ALICE IN CHAINS - ALICE IN CHAINS (1995)


Apocalypse now ...

Ce disque, le « dernier » de la formation originale d’Alice In Chains, est une de ces pierres tombales du rock, comme seuls des esprits torturés peuvent en produire, et pour moi le parallèle et l’analogie sont assez saisissants avec le « Disintegration » de Robert Smith – Cure. Sauf que dans les faits, ce Cd va encore plus loin, puisque si Fatbob Smith est encore de ce monde, Layne Staley, l’âme chantante d’Alice In Chains, a lui tiré sa révérence, ce disque est son dernier en studio avec son groupe, avant sa mort par overdose trois ans plus tard.
Ce Cd n’est pas sombre, triste, désabusé. Il est pire que ça. Il est glauque et morbide.
Le grunge, auquel Alice In Chains est plus ou moins à son corps défendant rattaché, était une urgence, un cri. Ce Cd est une plainte, un gémissement, un râle. Qui s’avèreront définitifs.
Ce disque a quelque chose d’épuisant et d’inexorable par son accumulation de mid-tempos lourds, ses solos de guitare de guingois, ce son mat et caverneux. La musique évoque souvent du Black Sabbath joué au ralenti, dans une ambiance sinistre et malsaine à la Joy Division. Un folk halluciné, le très beau « Heaven beside you » présage une éclaircie qui n’arrive pas, et la chape de plomb inexorable se referme. Le même espoir d’éclaircie s’insinue avec « Shame on you », chanson pop malsaine, mais chanson pop quand même. Le reste est un monument de déprime que l’on ne peut pas supposer être mise en scène. Ces types ne trichent pas, et si l’histoire a retenu la figure de martyre de Staley, c’est Cantrell le pourvoyeur essentiel des musiques (et parfois des textes), et il ne donne pas vraiment l’impression d’être un joyeux luron. Les deux étaient bien l’âme d’Alice In Chains, et la complémentarité de leurs voix est excellente, renforcée par un gros travail de production qui met en valeur ces harmonies vocales létales, pleines d’écho et de phasing …
Ce Cd fait remonter des images, des sons (les ballets d’hélicoptère d’ « Apocalypse now », les séances de roulette russe de « Voyage au bout de l’enfer », la noirceur désespérée du « Tonight’s the night » de Neil Young)
« Alice In Chains » est un aboutissement, une fin en soi.
Ames sensibles s’abstenir.

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