Glam, vous avez dit glam ?
Puisque c’est le terme sous lequel on a qualifié le
groupe à ses débuts (et même par la suite, il y a des raccourcis faciles qui
ont la vie dure). Parce que faudra qu’on m’explique … le glam, c’est le début
des années 70 en Angleterre, T.Rex, Bowie, Roxy, Sweet, Slade, Glitter, … en gros
tous ces types maquillés comme des camions portugais, les platform shoes, les
paillettes, et les riffs de Chuck Berry et Eddie Cochran remis au goût du jour
…
Vingt ans plus tard, que trouve t-on de tout ça chez
Suede ? En cherchant bien, la voix parfois maniérée et théâtrale de Brett
Anderson, quelques trucs de « The Drowner » qui évoquent le T.Rex de
la fin (que personne n’écoutait plus), des intonations à la Brian Ferry solo
sur « Sleeping pills », à la limite la construction de « Animal
nitrate », le titre « Metal Mickey » qui fait penser au
« Metal Guru » de T.Rex, la musique n’ayant rien à voir… ce qui fait
peu de choses, et il doit y avoir plein de disques de pop à guitares (car c’est
plutôt de cela qu’il s’agit) qui font plus penser à Ziggy et sa clique que cette première rondelle de Suede …
Bon, je vais pas non plus jouer les linguistiques de la
musique de djeunes. Qu’on l’appelle comme on veut, reste qu’il est pas mal ce
disque. Il a quand même pris un bon coup de vieux (lui aussi), et impressionne
beaucoup moins aujourd’hui que lors de sa sortie …
Porté par une série de singles éclaireurs
(« Animal nitrate », « The drowners », « Metal
Mickey »), ce « Suede » connaîtra un gros succès, dans une
Angleterre un peu à la ramasse, subissant le raz-de-marée américain du grunge,
la vague Madchester n’étant déjà plus qu’un lointain souvenir, et la britpop de
Blur, Oasis, Pulp et consorts, encore en gestation.
Un disque qui a du succès est aussi un disque dont on
parle. Le bon peuple briton (et d’ailleurs) s’était offusqué de la pochette
quand il avait appris que c’était deux jeunes garçons qui s’y roulaient une
gamelle, et ça avait fait jaser dans les chaumières … baîllements …
Mais si Suede n’a jamais vraiment joué dans la cour des
très grands, le groupe a sorti quelques disques qui se laissent écouter (les
deux- trois premiers) avant la débandade et bien sûr la reformation, et
Anderson a sorti des disques solo jugés
intéressants par les maniaques du genre.
Ce qu’on retient surtout de ce « Suede », c’est
la mise en avant du duo Anderson – Butler, le premier étant un de ces grands
chanteurs maniérés et lyriques que les ménagères adorent, cultivant look
hémophile fin de race et poses de dandy. Le second est le Johnny Marr des
années 90, à savoir un guitariste (mais il joue aussi du piano) considéré par
ses pairs comme le meilleur de sa génération, mais qui est resté à peu près
inconnu du grand public.
« Suede » le disque s’articule en gros autour
de titres électriques très « rock » (surtout les singles), alternant
avec ballades (mention particulière à la très réussie « Pantomime horse »)
qui flirtent parfois avec du pompier lyrique (notamment « Sleeping pills » qui dans son
final renvoie aux grandiloquences de Freddie Mercury, ce qui n’est pas
forcément une bonne idée). Le tout est enrobé par une production abusant parfois
un peu trop beaucoup de toutes sortes d’échos qui finissent par devenir
pénibles…
Entre phénomène de mode et conjugaison de deux réels
talents, Suede est un de ces groupes quelque peu oubliés aujourd’hui … il mérite
quand même mieux …