Qu’en serait-il advenu des Mott The Hoople si Bowie ne
s’était pas entiché d’eux et ne leur avait offert « All the young
dudes » qui les a fait passer à la postérité et relancé leur
carrière ?
Parce que là, quand paraît ce « Rock’n’roll
Queen » début 72, ça sent le sapin, la fin de contrat. Une compilation de
sept titres, dont un morceau live de dix minutes, le tout n’atteignant même pas
les quarante de rigueur des temps vinyliques. Autant dire que la matière à Best
of est assez rare chez Mott.
Derrière l’affaire Mott, il y a deux hommes. Ian Hunter,
fan de Dylan. Pas exactement la meilleure idée à la fin des sixties, Dylan
pour un tas de raisons (le retrait dû au prétendu accident de moto, les disques
parus ensuite assez moyens, le son général du rock qui s’est considérablement
durci, …) est à peu près oublié. La « chance » de Hunter sera de
croiser la route de Guy Stevens, un des agitateurs les plus en vue du swingin’
London finissant. C’est lui qui a trouvé le nom des successful Procol Harum,
qui enregistre dans son studio tout un tas de revivalistes et nostalgiques mod,
… Et qui décide de prendre en main la carrière de Hunter. Stevens aide Hunter à
monter un groupe (autre figure forte de Mott, le guitariste Mick Ralphs, héros
de seconde zone de la six-cordes, qui fondera plus tard Bad Company), et lui
conseille le look qui ne le quittera plus : cheveux mi-longs frisés, et
inamovibles lunettes noires (plus un accessoire médical qu’autre chose au
départ, Hunter est très myope).
Mott The Hoople 1970 |
Stevens produit les premiers pas discographiques. Accueil
glacial. Le groupe s’entête sans lui. Même résultat. Il est prévu que le groupe
assure la promotion de cette compilation (si tant est que quelqu’un soit
demandeur), et se sépare, chacun s’en ira vaquer vers d’autres aventures.
Evidemment, cette compile sera un bide supplémentaire
pour Mott. Et quoi qu’il se soit passé après « All the young dudes »,
et les disques intéressants qui ont suivi, la première partie de la carrière de
Mott The Hoople ne peut être réhabilitée.
C’est indigent, voire limite grotesque. Le groupe anglais
laborieux de seconde zone qui mouline sans imagination des trucs dans l’air du
temps. Rien qui ressemble au Dylan chéri par Hunter (ça viendra en solo des
années plus tard), mais plutôt tout qui navigue dans le sillage des Stones –
Faces. Sans le talent des uns ou des autres.
Les boogie stoniens sont de la revue. « Rock’n’roll Queen » le titre,
« Death may be your Santa Claus » ( ??), « Walkin’ with a
mountain ». Plutôt tendance boogie bien gras et lourds que tendance
stonienne d’ailleurs, sans imagination. A tel point l’anecdote fameuse
concernant « Walkin’ … ». Mott enregistrait dans la cabine de studio
voisine de celle des Stones, et leur parvenait le son de « Jumpin’ Jack
flash ». Ces lourdauds n’ont rien trouvé de mieux que de plagier le titre
qui allait devenir mythique, y compris dans les paroles, le « Jumpin’ Jack
flash it’s a gas » répété ad lib par Ian Hunter …
Mais si Mott a plagié les autres, certains de ses titres
n’ont pas été perdus pour tout le monde. Leur version instrumentale (mais
pourquoi instrumentale ?) plutôt heavy du classique des Kinks « You
really got me » a été littéralement photocopiée par Van Halen quand ils
reprendront ce même titre sur leur premier disque.
Un morceau (« Midnight lady ») lorgne vers le
glam lorsque T.Rex commence à squatter les ondes. Plus original est
« Thunderbuck ram », qui après avoir frôlé le pire avec son intro
classico-prog évolue en tournerie sauvage proche du space rock énervé que
feront le Blue Oyster Cult, les Pink Fairies ou Hawkwind. Quand au titre live,
un exercice dans lequel Mott a toujours eu bonne réputation, il ne la sert pas
vraiment leur réputation, basé sur un medley laborieux (« Whole
lotta shakin’ goin’ on » de Jerry Lee Lewis, « What I’d say » de
Ray Charles) construit autour du « Keep a knockin’ » de Little
Richard. Et faut faire très attention quand on touche au répertoire de Petit
Richard, il a placé la barre tellement haut qu’on est souvent voire toujours
ridicule, et Mott n’échappe évidemment pas à la règle.
Belle pochette … Qui évite de justesse à ce
« Rock’n’roll Queen » la poubelle …