Les Metallica, comment dire … bon, je dis rien, vous
avez compris … que dans leur période tignasse folle, jeans sales,
trash-speed-machin métal à fond, je m’en foutais complet … et qu’ensuite (après
le très successful « Metallica – The Black Album »), avec leur look
tout en cuir destroy genre figurants de « Mad Max – Fury Road »),
j’ai trouvé leur musique pas trop moche, mais bon …
Il y a un truc commun à tous les chevelus qui jouent
vite et fort, c’est que ce sont des bosseurs (les masses laborieuses du rock),
t’es fan et t’en as pour ton argent (sur skeud, en live, on sabote pas le taf)
et des types qui aiment bien rendre hommage à leur héros. Alors après les
millions de dollars et une paire de disques siamois de classic rock lourd (« Load
/ Reload ») ayant laissé quelques franges de leur public dubitatif, les
Metallica payent leurs dettes. A tous ceux qu’ils aiment. Et sortent donc un
disque entier de reprises, ce « Garage, Inc. ». Et pour que la fête (?)
soit complète, rajoutent une autre rondelle argentée regroupant les reprises
déjà commises depuis leurs débuts …
Bonjour le pavé. Deux fois plus d’une heure de
Metallica qui joue autre chose que du Metallica. Quoique … ceux qui attendaient
un medley Etienne Daho ou Culture Club seront déçus, mais ils doivent pas être
nombreux … Le « Garage, Inc. » stricto sensu (la première rondelle)
c’est du Metallica « d’avant ». Tous les potards sur onze et à fond
la caisse, de quoi ravir les fans des débuts. Surtout qu’on peut subodorer vu les
groupes de quatrième zone repris, que les versions des quatre de la Bay Area
sont supérieures aux originaux. Qui hormis quelques malentendants bas du front en
a quelque chose à cirer des punks crétins de Discharge, ou des hardeux de fond
de tiroir comme Mercyful Fate ou Diamond Head ? Groupes moqués à l’époque
par leurs congénères, alors, presque vingt ans après … Quand Metallica
s’attaque à des références autrement moins comiques, la situation se complique.
Reprendre du Black Sabbath ou du Blue Öyster Cult de la « grande
époque » (« Sabbra Cadabra », « Astronomy »), c’est
prendre le risque de se frotter à la comparaison avec les originaux. Et la
comparaison n’est pas flatteuse pour Metallica. Manque évident de comment dire,
finesse ? Surtout à cause de Lars Ulrich, bourrin comme c’est pas possible
derrière ses peaux, qui envoie un tempo systématiquement frénétique que les
autres doivent suivre. Mais comme c’est lui le boss, ça moufte pas derrière.
Hetfield, lorsqu’il ne braille pas de façon gutturale montre des lacunes vocales
béantes (moduler c’est pas son fort) …
On peut quand même reconnaître aux Metallica d’avoir
des cojones quand ils vont baguenauder en dehors de leurs sentiers battus et
rebattus. Se frotter à du Bob Seger, du Thin Lizzy, du Lynyrd Skynyrd ou plus
improbable encore, du Nick Cave, si c’est pas de la prise de risque, je veux
bien rejoindre le fan club d’André Rieu … et qui dit prise de risque dit aussi
sortie de route. Reprendre Seger sans avoir rien de soul ou de bluesy dans le
buffet, ça le fait pas … Reprendre Thin Lizzy sans un minimum de groove dans la
besace, ça le fait pas non plus, d’autant plus qu’il s’agit de l’ultra
classique de Lynott et ses boys (« Whiskey in the jar »). Pour le morceau
des Lynyrd, y’a de la triche, les quatre de Metallica étant rejoints (la
reprise a été faite pour les besoins d’une émission de radio) par une cohorte
de potes plus ou moins hardeux (venus de Alice in Chains, Primus, Corrosion of
Conformity, …) auxquels se rajoute le vétéran survivant de Skynyrd, le
guitariste originel Gary Rossington. Du coup, avec des claviers, des chœurs et des
types qui essayent pas de jouer plus vite que leur ombre, la farce prend et ce
« Tuesday’s gone » revisité, il est pas mal du tout …Reste à débattre
du cas du « Loverman » de Nick Cave. Titre anecdotique d’un disque
anecdotique (« Let love in ») de l’Australien, il est traité façon
Nick Cave des débuts quand il foutait les jetons à son public par son
extrémisme du temps de Birthday Party. Et même s’il n’y a pas cette folie hurlante,
(la reprise des Metallica se contente d’un quiet / loud braillé), je trouve ce
traitement réussi et ce titre est pour moi le meilleur de ces deux rondelles …
Le second Cd, c’est du déjà vu (et entendu). Se
trouvent compilés toutes les reprises déjà parues depuis leurs débuts. En commençant
par le sympathique « Garage days re-revisited » de 87 (dont le recto
de pochette sert de verso à « Garage, Inc. »), à une époque où les
Metallica fonçaient d’abord et réfléchissaient ensuite s’ils avaient le temps. Suivent
une litanie de titres disséminés sur des faces B, titres sur lesquels on (re)trouve
les références habituelles du groupe, les catastrophiques punks 80’s anglais
(Anti-Nowhere League), la seconde division du hard 70’s (Budgie), et la
troisième du hard 80’s (les inévitables lourdauds de Diamond Head).
Qui a dit que les Metallica n'avaient aucun humour ? |
Restent (j’en zappe volontairement quelques-uns) une
reprise de Queen et quatre de Motörhead. Bon, Queen. Faudra que les gens
comprennent une bonne fois que Queen c’est un des très rares groupes à prendre
au second degré (comme les Mothers de Zappa et peut-être les vingt dernières
années de Bob Dylan). C’est du mauvais goût poussé dans ses derniers
retranchements (mais sans le dire, ce qui permet le malentendu). Donc livrer
une version métal bourrin de « Stone cold crazy », c’est totalement
crétin et totalement à côté de la plaque … Quant aux titres de Motörhead, ils
sont révélateurs de l’écart qui peut exister entre un maître et des élèves
appliqués mais pas très doués. Première victime sur « Overkill », le
Lars Ulrich, incapable de reproduire le tir de barrage de la double grosse
caisse de Philty. Pourtant il nous les avait bien brisé depuis deux heures avec
sa frappe de mammouth en rut. Passons sur le bassiste (de toutes façons la
pièce rapportée de Metallica depuis la mort de Burton) qui n’arrive pas à la
cheville de Lemmy (et on ne parle là que du jeu de basse). Hetfield a beau
essayer de grogner et Hammett de mitrailler des solos bruyants, ça le fait pas …
trop tendres, les Metallica …
Arrive dès lors la question cruciale : à quoi
peut bien servir cette double galette ? A mon humble avis à pas
grand-chose, les fans retrouveront le Metallica « perdu » depuis le « Black
Album » (« Garage, Inc. » s’est bien vendu, leur banquier a été
ravi), et les autres auront la démonstration qu’en plus de faire généralement
des disques insupportables, les Metallica aiment des trucs tout autant
insupportables … CQFD ?