur mon Cd était bien ce qu’ils avaient voulu faire. Le son des Dream Machin(e) est plutôt déstabilisant. Une rythmique de bourrin (les deux chevelus), des claviers et de l’orgue qui dégueulent de partout, des voix tellement chargées d’échos et saturées qu’elles deviennent incompréhensibles et qu’on a parfois du mal à distinguer si c’est le mec ou la nana qui chante (ils se partagent à peu près les titres). Un son qui ferait passer les Sonics pour Pink Floyd (ou Rihanna). Est-ce que ça vient du fait que la fréquence d’enregistrement (c’est écrit en gros sur la pochette du skeud) est de 432 hz au lieu des 440 habituels ? J’y entrave que dalle à cette histoire, mais pour les curieux que ça intéresse, le couple s’en explique dans une (longue) vidéo. En tout cas, à l’heure du sonore agréable à l’oreille triomphant, les Dream Machine dépotent. Et on finit par s’y faire à leur son caverneux …
Surtout parce que ces couillons ont écrit de grands morceaux. Notez bien que j’ai dit grands et pas longs (y’en a la moitié des douze qui dure moins de deux minutes et aucun qui arrive à quatre), ce qui est assez paradoxal parce qu’on les sent très inspirés par le prog et les longs titres psyché des sixties seventies. A la fin du disque, y’a deux noms qui clignotent très fort : les Doors et Deep Purple. A cause de la Doris, de son Vox et de son B3, qui sont utilisés de la même façon que lorsque Manzarek et Lord les martyrisaient. Ajoutez-y quelques riffs sinueux à la King Crimson, une rythmique échevelée et vous obtenez une sorte de garage – power pop – prog relativement inédite, curieuse et le plus souvent très intéressante et réussie.
La Belle et les Bêtes ...
L’aspect garage, c’est ce son brut de décoffrage, ces méchants riffs fuzzy sixties (« Eye for an eye » et « Back to you » se distinguent dans cette catégorie). Le côté power pop, c’est cette urgence mélodique derrière la carapace hardos (on pense à un esprit Cheap Trick, comme sur « Torn from the hands … »). Mais ce qui domine, ce sont ces emprunts au prog (les mini breaks tarabiscotés un peu partout, les riffs crimsoniens du morceau-titre) et surtout ces claviers Doors-Purple (y’en a qui citent aussi Electric Prunes, dont j’ai un skeud qui traîne sur une étagère mais que j’ai pas écouté depuis des siècles, donc je m’avancerais pas sur ce terrain-là). C’est joué par la nénette Melton (mignonne bien que facho, comme quoi moi aussi je suis capable d’écrire des trucs réacs) qui s’avère assez douée et bluffante pour ces exercices « à la manière de … » (flagrant sur « Lose my place on time », « Nothing left » ou l’instrumental « Diamond on the rough »). Les deux tourtereaux qui se partagent aussi l’écriture étant capables de grands titres qui ne doivent leur réussite qu’à leur talent (« Buried alive »), même s’ils sonnent comme une chanson yé-yé « All for a chance », ou citent des bribes du « Sud » de Nino Ferrer (le refrain de « Caught in a trap »).

Conclusion : on peut dire plein de conneries et faire un bon disque …



DOGS - THREE IS A CROWD (1993)

Emportés par la foule ...
Ouais, j’suis mal barré là … alors qu’il y a des milliards de disques que je pourrais dégommer sans avoir à me forcer, à la jouer désabusé, cynique, tout ça … Voilà que je me retrouve avec un Cd dont j’ai pas envie de dire du mal. Ni du bien, c’est là tout le problème.
Parce que les Dogs, même si ça compte triple, comme au Scrabble, quand on arrive à glisser leur nom en société, j’essaie d’en dire du bien autant que faire se peut. Sur la foi d’un de ces croisés-crucifiés du rock Dominique Laboubée, qui était leur âme et qui est parti pas vieux la faute à une saloperie qui l’a bouffé à vitesse grand V. Les Dogs, c’était lui et ses disciples, recrutés au fil des rencontres parmi les plus fines lames rockant et rollant de Rouen d’abord et puis de tout ce pays. Les Dogs, c’étaient des puristes du binaire, les types au goût sûr et à la culture musicale millésimée. Ils ont réussi à se faire une place et à survivre au milieu des punks (ce qui était loin d’être gagné, surtout en Giscardie) et à même attirer l’attention d’une major (Epic, avec toute l’artillerie de la CBS derrière). Les Dogs ont même sorti deux disques parfaits (« Too much class for the neighbhoorood » et « Legendary lovers ») au début des mornes 80’s. Qui parce qu’ils étaient remplies à la gueule de rocks classieux et sans concessions, qui plus est en anglais, n’ont pas du tout marché dans le pays dévoué à Téléphone et Trust, en attendant Rita Mitsouko. Le rock, ici, c’est en français ou aux oubliettes. Grosse connerie et vaste débat, on va pas épiloguer là-dessus.
« Three is a crowd », c’est les Dogs des nineties. Toujours aussi anachroniques (on les a jamais vus en pantacourt balancer des riffs grungy et fuzzy). Toujours obsédés par une musique qu’à juste titre ils trouvaient meilleure que d’autres. Celle des Beatles, des Stones (qu’ils citent dans « Today sounds like yesterday »). Aussi la soul, le rhythm’n’blues, le rock garage, en gros tout ce que les sixties avaient de meilleur. Revivalistes un jour, revivalistes toujours … Sauf que là, exit les majors, faut faire avec les moyens du bord. Et se raccrocher à l’ami Zermati et à son label Skydog, ambulance de tant de rockers français en mal de reconnaissance. Zermati, c’est pas la CBS. Finis les « objectifs », retour au « do it yourself ». Les parutions discographiques des Dogs se sont espacées et quand on peut sortir une galette, faut pas passer trois mois en studio pour régler la caisse claire.
Malgré tout, « Three is a crowd » n’est pas un disque au rabais, un vague cataplasme sonore anémique. C’est là tout le problème pour moi. Les Dogs se sont fait produire par Colin Fairley (pas n’importe qui, longtemps aux côtés de Costello, Nick Lowe, les Dexys Midnight Runners et quantité d’autres). Et volontairement ou pas, l’Anglais leur a collé ce qu’on appelle un « gros son ». Une armure sur de la dentelle, parce que les compos, elles sont loin d’être mauvaises.
Laboubée entouré par Rosset & Lefaivre : Dogs 1993
Mais dès le début du premier titre (« The price of my sins »), on est quelque peu dérouté par une intro hard-indus, un mid tempo lourd de chez lourd, un écho démesuré (et malvenu) dans la voix de Laboubée. C’est cette fragilité naïve qui faisait tout le charme des Dogs (ou dans un autre registre, des Modern Lovers par exemple). Ils nous sortent pas la Panzer Division sonore, mais bon, ces gros artifices clinquants, pour moi, ils leur vont pas. Little Bob aussi (« Ringolevio ») avait quelques années plus tôt malencontreusement durci le ton. Foutue recherche du tape à l’oreille qui a fait tant de ravages dans les discos de types qui n’en demandaient pas autant (hein, Springsteen et Petty, vous voyez de quoi je parle ?).
Dominique et les Dogs savent écrire des chansons, c’est un truc qui s’oublie pas une fois qu’on est tombé dedans. Et celles de « Three is a crowd » sont loin d’être mauvaises (« Back from nowhere » énergique et mémorisable, « Super friend » frais et mélodique même si ça parle de rupture sentimentale, « Today sounds yesterday » on dirait par moments les Who des débuts, « Never been in love » mid tempo avec harmonica bluesy). L’ambiance est à la nostalgie, souvent (« Back from nowhere », « Super friend », « 19 again »), développant la thématique du « c’était mieux avant ». Les hommages sont bien là (« Skydogs » court instrumental pour l’ami Zermati, « Noise therapy » très Ramones (rien que le titre !). On a droit à deux reprises, l’obscure « Three is a crowd » qui donne son titre à l’album et dont j’ai pas réussi à trouver la version originale (non, c’est pas le morceau éponyme d’Otis Clay), et la beaucoup moins obscure « I wanna be your dog » des Stooges, plutôt convenue (le « Johnny Be Good » de la génération garage sixties énervée) et qui n’apporte rien à l’originale ni aux Dogs d’ailleurs.
A signaler aussi pour achever de faire à peu près le tour du proprio une ballade mid tempo (« The end of the gang »). Musicalement et dans les paroles (niveau quinze jours d’anglais au lycée) on est dans la nostalgie (des genres musicaux, des gonzesses, ces vilaines, qui se cassent). La voix de Dominique est souvent bidouillée et un peu trop chargée d’écho à mon goût, mais faut l’extirper des multiples parties de guitare bon, c’est pas Otis Redding au micro, on savait depuis longtemps. Zermati met la main à la pâte (piano martelé au fond du mix sur « I wanna be your dog »), et Philippe Almosnino (Wampas et Johnny Hallyday band entre multitude d’autres) vient placer quelques parties de guitare sur deux titres.

« Three is a crowd » n’est pas le disque par lequel il faut débuter les Dogs. Pas leur meilleur, c’est sûr. Mais s’il sortait dans ce pays que des disques de ce niveau, le rock made in France serait moins comparé au vin anglais … 


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