JOHN HUGHES - LA FOLLE JOURNEE DE FERRIS BUELLER (1986)

 

Casa de Papel ...

Vous l’avez vue la série espagnole préférée des joueurs de foot, tellement que Neymar y avait un (minuscule) rôle ? On y suivait les pérégrinations d’une bande de braqueurs de banque cornaqués par un type, le Professeur. Et les scénaristes, pour faire durer les épisodes et les saisons, foutaient les braqueurs dans une merde noire, dont le Professeur les sortait à coups de stratagèmes totalement surréalistes (et plutôt débiles) … Ben, « La folle journée de Ferris Bueller », c’est un peu pareil. Des personnages à la hache, un scénario ahurissant d’invraisemblances à tous les étages. Et comme pour la série des espingouins, un carton monumental, le college movie le plus rentable de son temps … ce doit être ce qu’on appelle le nivellement par le bas …

Matthew Broderick & John Hughes

Les college movies (ou teen movies, c’est peu ou prou la même chose), c’est un genre à part entière chez les Ricains. Depuis des décennies, il en sort une foultitude chaque année. Et la référence du genre, c’est John Hughes, scénariste, producteur et réalisateur, qui a cartonné au début des années 80 avec son tryptique « Breakfast Club » (le meilleur), « Pretty in Pink » (bof …) et donc « … Ferris Bueller », le plus successful des trois (il y a même eu une tentative de série télé dérivée par la suite, bide retentissant).

L’intrigue est plutôt simplette : le dénommé Ferris Bueller, collégien de Chicago, se fait porter pâle pour ne pas aller en cours. Il fait « évader » du bahut sa copine, débauche également son meilleur pote dont il emprunte la Ferrari de collection de son vieux, et le trio s’offre une tournée des grands ducs dans Chicago, coursés par un directeur d’établissement aussi bête qu’obstiné, tout en prenant soin de rentrer avant que les parents s’aperçoivent des supercheries …

Mia Sara, Alan Ruck & Matthew Broderick en Ferrari

Tout est fait à l’économie, manière d’avoir le retour sur investissement le plus massif. La somptueuse villa de la famille Bueller n’est pas à Chicago, mais à Long Beach, Californie, la Ferrari n’est pas de collection,  c’est un fake en carton, le collège n’existe pas (c’est un vieux bahut désaffecté où Hughes avait déjà tourné « Breakfast Club »), il y a de grosses incohérences scénaristiques (comment le trio se retrouve t-il dans une piscine à remous qui n’appartient à aucun de leurs parents), des « oublis » (une longue scène où le pote entend pour une fois assumer face à son tyrannique père dont il vient de fracasser la Ferrari, on ne verra pas ce face-à-face).

Tous les gags à base de coups de téléphone, de messages enregistrés sur des répondeurs, de mécanismes à trois bouts de ficelle reliés à des ordinateurs ou des chaînes hi-fi se multiplient, sont totalement redondants et totalement stupides (un scénario écrit à la fin d’un apéro copieusement arrosé ?).

Pour ne rien arranger, dans le rôle principal, l’insupportable Matthew Broderick (le Brad Pitt des cours de récré) en fait des tonnes (il vient du café-théâtre, ceci explique en partie cela), impeccable raie sur le côté et sourire enjôleur. Ce type a foiré à peu près (à l’exception de « Glory ») tous les films où il était en haut de l’affiche. A ses côtés, une nunuche transparente (Mia Sara) joue sa copine et un autre abonné des nanars (Alan Ruck) est son pote hypocondriaque et un peu demeuré. C’est sur lui que repose le film, il en fait trop, multiplie les mimiques censées être de circonstance, s’adresse souvent à la caméra comme Belmondo dans « Pierrot le Fou » (la comparaison s’arrête là).

Twist & Shout ...

En fait, les seuls trucs regardables du film sont deux improvisations de Hughes. La première, pour rajouter quelques minutes de pellicule, est une visite du trio dans le musée de Chicago (vous avez déjà vu des ados sécher les cours pour aller se balader dans un musée ?), prétexte pour Hughes de nous montrer des œuvres de ses peintres préférés (Kandinsky, Picasso, Matisse). Le coup de génie de Hughes sera de pirater (ou du moins infiltrer) une parade de la communauté allemande de Chicago en y glissant ses acteurs et son équipe technique, Broderick se livrant en furieux playback à une reprise du « Twist and shout » (réellement balancée sur une sono, aucun trucage des vues de foule, et les réactions sont pour la plupart celles de vrais gens, pas d’acteurs). Ce qui vaudra aux Beatles leur premier numéro un depuis la séparation du groupe … une constante chez Hughes, grand fan de rock anglais (il avait lancé la carrière américaine des Simple Minds en incluant « Don’t you » dans « Breakfast Club » et procuré aux oubliés Psychedelic Furs leur seul hit aux States avec « Pretty in pink » dans le film éponyme).

Ce « clip » de « Twist and shout » est à mon sens une des rares séquences intéressantes du film. Avec une paire de scènes (il n’a qu’un tout petit rôle) dans laquelle Charlie Sheen, en jeune camé looké Ramones séduit dans un commissariat la coincée frangine de Broderick-Bueller …

Cinq ou six minutes sur une grosse heure et demie, ça fait pas beaucoup …