Avec un blaze pareil, c’est pas gagné (et encore
quelquefois on l’appelle Israel Nash Gripka, et ne me demandez pas pourquoi). Tu
pars dans la vie avec un prénom qui te donne envie de buter tes parents
tellement il est lourd à porter, et un nom qui peut faire croire que t’es le
fils d’un Anglais, co-boulet avec Crosby de Stills et Young …
Ben non, Israel Nash, c’est pas le fils de Graham
Nash, et c’est tant mieux pour lui, dans la musique comme ailleurs, l’ombre
tutélaire des géniteurs se révèle souvent assez pesante … N’empêche, le Israel,
il a sorti ces derniers temps un disque qui va faire croire que c’est le fils à
Neil Young, pour rester dans la famille des Beatles américains.
Ce type est un rustique parmi les rustiques, et
semble vomi du néant, ou plutôt des seventies (ou d’un « Spinal Tap »
hillbilly) avec son look de baba barbu, qui s’entête à n’enregistrer dans son
trou à rats du Missouri qu’avec du matos vintage tant au niveau des instruments
que de la console (c’est lui qui produit, en plus, le gars sait ce qu’il veut et
a vu le résultat, les capacités pour arriver à ses fins), il a fait un des
meilleurs disques des années 70 qu’est pas sorti dans les années 70. On aurait
envie d’écrire logiquement. Sauf que parmi les multitudes en manque d’imagination
qui copient-collent les antiques générations, bien peu se hissent à ce niveau
bluffant.
C’est bien simple, « Rain plans », il
aurait pu sortir tel quel dans la disco de Neil Young, avant (ou après, peu
importe) des choses comme « After the gold rush » ou « Harvest ».
Et non, je déconne pas … Suffit d’écouter le skeud, c’est la pure vérité vraie.
« Rain plans », c’est du folk qui s’ouvre au monde du rock, qui évite
le pensum austère du type assis dans la pénombre avec sa guitare acoustique s’évertuant
à tisser un répertoire que pourront reprendre des scouts à la veillée ou Cabrel
en panne d’inspiration … D’ailleurs Israel Nash il a sorti un disque de folk
plein de grattes électriques, et pas qu’un peu, mais qui jamais ne s’enlisent dans
le gros son hardos.
Neil Young, c’est évident, plus souvent que de
raison, mais sans pour autant qu’on puisse crier au plagiat. Totalement dans l’esprit
et profondément différent, ne serait-ce que par la mise en avant de la pedal
steel guitar, peu usitée dans la disco du Canadien. Si « Who in time »,
l’énormissime sommet du disque qu’est le titre « Rain plans », « Iron
on the mountain », ou « Mansions » (on the hill ??), c’est
pas du Young style pur sucre, je veux bien m’inscrire au fan-club de Stromae
(les plus perspicaces l’auront noté, ça fait deux coms successifs dans lesquels
je cite ce trisomique musical, mais j’y peux rien, je viens de le désigner
comme héritier indiscutable des Mumuse, Coldplay et Radiomachin, catégorie
Belge triste une fois …).
Bon, revenons-en à notre folkeux. Ouais, Neil Young,
mais aussi le père Dylan. Dont « Woman at the well » qui ouvre le
disque (country-rock pépère, mélodie « facile ») et « Rexanimarum »
(qui le clôt en un parfait symétrisme et mériterait de devenir le « Knockin’
on heaven’s door » des années 2010) auraient pu telles quelles relever le
niveau de nombre d’albums du Zim dans les seventies …
Curieusement, au mépris de tout sens mercantile
(quelqu’un a-t-il dit à Israel Nash que des gens pourraient avoir envie d’acheter
ses disques ?), c’est l’entrée de ce « Rain plans », en gros les
trois premiers titres, qui est la plus faible. Enfin, faible, façon de parler,
c’est le reste qui fait très fort.
Meilleur disque de l’année (dernière).