Piqûre de rappel ...
Finalement, ce qui est le plus étonnant avec Pete
Doherty, c’est qu’il soit encore vivant. Tant il a été présenté (en forçant le
trait ?), comme un junkie irrécupérable, et un type ingérable humainement.
De la chair à fantasmes pour journalistes poursuivant une certaine esthétique
de la déglingue rock, ou le sensationnel à mettre en une de leurs tabloïds.
Des emblématiques proto-clashiens Libertines, qui
n’arrêtent pas de se séparer et de se reformer depuis plus de dix ans, de ses
rapports pour le moins étranges avec son pote Carl Bârat, de ses dérives le
faisant voyager de l’obscurité des prisons anglaises aux flash des paparazzi quand
il avait Kate Moss à son bras, … Doherty se rêve poète décadent, peaufine
inlassablement ses titres pour ensuite les jeter sur des disques bâclés et
foutraques, et joue souvent jusqu’à la caricature son personnage de clodo
bling-bling.
En principe, la came est planquée dans le chapeau de Doherty ... |
Mais ses disques n’en demeurent pas moins
attachants, dans lesquels alternent coups de génie et fumisteries totales. Ils
sont pleins de rock déglingué, approximatif. Beaucoup de tripes et pas trop de
technique. Du rock comme on l’aime.
Et tant qu’à faire, il y a même sur ce
« Shotter’s nation » un morceau fantastique. « Delivery »
il s’appelle. Plus ou moins démarqué du « All day and all of the
night » des Kinks. En tout cas, une merveille pop.
Le reste est pas mal non plus. Meilleur que le
« Down in Albion » précédent, qui était sympathique certes, mais
aussi furieusement bordélique. « Shotter’s Nation » est un disque à
l’ancienne, comme à l’époque du vinyle. 40 minutes, 12 morceaux courts. Ce qui
évite le remplissage, et permet d’aller à l’essentiel. Des
rock « clashiens » (« Carry on up the morning »), des
ballades titubantes (« Unbilotitled », « There she goes »). Et preuve que Doherty a du
talent, il reçoit l’adoubement de Bert Jansch (guitariste exceptionnel et
légende du folk anglais pour une de ses dernières participations à un disque)
qui vient gratouiller sur le très bon titre acoustique final, « Lost art
of murder ».
Bonne production claire et limpide de Stephen Street (producteur
« historique » des Smiths et de Blur), ce qui nous change du fouillis
sonore de Mick Jones le coup d’avant.
« Shotter’s Nation » n’est pas le disque du
siècle, mais un des meilleurs venus de la perfide Albion en l’an de grâce 2007.
Ce qui n’est déjà pas si mal.
Ah oui, j’oubliais, ce disque est paru sous l’intitulé
Baby Shambles. Personne n’a été dupe. Même si Baby Shambles est un
« vrai » groupe, c’est uniquement la chose de Doherty …