Génie take a ride ...
Ainsi donc Sufjan Stevens aurait été un génie
musical (je parle au passé parce que la mayonnaise est semble t-il très
retombée). C’est en tout cas le terme que l’on retrouvait le plus souvent
accolé à son nom. C’est sûr qu’il connaît la musique, on ne sort pas le genre
de morceaux et leurs arrangements précieux qui figurent sur ce disque si l’on
n’est pas capable de lire et d’écrire la musique et si l’on n’a pas assimilé
deux-trois trucs sur l’art de composer une chanson …
Mais bon, quelques plaisantes rengaines alignées sur
un disque, et qui vont plus loin que le sempiternel binaire bastonné ou les
programmations empilées trop souvent de mise dans ces années 2000 de recyclage
permanent valent-elles la litanie de louanges et de superlatifs attribués à
Stevens ? Est-ce qu’une ritournelle avec un couplet et un refrain qui
peuvent se retenir, le tout enrobé dans des arrangements psychédéliques
millésimés et des harmonies vocales élaborées, doit obligatoirement faire
surgir les références aux Beatles, aux Beach Boys ? Il n’y a tout de même
rien dans ce « Illinoise » qui s’approche de « A day in the
life » ou « Good vibrations » …
Sufjan Stevens est doué, certes. Ambitieux
également. Son projet délirant (un concept-album pour chaque état de l’Union)
semble avoir pris avec le temps du plomb dans l’aile. La longueur démesurée de
ce « Come on feel the Illinoise » (une heure et quart) en fait le
« concurrent » de quelques antiques double 33 T. Et le comparer à des
choses comme « Blonde on blonde », le Double Blanc, « Electric
Ladyland », « Exile on Main Street », « Songs in the key of
life », « London calling », … bon, restons calmes, sérieux, ne
perdons pas tout sens la mesure …
Il y a de bonnes choses sur ce « …
Illinoise », c’est sûr. De bons mélanges de jolies mélodies et
d’arrangements baroques, avec des trompettes omniprésentes, ce qui rapproche
parfois ces titres de ceux du Love d’Arthur Lee. Quelques folks mélodiques
rétro-futuristes généralement plus classieux que ceux de Devendra Machin, autre
surestimé notoire. Des tentatives assez réussies de faire de longs
morceaux complexes à tiroirs où se
succèdent et se chevauchent les ambiances. De jolies harmonies vocales.
Mais aussi l’impression de redites et de répétitions
sur la longueur. Beaucoup de morceaux se ressemblent, et le parti pris de leur
donner des titres interminables ne facilite pas leur mémorisation. On sent à la
longue un désagréable besoin de vouloir faire du clinquant, de la citation
lettrée, du tape-à-l’oreille en permanence. Alors que les disques et références
visées étaient justement des oeuvres simples.
Au final, la seule chose que je trouve vraiment
géniale dans ce disque, c’est son titre, bonne blague sur un morceau des
graisseux et pas vraiment finauds bûcherons glam de Slade. Pour le reste, tout
a déjà été fait, et souvent mieux, il y a bien longtemps … et quelqu’un a t-il
de nouvelles de Sufjan Stevens ?