Les débuts du rock’n’roll se devaient d’avoir une image, une icône. Ce fut Elvis (aux débuts, parce que les sandwiches au beurre de cacahuètes l’ont vite épaissie, l’image). Il leur fallait une guitare. Ce fut celle de Chuck Berry. Et une voix. Aucun doute possible, c’est celle de Little Richard. En effet, qui d’autre que le futur ex-révérend Penniman peut symboliser le chant du rock’n’roll, cette diction hystérique qui allait secouer l’Amérique du milieu des années 50, avant de faire succomber à ses rythmes le reste de la planète ? La voix de Little Richard sauve cette compilation, car ce Cd n’est pas terrible : moins de 40 minutes au compteur, une présentation non chronologique, un son pas génial (no remasters), un visuel tout moche, … Les plus grands classiques sont là (« Lucille », « Long tall Sally », « Good Golly Miss Molly », « et l’indépassable « Tutti fruti »), mais quelques morceaux de plus et une présentation plus soignée n’auraient pas été du luxe. Vu la multitude de compilations de la première « folle » du rock sur le marché, on peut facilement trouver mieux que ce Cd sorti sur un label improbable, Bescol ( ? ), aux temps préhistoriques du support.
Il y a de fortes chances que ce soit lui, Jerry Lee,
le Highlander du rock. De toutes façons, ils ne sont plus que trois, de ces
années cinquante rock’n’roll … Chuck Berry est aux fraises, s’entêtant en vieux
grigou qu’il a toujours été, à donner des concerts pathétiques (il a 85 ans,
ceci explique peut-être cela, mais faut savoir raccrocher la Gibson, papy …),
la fofolle Little Richard a mis sa carrière en pointillés depuis plus de 50
ans. Et tous les autres sont morts …
Jerry Lee Lewis et sa femme : sa cousine Myra, 13 ans ...
Jerry Lee Lewis, lui, ce serait plutôt le
Trompe-la-Mort du binaire. Donné
refroidi un nombre incalculable de fois, tant on l’a hospitalisé dans des états
critiques dus à une hygiène de vie outrancière sur bien des plans, ayant réussi
on ne sait trop comment à ne pas crever en prison … car il a été dans le
désordre accusé et jugé pour, en vrac, pédophilie (il avait épousé une fille de
treize ans, sa cousine en plus …), bigamie (il avait « oublié »
de divorcer de la précédente), multiples fraudes fiscales, voies de faits avec
arme innombrables, … Il a aussi été entendu par les attorneys pour la mort
suspecte (y gagnant son défintif surnom de Killer) de deux de ses sept ou huit
femmes successives (l’une étrangement noyée dans la piscine familiale, l’autre
ayant pris une bastos en pleine tête quand Jerry Lee nettoyait son flingue, ces
deux-là, comme par hasard, voulant divorcer et ramasser quelques dollars au
passage). Or, plus près de ses sous que Jerry Lee, malgré les efforts louables
de quelques-uns, y’a pas …
Et malgré tout ça, musicalement, Jerry Lee Lewis
reste encore crédible, publiant, certes de plus en plus épisodiquement, des
disques qui tiennent étonnamment bien la route (« Last man standing »
en 2006 par exemple). Certes assez loin de ce qu’il a fait à ses débuts sur le
label Sun de Sam Philips. Parce que chez Sun, en cette seconde moitié des
années cinquante, y’avait des clients … Pas tous en même temps, mais se sont
tout de même succédés dans le petit studio de Nashville, Presley, Perkins,
Cash, Orbison, pour ne parler que des plus connus … et Jerry Lee Lewis donc.
Pas très académique, mais efficace ...
Un Jerry Lee qui a passé ses années glorieuses chez
Sun en équilibre entre le rock’n’roll le plus sauvage et la country
« habitée » et énergique. S’appuyant sur son « pumping
piano », dans un style ultra-destroy pour l’époque, venu des honky-tonk
louisianais où il a grandi, et une voix toute en syncopes, changements de tons
et de rythmes. Une marque de fabrique inégalable et inimitable. Même si ses pièces
d’anthologie (Whole lotta shakin’ going on », « Great balls of
fire », « High school confidential » et
« Breathless ») viennent de l’aspect rock’n’roll de sa carrière,
Jerry Lee, qui a commencé par enregistrer de la country, ne délaissera jamais
la plouc music, et à partir des années 60, en fera le genre dominant de ses
productions studio. Chez Sun, il alternera les enregistrements dans les deux
styles, à l’image de son voisin d’écurie Carl Perkins. Et puis, Lewis sera un
de ceux qui reprendront le plus les standards contemporains confirmés, pas
toujours avec bonheur cependant (on ne se frotte pas impunément, et quelque peu
en dilettante semble t-il, à des choses comme « What I’d say » de Ray
Charles ou « Good Golly Miss Molly » de Little Richard), mais le
dynamisme de jeune chien fou de Lewis et quelques descentes du revers de la
main des touches d’ivoire arrivent dans la plupart des cas à faire passer la
sauce.
Cette compilation parue sur le label Varese, et
consacré aux rééditions d’oldies, (un peu comme Rhino, le prestige en moins),
fait défiler dans un ordre à peu près chronologique les standards, évidemment,
mais se distingue de la multitude de celles sur le marché par la sélection de
quelques pièces country ou de reprises peu connues du répertoire de Lewis.
C’est allé tellement vite le concernant (Holly est
mort un an et demi après ses premiers succès), et l’essentiel des galettes sur
le marché étant des compilations, que par facilité (surtout commerciale ?),
on a oublié maintenant que Buddy Holly faisait paraître des disques sous deux
noms différents, en solo et avec les Crickets. Subtilité des contrats de
l’époque, et qui ne change rien, c’étaient les mêmes personnes (les Crickets et
l’auteur-producteur Norman Petty) que l’on retrouvait derrière lui sur tous les disques.
Ce « Buddy Holly » est le troisième et
dernier disque publié par Buddy Holly. On pourrait même dire le second, tant
celui d’avant « That’ll be the day » n’est déjà qu’une compilation de
ses premières séances d’enregistrement, séances qui ne comprennent pas, hormis
le morceau-titre, aucun de ses titres d’anthologie. Ici, par contre, ça se
bouscule (« Peggy Sue », « Everyday », « Valley of
tears », « Words of love », « Rave on », il faudrait à
peu près tous les citer).
Buddy Holly & The Crickets
Buddy Holly est un des rares de cette époque-là à ne
pas faire du rock’n’roll. Ou plus exactement pas que du rock’n’roll. C’est LE
mélodiste des années 50. Et ce n’est
pas un hasard si le Lennon des débuts s’efforcera de lui ressembler,
physiquement (la photo de la pochette, non, non, ce n’est pas Lennon au tout
début des années 60) et baptisera son groupe d’abord les Silver Beetles en
hommage aux Crickets. L’influence de Holly sur cette musique que l’on appellera
pop est considérable. Celle se son producteur, auteur ou co-auteur Norman Petty
reste plus ambiguë. On a longtemps cru qu’il était l’homme de l’ombre, celui
sans qui Buddy Holly n’aurait pas été grand-chose. La tendance maintenant, au
vu d’archives et de témoignages des rares rescapés de l’époque, serait plutôt
d’en faire une sorte de Colonel Parker, plus intriguant que talentueux,
uniquement crédité sur les morceaux de Holly grâce à des conditions
« toutes particulières » du contrat
qui les liait. La vérité doit se situer entre les deux, Petty ayant quand même
prouvé avant ou après sa collaboration avec Buddy Holly que c’était un musicien
doué, et pas un simple escroc …
Ce « Buddy Holly » démontre deux choses
que tout le monde devrait savoir, mais une petite piqûre de rappel ne fait
jamais de mal … La première, c’est qu’on ne touche pas à un titre chanté par
Little Richard sans prendre le risque de se couvrir de ridicule (« Ready Teddy » ici). La
seconde, c’est que Holly alignait en 1958 des chansons époustouflantes à une
cadence infernale, les cinq titres bonus ajoutés aux douze originaux sont rien
moins que « That’s my desire », « Think it over »,
« Fools paradise », « Well all right » et « Take your
time ».
Bon, évidemment, aujourd’hui que sont disponibles
des légions de compilations bien foutues et même une intégrale de 6 Cds
contenant à peu près tout le matériel enregistré par le natif de Lubbock, ce Cd
pas souvent et pas toujours réédité
dans des conditions optimales, fait un peu figure de parent pauvre dans la
discographie de Buddy Holly. Il n’en est pas moins excellent …
Woody Guthrie, aujourd’hui, ce doit être comme les
productions de chez WARP, il doit plus rester que trois pékins que ça
intéresse. Il faut quand même une bonne dose d’abnégation pour à l’heure des
Black Eyes Peas ou Coldplay triomphants, s’enquiller dans les esgourdes ce
« Dust bowl ballads » … ou un machin des Boards of Canada …
Parce que Woody Guthrie, c’est du rêche, du brut de
décoffrage. Une voix, une guitare sèche, et quand par hasard (et pas souvent)
il y a une traînée d’harmonica, çà prend de suite des allures d’épopée
wagnérienne. Ajoutez un son garanti d’époque qui crachote et grésille à
tout-va, et on a largement de quoi rebuter le spectateur de base de
« Taratata » …
Woody Guthrie et son arme de destruction massive ...
Et pourtant, la descendance spirituelle de Woody
Guthrie est à peu près infinie. C’est le premier véritable chanteur
« engagé » américain, qui tire son inspiration de sa propre situation
(guère reluisante, c’est un prolo atteint d’une maladie nerveuse irréversible
et mortelle, on peut trouver plus glamour comme CV) ; mais aussi et
surtout de celle de ses semblables, tout ce petit peuple américain qui a pris
la crise de 1929 et la Grande Dépression qui a suivi en pleine poire.
Ce « Dust bowl ballads » dans sa version
actuelle de 2000 est une réédition augmentée, d’une série d’enregistrements
thématiques de Guthrie réalisés vers 1940. Placés sous la double influence des
« Raisins de la colère » de Steinbeck (des chansons sont consacrées à
Tom Joad, un des héros du roman, interprété la même année par Henry Fonda dans
le film de John Ford), et des tempêtes de sable bien réelles qui ont touché
l’Oklahoma où vivait Guthrie et qui rajoutées aux effets de la crise de 1929,
ont provoqué un exode massif vers la Californie …
Guthrie est considéré comme le père spirituel de
tous les folkeux « engagés ». Sauf que les titres originaux de
Guthrie sont à peu près tous de la country music pur jus, ne s’aventurant que
rarement dans le registre parlé du folk de l’époque, et ne s’inspirant guère
malgré certains intitulés de morceaux (« Talkin’ dust bowl blues »,
« Dust pneumonia blues », « Dust bowl blues ») du blues des
Noirs, autres parias de la société américaine … Cette country music en solo met
en valeur les mélodies légèrement sautillantes, qui se teintent parfois de la
syncope du rag (« Do Re Mi »).
Les textes, socialement positionnés (pour l’époque
s’entend), sont eux construit d’après des formes littéraires répétitives (il
faut capter l’attention, trouver des formules imagées, égrener plusieurs fois
les vers) qui tirent leurs origines de la nuit des temps (les tragédies
grecques, les chansons de geste, …). C’est uniquement au niveau des textes que
l’on peut rattacher Woody Guthrie aux folk singers des sixties.
Car la « descendance » de Guthrie sera
pléthorique. D’abord dans les années 50 avec Pete Seeger et surtout Ramblin’
Jack Elliott son véritable « héritier », ensuite la décennie suivante
avec évidemment Dylan (qui soit dit en passant n’a fait que suivre et copier
Elliott, jusque dans ses visites à l’hôpital new-yorkais dans lequel Guthrie a
fini ses jours), et tous ses plus ou moins disciples à guitares sèches et feux
de camp …
Guthrie était un radical (son fameux sticker
« This machine kill fascits » apposé sur sa guitare dès le début des
années 30), un des premiers artistes à prendre fait et cause pour le New Deal
de Roosevelt. Ceux qui se réclament de lui ne sont aujourd’hui que des
centristes du rock. Avec mention particulière à Springsteen, qui a aussi
utilisé le personnage de Tom Joad pour un de ses titres d’albums, et chanté un
des morceaux de ce « Dust bowl ballads » (« Vigilante
man »), sur l’album de reprises (« Folkways, a vision shared »)
qu’ont consacré à Woody Guthrie et son
équivalent noir et blues Leadbelly tous les Hervé Morin du rock (Dylan, U2,
Mellencamp, …). Lequel « Folkways …» n’était qu’un remake d’un double
vinyle de 1972 ( « A tribute to Woody Guthrie ») qui voyait déjà les
François Bayrou de l’époque (Judy Collins, Richie Havens, Dylan bien sûr
évidemment, …), s’attaquer live au répertoire de leur inspirateur…
Le doo- wop est un genre musical qui, cycliquement,
revient au goût du jour. A l’origine fait par des noirs pour des noirs aux USA
à la fin des années 50, il va voir son public s’élargir tant il se pose
(involontairement) comme l’antithèse du rock’n’roll naissant : chansons
minutieusement répétées, bons chanteurs, harmonies vocales impeccables, tenues
de scène irréprochables …
Cette mode va générer une infinité de groupes,
n’ayant souvent gravé que quelques morceaux, ce qui fournira une matière
première inépuisable pour une multitude de compilations.
Celle-ci se situe bien dans la lignée générale (même
si les puristes du genre ne comprendront pas forcément ce que certains artistes
ou morceaux ici présents ont à voir avec le doo wop). 1/3 des titres sont des
classiques incontournables, un autre tiers est constitué d’enregistrements plus
obscurs, et un dernier tiers fait du remplissage, en fonction des contrats
d’édition et des droits récupérés par les compilateurs.
Un Cd sympathique et plaisant, mais certainement pas
la référence absolue du genre.
Ils passaient à la télé et à
la radio quand ils n’étaient que deux gamins chantant, au début des années 50 …
bien avant les déhanchements d’Elvis le Pelvis. Et donc, comme ils se
plaisaient à le faire remarquer lors de leur fabuleux « Reunion
concert » de 1983, le rock’n’roll, ouais, c’est bien joli, mais eux ils
étaient déjà là avant …
Même si leurs premiers succès
ne datent réellement que de la fin des années 50, et même si tout n’a vraiment
commencé qu’avec « Bye bye love » en 1957. Un titre comme une marque
de fabrique, un thème gentillet, une mélodie immédiatement mémorisable, et Don
et Phil Everly qui chantent… d’une façon unique, instantanément reconnaissable.
Toujours à l’unisson, et pas seulement sur les refrains, sur tout le titre …
Pas une nouveauté, des duos, voire des groupes chantant, la country music (et
son public) en était particulièrement friande, de toutes ces voix de tête à
fort accent campagnard et redneck vocalisant de concert.
Everly Bros fin 50's
Les Everly eux ont une diction
parfaite et délaisseront très vite la stricte country de leurs débuts pour
s’orienter vers une variété haut de gamme. Leur synchronisme vocal parfait, à
une époque ou le re-recording n’existait pas et encore moins Auto-Tune,
l’évidence des mélodies et les arrangements somme toute très grand-public, très
centristes des morceaux, vont les installer pendant presque dix ans au sommet
des hit-parades américains.
Comme beaucoup à cette
époque-là, ils pourront s’appuyer sur les morceaux clés en main fournis par un
jeune couple d’auteurs-compositeurs Felice et Boudleaux Bryant, qui leur
écriront l’essentiel de leurs créations. Et comme tout le monde, les Everly
Brothers constelleront leur répertoire de reprises choisies de Little Richard,
Buddy Holly, Roy Orbison, … Ils reprendront même le « Je
t’appartiens » de Gilbert Bécaud (oui oui, on parle bien du même, du type en costard noir et Adidas blanches
( ! ) des shows de Maritie et Gilbert Carpentier) qui adapté en « Let
it be me » sera un de leurs plus gros succès. Les Everly ne se
cantonneront jamais aux romances adolescentes pour lesquelles ils étaient à peu
près sans équivalents, ils n’auront pas peur, à l’inverse de stars centristes
reconnues (Sinatra, Warwick, …), de se frotter à du rockabilly (« Wake up
Little Suzie »), voire du rock’n’roll tout ce qu’il y a de plus roots
(« Bird dog », « Claudette », « Lucille », …).
Everly Bros - Reunion Concert Septembre 1983
Le premier des deux Cds de
cette compilation (50 titres en tout) est le meilleur. De 1957 à 1961, les
Everly Brothers ont aligné avec une régularité de métronome des titres
colossaux, de la lente ballade countrysante « Maybe tomorrow » à
l’angélique « Take a message to Mary », en passant par la très pop
« Cathy’s clown » (devenue « Le p’tit clown de ton cœur »
une fois reprise par Hallyday), l’himalayenne « Walk right back » qui
n’a rien à envier aux productions Motown ou Spector, la pièce montée baroque
« Temptation ». Mention particulière à « All I have to do is
dream », tout simplement une des plus belles chansons du monde …
Le second Cd, jusqu’aux
disputes qui entraîneront la « séparation » des deux frangins au
milieu des seventies, est un ton en
dessous. Même s’il débute par « Crying in the rain », qui donne
vraiment envie de chialer tellement c’est beau, et qu’il pleuve ou pas …
Insensiblement et insidieusement, la qualité intrinsèque des titres décline, au
profit d’arrangements de plus en plus fignolés et tarabiscotés, qui voit les
Everly se livrer à des choses vocalement ahurissantes et insensées. Laissant de
côté les mélodies simples et chansons évidentes. Le succès s’en ressentira, peu
de titres iront tutoyer le haut des charts, et l’enlevée « The price of
love » sera en 1965 leur dernier grand hit.
Les dernières années du duo
paraissent quelque peu désuètes, qui les voit s’entêter sur la recette qui a
fait leur fortune, avec des orchestrations de plus en plus sirupeuses. Cette compilation
se conclut par « On the wings of a nightingale » de leur excellent album
de come-back « EB 84 ». Ce
titre est signé d’un de leurs illustres fans, Paul McCartney, c’est un de ses
meilleurs morceaux à lui des quarante dernières années, et servi par les voix
intactes des frangins, ça le fait …
Ce qui amène à dire quelques
mots sur l’influence que Don et Phil Everly ont eu sur le milieu musical. Assez
impressionnante, il faut bien dire. Des gens comme les Beatles ou les Beach
Boys ont commencé à répéter leurs propres harmonies vocales en prenant comme
modèle les Everly, Simon et Garfunkel en particulier leur doivent absolument
tout, et d’une façon générale tous les duos chantants se sont inspirés de leur
travail (Sonny & Cher, Carpenters, Righteous Brothers, Starsky & Hutch,
Stone et Charden, …).
A noter que leur live de
« reformation » (« Reunion concert ») est un colossal tour
de chant, certaines de leurs chansons se voyant transcendées par le live (et
aussi un super backing band) …
Enfin rayon people, Erin
Everly, fille de Don Everly et groupie notoire du L.A. des années 80, a été
l’espace de quelques jours ( ! ) mariée à l’intergalactique crétin Axl
Rose …
Stoller, Presley et Leiber pendant les séances de Jailhouse Rock
En une dizaine d’années à cheval sur les 50’s et les
60’s, ces deux new-yorkais ont laissé à la postérité ce que l’on appelle une
« œuvre ». Auteurs de plus de bonnes chansons chaque mois que
Barbelivien en 40 ans, on retrouve leurs merveilles généralement dispatchées
sur les disques des figures majeures de cette époque-là. Même si
actuellement quelques compilations
leur sont dédiées.
Celle-ci est une de leurs première, sortie à l’origine
en double 33 T en 1980, et qui présente une partie de leurs hits. Une partie
car il manque quelques interprètes prestigieux
Et surtout Elvis Presley (mais question de
droits ?) pour lequel ils ont composé des choses comme « Hound
dog » ou « Jailhouse rock » (excusez du peu …)
Cette compile commence avec Big Mama Thornton et
LaVern Baker jusqu’aux succès solo de Ben E. King. La moitié des titres est
consacrée aux seuls Coasters et Drifters. Au générique quelques titres qui ont
été de gros succès adaptés en français : les Cheers de « Black denim
trousers … » (« L’homme à la moto »), les Coasters de « Along
came James (« Zorro est arrivé ») ou « Three cool cats »
(« Nouvelle vague »), …
Et tiens, messieurs-dames d’Atlantic, vous pourriez
profiter (comme d’habitude dans ces cas-là) de la mort cet été de Mike Leiber
pour rééditer ce « Only in America » (du titre éponyme et gros succès
de Jay & the Americans) en Cd… En n’oubliant pas Elvis …
La période artistique la plus
cruciale d’Elvis se termine en mars 1958, avec son départ sous les drapeaux.
Ce « Loving you », à l’origine B.O. du
film du même nom, est donc un disque de la « bonne époque », puisque
datant de 1957.
Mais il ne contient pas un seul de ces immenses
morceaux dont le King parsème sa discographie pléthorique des années 50. Et
même si des trucs comme « Teddy Bear », « Party »,
« Blueberry Hill », « Have I told you …», « When it rains …
» (cette
dernière datant de ses premiers enregistrements Sun) valent leur pesant de beurre de cacahuète, on sent qu’Elvis a déjà nettement
évolué depuis les mythiques Sun Sessions.
Le colonel Parker est passé par là, qui commence à
tirer fort sur la corde de sa poule aux œufs d’or. Tournées, shows télé, films,
séances studio … Ce « Loving you » sent la cadence infernale à
laquelle est soumise Presley.
Alors, même si tout ce qu’il touche se transforme en
or, les vraies pépites sont tout de même assez rares dans ce Cd.
P.S. Même s’il s’agit d’une B.O., c’est bien le band
légendaire (Scotty Moore, Bill Black, D.J. Fontana , les Jordanaires) qui
accompagne Presley.
Sam Cooke, référence ultime de Rod Stewart, a été révélé
par la dure école du gospel, avant de devenir
l’idole de la jeunesse black américaine (surtout les filles) au début
des années 60, grâce à un répertoire où se mélangent soul, pop et rock.
Tous les titres présents sur ce court Cd (30 minutes)
sont des hits certifiés, mettant en valeur cette voix d’une facilité, d’une
aisance et d’une souplesse stupéfiantes.
Abattu en pleine gloire par un mari jaloux, Sam Cooke ne
profitera pas de son immense succès, et est honteusement oublié aujourd’hui.
Malgré l’âge de cette édition (1987), le son est correct
et le Cd permet de découvrir ce fabuleux chanteur.
Cd à ranger à côté du live « Harlem Square
Club », témoignage incandescent du magnétisme qu’exerçait Sam Cooke sur
son public.
Premier volet d’une compilation en 3 Cds, comprenant
également « Rockin’ the classics » (axé sur des reprises), et
« Rocking the country » (comme son nom l’indique, répertoire de plouc
music).
Essentiellement consacré aux titres créés par le
Killer chez Sun. Du classique, du lourd (« Great balls of fire »,
« Whole Lotta shakin’ goin’ on », « High school confidential »,
« Breathless »…), ses classiques les plus connus et les plus remuants
(d’où le titre de la compilation) sont là. Quelques reprises, (« Ubangi
stomp », « What I’d said »), quelques titres plus obscurs, en
tout 22 pépites de la meilleure période de Jerry Lee Lewis.
Ce « Rockin’ up the storm » à peu près introuvable
aujourd’hui faisait partie d’une gigantesque fournée de rééditions Cd du début
des années 1990 du catalogue Sun (hormis Elvis, question de droits) des
artistes majeurs du label de Sam Philips.
Surboum dans les maisons de retraite Il faut être né avant 1945 pour avoir connu
ça : la déferlante twist qui a envahi la France en 1961-1962, se
transformant vite en vague yé-yé.
A l’origine de ce mouvement, une chanson, « The
Twist » par Hank Ballard & the Midnighters aux USA. Un quasi-bide.
Reprise quelques semaines plus tard par un certain Ernest Evans sous le pseudo de Chubby Checker, elle va devenir un
gigantesque succès mondial, porté par une danse du même nom.
Chubby Checker n’ira pas chercher plus loin un plan
de carrière, répétant jusqu’à l’écœurement des copies conformes de son hit. En
France, plus que partout dans le monde, tous s’y mettront (Hallyday, Mitchell,
Rivers, …), adaptant, traduisant, reprenant note à note les morceaux de
Checker.
Lequel, même s’il continue encore sa carrière de roi
du twist (il a vendu des dizaines de millions d’albums), n’aura artistiquement
été qu’une parenthèse dans l’histoire musicale américaine, entre les pionniers
du rock’n’roll et l’invasion des Beatles.
La musique de Chubby Checker n’a plus aujourd’hui
qu’un intérêt très mineur. Cette compilation n’y apporte rien de plus, desservie
par un packaging sommaire, un son asthmatique et une égalisation approximative
des titres. Quant aux morceaux présents, il n’est même pas sûr qu’il s’agisse
des versions originales, Chubby Checker les ayant réenregistrés plusieurs fois.
1er « vrai » disque de Little Richard (après quelques enregistrements anecdotiques auparavant) pour le label Specialty. Paru en 1957, ce Cd studio s’ouvre par un des plus grands (sinon le plus grand) morceaux de rock’n’roll de tous les temps, « Tutti Frutti », avec sa voix hystérique, son rythme irrésistible, et ses onomatopées à la place des paroles. Quelques décalques de l’hymne absolu sont aussi présents (« Ready Teddy », « Jenny, Jenny », et l’autre classique du Cd, « Long Tall Sally »), au milieu de morceaux plus apaisés mais tout aussi magnifiques (« Rip it up »).
La plus fabuleuse voix ayant jamais chanté du rock’n’roll est ici présente à son état brut, originel. Rigoureusement indispensable.
J’ai lu quelque part que si on n’aime pas ce disque, c’est qu’on n’aime pas le jazz …
Le jazz, j’aime pas, et j’assume … Miles Davis, mégalo, hautain, prétentieux, et j’en passe, c’est pas le genre de personne avec qui j’aurais aimé boire un coup … Sauf que s’il faut causer musique, je sais qu’il se pose là, et pas qu’un peu … Respecté, voire admiré, par tous ceux qui taquinent (ou maltraitent) la gamme …
Donc, « Kind of blue », qu’il soit ou pas le meilleur disque de Miles Davis, le meilleur disque de jazz ou de ce qu’on voudra, toutes ces considérations de musicologues cacochymes, on s’en fout … Reste le résultat, cette rondelle qui tourne dans le lecteur … Et là, c’est parfait … plus que ça, même … un disque qui laisse loin derrière tout le reste … ou pratiquement…
Un des plus grands trucs qu’il m’ait été donné d’écouter …
Johnson, Waters, Hooker … Ceux-là sont pour moi la sainte Trinité du blues. Robert Johnson a creusé les fondations du blues moderne, Muddy Waters a construit la maison bleue, et John Lee Hooker l’a repeinte en noir.
Hooker dans toute son œuvre est là pour nous rappeler que le blues, c’est aussi la musique du diable … sombre, comme l’éternelle mine renfrognée du bonhomme, remplie de sourdes menaces … Transmises par le groove lent qu’il donne aux douze mesures, avec le meilleur de ses titres à ses débuts (en gros, jusqu’à la fin des 50’s), quand seul avec sa guitare électrique toute en méchante saturation, le pied droit martelant la mesure (on l’entend parfois), John Lee Hooker nous livre une série de classiques immortels.
Et même si on trouve pas le message dans ses chansons, c’est bien Hooker, qui bien avant James Brown, mettra le mieux en exergue la formule « I’m Black and I’m proud ». Hooker n’est pas un simple amuseur pour rades minables enfumés de Chicago, il y a dans son interprétation quelque chose de fier, quasi hautain, dans sa voix grave tellement aisément reconnaissable, dans la façon lente et menaçante d’égrener notes et mots. John Lee Hooker est dans tous les sens du terme, le plus noir des bluesmen …
Cette compilation en deux Cds assez courts (une cinquantaine de minutes chacun), malgré les quatre décennies musicales en principe abordées, a la bonne idée de zapper à peu près totalement les années 70, 80 et 90, qui pour Hooker comme pour tous ses collègues, ne les virent pas à leur meilleur niveau.
Le premier Cd est fabuleux, les premiers enregistrements des 50’s pour l’essentiel, Hooker seul avec sa guitare, pour une litanie de pépites inusables. Les titres d’anthologie de sa carrière. Rien à jeter …
Le second Cd est logiquement un petit ton en dessous, axé sur les années 60. Même si l’on y trouve quelques classiques (« Boom Boom», « One bourbon, one scotch, one beer », « Shake it baby », …), le son se fait plus étoffé (choristes, claviers, cuivres, autres guitares, …) noyant quelque peu dans la masse de productions qui se veulent clinquantes, la six-cordes et la voix du Maître. En final de Cd, les collaborations, avec Cannet Heat, adeptes du boogie lent et monolithique qui ont eu la bonne idée de faire profiter Hooker de leur popularité et de le sortir de l’oubli, et plus tard dans les 80’s, les titres avec les incontournables de ce genre de duos mais beaucoup plus anecdotiques Roy Rogers ou Bonnie Raitt.
Cette compilation étant signée Rhino et connaissant le sérieux du label spécialisé dans les rééditions, on peut supposer que la plupart des titres les plus anciens sont les « vraies » versions originales, Hooker, comme nombre de ses collègues, était en plus de Chess, signé sur plusieurs autres micro-labels, et n’avait eu de cesse de réenregistrer pendant des années la plupart de ses titres, laissant une discographie pléthorique et labyrinthique…