ALICE COOPER - FROM THE INSIDE (1978)


 Shock Corridor ?

Résumé des épisodes précédents : Alice Cooper était un groupe censé représenter le double maléfique de son chanteur Vincent Furnier. Après quelques années de disques plutôt bons, voire plus pour certains (« Killer », « School’s out, « Million dollar babies », liste non exhaustive), de grosses ventes, des concerts très courus et de plus en plus spectaculaires, exit le Alice Cooper Group, et place à Vincent Furnier solo sous le nom d’Alice Cooper. Qu’est-ce que ça change, me direz-vous ? Sur le papier pas grand-chose, même si la perte du bassiste Dennis Dunaway, architecte sonore des débuts, va se traduire par un changement de tonalité musicale. Le premier disque solo, « Welcome to my nightmare » est le plus gros succès de « groupe ». Faut dire que Furnier a conservé son atout maître : le producteur canadien Bob Ezrin. Qui va le suivre pour encore deux albums, puis jeter l’éponge. En cause, le comportement totalement erratique de Furnier. Qui a fini par réellement devenir schizophrène, totalement alcoolo (il avouera quelques années plus tard consommer par jour une centaine de bières et deux litres de bourbon, euh … vraiment, t’exagérais pas un peu quand même quand tu prétendais ça, Vincent ?). Résultat des courses : un internement plus ou moins volontaire fin 77 en hôpital psychiatrique pour une « remise à niveau ».

Vincent Furnier 1978

Et musicalement, au niveau de son entourage, nouveau départ. Aux paroles, Bernie Taupin, certainement rencontré sûrement au comptoir d’un bar, quand on connaît le goût pour la picole du partner in crime d’Elton John. A la direction de l’orchestre, Dick Wagner (du duo siamois Hunter-Wagner, remember le « Rock’n’roll animal » de Lou Reed) compagnon de route du Coop depuis plusieurs années. Est rassemblé un équipage pléthorique, au sein duquel on trouve des requins de studio très cotés (Jim Keltner aux fûts), et d’autres en devenir (Rick Nielsen, futur Cheap Trick, Lukather et Kimball, futurs Toto), et une armada de choristes. A la production, un autre Canadien, David Foster, aux déjà nombreux (mé)faits d’armes …

« From the inside » est en quelque sorte un concept-album autobiographique, inspiré par l’internement du Vincent. Vraiment vécu ou résultat d’un brainstorming avec Taupin ? J’en sais rien et je m’en cogne un peu beaucoup si vous voulez savoir. Parce que de toute façon et de n’importe côté qu’on l’envisage, « From the inside » ne fait pas partie de ce que l’homme au boa a fait de mieux. Même si attention, vu le casting et le pognon de dingue comme dirait l’autre guignol, il y a de quoi dans cette rondelle pour attirer le chaland, et le banquier d’Alice a été bien content … Pour situer, « From the inside » pour Alice Cooper, c’est un peu comme « Dynasty » pour Kiss. Le disque carrément à l’assaut des passages radio. Sauf qu’ici pas de tube inoxydable et putassier à la « I was made for lovin’ you ». Même si avec « How you gonna see me now », le Coop s’est essayé au hit consensuel, qui ne sonne finalement que comme un fond de tiroir de l’Elton John de l’époque, et qui n’a vraiment été qu’un succès … en Belgique.

Alice Cooper 1978

J’ai cité Elton John. Et j’assume. Je sais pas si c’est la présence de Taupin ou le fait que beaucoup de titres reposent sur le piano, ou les deux, mais il me semble qu’il y a beaucoup du collectionneur de lunettes dans « From the inside ». « Wish I were born in Beverly Hills » aurait pu avoir sa place sur « Goodbye Yellow brick road », de même que le « How you gonna see me now » déjà cité.  Sinon, ça lorgne parfois vers le baroque, plus ou moins pompier. « Nurse Rozetta » (bonjour le cliché du fantasme sur l’infirmière), fait furieusement penser à la musique du « Rocky Horror Picture Show », et l’ultime, long et tarabiscoté titre final (« Inmates … »), on retrouvera tout ça en bien mieux sur « The Wall » de Waters – Pink Floyd, un disque produit par … Bob Ezrin. Comme quoi tout est dans tout et inversement …

Moi, ce qui me plaît chez le Coop, ce sont ses bons gros riffs méchants. Portion congrue ici, il faut se contenter de l’assez quelconque « Serious » pour avoir quelque chose qui ressemble à du (vrai) rock. Au débit également, la voix malsaine et vicieuse ne drive plus les morceaux, elle fait juste de la figuration sur quelques bribes de titres.


Y’a même un duo assez consternant (avec Marcy Levy ou Marcella Detroit, en fait c’est la même, une ancienne choriste à Clapton), ça s’appelle « Millie and Billie », roucoulade entre deux internés toxicomanes … on est assez loin de « Vol au-dessus d’un nid de coucou », dont « From the inside » s’était de façon assez évidente inspiré …

Allez, une paire de trucs à sauver, « From the inside » le morceau, rock middle of the road sympathique et « The quiet room », entame de ballade mièvre et vaporeuse avant une accélération et un final où l’Alice retrouve sa voix « historique » …

Ce disque très centriste et plutôt mollasson sera une bonne vente, ça permettra au Coop de rajouter quelques numéros tordus et d’autres effets spéciaux gore dans ses concerts, qui seront de plus en plus courus, et la cash machine de l’Alice Cooper Inc. pourra tourner à plein régime …

Il n’empêche, c’est avec ce genre de disques assez inconsistants que le futur partenaire de golf de Donald Trump (‘tain, sans déc’, mon petit Vincent, comment t’as fait pour tomber aussi bas ?) entamera une carrière grand public … Sans moi (ouais, je sais il a pas fait que des daubes depuis plus de quarante ans, y’a quelques trucs passables de temps en temps) …


Du même sur ce blog :