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DIANA ROSS - ONE WOMAN THE ULTIMATE COLLECTION (1993)

Dirty Diana ?

Ah que non, ce serait trop facile de dézinguer la vieille mémére, la sophisticated diva des années 60 et suivantes. Parce que je vais vous avouer quelque chose, Diana Ross, elle a un truc (le même que Chrissie Hynde ou à un degré moindre Alison Mosshart) : une voix qui fait bander. Ça s’explique pas, … c’est comme ça, la la la …
Et y’a pas qu’à moi qu’elle a du faire cet effet. Dans le lot, il doit y en avoir quelques autres, parce que la Ross, sous son seul nom et avec les Supremes est la recordwoman de ventes de disques dans le monde. Ce qui n’est certes pas un gage de production discographique de qualité … Parce que comme tous les autres, la Ross a assis sa légende sur quelques années de son interminable carrière. En gros, les premières et sa période dite « disco ».
Pourtant ça n’avait pas débuté du feu de Dieu pour la Diana. Un petit groupe chantant, les Primettes, remarqué par Berry Gordy (enfin, il avait surtout remarqué Diana, on y reviendra) et signé sur son label Motown. Et quelques 45T qui se ramassent. Pas glop, l’organisation quasi militaire que Gordy met en place n’aime pas ça, et nombreux sont ceux qui n’auront pas de seconde chance. Faut dire que dans un répertoire « classique », Diana, chanteuse lead du trio rebaptisé Supremes, n’est pas très à son aise, et comme la concurrence est rude, chez Motown et ailleurs, il faut être plus que correct pour grimper dans les charts.
Diana Ross & The Supremes
Berry Gordy, que le minois de Diana Ross ne laisse pas indifférent, s’entête, réquisitionne ses meilleurs auteurs (Holland/Dozier/Holland) au service des Supremes. Deux essais du trio pour régler le tir, et bingo avec le troisième titre « Where did our love go » en 1964, qui deviendra le premier N°1 des filles et un peu la quintessence du son Tamla-Motown. Le monde entier succombe et les Supremes vont alors enchaîner les hits pendant trois ans. Jusqu’à ce que le groupe, sous l’instigation de … Berry Gordy, soit rebaptisé Diana Ross & The Supremes. Sur la lancée, nouveaux hits, mais la belle mécanique commence à s’enrayer, les changements de personnel autour de l’inamovible Ross surviennent, et la formule Motown commence à lasser. De cette période Supremes, on ne trouve sur cette compilation que quatre titres, et encore, le tardif « Reflections » ne fait pas pour moi partie des titres légendaires du groupe.
Diana Ross devient alors en quelque sorte l’ambassadrice de la Motown, la Dionne Warwick de Berry Gordy. Elle participe pleinement au rêve américain, son histoire tient de la success story (quelque peu romancée), et elle qui est issue d’une famille nombreuse, s’entiche d’une troupe de gosses chantants, plus particulièrement du plus jeune, un certain Michael Jackson. C’est elle qui assure leur promotion sur leur tout premier disque « Diana Ross presents the Jackson 5 ».
Pause Closer. Deux questions essentielles reviennent au sujet de Diana Ross. Un : Berry Gordy l’a t-elle pécho ? Oui, elle a eu un enfant de lui (alors qu’elle était mariée avec un autre). Deux : Diana Ross a t-elle dépucelé Michael Jackson ? Rien n’est officiel, il y a de fortes présomptions … Fin de l’épisode presse people …
Diana Ross époque "Diana"
Revenons à cette compile. Les seize titres restants couvrent la période 1970-1993. Evacuons d’emblée les trois derniers des années 90, très mauvais. Le reste rassemble ses morceaux les plus connus, plus ou moins chronologiquement. Dès les débuts de sa carrière solo (comme toutes les autres stars de la Motown, Marvin Gaye ou Stevie Wonder, Diana Ross aura des velléités d’indépendance, mais c’est celle qui renâclera le moins pour rester sur le label, ses liens particuliers avec Gordy expliquant cela), Diana Ross devient une chanteuse centriste, au répertoire très middle of the road, invitée vedette de tous les shows de variété familiaux. Meilleur titre de l’époque, « Ain’t no mountain high enough », grosse pièce montée pop avec orchestration démesurée et quelque peu dégoulinante …
Lentement mais sûrement au cours des seventies, l’étoile de la Ross commence à pâlir. Sont convoqués à la rescousse Bernard Edwards et Nile Rodgers, les rois du disco Chic, chargés d’écrire et produire un disque. Ce sera « Diana » en 1980. Les choses ne se passent pas très bien, la Diana fait ses numéros de diva, et gonfle passablement Edwards et Rodgers. Qui font leur boulot, tout en truffant les lyrics du disque de paroles à double sens. Et si Diana Ross chante maintenant très bien, si elle sait prendre des poses avantageuses sur ses photos, elle … comment dire, ne brille pas forcément par son esprit. Elle piquera une légendaire colère quand elle comprendra des mois après l’avoir enregistré ce que signifie le titre et les paroles de la chanson « I’m coming out » qui feront forcément d’elle une icône de la culture disco gay. Ce titre ne se trouve évidemment pas sur la compilation, mais il y a de cette collaboration avec les leaders de Chic l’imparable « Upside down » qui fera de Diana Ross la rivale et l’égale en terme de succès de toutes les divas disco de l’époque.
Diana Ross 1989
La revoici donc au top, se piquant de gérer au plus près sa carrière, quittant Motown (avant d’y revenir quelques années plus tard), duotant avec Lionel Richie (titre calamiteux mais qui se vendra très bien). Elle n’en poursuivra pas moins son déclin artistique, non sans avoir tenté en 1985 un génial coup de poker avec les frangins Gibb à l’écriture (oui, oui, ceux des Bee Gees). Ce conglomérat de vieilles gloires disco sur le retour va accoucher d’un titre fabuleux, « Chain reaction », mix discoïde insensé du son des Supremes, mélangeant plus particulièrement dans ses influences « Baby love » et « You keep me hangin’ on ».
Evidemment aujourd’hui, vu l’âge de la dame, il n’y a plus rien de bon, même pas de moyen à attendre de sa part. Et on ne fait pas  sur plusieurs décennies une carrière dans la variété haut de gamme, mais la variété tout de même, sans enregistrer des choses très dispensables. Cette compilation le démontre. Les titres avec les Supremes font bien de l’ombre,  c’est le moins que l’on puisse dire, au reste de sa carrière, malgré une poignée de hits disco très recommandables …

GENESIS - WE CAN'T DANCE (1991)


Têtu ...

Non, il ne va pas être question du magazine pour LGBT … mais du qualificatif qui peut s’appliquer à Genesis. Faut vraiment être obstiné pour persister à emmerder la Terre entière aussi longtemps. Les trois gonzos restants au début des années 90 s’accrochent à la musique tels des morpions aux poils dans des entrejambes négligées.
« Tell me why » s’interrogent-ils sur un titre (un dirait une maquette inachevée de Sting, ce truc, c’est dire le niveau). On pourrait leur retourner la question. Pourquoi, oui pourquoi cet acharnement pervers ? Ils auraient pas pu arrêter quand Peter Gabriel, certainement dans un éclair de lucidité s’est cassé au milieu des seventies ? Ou quand le guitariste Steve Hackett a fait de même quelques années plus tard ? Non, pensez donc … les inénarrables Phil Collins, Mike Rutherford et Tony Banks, en plus d’être livreurs de daubes en solo, se sont tout du long des années 80 sentis obligés de faire des disques ensemble. Comme s’ils avaient besoin de fric … Comme si quelqu’un de sensé attendait quelque chose de ces trois pantins …

D’ailleurs même leurs fans des débuts (si, si, il y en eut, et beaucoup) n’y comprenaient plus rien à leurs disques. Les Pieds-Nickelés du prog sortaient des disques de chansonnettes, qui, il faut être honnête, valaient bien celles d’Olivia Newton-John ou des Bananarama. Ce qui place pas la barre très haut. Malgré tout, les vieux couillons baba continuaient d’acheter les disques, rejoints par tous les sourds scotchés aux radios FM. Et durant toutes les 80’s, les Genesis, encore plus mauvais que quand ils étaient nuls (ou le contraire, ça marche aussi), vendirent du disque par camions.
Il me semble même que le jackpot fut atteint avec ce « We can’t dance », pas meilleur ni pire que « Mama » ou « Abacab ». Juste plus long, avec des morceaux de dix minutes. Imagination débordante ? Tu parles, on a tout compris dès le premier titre « No son of mine ». L’intro qui fait frémir avec ses synthés lugubres, la voix de canard cancéreux du Collins, sa batterie hyper-compressée, et sa mélodie pompée sur celle de sa scie casse-bonbons « In the air tonight ». Autant dire que d’entrée les Genesis montraient qu’en matière de pop bas de gamme, ils avaient bien cinq ans et trois modes de retard …
Ce « We can’t dance » est un (inter)minable déballage de ballades pourries (dont certaines, allez savoir pourquoi, ont fait des hits, comme « Hold on my heart »), des espèces de rock variéteux crédibles comme des promesses électorales (« Jesus he knows me »), des machins englués jusqu’au trognon dans des synthés périmés (« Dreamin’ while you sleep »), des …
Bon, ça suffit …
Remets-moi Johnny Kidd …



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MARTIN SCORSESE - CASINO (1995)


Jackpot ...

Par bien des aspects, « Casino » restera comme une sorte d’apogée.
De Scorsese d’abord. Pas le genre de metteur en scène qui se fait bouffer par son scénario ou ses acteurs. Scorsese a un style, une patte. Scorsese montre tout. Et quand il fait des films qui se déroulent dans un milieu violent, il montre la violence. Pas pour le plaisir de remplir l’écran de jets d’hémoglobine, mais parce que la violence fait partie de l’histoire. Et quand la mafia (ici, celle qui dirige en sous-main les casinos de Las Vegas), les millions de dollars, et les montagnes de coke sont au cœur de l’histoire, eh ben, ça bastonne, ça tabasse, ça flingue et ça saigne. Scorsese ne donne pas dans le réalisme façon Bisounours. Au mépris des censeurs et des millions de dollars perdus, lorsque le film quitte le cadre du « public familial » (« Casino » a été interdit aux moins de 17 ans aux USA lors de sa sortie). Cette saga toute en démesure (trois heures, des centaines de « fuck » dans la V.O., soixante crédits musicaux dans la B.O., le Caesars Palace réquisitionné pour le tournage, …) est pour le moment, sinon définitivement, la fin du cycle « mafia contemporaine» de Scorsese, et le second volet d’un diptyque majeur entamé avec « Les Affranchis ».
Scorsese & De Niro
« Casino » est aussi l’apogée, et là aussi semble t-il le terme de la collaboration Scorsese – De Niro. Même si des rumeurs de nouveau film les réunissant à nouveau voient régulièrement le jour. A mon humble avis, si Scorsese est toujours capable de faire de bons films, je vois mal De Niro, à 70 balais, livrer une de ces performances d’acteur que Scorsese a su mieux que quiconque lui extirper, suffit de voir sa reconversion grimaçante en beau-père de Ben Stiller pour se dire que le Roberto a depuis pas mal d’années la tête dans le sac … Un De Niro, qui évidemment, joue dans « Casino » un personnage sinon de mafieux, du moins un type jonglant avec toutes les limites permises par la loi et en relation étroite avec truands et ripoux de tous bords …
Le tandem Scorsese – De Niro en fout plein la vue. « Casino » est avant tout un film à grand spectacle, éclairé par les lumières aveuglantes du Tangiers, et tous ces mouvements hyper-techniques de caméra qui ne se remarquent même pas, la fluidité des séquences est fabuleuse, jamais un effet de trop …  De Niro est le personnage central du scénario, le dépositaire de la toute-puissance maffieuse. Il est autant le moteur de l’histoire, celui qui fait avancer l’intrigue, que celui qui la subit, car il est entouré par deux personnages forts.
Joe Pesci, immense dans ce film. La connexion ritale de Scorsese, évidemment. Pesci livre une performance de truand sauvage et speedé qui n’est pas sans rappeler les numéros de James Cagney dans « L’ennemi public » ou « L’enfer est à lui ». Une présence phénoménale, et pour moi il vole la vedette à De Niro.
Sharon Stone & De Niro
Sharon Stone aussi. Certainement son meilleur rôle (de toutes façons, malgré sa réputation, on ne l’avait vue que dans de furieux navets ou pas loin), pute de luxe, flambeuse et junkie, avec tout au long du film une lente mais sûre descente aux enfers (l’alcool au début, la dope ensuite) qui l’oblige à composer différemment quasiment à chaque scène. Et qu’elle soit au faîte de sa beauté glamoureuse n’est certes pas un handicap …
L’intrigue centrale du film est assez simple. Sam « Ace » Rothstein (De Niro), bookmaker de génie lié à la mafia de Chicago, est envoyé par celle-ci gérer un casino de Las Vegas. Les affaires sont vite florissantes, les valises pleines de billets retournent « au pays ». La situation va se compliquer pour tous quand Rothstein tombe amoureux et épouse Ginger (Sharon Stone) et quand il est rejoint par son ami d’enfance Nicki Santoro (Pesci), par l’odeur du business illégal alléché. Rothstein va dès lors devoir composer avec ces deux ingérables et l’histoire va très mal finir pour la plupart des protagonistes.
Joe Pesci & De Niro
Alors certes, si c’est bien cette triplette qui est essentielle dans le film, et si on ne retrouve que leurs trois têtes sur l’affiche, ce serait faire peu de cas de toute la multitude de personnages secondaires, et de tout un système (celui du jeu en général et de Vegas en particulier) minutieusement décrit par Scorsese. Malgré ses trois heures, de nombreux éléments de l’histoire ne sont pas montrés, ils sont résumés en voix off par Rothstein le plus souvent, voire par Santoro. Certaines choses abordées dans le film auraient pu faire l’objet d’un long-métrage entier : le fonctionnement d’un casino, les techniques de fraude fiscale et de blanchiment d’argent, la corruption du personnel, les tricheurs plus ou moins professionnels, les relations troubles avec la politique, la police et la justice, … autant d’intrigues secondaires dans le film, juste abordées, mais qui en font toute la richesse et la complexité. Faut suivre si on veut saisir toutes les nuances, les allusions, les sous-entendus et les non-dits … Ce qui permet d’avoir au casting toute une galerie de personnages secondaires, du mac minable de Ginger (James Woods), aux gueules pittoresques des pontes de la mafia, en passant par toute une faune d’employés, de petits truands, d’arnaqueurs, de flambeurs, de politicards et de flics ripoux. Même la propre mère de Scorsese est de la distribution …
Joe Pesci & Sharon Stone
Scorsese traite là d’un sujet globalement brûlant, et pour éviter de se retrouver avec une patate trop chaude, transpose l’action dans les années 70 et 80, en précisant dans le final que depuis les choses ont changé. Tout en insinuant que les vétérans de la mafia italo-américaine ont juste été remplacés par les cols blancs des banksters et du monde de la finance en général. Scorsese a aussi modifié (certains survivants, pas beaucoup, l’essentiel de la distribution se fait dégommer avant le générique de fin, pourraient être susceptibles et envoyer au minimum leurs avocats) les noms des véritables protagonistes (les personnages joués par l’essentiel du casting ont réellement existé, et dans ses grandes lignes, le scénario s’inspire de faits réels). Cette véracité de l’histoire fait l’objet d’une incrustation au début ou la fin, je sais plus, et on trouve dans les bonus du BluRay et sur le Net les véritables noms, ce qui n’a à la limite qu’un intérêt tout anecdotique. C’est une histoire, un mode de fonctionnement qui est montré, peu importent les personnages. D’ailleurs Scorsese met vraiment des gants, essayant de nous faire croire dans les bonus que pour lui le thème central de « Casino », c’est la dégradation de la relation Rothstein-Ginger … Hum, Marty, j’ai du mal, j’y crois pas trop, j’avais pas l’impression de regarder un remake de Douglas Sirk. Tiens, tant que je cause bonus et support, autant dire que la version BluRay est somptueuse image et son d’une précision et d’une clarté diaboliques, et les bonus (un survol de la filmo de Scorsese commentée par lui, et une « enquête » sur les véritables personnages ayant inspiré le film) assez nuls pour qui a déjà vu et entendu le débit de mitrailleuse de Scorsese.
Et s’il encore trop tôt pour enterrer Scorsese et faire un palmarès de sa carrière (il a depuis « Casino » sorti des trucs pas dégueus et fourmille encore de projets), « Casino » est un des films qui seront mis en avant pour montrer ce qu’il a fait de mieux. Peut-être pas sa masterpiece, parce que depuis « Mean streets », y’a eu du lourd, du très lourd même, mais sûrement un de ses films majeurs … Question subsidiaire : en a t-il fait de vraiment mineurs ?

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RADIOHEAD - OK COMPUTER (1997)


Computer blues ...

Alors là, attention chef-d’œuvre … c’est ce que vous diront avec des trémolos dans la voix tous les maniaco-dépressifs, et tous ceux qui n’écoutent que de mauvais disques.
Non, non, mes petits chéris, il n’y a pas de quoi se relever la nuit. Tout au plus je serai d’accord avec vous pour dire que c’est un disque intéressant, le meilleur des tristos Radiohead. Des types pourtant prometteurs, dont j’attends encore qu’ils sortent un bon disque. Qui ne viendra jamais, ils sont maintenant trop vieux, trop rances, trop perdus dans leur cérébralité neurasthénique …
« OK Computer » est un disque qui n’eut pas grand mal à surnager dans cette seconde moitié des années 90, à la qualité musicale en chute libre (on avait commencé avec Nirvana et fini avec Mumuse, c’est dire l’ampleur des dégâts) et globalement très affligeante. « OK Computer » est un ramassis assez bien torché de tout ce qui pouvait « fédérer » la génération désenchantée comme disait l’autre. Des choses, des sons, des structures de titres déjà entendus mille fois chez d’autres, vaguement ripolinés d’une humeur morose et d’un pathos geignard. Et comme point de ralliement, la voix sous Prozac pleurnicharde de Thom Yorke. Que je ne supporte pas, il y peut rien et moi non plus …
Musicalement, ça tient globalement assez bien la route. « OK Computer » sera certainement le dernier grand disque conçu pour les chaînes hi-fi, avant que l’hyper compression pour mp3 et iPod lamine tout. Les Radiohead et leur producteur Nigel Godrich, de fait le sixième membre du groupe, ont effectué un travail considérable et le plus souvent réussi sur la structure sonore. « OK Computer » est un disque qui s’écoute, qui ne se subit pas. Avec suffisamment de prise de risques pour se démarquer du troupeau indie-rock dans lequel s’ébrouait jusque-là le groupe.
On a souvent qualifié ce disque de « floydien ». Ouais, si on veut, quand bien même « Subterranean homesick Alien » doit autant à Dylan par son titre qu’aux disques solo de Roger Waters des 80’s. Comparaison plus pertinente quand il s’agit des brouillages radios de l’intermède « Fitter happier » et surtout du très « Echoes » « The Tourist ». Rayon seventies, « Lucky » me semble inspiré par le « Red » de King Crimson, même s’il est juste pleurnichard quand le disque de la chose à Fripp suintait le tragique et le désespéré. Les deux titres les plus révérés m’ont toujours gavé, que ce soit le patchwork « Paranoid android » (du folk, du bruitisme, du chant grégorien, etc, etc …, me fait penser au fuckin’ prog ce machin …), et la ballade qui s’énerve sur la fin comme il y en a des milliards de « Karma Police ». J’ai aussi beaucoup de mal avec cette sorte de heavy metal qu’est « Electioneering », et avec la bouillasse free-rock sans intérêt de « Climbing up the walls ».
Le reste, je suis preneur. Avec mention particulière pour « No surprises » la comptine mélodique simple mais efficace, « Exit music for a film », qui réveille le fantôme de l’excellent Jeff Buckley, pour une fois bien chantée (comme quoi il en est capable, mais pourquoi diable alors ces sempiternels funestes gémissements ?) par Yorke, et la pop-rock de « Let down », sorte de « Ruby Tuesday » des années 90.
Au vu et surtout à l’entendu de ce qu’ils ont fait par la suite (curieusement, j’ai toujours apprécié un de leurs plus ignorés, le politisé « Hail to the thief »), il semble aussi que les Radiohead aient voulu conclure avec « OK Computer » un cycle de leur carrière, s’acheminant de façon de plus en plus kamikaze vers l’électronique envisagée par eux de façon quasi lugubre. Rien que pour ça, ce pied de nez à tous les schémas de rentabilité immédiate, ils auront gagné ma miséricorde …

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In Rainbows



MARTIN SCORSESE - KUNDUN (1997)


Zen, restons zen ...

« Kundun » n’est pas le genre de film qu’on attend forcément de Scorsese. Venant de lui, on compte sur des scénarios sanguins et violents, avec des personnages qui le sont tout autant. Surtout que « Kundun » arrive après « Casino » et « Les affranchis », classiques de son réalisateur. Sauf qu’entre-temps il y a eu le calme et quasi contemplatif « Le temps de l’innocence ».
« Kundun » serait plutôt à rattacher (plus sur le fond que la forme) à « La dernière tentation du Christ », résurgence des jeunes années passées par Scorsese au séminaire, et dont il a gardé un attrait, voire une fascination pour tout ce qui est religieux et mystique. « Kundun » (du nom du premier dalaï-lama de l’Histoire) raconte la jeunesse de l’actuel dalaï-lama. Et comme le type qui s’habille avec les chutes de tissu des tenues des employés de l’Equipement est une de ces vaches sacrées de notre époque qu’il est interdit de critiquer, ce mélange de biopic et de film historique est lisse comme une peau de bébé, respectueux, limite obséquieux. Certes, s’il fallait absolument choisir, mieux vaut une bande de zozos orange pacifistes, que les inventeurs de l’Inquisition ou de la charia. Mais les bouddhistes, ça reste quand même juste une fuckin’ secte (officielle), parole d’athée farouche et féroce dès qu’il s’agit de religion…

« Kundun » s’inscrit dans une mode, très prisée de la pseudo « intelligentsia » du mitan des années 90 visant à une mobilisation favorable à la cause tibétaine. Cause qui en vaut bien une autre, et le film arrive conjointement à une série de concerts des gens de la chose « rock » donnés aux Etats-Unis sous le slogan « Free Tibet » (de l’occupation chinoise), avec en figure de proue le dalaï-lama. Et si l’idée du film remonte au tout début des années 90, elle procède bien de la même démarche, et il n’est pas surprenant que Scorsese, par ailleurs grand fan de rock devant l’éternel ait apporté sa pierre à l’édifice. Ceci étant, on ne trouvera pas dans la BO de « Kundun » trace du « Sympathy for the Devil » des Rolling Stones, c’est un film « sérieux » qui ne mélange pas les genres.
« Kundun » est une prouesse cinématographique, parce que Scorsese derrière une caméra, c’est quand même pas rien. Le Tibet a été « reconstruit » aux studios de Ouarzazate au Maroc grâce à des décors pharaoniques et à quelques retouches numériques. Le casting est uniquement composé de comédiens non professionnels, recrutés partout dans le monde et appartenant tous à la communauté tibétaine exilée. Il était évidemment hors de question de tourner au Tibet, toujours sous tutelle chinoise, et la mise en route du film a entraîné quelques tensions diplomatiques entre la Chine et les USA, quelques mesures de rétorsion économiques de la part de Pékin, une médiation de Kissinger, … la routine de l’étrange ballet diplomatique quasi-permanent entre ces deux états hégémoniques.
Visuellement, « Kundun » est un superbe spectacle, avec des paysages qui n’ont rien à envier à ceux des grands westerns, tout un tas de costumes étranges qui ne surprendront pas les lecteurs de « Tintin au Tibet », et des reconstitutions minutieuses des endroits, des cérémonies et des grands moments qui ont marqué la jeunesse du dalaï-lama. L’histoire montrée commence en 1937 alors qu’il n’a que deux ans et se termine lors de la « fuite » en Inde en 1959, après les premières années d’occupation chinoise et les exactions de son armée … « Kundun » est un film partisan, une hagiographie, limite un film publicitaire pour la « bonne cause ». On devine bien que cette religion étrange, qui fait d’un homme vivant une divinité, une sorte de monarque spirituel à qui tous les égards et toutes les soumissions sont dus (il y a bien à ses côtés un aréopage de conseillers-précepteurs-ministres, mais ils doivent s’effacer devant ses desiderata, les intrigues de ces « courtisans » sont évoquées mais vite éludées). Il convient de préciser que le dalaï-lama en personne a participé à plusieurs reprises au processus de création du scénario, et que tout au long de la préparation et du tournage, sa garde rapprochée de conseillers divers et variés suivait l’équipe du film.
On se retrouve donc avec une sorte de conte de fées religieux, dans lequel les « bons » sont très bons et les « méchants » très méchants. Pas très nuancé, tout ceci. Etrangement, le personnage le plus marquant du film est pour moi Mao, lors des quelques rencontres qu’il a eues avec le dalaï–lama, présenté malgré la dureté des ses propos et de sa stratégie, comme un personnage courtois, séducteur et charmeur … étrange que les consultants bouddhistes n’aient pas cherché à « noircir » davantage le personnage …
Il est clair que c’est le talent de Scorsese qui sauve le film, tirant le maximum des paysages sauvages, des palais tibétains et des costumes, jouant avec les angles de prise de vue, promenant sa caméra au milieu des protagonistes, … S’il ne peut pas glisser quelque vieux rock ou antique blues dans la B.O (confiée à Philip Glass), Scorsese ne peut s’empêcher de glisser un hommage à Méliès (prémonitoire de « Hugo Cabret » ?), à travers quelques films d’époque que regarde un dalaï-lama adolescent. « Kundun » sans quelqu’un du calibre de Scorsese, aurait ressemblé à un documentaire de Stéphane Bern sur une quelconque tête couronnée de la planète.
Reste que cet iconoclaste, ce transgresseur de genre qui a commencé sa carrière comme cameraman à Woodstock et traversé comme ses idoles les 70’s dans un grand nuage de poudres blanches, a livré là une œuvre qu’on pourrait qualifier « de commande », ripolinée et sans aspérités, à la gloire d’une personne dont le but est quand même de retourner exercer sa monarchie théocratique dans son pays … entre ça ou alors les Chinois, ils sont quand même putain de mal barrés, les Tibétains …

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Casino


WAYNE KRAMER - THE HARD STUFF (1995)


The toughest ...

Y’a des noms comme ça, qui forcent le respect. Celui de Wayne Kramer par exemple. Parti de rien pour aller nulle part, et revenu de tout.
Wayne Kramer, l’une des deux guitares du MC5. Déjà, rien que ça, ça suffirait comme carte de visite à des milliards de types qui veulent se la jouer rocker dur. Mais c’est pratiquement une parenthèse dans la vie de Wayne Kramer. Le groupe enragé dissous vers 1972 dans une bourrasque de poudres blanches, Kramer va entamer un périple flirtant avec toutes les limites. Des trafics divers, des affaires un peu chelous pour commencer, et une virée au pénitencier. Rendu à la vie civile, une autre formation sponsorisée par les cartels colombiens, Gang War, avec Johnny Thunders, un autre sacré client en matière de guitares et d’opiacées. Des projets éphémères avec notamment des survivants du MC5 ou des amis-concurrents des Stooges …
Evidemment pareil pedigree n’attire pas les majors du disque, la musique jouée n’a pas trop de « potentiel » marchand, et tous ces garnements sont un peu plus difficiles à gérer que, au hasard (tu parles), la dizaine de cacochymes vieillards ayant fait partie de Yes qui s’entêtent à resservir leur daube à des grabataires sourds et consentants …
Il fallait un malade comme Brett Gurewitz, le boss du label Epitaph, qui au vu de son catalogue (Bad Religion, Turbonegro, Cramps, Tricky, Circle Jerks, …) s’y connaît un peu en cas sociaux imprévisibles, pour signer cette légende à la dérive. Même si Kramer n’a rien de la tête brûlée à laquelle il serait trop facile de le réduire. C’est un type qu’on respecte, voire admire, à la manière d’un Keith Richards ou d’un Lemmy (avec lequel, fatalement, il jouera pour des concerts tribute au MC5), et Kramer est encore en course pour être le dernier survivant de ce trio de défoncés, pour le moment c’est celui qui à l’air d’aller le mieux …
Donc, dès que la rumeur d’un retour au studio se répandit, les volontaires se trouvèrent légion pour venir l’épauler. Généralement tout un tas de durs à cuir(e) issus de la galaxie Epitaph, avec en tête les furieux Melvins, mais aussi des gens vus et entendus chez Rancid, Black Flag, ou dans des groupes de Detroit (Sweat Pea Atkinson, chanteur chez Was (Not Was), et le plus grand bassiste de tous les temps, James Jamerson des Funk Brothers himself). Le résultat est à la hauteur de ce casting bariolé. Là où l’on pourrait s’attendre à exclusivement du rock dur, garage, on est surpris par la variété sonore proposée.
A côté de titres « pour hommes » qui sont quand même majoritaires, on trouve des ballades dévastées, comme la fabuleuse « Junkie romance », très Keith Richards à bout de souffle (pléonasme), la rythmique funky d’une sorte de free-rock (« Incident on Stock Island ») comme il y a du free-jazz avec voix parlée, un titre dans la lignée de certaines dérives scéniques du Five ou des impros de Beefheart et Zappa. Un morceau qui trouve son pendant dans le dernier titre plus ou moins caché du Cd (« So long, Hank »). Kramer titille occasionnellement le hardcore (« Bad seed »), l’énorme ligne de basse de Jamerson emporte « Pillar of fire » vers les rivages du rock lourd seventies, « Realm of pirate kings » est très hendrixien avec ses guitares glougloutantes, l’intro de « Sharkskin suit » devrait parler à tous les fans de Noir Désir (ou du Gun Club), et l’inaugural « Crack in the universe » s’est souvent retrouvé sur des compilations « spécialisées » sans que l’on puisse pour autant le qualifier de hit.
Logiquement, l’impact commercial de « The hard stuff » sera limité (pour être gentil). C’est pas un disque qui s’adresse au grand public, c’est un peu réservé à la « famille ». Qui a été comblée, le disque est excellent et remettait sous les projecteurs une des légendes encore vivantes d’un des plus séminaux groupes de rock ayant existé …

ICE CUBE - THE PREDATOR (1992)


Carré ...

Ice Cube fait partie de cette poignée de rappeurs qui inspirent vraiment le respect. Faut dire qu’avant de se lancer en solo, il faisait partie des NWA, et çà, au début des années 90, c’était pas rien comme pedigree. Et évidemment, avoir fait partie de ce collectif de furieux qui ont tracé et défini tout le rap de la décennie, entraîne quelques solides inimitiés et préjugés. Avec le restant des NWA, logique, mais aussi avec l’opinion publique tant la réputation sulfureuse du posse de Compton servait de passeport.
Ice Cube, grande gueule toujours ouverte même quand il fallait pas, s’est vu taxer très vite de misogynie, machisme, racisme et antisémitisme. Et là où d’autres en ont rajouté dans la surenchère, lui a toujours cherché à se justifier, à ouvrir le débat, entamer la discussion, avec ses armes à lui, ses disques. Il n’en reste pas moins qu’Ice Cube reste un personnage assez ambigu, de par les rapports qu’il a entretenu avec un islamisme sinon radical du moins militant (la controversée Nation of Islam), ou encore avec le show-business (un monde qu’il dénonce, mais il a tourné dans un paquet de nanars hollywoodiens, après ses excellents débuts dans « Boys ‘n the hood » de John Singleton). Par contre, au niveau strictement artistique, y’a pas photo. C’est un des tout grands du rap …
Et « The predator » est avec « AmeriKKKa’s most wanted » considéré aujourd’hui comme ce que le rondouillet rappeur a sorti de meilleur. On y sent un Ice Cube très impliqué (il participe à la production, avec notamment DJ Muggs de Cypress Hill). « The Predator » est un disque sombre, avec beaucoup de rythmiques austères et martiales. C’est un disque typique de cette époque de l’âge d’or du rap « old school », axé sur des samples venant pour une immense majorité de la soul et du funk des années 60 et 70. Trois 45T « Wicked », « Check yo self », « It was a good day » aideront le disque à obtenir un succès conséquent. Sur quelques morceaux des guitares rageuses pointent le bout de leurs riffs, tendant des passerelles vers un rapprochement rap-heavy metal (l’autre Ice (T) fait déjà ça avec Body Count, et Ice Cube enregistrera plus tard avec les neo-metalleux de Korn).
« The Predator » est un des derniers éclats d’Ice Cube (le rap est le genre musical qui consomme le plus vite ses stars, tenir une poignée d’années au sommet est déjà un exploit) qui va, sentant le vent de l’oubli qui commence à souffler sur lui, se tourner de plus en plus vers le cinéma.
Le 7ème art n’y gagnera pas grand-chose, le rap va perdre une de ses figures de proue les plus intéressantes. Ice Cube continue de loin en loin de sortir des disques qui n’émeuvent plus guère les foules.

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AmeriKKKa's Most Wanted


ELECTRONIC - ELECTRONIC (1991)


Super groupe et super daube ...

Alors là, attention, c’était la grosse affaire (de la semaine) ce truc … Pensez, les célébrissimes ( ? ) Bernard Sumner et Johnny Marr montant un groupe, limité à leurs deux seules augustes personnes.
Par ici, on en avait rien à secouer, personne achetait les disques des Smiths ou de New Order. Par contre au pays de Churchill, ces deux groupes avaient écrasé par leurs ventes les années 80. Mais déjà, le nom même du groupe interpelle. Deux guitaristes, pas spécialement réputés pour leur sens de l’humour et du second degré qui baptisent leur groupe Electronic ? Personne ne s’attendait à une version moderne de Cream ou de l’Allman Brothers Band avec solos de guitare de quinze heures, mais ce truc là, hum … De la guitare, il faut tendre l’oreille pour en distinguer, mis à part sur le dernier titre. Il me semble avoir lu  qu’ils en jouaient, mais que ça avait été émulé, samplé, échantillonné, … et que c’était recraché par des synthés avec le son qui va avec.
Résultat des courses : à peu de choses près, ça sonne exactement comme du New Order de la même époque (si j’étais méchant, je dirais que ça prouve que New Order ne sert strictement à rien, puisque Sumner peut faire New Order tout seul, mais comme je suis pas méchant, je dis rien) et pas seulement à cause de la voix de Sumner. Tout ça pour ça ? surtout que New Order au tournant des années 90, ils étaient pas au mieux, si tant est qu’ils l’aient été un jour. « Electronic » est un disque de techno-pop qui à sa sortie sonnait déjà vieillot, c’est dire plus de vingt ans après … en tout cas, il n’a rien apporté de positif à la réputation des deux pacsés de circonstance, en cale sèche niveau inspiration.
Avant de ranger ce disque à sa place (suivez mon regard), on peut se laisser aller à écouter « Tighten up », un peu plus enlevé et poppisant que le reste, constater que les Pet Shop Boys étaient dans ce genre d’un niveau infiniment supérieur, puisque le titre (« The patience of a Saint ») sur lequel ils sont invités (compo, chant et synthés) est le meilleur du disque, et trouver amusant « Feel every beat », sorte de rap old school à guitares …
Ventes conséquentes en Angleterre, une paire d’autres disques suivront dans la décennie et n’amuseront plus grand-monde. Il semblerait que l’aventure Electronic soit terminée. Sans regrets …

DINOSAUR Jr - WHERE YOU BEEN (1993)


Des guitares, toujours des guitares, rien que des guitares ...

Dans le rock énervé US des années 90, Dinosaur Jr., le groupe de Jay Mascis et (aux débuts) de Lou Barlow, n’a pas eu l’aura d’un Nirvana, la noirceur d’Alice in Chains, ou le succès de Pearl Jam.
Faut dire qu’ils l’ont bien cherché aussi, avec leurs titres tartinés jusqu’à plus faim de grosses guitares saturées, ce qui a valu au groupe une filiation évidente avec Sonic Youth et Neil Young. Mais sans le sens de la trouvaille sonore des premiers et sans le talent mélodique du second.
Dinosaur Jr. livre des morceaux qui ont tendance à tous se ressembler, basés sur des mid-tempos écroulés sous d’imposantes couches de guitares bruyantes. Ajoutez à cela la pauvre voix traînante de Jay Mascis et des pochettes de disques toutes plus affreuses les unes que les autres (sauf, allez savoir pourquoi, celle de « Green mind »), et vous avez de quoi largement rebuter le chaland moyen.
Mais parfois, la chape de plomb des six-cordes se desserre, et la mélodie (« What else is new ») s’impose. Quelquefois des titres quasi acoustiques (« Not the same ») contribuent aussi à alléger l’atmosphère. Le dernier titre du disque, « Keeblin’ » est même un folk biscornu avec guitare acoustique et sans batterie. Ajoutez à cela une attitude sans compromission de Mascis, qui a toujours fait (et continue encore aujourd’hui) son truc, insouciant du temps, des modes, et du succès ou pas de ses productions, et qui risque pas de vendre un de ses morceaux pour un fond sonore de pub Gap ou Calvin Klein. Un type bien, quoi …
Ainsi, au fil des ans, Dinosaur Jr. est devenu une référence qui compte dans l’indie-rock. Surtout américain, le groupe restant relativement confidentiel dans le reste du monde.

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Bug

R.E.M. - MONSTER (1994)


Monstrueux ?

C’est bien simple, je savais même plus que je l’avais ce skeud. Pourtant j’en ai usé des disques de R.E.M.. Le second (« Reckoning »), les deux multiplatinés (« Out of time » et « Automatic … »), et de temps en temps tous les autres des années 80. « Monster », c’est celui qui arrive après « Automatic for the people ». « Automatic … », c’est le disque de la consécration planétaire, et des concerts dans les stades sur les cinq continents. Autant dire que les Athéniens sont au sommet, en gros le plus gros groupe indie que la Terre ait jamais connu. Et qu’ils arrivent à gérer assez bien cette incohérence entre groupe (de) milliardaire(s), et groupe étiqueté indie (pop, rock, enfin indie tout ce qu’on veut…).
Mais là, qu’est-ce qu’il leur a pris ? C’est quoi ce cirque, c’est quoi leur plan, ils voulaient en venir où, avec ce « Monster » ? En gros, « Monster », c’est un disque de rock garage. Sauf que le garage des types de R.E.M., il doit être plein de bagnoles d’un prix indécent. Certes, on savait le guitariste Peter Buck grand fan de trucs basiques des sixties (en fait, c’est un des plus terrifiants boulimiques de consommation musicale que la Terre ait porté, il est fan de milliards de choses). Et le Buck il devait commencer à s’emmerder ferme à gratter, gratter sur sa mandoline tous les soirs pour jouer devant des milliers de pékins « Losing my religion ». Mais quand même …
Ces trucs basiques, rock’n’rolls crades et rustiques, ils sont pas crédibles une seule seconde chez R.E.M.. D’abord parce que c’est trop bien fait, quand au contraire c’est l’approximation déglinguée qui fait tout le charme (?) de cette musique. Même Michael Stipe chante de façon compréhensible, c’est dire si c’est surprenant. Et donc à la place de ce qui se voudrait destroy, on a droit à de magnifiques titres d’un rock tout ce qu’il y a de centriste. La pochade aurait pu passer s’ils s’étaient vraiment lâchés (comme quand Buck, Mills et Berry avaient accompagné en 90 Warren Zevon pour le disque de reprises de vieux standards « Hindu Love Gods »). Mais là, avec « Monster », ils louvoient entre titres à grosses guitares et morceaux typiques du R.E.M. à gros succès, alignant pièces quelconques dans les deux genres.
Surtout que question timing, ils sont pas très heureux … ils se pointent avec leurs jolis gros riffs alors que des milliers de groupes servent des décibels rageurs et saturés dans le sillage de la vague grunge, et là pour le coup, y’a plein de minots dans leur garage qui doivent sonner mille fois plus méchant que R.E.M.
Le paléontologue qui écoutera ça dans trois siècles trouvera peut-être que « Monster » est un disque sympa, mais au moment où il est sorti, c’était juste un gigantesque hors-sujet, même pas assumé en tant que tel …
Il y a un morceau qui s’appelle « King of comedy ». Comme le film de Scorsese avec Jerry Lewis et De Niro. Leur a t-on dit qu’en France il était sorti sous le titre « La valse des pantins » ?


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Murmur

L7 - HUNGRY FOR STINK (1994)


Le bruit de l'odeur ...

L7 … Les Squares, les Ringardes, les Boloss … L’autodérision comme nom de baptême … Mais bon, valait mieux pas aller les chatouiller… Parce que les L7 font pas vraiment dans la dentelle, que ce soit au niveau vestimentaire, des textes, de la musique, ou dans la vie de tous les jours. De rudes soudardes, pas adeptes de la langue de bois ou de l’attitude équivoque.
Les quatre filles ont commencé à sortir des disques chez elles aux USA au début des années 90. Et comme c’était quand même assez euh … pour le moins violent, on a dit que c’était un groupe grunge. Et puis, comme elles ouvraient grand leur gueule, on a dit qu’elles faisaient partie du mouvement riot grrrl (avant que la chose soit récupérée par des folkeuses molles poilauxpatteuses). Ouais, ma foi, si on y tient … même si c’est pas aussi simple.
Par l’attitude, les L7 ont beaucoup plus à voir avec le punk. Et c’est forcément déstabilisant pour les mâles dominants de la musique. Faut dire qu’elles y sont pas allées avec le dos de la cuillère, et notamment Donita Sparks, une des guitariste-chanteuses, tête pensante ou en tout cas celle qui est la première à l’ouvrir. A son crédit ( ? )  quelques spectaculaires pétages de plombs, le plus connu consistant en un jet de son Tampax sur le public du festival de Reading qui lui suggérait avec vocabulaire approprié un strip-tease. Mais les autres ne sont pas en reste, il doit bien traîner sur Google quelques photos où elles exhibent leurs touffes pubiennes teintes en bleu, et elles avaient organisé une tombola à un concert dont le gagnant (ou la gagnante) recevait comme prix une nuit avec la batteuse Dee Plakas. Et c’était pas un bon coup (désolé) de pub, ça a vraiment fini au plumard …
Musicalement (faudrait y venir, quand même, hein …), ça casse pas des briques, pourrait-on dire en référence à un de leurs disques précédents. C’est un gros raffut pas très finaud qui ressemble à du doom préhistorique (le Sab, Blue Cheer, ce genre), du Husker Dü au ralenti, du Dinosaur Jr en encore moins mélodique … le genre de trucs qui donne pas envie de faire la danse des canards mais qui décolle bien le cérumen. Chez les L7, point de Ginger Baker, de Jimi Hendrix ou de Robert Plant, c’est martial, linéaire, les guitares sont accordées (enfin, je me demande) très bas, les solos sont faits sur deux cordes, c’est plus gueulé que chanté (surtout quand c’est Sparks). Le genre de disques qui fait fuir tous les fans de prog et de jazz-rock. Et donc que j’apprécie, autant par pathologie personnelle que par dégoût des deux genres suscités …
Ici, pas de conceptualisation de la musique. Le premier titre donne le ton : un mur de guitares, un peu de mélodie (si, si) juste ce qu’il faut, un solo rachitique de gratte, et une voix d’éviscérée. Ça s’appelle « Andres », et on le sait pas encore, c’est quasiment le plus « joli » du disque, leur vision à elles de la chanson pop sans doute. Parce que le reste, ça envoie. Du metal mid-tempo (parce que plus vite, elles y arrivent pas), des hurlements de louves en rut. Se remarquent dans ce magma radical un titre quasi rappé (« The Bomb ») qui fait penser à Body Count, quelques claviers (très discrets, qu’on se rassure) sur un morceau surf-rockabilly (« Riding with a movie star »), un carnage sonique très Stooges période « Fun house », ça s’appelle « She has eyes ». Les nanas ressortent de l’oubli la talk box (le gadget de Jeff Beck qui a fait la fortune de Peter Frampton) sur le titre du même nom qui s’achève dans un magma de distorsion boueuse.
Et puis, la grosse affaire du disque, c’est devenu a posteriori « Fuel my fire », déjà une reprise-adaptation par les L7 d’un titre d’un obscur groupe punk australien me semble t-il et dont le nom m’échappe, mais qui retrouvera une seconde jeunesse quand il figurera sur le multi-platiné « Fat of the land » de Prodigy. Quitte à en décevoir certains, la version des bigbeateux techno est la meilleure.
Et parce qu’il faut bien conclure, devant pareille rondelle sale, primitive, méchante, et à la repoussante pochette, que faire : décréter que c’est putain de sublimement génial alors que bon, faut quand même raison garder, ça vole pas très haut … ou alors un poubelle direct et retour aux valeurs sûres des temps de crise (Knopfler, Sting, Collins, …). Bon, après tout, faites ce que vous voulez, moi je me remets un Little Richard …

SUEDE - SUEDE (1993)


Glam, vous avez dit glam ?

Puisque c’est le terme sous lequel on a qualifié le groupe à ses débuts (et même par la suite, il y a des raccourcis faciles qui ont la vie dure). Parce que faudra qu’on m’explique … le glam, c’est le début des années 70 en Angleterre, T.Rex, Bowie, Roxy, Sweet, Slade, Glitter, … en gros tous ces types maquillés comme des camions portugais, les platform shoes, les paillettes, et les riffs de Chuck Berry et Eddie Cochran remis au goût du jour …
Vingt ans plus tard, que trouve t-on de tout ça chez Suede ? En cherchant bien, la voix parfois maniérée et théâtrale de Brett Anderson, quelques trucs de « The Drowner » qui évoquent le T.Rex de la fin (que personne n’écoutait plus), des intonations à la Brian Ferry solo sur « Sleeping pills », à la limite la construction de « Animal nitrate », le titre « Metal Mickey » qui fait penser au « Metal Guru » de T.Rex, la musique n’ayant rien à voir… ce qui fait peu de choses, et il doit y avoir plein de disques de pop à guitares (car c’est plutôt de cela qu’il s’agit) qui font plus penser à Ziggy et sa clique que cette première rondelle de Suede …
Bon, je vais pas non plus jouer les linguistiques de la musique de djeunes. Qu’on l’appelle comme on veut, reste qu’il est pas mal ce disque. Il a quand même pris un bon coup de vieux (lui aussi), et impressionne beaucoup moins aujourd’hui que lors de sa sortie …
Porté par une série de singles éclaireurs (« Animal nitrate », « The drowners », « Metal Mickey »), ce « Suede » connaîtra un gros succès, dans une Angleterre un peu à la ramasse, subissant le raz-de-marée américain du grunge, la vague Madchester n’étant déjà plus qu’un lointain souvenir, et la britpop de Blur, Oasis, Pulp et consorts, encore en gestation.
Un disque qui a du succès est aussi un disque dont on parle. Le bon peuple briton (et d’ailleurs) s’était offusqué de la pochette quand il avait appris que c’était deux jeunes garçons qui s’y roulaient une gamelle, et ça avait fait jaser dans les chaumières … baîllements …
Mais si Suede n’a jamais vraiment joué dans la cour des très grands, le groupe a sorti quelques disques qui se laissent écouter (les deux- trois premiers) avant la débandade et bien sûr la reformation, et Anderson  a sorti des disques solo jugés intéressants par les maniaques du genre.
Ce qu’on retient surtout de ce « Suede », c’est la mise en avant du duo Anderson – Butler, le premier étant un de ces grands chanteurs maniérés et lyriques que les ménagères adorent, cultivant look hémophile fin de race et poses de dandy. Le second est le Johnny Marr des années 90, à savoir un guitariste (mais il joue aussi du piano) considéré par ses pairs comme le meilleur de sa génération, mais qui est resté à peu près inconnu du grand public.
« Suede » le disque s’articule en gros autour de titres électriques très « rock » (surtout les singles), alternant avec ballades (mention particulière à la très réussie « Pantomime horse ») qui flirtent parfois avec du pompier lyrique (notamment  « Sleeping pills » qui dans son final renvoie aux grandiloquences de Freddie Mercury, ce qui n’est pas forcément une bonne idée). Le tout est enrobé par une production abusant parfois un peu trop beaucoup de toutes sortes d’échos qui finissent par devenir pénibles…
Entre phénomène de mode et conjugaison de deux réels talents, Suede est un de ces groupes quelque peu oubliés aujourd’hui … il mérite quand même mieux … 

PIXIES - TROMPE LE MONDE (1991)


Ça sent le sapin …

Et pas seulement parce qu’il y a de la neige et des yeux ( pourquoi ? ) à la place des boules sur la pochette, une des plus moches de chez 4AD … Tout dans ce disque indique que le groupe part en sucette (oui, je sais, plus de vingt ans après, c’est facile d’écrire çà, mais même à l’époque, y’avait des détails qui trompaient pas – le monde – on y reviendra …).
Les Pixies, c’était un des rares groupes dont quelques cinglés comme moi attendaient vraiment les disques à cette époque. Avec les Jesus & Mary Chain, le compte était vite fait … et encore, les frangins Reid commençaient à se vautrer dans la redite et le quelconque. Tandis que les Pixies, ils devenaient, phénomène rarissime, meilleurs à chaque disque… Jusqu’à ce « Trompe le monde ».
Pourtant, les Pixies c’était un des assemblages les plus improbables à avoir sévi dans le milieu des musiques plus ou moins trépidantes adressées aux djeunes. Un gros patapouf excité au centre de la scène, une bassiste raide def qui commençait aussi à s’envelopper, un métèque porto-mexicain ou un truc du même genre à l’autre guitare, un batteur genre vieux beau surfeur qui revient sur la plage en ayant perdu sa planche … Fringués comme des beaufs au camping, charisme zéro …
Mais les disques, putain, c’était quelque chose, ma bonne dame … les Beach Boys repris par les Sex Pistols, les Herman Hermitt’s par les Ramones, les Supremes par les Damned … des mélodies époustouflantes, des rythmes épileptiques, des guitares surf, des harmonies vocales célestes, des morceaux tellement crétins qu’ils en devenaient géniaux, … et puis un truc (qu’ils avaient certes pas inventé), mais qui allait faire la fortune de tout un tas de chevelus à chemise à carreaux, Nirvana en tête, cet assemblage ce couplets quiet et de refrains loud… Les Pixies c’était ça, les ploucs totaux qui jouaient la meilleure musique de la galaxie …
Et puis, là, avec « Trompe le monde », y’a des trucs qui ont commencé à coincer. Et d’abord, putain c’est quoi ce bordel, on n’entendait plus la voix de Kim Deal. Les supputations y allèrent cinq minutes bon train, avant de se rendre à l’évidence, le gros qui écrivait tous les titres avait décidé que sa voix de goret qu’on égorge suffisait, et exit vocaux, chœurs et contre-chants de la toxique bassiste. Pas cool … Et « Trompe le monde » est autant un disque en solo de Black Francis qu’un disque des Pixies. Et si on dissèque la bestiole, on se rend compte que finalement, de ces trouvailles folles, de ces gimmicks cinglés qui rendaient « Doolittle » et « Bossanova » cruciaux, ben ici, ils sont moins nombreux (si on est gentil), ou ont à peu près disparu (si on est lucide). Alors voilà, un groupe qui vend que dalle ou presque, et qui se met à faire son Simple Minds, qui répète sa formule en moins bien ? On n’y était pas habitué. Sauf que quand même, un disque plutôt foiré des Pixies, c’est quand même mieux foutu qu’un de réussi des Simple Minds …
Parce que d’entrée, « Trompe le monde » le morceau et « Planet of sound » te collent une balle entre les yeux, c’est bourrin et mélodique à la fois, y’a des breaks zarbis de partout, … terrain connu. « Alec Eiffel » est assez étonnant (moi, je prends, mais beaucoup avaient froncé les sourcils devant ce titre, un des plus pop et légers écrits par le gros), le suivant (« The sad punk »), une bêtise hardcore qui vire « climatique », commence à interpeller. Ils vont où, là ? Et Kim Deal, on l’entend plus ?
Cool as Kim Deal
Bon, tout n’est pas à jeter, mais quand même, on trouve sur « Trompe le monde » des choses douteuses, fades, déjà entendues sur les disques précédents. Les Pixies n’avancent plus, ils commencent à tourner en rond. Des choses comme « Palace of the brine » récite des pans entiers de « Here comes your man », « Letter to Memphis » c’est du classic rock come Bon Jovi ou Billy Idol en faisaient quelques années plus tôt, « Distance equals » est tellement court que ça ne vaut pas la peine d’en dire tout le mal qu’il mérite, … c’est dire si les Pixies font du sur-place. A l’inverse, des choses comme « Space (I believe in) », ou « Motorway to Roswell » en plus d’énoncer les thématiques sci-fi tordues chères à Black Francis, voient idées sonores et trouvailles diverses se bousculer, le second étant même fini au piano, ustensile jusque-là peu mis en avant dans le groupe.
Faute de mieux ailleurs, il a bien fallu s’en contenter de ce « Trompe le monde ». Un disque qui empestait la fin programmée, le manque de discussion dans le groupe passé sous la totale grosse pogne de Black Francis. Qui, grenouille voulant se faire plus grosse que le bœuf, a sorti une paire de rondelles correctes en solo (les deux premières), avant une longue litanie de skeuds dont strictement personne n’a plus rien à foutre. Kim Deal, en plus d’inspirer des titres de chansons aux Dandy Warhols, a réactivé son ancien groupe Breeders pour quelques disques hétérogènes juste passables. Les deux autres, le métèque et le surfeur, on s’en fout …
Tout ce beau ( ? ) monde s’est retrouvé dans les années 2000 pour une séquence nostalgia – reformation bien  plus rémunératrice que quand ils étaient « vivants ». Thanks God, ils n’ont pas poussé la mauvaise blague jusqu’à revenir en studio … pour le moment …

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