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THE RAKES - CAPTURE / RELEASE (2005)


Franz Ferdinand II

Bon, pour une fois je vais faire court (« Ouf ! C’était pas trop tôt ! » entends-je).
Parce que hein, y’a pas grand-chose à dire sur ces gars. The Rakes, groupe anglais, seconde moitié des années 2000, vomi du néant dans lequel il est retourné après trois disques dont ce « Capture / Release », son premier, considéré par les fans ( ? ) comme son meilleur, c’est dire le niveau supposé des deux autres.
Les Rakes, c’est quasiment du copier-coller de Franz Ferdinand, mêmes influences post-punk revendiquées (Magazine, Gang of Four, Buzzcocks, plus ici Talking Heads pour le côté rigide et martial ), mêmes chansons hymnes dansantes, la qualité, l’évidence et les arrangements en moins.
Poussant le vice du décalque jusqu’à partager l’affiche avec leurs modèles, ce qui s’est évidemment retourné contre eux, ils sont juste passés pour des suiveurs sans originalité, ce qui n’est pas faux. Autant Franz Ferdinand sont à peu près supportables sur un album (leur premier au hasard), autant les Rakes deviennent pénibles au bout de deux titres.
Bon, j’exagère … il y a au moins deux différences avec Franz Ferdinand, le chanteur des Rakes n’est pas beau gosse, il a un peu la même gestuelle désossée que Ian Curtis de Joy Division, et ils ont glissé dans la demi-heure que dure ce disque un morceau de ska (même pas mauvais, d’ailleurs).
Ah, et puis, ils sont bien anglais, les paroles de « Strasbourg », leur « hit », me laissent supposer qu’ils croient que l’Alsace est en Allemagne …

GOSSIP - MUSIC FOR MEN (2009)


Pour nous les hommes ?

Les plaisanteries les plus courtes étant les meilleures, faudrait qu’ils arrêtent bientôt. Parce que là, hum, comment dire, c’est un peu … gros leur truc. Ou doit-on dire son truc, tant il n’y en a que pour la Beth Ditto dans cet ersatz de groupe de rock. Et la pauvre batteuse (très moche, il va de soi) en gros plan sur la pochette doit se demander ce qu’elle fout là, elle dont absolument tout le monde ignore le nom.
Ce « Music for men », c’est du vide bien orchestré. Très bien, même. Il y a un son d’enfer, des petits arrangements roboratifs de partout (peuvent dire merci à Rick Rubin, sans qui ce disque serait une horreur absolue) au service de ce qu’on appellera charitablement des morceaux misérables. Tous construits de la même façon. Couplets mid tempo, et gros riffs de guitare sur le refrain up tempo. Deux exceptions, le premier titre (« Dimestore diamond »), tout en tension larvée et qui laisse à tort augurer de bonnes choses qui n’arrivent pas, et le dernier (« The breakdown »), exécrable ballade gluante, bruit de bidet final de cette sanisette sonore.
Ce qui sauvait quelque peu le précédent (« Standing in the way … »), c’était la voix de Ditto, qui sans pouvoir être comparée aux grandes shouteuses (Joplin), ou aux grandes abîmées (Holyday), se baladait avec une facilité assez déconcertante et bluffante sur les morceaux. Là, quelqu’un dans sa maison de disques a dû lui dire qu’il fallait assurer, qu’elle avait en charge une petite entreprise qui tournait bien, ce genre de plan marketing rance visant le plus grand nombre … Finies les extravagances castafioresques, on pose bien comme il faut et bien gentiment sa voix, et on chante tous les titres de la même façon. Le résultat, on a l’impression d’entendre la fatale Pat Benatar d’il y a trente ans. La Ditto aligne ses petits rocks gentils-mous teintés de disco sans aucune once d’imagination vocale, sans aucune prise de risque. Du formatage pour le « grand public » dans tout ce qu’il a de tragique.
Alors ça fonctionne le temps d’une paire de titres qui ont fait des hits passables (« Heavy cross », « Love long distance »), et puis ça lasse, mais lasse … Et il y avait finalement quelque chose de pathétique à voir la Ditto venir faire dans les shows télé son numéro de diva transgressive (enfin, transgressive tu parles, tout est « on control », on est quand même loin de Divine, l’égérie de John Waters), maquillée comme un semi-remorque volé, pour être sûre qu’on la remarque bien … Cette fille a certainement du talent, elle le gâche pour son warholien quart d’heure de gloire. Il semble d’ailleurs que la supercherie a assez duré, le dernier pensum de la Gossip girl s’est fait descendre par à peu près tous les médias dits ou prétendus spécialisés …
Pour faire bonne mesure, comme d’hab, quelqu’un dans la maison de disques s’est cru malin en rajoutant à la fin du Cd trois remixes d’une insondable crétinerie …

Des mêmes sur ce blog :
Standing In The Way Of Control 

THE LAST SHADOW PUPPETS - THE AGE OF UNDERSTATEMENT (2008)


Puppets on the strings ...

Comme quoi, faut se lâcher des fois … ce disque bâclé en deux semaines va se révéler être un de ceux dont il était de bon ton de causer en l’an de grâce 2008. Deux copains se lancent dans une jam plus ou moins informelle, loin des calculs de rentabilité et des schémas du show-business musical, torchent un titre par jour en studio, gardent les douze meilleurs pour le Cd, les autres agrémentant les faces B de singles.
Faut pas rêver non plus, c’est pas exactement un scénario à la Disney. Ce disque n’a été possible que parce que l’un des deux lascars est hautement bankable, c’est Alex Turner, leader des Arctic Monkeys, big thing en terme de ventes dans l’Angleterre des années 2000. L’autre, c’est Miles Kane, leader des plus obscurs Rascals, dont il ne tardera pas d’ailleurs à s’émanciper.
Et là, comme des enfants gâtés enfermés dans le magasin de jouets, les deux potes se laissent aller à des exercices de haute voltige, récitant dans leurs chansons les gammes de quarante et quelques années de pop anglaise. Parce que plus anglais que l’ossature de ces chansons, y’a pas. Mais là où l’affaire prend une tournure curieuse, c’est lorsque les deux gaillards « embauchent » le très sérieux London Metroplitan Orchestra, et font arranger les empilages de cordes par un type (Owen Pallett) venu de la galaxie Arcade Fire. Du coup, rajoutées à une forme de maniérisme ampoulé très Scott Walker dans le chant, beaucoup de choses sonnent comme les productions sixties de Lee Hazlewood, songwriter américain certes, mais un des plus influencés par la musique (surtout classique) européenne.
La boucle est bouclée. Surtout que quand on parle de Scott Walker, son plus fidèle disciple David Bowie n’est pas loin. Un de ses vieux titres pré-Space Oddity (c’est dire si ça ne rajeunit personne, et surtout pas lui) « In the heat of the morning » sera enregistré par Turner et Kane mais ne sera pas retenu dans le tracklisting du Cd.
Bon, j’ai comme l’impression d’être un peu confus là … mais ce disque l’est aussi. Il part un peu dans tous les sens, multipliant clins d’œils et références, comme si Turner et Kane, libérés des contraintes de leurs groupes respectifs, étaient allés fureter vers des sentiers jusqu’alors interdits. « The age of understatement », le morceau, est une cavalcade contry-western, thème d’un film imaginaire. Niveau cinématographique, les génériques des James Bond sont en filigrane derrière « In my room ». « Standing next to me », c’est une plongée nostalgique dans les bluettes pop du Swingin’ London circa 66, « Separate » renvoie aux Smiths des débuts.
Tout n’est pas parfait, quelques titres font un peu « léger », « Only the truth », sorte de « Paint it black » cafardeux et dépouillé, « Meeting place », musique de plage caraïbe dans lequel les deux lads se la jouent un peu trop facilement Harry Belafonte, « Calm like you », exercice quelconque à la Scott Walker.
D’une façon globale, les morceaux avec les cordes sont très bons, en évitant le piège de la grandiloquence et du pompiérisme dans lequel tant de Moody Blues et Procol Harum se sont perdus. « The age of understatement » n’est pas un disque crucial, c’est juste un exercice de style brillant, la réunion dilettante de deux des auteurs anglais les plus intéressants de la dernière décennie…



MIOSSEC - L'ETREINTE (2006)


Miossec se mouille ...

J’ai pas tous ses disques, j’en ai juste une petite poignée. Et celui-ci me semble son plus intimiste, celui où Christophe Miossec dévoile son âme, ce qui coûte plus que de montrer son cul (dixit Gainsbourg).
Derrière une pochette que je trouve très moche (due à un de ses potes peintres, également responsable de l’artwork du livret), se cache un de ces essais musicaux introspectifs que je redoute, sur lequel un quidam vient raconter sa vie et chialer sur l’épaule d’un auditeur qui n’a rien demandé.
Ce coup-ci, ça passe, peut-être parce que quelque part Miossec ne « joue » pas, et qu’il se livre. Il y a des textes qui en disent tellement qu’ils sont vrais, et ne sont pas là par hasard. Il y a des plaies béantes, de vraies blessures de l’âme qui apparaissent, mais derrière tout ça une humilité, une humanité. Miossec ne se plaint pas, ne cherche pas le réconfort, il se raconte …
Musicalement, ça donne dans « l’ambiance ». C’est pas vraiment du rock, du folk, ou un mélange des deux, ça tient plus du nappage instrumental que de la récitation d’un genre identifié, ça se contente de pulser, de swinguer gentiment. C’est tout entier au service des mélodies, et il y en a quelques-unes de bien foutues (« L’amour et l’air », la plus belle et marquante, « Mon crime : le châtiment », « La facture d’électricité », …).
C’est au niveau des textes qu’il a fait fort, Miossec. Fini le poivrot existentiel, le Tom Waits mâtiné de Gainsbourg des débuts, et place à un adulte qui a morflé, et qui nous montre ses bleus à l’âme. Dans des thèmes difficiles, dont beaucoup tournent autour de l’amour (de sa vie, de celle qui est partie, de celle qu’on voudrait reconquérir, …), et de toutes ces choses anodines et intimistes qui ne marquent l’existence que de celui qui les vit. Il faut oser, et surtout trouver les mots qui sonnent juste et vrai pour chanter des choses comme « Maman », « Quand je fais la chose », « La grande marée », « L’imbécile », « L’amour et l’air ». Tous ces titres introspectifs occupent le cœur du disque, et il n’y a finalement qu’au début et à la fin qu’on retrouve un Miossec connu. L’observateur acerbe de la société, de ses aléas et de ses travers avec la géniale « La facture d’électricité », une des choses qui parlent autrement mieux du chômage que des heures de discours politiques ou syndicaux. Et les deux derniers titres (au demeurant peut-être les plus faibles du disque), la conventionnelle ballade « Julia » et la berceuse « Bonhomme », dans lequel les coïncidences avec un double disque blanc de quatre types de Liverpool sont tellement troublantes qu’il ne peut s’agir que d’un hommage, décalé, certes, mais hommage quand même.
Les fans des débuts semblent assez partagés sur ce disque, qui évite, vus les thèmes abordés, de tomber dans les soupes braillées à la Ferré (l’excellent « La mélancolie »), les pleurnicheries à la Charlélie Couture (« Le loup dans la bergerie », bonne joke, mais à quel degré faut-il prendre ce titre ?). Qui évite aussi les chansons d’amour avec violons terminalement nulles. Non, Miossec avec ce disque ne fait pas non plus un revival Mike Brant.
Il est juste là, en face de nous, avec son cœur qui saigne. Et il nous montre qu’un cœur qui saigne, ça peut être beau …

Du même sur ce blog :
Boire

JULIAN CASABLANCAS - PHRAZES FOR THE YOUNG (2009)


La grosse tête ?

Ce doit être sympa d’être Julien Maisonblanches. Un papa fondateur de l’agence Elite, du fric plein les poches, un physique à lever toutes les top models de l’agence paternelle, le chanteur d’un groupe à la mode, c’est pas vraiment la biographie d’un bluesman du Delta.
Alors forcément, à lui moins qu’un autre, on va rien pardonner. Faut dire qu’il traîne pas mal de casseroles depuis qu’il s’est fait un prénom. Un caractère de cochon, et une fâcheuse tendance à vouloir que tout tourne autour de sa personne qu’il croit auguste. Alors là, en cette fin des années 2000, il sort un disque solo. Au mauvais moment, parce que tout le monde en attend un des Strokes, et sous le prétexte vaseux que ses acolytes en ont aussi sorti. Comme un enfant gâté qui n’en fait qu’a sa tête …
Ce disque est globalement assez vilain, pue l’argent facile gâché en studio et l’auto complaisance. Il donne l’illusion sur le premier titre, « Out of the blue », parce qu’on y retrouve des ingrédients connus, la voix nonchalante, la rythmique sautillante strokienne. Mais déjà, il y a tous ces synthés qui sonnent faux, qui font toc. Et toutes ces choses (les chœurs brumeux, les mélopées tristes) qui semblent des copier-coller venues de chez REM. « Out of the blue » donne la direction du disque, pratiquement tout est fait avec des machines, en empilant des couches de synthés datés, renvoyant plus que de raison à des choses anodines des funestes années 80 (le single « 11th dimension », c’est le retour des fantomatiques Visage, Human League et Spandau Ballet, et c’est juste ridicule, refaire ça vingt cinq ans après, où est l’intérêt ?), piquant sans vergogne les bonnes idées du Beck (le scientologue, pas Jeff) des débuts qui mélangeait country et electro (« Ludlow St »), plagiant quasiment des vieux tubes sixties certifiés (« Stand by me » et « Time is on my side » dans « 4 chords of the Apocalypse »), …
Si l’on ajoute à cette litanie oubliable, une ballade sans intérêt (« Glass »), et une autre tout juste à peu près avenante (« Tourist », rien que le titre très radioheadien, fait penser à du Thom Yorke enjoué, certes, mais du fuckin’ pénible Thom Yorke quand même), et quand on aura précisé que ce « Phrazes … » ne contient que huit titres, le compte des morceaux acceptables sera vite fait.
« Out of the blue » donc, plus « Left to right », jolie mélodie même si on n’y sent pas vraiment un Casablancas concerné. Meilleur du lot d’assez loin pour moi, « River of brakelights », le plus ouvertement electro du lot avec chanteur pour une fois « dedans », impliqué, morceau réminiscent de ce que faisait le King Crimson « reformé » des années 80.
L’on sait depuis que ce disque et l’attitude dilettante de Casablancas ont hypothéqué forcément longtemps la parution du quatrième Cd des Strokes, et la survie même du groupe qui l’a révélé.
Tout ces caprices de gosse (de) riche pour çà ? No way …

FRANZ FERDINAND - YOU COULD HAVE IT SO MUCH BETTER (2005)


Status Quo ...

Battre le fer pendant qu’il est encore chaud … c’est ce qu’ont du se dire les Franz Ferdinand et leurs conseillers financiers (pardon, les gens de leur maison de disques). Parce qu’avec leur première galette, ils avaient fait fort, devenant par la magie de quelques hits assez bien troussés un groupe qui comptait, dont les chiffres de vente se chiffraient en millions, chose prodigieuse en ces années 2000 où une connexion ADSL et MegaUpload suffisaient pour avoir de la musique.
Alors, pas téméraires pour deux sous, les Franz Ferdinand se sont appliqués à sortir fissa un skeud qui passerait comme lettre à la poste chez leurs fans. Comme y’avait les moyens, ils ont truffé leurs morceaux de petits gris-gris sonores gentiment centristes, mais sans prendre le moindre risque. Un follow-up, on appelle çà, à tel point qu’il faudrait être bien malin (ou bien fan) pour reconnaître lors d’un blindtest de quel disque provient le titre qu’on écoute. Alors c’est plutôt sympa, totalement dans l’air du temps consensuel, il n’y a plus aucun effet de surprise, tout est under control, totalement prévisible. Tout ce que les jeunes filles qui avaient acheté en masse le premier devaient attendre.
Bon, moi je suis plutôt client, avec toute ma blasitude et toute ma mauvaise foi. En fait, ce doit être mon côté pédo-pervers qui ressort, je trouverais toujours plus intéressant de voir un concert de Franz Ferdinand à la O2 Arena avec aux premiers rangs de jeunes nymphettes hurlantes miniskirtées que des hordes de graisseux fortement houblonnés index et auriculaire dressés ovationnant la reformation de Manowar ou Accept à une quelconque Hellfest …
Quelques titres surnagent du lot « The fallen », « Walk away » (comme si les Smiths avaient enregistré sous amphets), la gentiment mélodique « You’re the reason », le morceau-titre, le plus franchement rock du Cd … Il y a pas mal d’auto-citations (« Well that was easy », « Outsiders », « I’m your villain »), ce qui à force laisse à croire à un certain manque de renouvellement, de fraîcheur et d’inspiration … Quelques trucs piqués chez les autres : du piano en avant genre Coldplay (« Elanor … », « Fade together »), des choses qui tentent de sonner comme les Beatles en 65 repris par le Knack de « My Sharona » (« Do you want to »), une sorte de ska centriste énervé à la No Doubt (« This boy »), et aussi une poignée de titres aussi vite oubliés qu’écoutés …
Résultat des courses : un disque tellement prévisible que ça en devient embarrassant, plus arrangé que le premier, mais sans aucune surprise, sans la moindre trace d’évolution, sans le moindre risque. Le noyau dur des fans a adoré, ceux qui n’aimaient pas ont détesté, la routine quoi …
Il aurait tout de même peut-être fallu dire à ces jeunes gens qu’ils sont certes bien gentils, mais que bon, il serait temps de passer à autre chose. Apparemment, personne n’y a songé, leur troisième disque était comme les deux premiers, il a fini par lasser quelque peu et a pas très bien vendu. Bien fait …

Des mêmes sur ce blog : 
Franz Ferdinand
Right Thoughts, Right Words, Right Action

MICKEY 3D - TU VAS PAS MOURIR DE RIRE ... (2003)


Quoique ...

J’ai du rater un épisode, une mode, quelque chose … parce que là, je comprends pas trop …
Comment des choses aussi quelconques que ce disque, peuvent être perçues comme des révélations, des jalons qui comptent dans cette décennie ? Certes, il m’arrive parfois aux oreilles, voire plus souvent que ça encore, des choses infiniment plus mauvaises que Mickey 3D.
Mais comment se fait-il que ce machin, plein de « bons sentiments » à deux euros, d’une qualité musicale famélique, avec un type qui chante à faire passer Gainsbourg pour Placido Domingo ses textes écolos-centristes pour collégiens concernés, comment se fait-il donc qu’il s’en soit vendu des camions ?
Comme tout le monde, j’avais entendu cette scie « Respire », appris que le gars qui avait écrit ça, c’était celui de la semblable scie « J’ai demandé à la Lune » des vieux ados gothiques Indochine (les Cure bleu-blanc-rouge, les bonnes chansons et les bons disques en moins). J’avais trouvé « Respire » aussi vite fatigant que les machins  de Louise Attaque, le putain de violon en moins, et les synthés façon electro en plus, ce qui n’est pas forcément mieux.
Et bien, après écoute plus ou moins attentive du skeud, je suis en mesure d’affirmer que « Respire » est de loin le meilleur titre de cet album, c’est dire si avec tout le reste on s’emmerde ferme. Le gars derrière tout çà (Mickael Furnon, c’est en fait quasiment Mickey 3D à lui tout seul), ne sait effectivement pas chanter (bonjour la monotonie), et en gros écrit toujours la même chanson accompagnée des mêmes textes de flippé désabusé. Il n’y a rien ici d’original, on a même quelques fois l’impression, au gré des arrangements (c’est le seul truc qui différencie les morceaux, selon que ça donne dans l’ethnique-world, l’acoustique, l’électrique, l’électronique) que l’on a entendu tout ça en beaucoup mieux chez d’autres.
Chez Louise Attaque, et donc chez leurs pères électriques Noir Désir, particulièrement flagrant sur le titre caché (« Avance » ?), chez Miossec aussi (qui même à jeun pulvériserait le pauvre Mickey niveau textes), voire au détour de quelque sonorité arabisante chez les Négresses Vertes.
Niveau écoutable si on a vraiment rien de mieux à foutre, j’ai noté « Ca ne m’étonne pas », chanson yéyé avec chanteuse à voix acidulée, « La mort n’existe pas » malgré des paroles putain de simplettes, et « Beauseigne » avec ses arpèges à la Byrds-REM …
Il semblerait que le groupe n’existe plus … C’est con, j’avais oublié d’en écraser une larme …



GUILLERMO DEL TORO - LE LABYRINTHE DE PAN (2006)


Alice in Francoland

« Le Labyrinthe de Pan » est à juste titre un des films les plus marquants et les plus célébrés des années 2000 et sera certainement le film de sa vie pour Guillermo Del Toro. Un projet fou que le gros Mexicain avait dans sa tête depuis vingt ans, avant même d’avoir tourné quoi que ce soit.
Quand il commence le tournage au milieu des années 2000, Del Toro est un réalisateur devenu bankable qui a commencé par des films fantastiques « d’auteur » (entendez par là des petits budgets et des demi-succès) culminant avec « L’échine du Diable », avant d’aller à Hollywood mettre en scène des pelloches à gros budget et gros succès (un « Blade », le premier « Hellboy »). Une carrière qui présente bien des similitudes avec celle de Sam Raimi, parti lui des loufoqueries gore des « Evil dead » pour finir avec la série des « Spider Man ».
« Le Labyrinthe de Pan » (mauvaise traduction du titre original espagnol, « Le Labyrinthe du Faune », beaucoup plus adéquat au scénario) raconte deux histoires, l’une se déroulant dans un monde réel, l’autre dans un monde imaginaire. L’histoire réelle se déroule en 1944 dans le Nord de l’Espagne, où la garnison du capitaine Vidal combat au nom du franquisme les derniers bastions de résistance communiste. L’histoire imaginaire est celle de sa belle-fille Ofelia, et de sa quête pour retrouver son statut de princesse d’un royaume parallèle et disparu. Ces deux mondes vont lentement s’interpénétrer et finalement s’affronter lors d’un final cataclysmique.
Même s’il est en partie inspiré par des films comme « Le Magicien d’Oz » ou « Alice au pays des Merveilles », « Le Labyrinthe … » n’est pas vraiment un film pour enfants … ou alors des enfants (très) avertis, il y a certaines scènes bien gore (le défonçage de tête à coups de bouteille du braconnier, la torture du bègue, l’auto-suturation de la joue de Vidal, …) bien nauséeuses, qui risquent de traumatiser le fan de base de Dumbo …
Il y a dans ce film une abondance de détails, de symboles, qui en font une œuvre dont on découvre toujours quelque chose de nouveau à chaque visionnage. Et puis, au cas où l’on n’aurait pas tout compris, parmi les plus de 6 heures ( ! ) de bonus de la version BluRay, moultes explications de Del Toro, dont une version intégrale du film qu’il commente.
Ce film est un patchwork entre monde réel et monde imaginaire, c’en est aussi un entre « cinéma à l’ancienne » et effets spéciaux numériques. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le monde féérico-cauchemardesque repose beaucoup plus sur des décors pharaoniques construits par des artisans locaux espagnols, certains n’étant utilisés que pour une seule scène (la cité en ruines du début, le train). Le moulin, lieu de l’action « réelle » est un décor. Le numérique n’est utilisé qu’additionnellement pour certains trucages. Le résultat est spectaculaire, et Del Toro n’y est pas pour rien, utilisant une armée de caméras toujours en perpétuel mouvement. Des mouvements lents et ondoyants qui enveloppent les personnages, à l’opposé des montages saccadés et épileptiques trop souvent de mise dans le cinéma d’aujourd’hui. Il y a du Kubrick chez Del Toro, mais un Kubrick qui abandonnerait les grands espaces pour filmer au plus près des acteurs, dans un langoureux ballet qui rend l’atmosphère encore plus oppressante.
Les acteurs livrent de grandes performances, alors qu’ils viennent pour la plupart d’autres genres cinématographiques. Mention particulière à Sergi Lopez, glaçant capitaine Vidal et à la froideur déterminée de Maribel Verdu (Mercedes) , plutôt habituée aux rôles sexy de comédie. Concernant la jeune Ivana Baquero qui joue le rôle principal, celui d’Ofelia, Del Toro a la lucidité de ne pas trop lui en demander, de ne pas faire reposer l’essentiel sur sa seule prestation, et elle se tire des scènes difficiles avec quelques sympathiques mimiques. L’essentiel du casting est espagnol (Del Toro a refusé le tournage dans les studios hollywoodiens), à l’exception de l’américain Doug Jones, spécialiste des rôles très « costumés » et maquillés, c’est lui qui joue ici le Faune et aussi le Pale Man.
L’histoire « imaginaire » explore toutes les symboliques du conte pour enfants. La petite fille qui devient princesse, les épreuves qu’elle doit affronter représentées par les monstres récurrents (l’animal hors-norme, ici un crapaud géant, malgré tout peut-être le passage le plus faible et téléphoné du film, l’ogre, avec la superbe création du personnage du Pale Man un des plus « beaux » monstres des derniers lustres), les soutiens qu’elle reçoit (le Faune qui la guide, les fées-phasmes qui l’escortent), les éléments de pure magie (le livre qui s’écrit quand on l’ouvre, la craie qui trace des portes pour accéder ou s’échapper du monde imaginaire, la mandragore qui soulage les douleurs de la pénible grossesse de la mère d’Ofelia, … ).
Le monde réel est austère, tout en couleurs froides et lignes droites, réglé par des mécaniques inéluctables (les engrenages du moulin, ceux de la montre que Vidal répare et entretient avec un soin maniaque), le monde imaginaire est tout en courbes, « utérin » dit plusieurs fois Del Toro dans ses commentaires (le puits du labyrinthe, la caverne du crapaud, le couloir voûté qui conduit à la salle à manger du Pale Man, la salle du trône du Roi, …), les couleurs sont beaucoup plus chaudes, pour devenir vives (avec un jaune orangé qui domine vers la fin, lors des explosions pendant l’attaque du moulin, ou dans la salle du Trône). Insidieusement les deux mondes se pénètrent, parfois les méchants évoluent dans le même cadre (la parfaite similitude entre la pièce et la table où siège Vidal lors du banquet avec les notables, et la pièce où est installé le Pale Man). Del Toro a même glissé dans le monde réel des éléments qui suggèrent le monde imaginaire, mais bon faut avoir un sacré don de l’observation pour distinguer que les incrustations dans la tête du lit de la mère d’Ofelia et le pommeau de la rampe d’escalier dans le moulin reprennent la forme des cornes du faune, alors que c’est beaucoup plus évident dans la forme de l’arbre mort où se terre le crapaud géant.
Parce que dans ce film Del Toro joue avec les détails d’une façon maniaque (par exemple en rajeunissant et embellissant imperceptiblement le faune à chacune de ses apparitions, à mesure qu’Ofelia progresse dans ses épreuves), et multiplie les allusions lourdement symboliques, notamment religieuses. Quoi de plus normal dans la très croyante Espagne que de multiplier les trinités (trois fées, trois serrures chez le Pale Man, trois épreuves pour Ofelia, …), que le Pale Man (trouvaille absolument géniale) utilise les stigmates de ses mains pour y ficher ses yeux et voir …
Bizarrement, car il s’agit véritablement d’une œuvre majeure à tiroirs, l’aspect historique et politique a été zappé, surtout dans les explications et l’exploitation qui a été faite des thématiques du film. Del Toro lui-même, alors que les allusions sont évidentes, passe très vite (pour ne pas dire qu’il l’occulte carrément) sur cet aspect dans ses heures de commentaires, alors que d’autres sont exposés à plusieurs reprises. Dès les premières images du film, s’incruste sur l’écran « Espagne 1944 », les maquisards dans la grotte lisent un journal annonçant le débarquement des alliés en Normandie. Le lieu et l’époque sont bien définis. Le personnage d’Ofelia (l’innocence, la pureté) ne salue pas (elle tend la main gauche) son beau-père Vidal, le militaire franquiste, ils vont s’opposer tout le film, et elle finira abattue par lui. La scène du banquet donné par Vidal n’a que peu d’importance dans l’histoire du film, mais elle permet de montrer les classes sociales (les notables locaux, l’Eglise) qui soutenaient le franquisme, et leurs représentants sont vraiment traités par Del Toro qui connaît bien l’histoire de l’Espagne de la façon caricaturale qui convient. Et comment ne pas voir dans le personnage et l’environnement du Pale Man (réplique « imaginaire » de Vidal), les allusions criantes au nazisme (la cheminée en forme de four qui brûle derrière lui, l’amoncellement des ossements et des chaussures d’enfants qu’il a dévorés qui rappellent les mêmes amoncellements vus dans les films-documentaires sur les camps de concentration comme « Shoah » ou « Nuit et brouillard »). Le film ayant très vite connu un gros succès en Espagne, il semblerait que Del Toro et tout le staff aient renoncé à mettre en avant cet aspect-là, pour ne pas froisser et raviver quelques susceptibilités dans un pays encore traumatisé de nos jours par plus de trente ans de dictature militaire …
Tiens, comme ça en passant, qu’on ne me dise pas que Tarantino, qui n’a pas les yeux dans sa poche quand il s’agit de piquer les bonnes idées aux autres, ne s’est pas un peu inspiré du personnage de Vidal pour le rôle qu’il a donné à Christoph Waltz dans « Inglorious Basterds ».
Ah et puis pour finir, il y a dans « Le Labyrinthe de Pan » une mélodie inoubliable qui revient plusieurs fois dans le film. La meilleure dans un film espagnol depuis celle de « Porque te vas » dans « Cria cuervos » de Carlos Saura…

GRANDADDY - SUMDAY (2003)


Le coin des grabataires ?

Suffit de voir leurs bobines aux Grandaddy, improbable mix entre bûcherons canadiens, truckers américains et ZZ Top pour savoir que l’on n’a pas affaire à un phénomène de mode. Des types bedonnants et hors d’âge, de grand dadais (trop facile, celle-là) à la ZZTopesque pilosité, issus de Modesto, Californie.
Grand Manitou du groupe, Jason Lytle … qui a tout d’un grand, auteur unique de tous les titres de ce « Sumday ». Qui est un disque américain atypique, puisque c’est un des meilleurs disques anglais de la décennie. Lytle et ses potes sont fans de pop anglaise, et ça s’entend au détour de chaque chanson. Un fan qui en plus sait écrire des trucs imparables, d’une évidence sidérante. Un des grands songwriters américains, à ranger aux côtés de son contemporain Elliott Smith, rayon surdoués mélodiques. Sauf que là où l’auto-poignardé faisait plutôt dans l’enrobage austère, les Grandaddy poussent leurs titres dans une exubérance de sons, d’arrangements, d’harmonies vocales, retrouvant les alchimiques formules qui faisaient fonctionner les chansons dans les lointaines sixties.
Mais Grandaddy ne sont pas que des revivalistes béats, obnubilés par les instruments en bois et les amplis à lampes. Ils montrent qu’ils s’y entendent à faire tourner toutes les bécanes électroniques dans des studios modernes. Les machines sont là et bien là, omniprésentes, mais reléguées au second plan pour offrir un écrin aux chansons.
On pense quelque fois, et même plus que de raison aux Beatles, « I’m on standby » semble un inédit de « Let it be » (l’album), « Saddest vacant … » va encore plus loins dans le côté « Let it be » (le titre) avec son intro au piano, même si c’est pas le meilleur titre de ce « Sumday ». Pour en terminer avec le syndrome Fab Four, il convient de citer le fantastique « Stray dog … », qui utilise les mêmes gimmicks rythmiques déjà entendus sur leur reprise de « Revolution » pour la B.O. du film « I am Sam », ou le piano très « Imagine » de « The warming sun ».
La voix fluette et aiguë de Lytle oblige à citer Neil Young (sacré mélodiste celui-là aussi), et on pense souvent au country-rock du Canadien de ses débuts en solo ou de l’époque Buffalo Springfield, flagrant sur le renversant et inaugural « Now it’s on », sur « Yeah is what we had » (avec sur ce titre des bribes mélodiques de « Watching the wheels » de Lennon me semble t-il). Parce que çà, exhiber la madeleine proustienne sonore, ils savent faire Lytle et ses Grandaddy et que celui qui ne pense pas à « Mrs Robinson » de Simon & Garfunkel en écoutant « El Caminos … » prenne rendez-vous chez son ORL …
Bon, il faut quand même avouer, et c’est parfois le reproche fait à ce disque, que l’immense majorité des titres étant sur le même tempo et faisant appel aux mêmes recettes, on a l’impression de tourner en rond sur la même chanson. Si on n’aime pas au bout de quelques mesures, pas la peine d’insister …
Moi j’ai choisi mon camp, des disques qui font penser à l’orfèvrerie des Beatles, des Beach Boys, ou des plus oubliés magiciens de la chose pop qu’ont été Left Banke ou les Zombies, eh bien je suis preneur …
Grandaddy a existé dix ans avant de se dissoudre au milieu des années 2000, et a laissé une poignée de disques dont ce « Sumday » constitue le dernier volet d’un triptyque majeur comprenant « Under the western freeway »«  et « The sophtware slump ».

Des mêmes sur ce blog :



(On trouve de tout sur YouTube, même un blaireau qui met ses photos de vacances avec Grandaddy en fond sonore ...)

BEIRUT - GULAG ORKESTAR (2006)


Le temps des Gitans ?

Beirut, c’est un sacré truc zarbi. Un concept, ou au choix un faux groupe, derrière lequel se cache un ado américain, Zach Condon. Condon est un minot qui tout seul dans son coin, en utilisant une kyrielle d’instruments dont certains plutôt exotiques (accordéon, trompette, ukulelé, plus toute une panoplie de claviers et synthés), a fait le meilleur disque manouche depuis (qui a dit Thomas Dutronc ? attention, je vais me fâcher, là) … depuis, j’en sais foutre rien (ça y est, j’ai réussi à placer foutre et Condon dans le même paragraphe, j’suis content de moi, là …), parce que c’est pas le genre de trucs que j’écoute (qui a dit Kusturica ? n’aies pas peur, tu dois avoir raison …).
Bon, je reprends, et faudra que pense à arrêter de picoler avant d’écrire des coms, ça va finir par se voir que je suis pas à jeun … Donc, le gamin Condon, qui avait pourtant largement de quoi satisfaire ses goûts pour le folk antique dans son Amérique natale, est parti pendant plusieurs années tracer la route en Europe, et plus particulièrement dans cette région que l’on appelait autrefois Mitteleuropa (l’Autriche-Hongrie, la Prusse), poussant des pointes vers les Balkans et une visite en Irlande. Et c’est la vieille musique de ces endroits-là qu’il nous ressert. Qui n’a rien à voir avec les chansons populaires ( ? ) des teutons à quelque fête de la bière, mais une musique remplie des sonorités les plus plébéiennes, rurales, de ces contrées. En gros, les tziganes, roms, et autres gitans.
Evidemment, personne n’attendait ce disque. A l’origine de onze titres, très rapidement les versions Cd ont rajouté les cinq titres d’un EP (« Lon Gisland ») paru dans la foulée, et qui n’apporte pas grand-chose, si ce n’est un instru celtisant qui semble un peu perdu et hors-sujet dans le contexte.
Dès les premiers titres, on se dit que « Gulag Orkestar » est génial, avec ses ambiances tziganes, ses chœurs lancinants (« The Gulag Orkestar » le titre), ses ambiances bavaroises tristes (« Prenzlauerberg »), et ses mélodies parfois enjouées (« Brandeburg », et surtout « Postcards from Italy », pour moi d’assez loin meilleur morceau de l’album).
Au bout de quelques titres qui ont tendance à furieusement se ressembler (mêmes tempos, mêmes orchestrations, mêmes arrangements, même façon pour Condon de placer sa voix, …) on se dit que c’est quand même un peu toujours pareil, et que ça commence à devenir lassant.
On est finalement soulagé quand ça s’arrête, parce que ce bousin finit par gonfler grave, toutes ces variations infimes sur le même thème …
Un disque finalement révélateur d’une époque, où il semble que tout a déjà été dit et entendu mille fois, et où la moindre idée, la moindre trouvaille, le plus petit gimmick, sont montés en épingle pour qu’ils apparaissent au pékin d’auditeur qui ne sait plus où donner du conduit auditif, comme la trouvaille du siècle émanant d’un génie en devenir de la chose musicale. Et même si le rendu n’a pas grand-chose à voir, je trouve le résultat assez proche dans l’esprit de ce que font quelques autres hâtivement qualifiés de surdoués, comme les surfaits Sufjan Stevens ou Kevin Barnes, le type de Of Montreal … des gars qui semblent avoir tout dit après un enchaînement de quelques bons titres, et qui se répètent jusqu’à l’écœurement…


JERRY LEE LEWIS - LAST MAN STANDING (2006)


Retour de flamme

Rapide coup d’œil sur les étagères de ma discothèque : hormis les compiles, mon disque le plus récent de Jerry Lee Lewis est le « Live au Star Club de Hambourg » de … 1964. Et donc un trou béant jusqu’à ce « Last man standing » de 2006. Composé de 21 morceaux, 21 collaborations avec tout le gotha des anciens du rock. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne s’agit pas d’une réunion poussive d’anciens combattants, mais bien d’une énorme réussite. Le casting est stupéfiant, manquent juste Dylan, Chuck Berry et quelques autres de moindre acabit, c’est dire le niveau.
Tout commence avec « Rock’n’roll » et Jimmy Page à la gratte. La cathédrale de heavy-rock qui ouvrait le 4ème Led Zep devient, passée à la moulinette Jerry Lee Lewis, ce que son titre annonce, un pur morceau de rock’n’roll. Et on voit ensuite défiler des gens comme Springsteen ou Mick Jagger, que l’on n’avait pas vu à ce niveau depuis des lustres (« Evening gown » semble rescapé des séances d’ « Exile on Main Street »)
Suivent des légendes du blues (B.B. King, Buddy Guy, évidemment Clapton sans lequel un tribute ne se ferait pas), de la country (Merle Haggard, Kris Kristofferson, Willie Nelson), des collègues de promotion des années 50 (Little Richard), qui viennent batailler avec le Killer sur des standards blues, rock’n’roll et country (sur la fin du Cd, manière de rappeler aux foules que de tous les précurseurs de sa génération, seul Jerry Lee a eu une carrière country digne d’intérêt).
Quasiment tous les titres mériteraient une citation. A 71 ans, Jerry Lee Lewis devenait la « révélation » musicale de l’année. Elle est pas belle la vie ?
Tiens, et il vient de se marier, Jerry Lee … Pour la septième fois …

Du même sur ce blog :


FUCK BUTTONS - TAROT SPORT (2009)


With God on my side ...

J’étais tranquille, j’étais peinard, chez moi, en train de chercher un gimmick pour mon prochain com, quand j’ai vu le Grand Véhicule se garer en face la porte. Un type est entré. Je l’ai toisé d’un œil torve :
- Eh, Dieu, te gêne pas, fais comme chez toi, entre sans frapper …
- Comment tu m’as reconnu, Lester ?
- Facile, Très-Haut, tu es coiffé comme Clapton à l’époque de Cream, et puis tu fumes le Havane.
- Je vois que j’ai affaire à un connaisseur. Et dis-moi, qu’est-ce que tu fous, là ?
- Ben, Votre Grandeur, j’essaye de trouver un plan pour ma 574ème chronique de Muddy Waters.
- T’en as pas marre de te faire chier avec cette musique de grabataires ? Pense à tes jeunes lecteurs de cinquante ans, parle d’un disque pour eux, d’un disque électronique …
- Mais j’y comprends rien moi, à la musique électronique, Tout Puissant. Vous voulez que je parle de David Guetta ?
- Et pourquoi pas des Boards of Canada, tant que tu y es ? La musique électronique, y’a rien à comprendre. Tiens, écoute ça, par exemple.
Par je ne sais quel prodige, du bruit se fit entendre…
- Euh, Mon Seigneur, c’est à la bonne vitesse, là ?
Dieu haussa les épaules.
- Et c’est qui, Votre Sainteté ?
- Les Fuck Buttons, ignare.
- Gloups, les Fuck quoi, Votre Altesse ?
- Les Fuck Buttons de Bristol. Tu connais Bristol au moins ?
- Oui, Majesté, bristol, c’est du papier pour les faire-part ou les invitations …
Dieu se regarda et donc, leva les yeux au ciel.
- Pfff … mais non, Bristol, la ville de Portishead et Massive Attack. Tu les connais eux, au moins ?
- Affirmatif, Mon Prince, les tristos qui font du dub au ralenti …
- N’importe quoi, enfin, passons … Les Fuck Buttons sont la dernière sensation de Bristol. Ce disque, c’est leur second, produit par Andy Weatherhall et …
- ‘Scuzez moi, Grand Timonier, mais Weatherhall, c’est un grabataire aussi, il remixait les Rita Mitsouko y’a vingt ans.
- Tu veux que je déclenche sur toi ma colère forcément divine ? Ferme-là et laisse moi t’expliquer … Les Fuck Buttons, c’est deux gars qui font de la musique électronique, l’un influencé par le post-rock de Mogwai, l’autre par la drone music, « Metal Music Machine » de Lou Reed, ce genre de choses …
Les Fuck Buttons en train de faire tapisserie ...
- Putain, ça craint tout ça, Votre Eminence …
- Espèce de chochotte, tu n’y comprends rien, c’est de l’avant-garde, c’est forcément bien … et tais-toi quand je parle. Donc « Tarot sport » jette un pont entre ces genres novateurs et est construit comme une longue odyssée sonore, avec tous les titres enchaînés et de longues séquences de transition entre eux. Note que la plupart des morceaux (exclusivement instrumentaux, aucune voix, même trafiquée, n’est décelable), durent pratiquement tous dix minutes, ce qui permet d’installer les ambiances hypnotiques et répétitives nécessaires. Et qu’on retrouve dans ces titres des choses qui renvoient à la plupart des courants de la musique électronique des vingt dernières années. Il y a de la house, du big beat, de la drum’n’bass, de la trance, de la jungle, plein de choses pour réveiller plein de souvenirs chez les connaisseurs. Note qu’on n’est pas dans l’ambient, ça bastonne au niveau des BPM, y’a des morceaux où on s’approche des 150. Et puis, c’est un disque qui fonctionne d’autant mieux qu’on l’écoute très fort. Tu suis ?
- Oui, mon Général. Un peu comme avec Ted Nugent, plus on monte le son, plus c’est bon …
- Mon Moi ! Mais que me suis-je fait pour mériter pareil obscurantisme …
- Non, je charrie, Votre Honneur, c’est pas si mauvais que ça en a l’air. Tiens, D’ailleurs y’a des morceaux qui ressemblent à Air. Enfin, Air repris par les Prodigy ou Orbital …
- Tu vois, quand tu veux, tu peux dire des choses à peu près sensées. Donc tu vas laisser tes vieux croûtons habituels, et tu vas dire du bien de ce disque des Fuck Buttons dans ton misérable blog … Et on discute pas, c’est un ordre …
- Comme il vous plaira, Sire … Mais euh, Votre Altesse, vous croyez que ça va intéresser quelqu’un les Fuck Buttons ?
- C’est l’avenir de la musique.
- Ah bon, si vous le dites, Excellence … Inch’Allah.
En me jetant un dernier regard courroucé et méprisant, Dieu me quitta …

THE BESNARD LAKES - ... ARE THE DARK HORSE (2007)


Beauté crépusculaire

Un couple de Montreal, Québec, sur un label indépendant, qui sort des disques dans les années 2000 … ça vous fait penser à personne ? J’en vois qui sont abonnés aux Inrocks et qui hurlent « Arcade Fire ! ». Perdu, je parlais d’un bon groupe … Celui dont au sujet desquels il est question là présentement est The Besnard Lakes. Les qui ?
Les Besnard Lakes, groupe formé autour de Jace Lasek, un rat de studio d’enregistrement (le sien, spécialisé dans le rock indie plutôt undergroung), et sa moitié Olga Goreas. Tous deux multi-instrumentistes et chanteurs, compositeurs et of course producteurs de ce « … are the Black Horse ». Black Horse ? ça vous fait aussi penser à un autre canadien ? Neil Young ? Gagné … enfin presque, Neil Young surtout à son époque guitares distordues de la fin des années 80, circa « Freedom – Ragged glory – Weld ». Parce que les Besnard Lakes (un vrai groupe, au-delà du couple leader) prennent un malin plaisir à étirer leurs morceaux, tartinées de guitares lancinantes qui rappelleront aussi les furieux freaks d’Hawkwind, les Warlocks, voire le shoegazing.
Mais les guitares ne sont qu’un accessoire comme tant d’autres, voir la liste impressionnante des instruments présents sur ce disque, on ne risque pas de confondre Besnard Lakes avec le Brian Jonestown Massacre. Il y a sur ce « … Black Horse » des mélodies à la pelle, bien en avant, et tout le monde chante ou fait les chœurs, mettant en place des harmonies vocales évoquant les Beach Boys tristes de « Surf’s up ». Rajoutez  à cela des titres résolument optimistes (« Disaster », « Devastation », …) et les textes barrés-flippants qui vont avec, et vous obtenez un disque qui empeste la descente d’acide, la fin de trip noirâtre …
Evidemment, du glauque’n’roll de ce genre, beaucoup s’y sont essayé. Peu ont cependant réussi à en tirer quelque chose de majestueux. Les Besnard Lakes y sont parvenus, et ce disque est pour moi une des meilleures rondelles des dix dernières années. L’album suivant (« … are the roaring night »), empêtré dans une sophistication progressive et pompière (pléonasme), ne sera malheureusement pas du même niveau …

AMY WINEHOUSE - BACK TO BLACK (2007)


Lady Soul ou Lady Heroïne ?

On va pas refaire l’histoire, la réécrire … Encore moins faire une bio ou une nécro. Je bosse pas aux Pompes Funèbres du rock… Il est des destins qui s’écrivent tout seuls, sans que qui ce soit ait à les forcer. Et celui d’Amy Winehouse était tellement prévisible, qu’il n’y aura finalement que tous les Pujadas de JT qui ont pu feindre la surprise ou l’incompréhension quand elle a clamsé.
Pour moi, Amy Winehouse, ça restera un putain de bon disque qui à lui seul a relevé le niveau des années zéro. Un disque pour les vieux, tous ces grabataires qui savent que Wilson Pickett ou Marvin Gaye ne sont pas des rugbymen. Un disque de vieille soul américaine. Et là où ça prenait une tournure surréaliste, c’est qu’il était fait par une jeune Anglaise de vingt-trois ans. Tatouée avec un mauvais goût de docker, coiffée comme Aretha « Lady Soul » Franklin ou Dusty « In Memphis » Springfield, fringuée comme une pute roumaine de bord d’autoroute…
Et pourtant ça n’avait pas très bien commencé. J’avais entendu une pub à la radio, avec un type qui baragouinait un truc du genre : « Avec Amy Winehouse, la nouvelle révélation soul, revivez la légende Tamla ». Derrière, en fond sonore, des extraits de « Rehab », 45T éclaireur de ce « Back to black ». Tamla de la soul ? C’est nouveau, il me semblait plutôt que c’était Stax ou Atlantic. Comme quoi les directeurs marketing des maisons de disques sont même pas foutus de promouvoir correctement des artistes exceptionnelles comme Amy Winehouse. Parce que moi, ce que j’entendais, c’était des « no, no, no » gospel et cette voix grave et soyeuse, naturelle. On sentait pas la technique d’une Castafiore braillarde comme chez toutes ces fuckin’ québecquoises dont on nous gave depuis cent ans … Le flash … quelques jours après, le Cd est sorti et a tourné plus que de raison dans le lecteur.
Un Cd sur lequel il n’y a pas grand-chose à jeter, à l’opposé d’un single malin entouré de sinistres daubes. Un truc cohérent, avec une couleur et une unité de son homogène. Dus à un assemblage hétéroclite, celui d’un jeune producteur tendance Mark Ronson, et de vieux de la vieille, les Dap Kings, musiciens de studio du label revivaliste soul américain Daptone Records qui végétaient dans l’anonymat comme backing-band de Sharon Jones, leur star inconnue … Emmené par des simples ô combien évidents, « Rehab », « You know I’m no good », « Back to black », « Love is a losing game », qui arrivèrent à concilier tendances, courants et chapelles a priori antagonistes, surfant sur un retro-futurisme-revivalisme-machin (de toutes façons, depuis en gros le milieu des seventies, tout n’est que rabâchage permanent), Amy Winehouse récolta un succès aussi bienvenu que quelque peu démesuré, comme le music-business et le buzz savent si bien les générer, dès lors qu’ils sentent entre leurs pattes quelque personnage hors-normes. On s’aperçut même qu’elle avait sorti un disque auparavant (« Frank », que j’ai pas réussi à écouter jusqu’à la fin mais qui m’a tout l’air épouvantable). Le reste s’écrira à la une des tabloïds, la toxique diva se révélant totalement destroy et nettement plus punk que tous les Blink Chose et Sum Bidule réunis.
Certains lui prédisaient une carrière à la Aretha Franklin, elle choisira une courte vie à la Janis Joplin … Reste ce « Back to black » miraculeux qu’on ne se lasse pas d’écouter …

THE DANDY WARHOLS - WELCOME TO THE MONKEY HOUSE (2003)


Un disque qui a la pêche ...

Un des groupes les plus aimés de la critique rock mais qui n’a jamais vraiment réussi à recueillir les suffrages du public. Vitrine ambulante de tous les fantasmes rock’n’roll, les Dandy Warhols de Portland, Oregon, ont au tournant des années 2000, sorti une poignée disques plus ou moins bordéliques, mais réussis, avant de s’enliser, de tomber dans l’auto-parodie, et de n’intéresser plus personne.
Et contrairement à ce que pourrait laisser croire la pochette de ce « Welcome to the monkey house » (leur quatrième et dernier « bon »), ce Cd ne se situe pas quelque part entre « Sticky fingers » et le 1er Velvet Underground. S’il faut à tout prix le définir, ce serait plutôt un hybride entre glam-rock et boucles technoïdes.
Après un premier titre « bizarre » déboule le magnifique « We want to be friends » et la machine à plaisirs (sonores) s’emballe. Les quatre branleurs malicieux menés par Courtney Taylor (bis) progressent d’inventivité à chaque album. Qui en ce début de triste siècle, était capable de faire se côtoyer des morceaux aussi classiques, purs et efficaces que « We want to be friends » (très énorme titre), « We were the last high » (avec Evan Dando des Lemonheads), les ballades « Heavenly » et « I am sound », recevoir l’adoubement de Bowie himself pour la crétinoïde « I am a scientist », et enrober l’ensemble du Cd d’arrangements travaillés et subtils parsemés de boucles techno ? A mon humble avis pas grand monde.
Alors, même si ce disque n’est pas forcément le meilleur des Dandy Warhols (pour ça, voir plutôt les deux précédents « … come down » et « Thirteen tales from urban bohemia »), il mérite quand même largement le détour. On parle (dans l’indifférence générale) d’un nouveau disque ces jours-ci …

PHARRELL - IN MY MIND (2006)


Le son du vide ...

Envie de sucer un Esquimau ? Pharell Williams 2006

Produire des titres qui se retrouvaient systématiquement au sommet des hit-parades US est une preuve, sinon de de talent, du moins d’un certain sens du pragmatisme sonore. Même si tout ce rap et ce pseudo r’n’b produit par les Neptunes, c’est surtout de la soupe pour MTV addicts.
Etre un surdoué des studios d’enregistrement est une chose. Etre capable d’écrire un morceau en est un autre. Pharrell (Williams), moitié des suscités Neptunes, le prouve avec ce « In my mind ». Des compositions d’un vide abyssal sont brillamment mises en son. Idéal pour tester sa nouvelle stéréo …
Pourtant tous ceux qu’il a hissés (Gwen Stefani, Snoop, …) vers  les sommets des charts tentent (sans trop de conviction d’ailleurs) d’aider Pharrell à accoucher de quelque chose qui pourrait ressembler à une chanson.
Certains avaient qualifié Pharrell de nouveau Prince, de nouveau James Brown, de nouveau génie de la musique noire …
Les mêmes  doivent confondre Grands Corps Malade et Bob Dylan …





BABY SHAMBLES - SHOTTER'S NATION (2007)


Piqûre de rappel ...

Finalement, ce qui est le plus étonnant avec Pete Doherty, c’est qu’il soit encore vivant. Tant il a été présenté (en forçant le trait ?), comme un junkie irrécupérable, et un type ingérable humainement. De la chair à fantasmes pour journalistes poursuivant une certaine esthétique de la déglingue rock, ou le sensationnel à mettre en une de leurs tabloïds.
Des emblématiques proto-clashiens Libertines, qui n’arrêtent pas de se séparer et de se reformer depuis plus de dix ans, de ses rapports pour le moins étranges avec son pote Carl Bârat, de ses dérives le faisant voyager de l’obscurité des prisons anglaises aux flash des paparazzi quand il avait Kate Moss à son bras, … Doherty se rêve poète décadent, peaufine inlassablement ses titres pour ensuite les jeter sur des disques bâclés et foutraques, et joue souvent jusqu’à la caricature son personnage de clodo bling-bling.
En principe, la came est planquée dans le chapeau de Doherty ...
Mais ses disques n’en demeurent pas moins attachants, dans lesquels alternent coups de génie et fumisteries totales. Ils sont pleins de rock déglingué, approximatif. Beaucoup de tripes et pas trop de technique. Du rock comme on l’aime.
Et tant qu’à faire, il y a même sur ce « Shotter’s nation » un morceau fantastique. « Delivery » il s’appelle. Plus ou moins démarqué du « All day and all of the night » des Kinks. En tout cas, une merveille pop.
Le reste est pas mal non plus. Meilleur que le « Down in Albion » précédent, qui était sympathique certes, mais aussi furieusement bordélique. « Shotter’s Nation » est un disque à l’ancienne, comme à l’époque du vinyle. 40 minutes, 12 morceaux courts. Ce qui évite le remplissage, et permet d’aller à l’essentiel. Des rock « clashiens » (« Carry on up the morning »), des ballades titubantes (« Unbilotitled », « There she goes »). Et preuve que Doherty a du talent, il reçoit l’adoubement de Bert Jansch (guitariste exceptionnel et légende du folk anglais pour une de ses dernières participations à un disque) qui vient gratouiller sur le très bon titre acoustique final, « Lost art of murder ».
Bonne production claire et limpide  de Stephen Street (producteur « historique » des Smiths et de Blur), ce qui nous change du fouillis sonore de Mick Jones le coup d’avant.
« Shotter’s Nation » n’est pas le disque du siècle, mais un des meilleurs venus de la perfide Albion en l’an de grâce 2007. Ce qui n’est déjà pas si mal.
Ah oui, j’oubliais, ce disque est paru sous l’intitulé Baby Shambles. Personne n’a été dupe. Même si Baby Shambles est un « vrai » groupe, c’est uniquement la chose de Doherty …