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LETTRE PERSANE (12/01/2015)

I will survive (et 1 et 2 et 3 zéro ...)

Ma chère Roxane,
Mon périple m’a conduit en ce 11 Janvier 2015 dans cette bien étrange bourgade française qu’est Paris. Je me suis retrouvé dans une foule énorme, agitant force drapeaux et battant le pavé. Comme c’était impossible de les compter tant ils étaient nombreux, on a dit qu’ils étaient 2 millions, ça au moins c’est du chiffre qui a de la gueule. Tu connais mon peu de connaissances en matière de ballon rond, j’ai pensé que la France avait gagné la Coupe du Monde organisée au Qatar. Un autochtone auprès duquel je m’enquérissais  du score, me dit que non, pas du tout, il ne s’agissait pas de football. C’est dommage, cette compétition sera sans doute un grand spectacle, une magnifique vitrine pour l’exposition au monde des mirifiques pratiques locales, et l’on peut rêver de voir dans le rond central à la mi-temps des matchs  quelques mains coupées aux maraudeurs locaux, ou quelque concours de lapidation pour épouses infidèles. Quand le sport désintéressé et une évolution sociale hors pair se rencontrent, ce ne peut être que grandiose … Mais je m’égare (et je pourrai m’égarer encore plus si j’en venais à causer de ce à quoi sont utilisés les pétrodollars qataris en matière de financement de groupuscules islamistes ayant peu à voir avec le kop de Boulogne …)
Mon voisin m’apprit que la France se trouvait réunie dans les rues dans une sorte de sursaut national après avoir connu pendant les jours précédents une vague d’assassinats visant dessinateurs, journalistes, policiers, clients de supérette, et quelques autres quidams ayant eu le malheur d’être au mauvais endroit au mauvais moment. Les troupes de Robocop locaux ayant réduit en charpie les trois illuminés (enfin façon de parler, y’avait pas de lumière à tous les étages chez eux) responsables. Lorsque je lui demandai les raisons de ce carnage, il me dit que les premiers tués l’avaient été parce qu’ils avaient moqué par leur caricatures le Prophète, le dieu de leur religion. Quelle ne fut ma surprise de savoir qu’en France, ce pays  qui avait inventé le seul idéal révolutionnaire méritant l’exportation résumé par le triptyque Liberté Egalité Fraternité, il existât encore des gens pour le fouler au pieds et le rejeter à grands coups d’armes de guerre automatiques dans ta face, chien d’infidèle …
Emportés par la foule qui nous traîne nous entraîne écrasés l’un contre l’autre, je me glissai donc avec mon guide de rencontre dans cette folle sarabande . Il m’expliqua tout ce qui était arrivé dans la semaine, toute cette émotion, cette crainte et cette colère qui se déversaient maintenant en un immense défilé de fierté unitaire. Que ce pays est donc un beau et grand pays me dis-je. Quelques menus détails attirèrent mon attention. Des cars de policiers passaient, applaudis par le peuple. Qu’avaient donc fait de particulier ces gens-là ? Leur travail me répondit mon ami. Ce doit être une coutume locale, je ne manquerai pas quand j’irai au café ou au supermarché d’applaudir le serveur et la caissière.
A moment donné, il ne fut plus possible de bouger. Une troupe nombreuse et lourdement armée encadrait un carré de personnages que je devinais importants. Il y avait là le Président français Hollande, d’autres grands chambellans de différentes nations, tous plus célèbres et importants les uns que les autres, les plutôt fréquentables devant, les autres derrière. Je ne vis pas Poutine ou Medvedev, mon voisin me précisa qu’ils n’aimaient pas trop être là quand on parlait de liberté (d’autres aussi s’étaient fait porter pâles, et pas seulement le nord-coréen …), mais qu’ils avaient été bien présents tout au long de la semaine, l’arsenal des forcenés étant surtout made in Russia … Mais chut, fallait pas le dire, la France vend aussi beaucoup d’armes. Il y en avait un qui avait l’air plus protégé que les autres, c’était l’Israélien Netanyahou, digne héritier d’une vieille famille de bouchers-charcutiers. C’est peut-être pas tout à fait sa faute, on l’a foutu lui et son peuple dans un pays créé de toutes pièces au milieu de ses ennemis millénaires. Comme ça, on est sûr que les marchands de canons seront pas au chômage, merci Yalta …
Netanyahou, c’était la star de la journée. Peut-être pas le playboy de l’équipe (fallait voir Renzi et Cameron faire les beaux, par contre Angela était toujours aussi peu euh… canon), mais le meilleur communicant, ça c’est sûr. Mon ami m’expliqua que c’étaient des Juifs qui avaient été pris pour cible le troisième et dernier de ces tristes jours. A mon grand étonnement, parce que je m’imaginais naïvement que dans une République laïque, on était Français avant d’être juif, ou musulman ou chrétien, ou athée, et que c’était l’individu qui primait sur sa religion. N’y avait-il pas quelque joueur de ping-pong parmi les victimes, pour que la communauté des pongistes puisse crier à la persécution ? Mon voisin me prédit même (il n’était donc pas éditorialiste) qu’on en viendrait bientôt à plus parler de ces quatre-là et de leur religion stigmatisée que des premières victimes qui étaient le postulat de départ ce cette série d’abominations. Mais qui étaient donc ces Charlie demandai-je ? Une bande de plutôt anars rigolos, amateurs de vannes en dessous de la ceinture et de canons de rouge, et qui avaient décidé que comme la liberté, ils n’auraient pas de limites et surtout pas celles que voudraient leur imposer les bien mal pensants de tout acabit. Ils représentaient l’essence même de la République et de la laïcité et ils sont morts pour ça … et maintenant tous les calotins avec des siècles de sang versé à  cause de leurs croyances sur les mains, rejoints par tous les hypocrites sécuritaires de tout poil voudraient placer leurs putains de dieux au cœur de cette affaire, et faire que ces types qui sont morts pour défendre une liberté majuscule de leur vivant seraient maintenant un prétexte pour un tour de vis sur nos petites libertés à tous, un Patriot Act à la française ?

 Je vous le dis, ma chère Roxane, il a dans cet étrange peuple cosmopolite bien des raisons de désespérer. J’en ai pourtant vu une d’espérer. Il y avait au milieu de cette foule une gamine black et musulmane qui chantait à gorge déployée la Marseillaise. C’est les Messieurs-Dames que l’on voyait fiers comme des coqs ceints de leurs écharpes tricolores, qui ont maintenant la responsabilité de la faire grandir heureuse au milieu de tous. La balle, si l’on peut dire, est dans leur camp … Qu’ils essayent d’être à la hauteur des espérances, une fois dans leur vie, ça pourrait être ça, le changement … Sinon, les inventeurs du Moyen-âge, comme disait un de leurs bouffons majeurs du siècle dernier, auront gagné …

FOALS - TOTAL LIFE FOREVER (2010)

Foals on the hill ?
C’est la putain de misère, j’vous dis moi … Je plains les mecs qui écrivent dans des canards musicaux et qui doivent se fader tous les trucs qui sortent … ce qu’ils prennent par les oreilles, les pôvres … Doivent se bousculer pour prendre la place du préposé aux rééditions, ou alors se partager les vieux skeuds qui ressortent, sinon y’a de quoi déprimer sévère …
Bon, vous me connaissez, vous me voyez venir avec mes grosses savates, un disque des Foals (des qui ? bougez pas, on y arrive …) sous le bras. Les Foals, un sac sur la tête, les mains attachées derrière le dos, et tu demandes au premier djihadiste qui passe de les décapiter au yatagan rouillé sans autre forme de procès. Je devrais pas écrire ça, je vais encore me faire repérer par un cyber-keuf et voir arriver chez moi au petit matin blême une escouade de pandores qui vont tenter de me faire avouer où se planque le mollah Omar … Déjà que ces types, les Foals, existent encore sans s’être endettés en frais de justice jusqu’à la trentième génération relève du prodige. Parce qu’avec une pochette comme ça, si Courtney Love-Cobain y tombe dessus après avoir pris une poignée de coke et un énième râteau de Billy Corgan (faut être sacrément raide déf, pour essayer de se faire cette grande asperge chauve, mais bon, chacun son truc …), donc si la Yoko Ono grunge a pas lâché ses avocats pour plagiat de la pochette de « Nevermind », putain le cul bordé de nouilles qu’ils ont, les Foals …
Y'a pourtant vraiment pas de quoi être fiers ...
Oh et puis … comme c’est Noël, le bon Dieu, le petit Jésus, la Miséricorde, et tout ce bordel religieux qui te pousse au pèlerinage au supermarché du coin rayon cholestérol, ou bouts de plastoc cancérigènes pour petits nenfants (imaginez, les moutards, ils ont, à peine venus dans ce bas monde, le choix entre les métastases sponsorisées par Ken, Barbie et Nestlé, ou s’ils en réchappent 212 trimestres à pointer à Pole-Emploi … y’aurait des façons plus drôles de démarrer dans la vie, hein, bon … remarquez je m’en fous…), je vais faire ma Mère Teresa et pas en dire de mal… Bon, si un peu, quand même, sinon je perds le peu de crédibilité et de lecteurs qui me restent.
Les Foals sont Anglais et ont sorti leur première rondelle en 2007 ou dans ces eaux-là… ça y est, vous les voyez venir, les boulets (quoique, ça aurait pu être pire, ils auraient pu être de Brooklyn) ? Les Foals n’ont que peu d’arguments en leur faveur, mais il doit bien se trouver quelque part sur le web trois clampins qui ont fondé leur fan-club et qui vont diront, au risque de se claquer les quelques neurones valides qu’il leur reste, que les Foals, c’est grandiôôôse … faut pas déconner …
En voilà de belles baudruches ...
Les Foals, c’est pas plus mauvais que nombre de leurs congénères, mais c’est guère meilleur non plus. Pour se donner bonne conscience et enfumer quelque puceau musical qui passerait par là, ils se proclament fans de Joy Division et de Portishead. Que celui qui entend dans cette rondelle la moindre chose qui rappelle l’épileptique pendu ou les tristos de Bristol me le fasse savoir, y’a mon mépris et l’intégrale de Yes (putain, y’avait longtemps, ça fait du bien) à gagner… Les plus malins ou les moins bourrés auront remarqué que Joy Div et Portimachin ça renvoie aux années 80 et 90. Le NME, Pitchfork et les Inrocks en ont évidemment fait des génies, s’esbaudissant à qui mieux mieux sur le talent des Foals. Pensez, ils étaient signés chez Sub Pop, label d’habitude gage de sérieux et de rock’n’roll dans ta face, même si les Foals c’est pas sérieux et encore moins rock’n’roll. Il faut reconnaître à ces cinq gugusses au moins une bonne idée. Celle d’avoir mis leur meilleur titre d’entrée sur le skeud … parce que s’ils l’avaient foutu à la fin, je sais pas qui de normalement constitué aurait poussé le vice à écouter la onzième plage de ce genre de rondelles. Tandis que là, après avoir entendu ce « Blue blood » sorte de new wave madchestérisée chantée par le mec de TV On The Radio (ça, c’est du descriptif, hein, avouez ...), on se dit qu’ils ont peut-être été capables de faire aussi bien quelque part sur ce skeud … Ben non, y’a deux-trois trucs qui se laissent écouter et les autres uniquement si on a envie de se faire le trip nostalgique Top 50 – Desireless – Luna Parker (gaffe à l’atterrissage, c’est du violent …).
Ma magnanimité sera  cependant accordée à « Spanish Sahara », malgré un final à la U2 des mauvais jours et à « Alabaster », même s’il me semble totalement pompé sur un truc dont j’arrive pas à me souvenir. Le reste, vaste soupe à la grimace sonore, renvoie dans les meilleurs des cas à de fades imitations des Talking Heads, Peter Gabriel ou Bowie dans leurs périodes eighties, ce qui de quelque part qu’on l’envisage n’est pas vraiment une bonne idée, avec quelques fois pour achever de gâter la sauce, des effets radioheadiens …
C’était pas forcément mieux avant, mais c’était moins chiant …

Et que sont les Foals devenus ? Aucune idée …


En écoute et plus si affinités ici


FOO FIGHTERS - SONIC HIGHWAYS (2014)

Le classic-rock des années 2010 ?
Dave Grohl est un type bien. Alors qu’il doit avoir mis sa famille à l’abri du besoin pour des générations grâce aux royalties de Nirvana et des Foo Fighters, il se la joue pas jetsetter arrogant, qui continue dans le music business juste pour la caillasse. On le voit pas tirer une tronche de dix mètre sur scène ou sur les photos, et il est toujours prêt à cabosser une batterie si on lui demande (QOTSA, Probot, voire derrière Sir Macca pour une reprise d’un classique de Nirvana). Ce type, pour moi le meilleur batteur de rock vivant, prend son pied guitare en main quand c’est lui qui mène la danse avec les Foo Fighters.

Et mine de rien, ce chien fou des années 90 est devenu un dinosaure du rock. Parce qu’il est toujours là (des nouvelles de Soundgarden, Pearl Jam, Smashing Machins , QOTSA ou Radiohead ?), et peut-être parce qu’il s’est jamais embourbé dans la cérébralité, la conceptualisation, ou l’auto-glorification de son auguste personne (j’ai les noms …). Les Foo Fighters, ça casse peut-être pas trois pattes à un canard, mais au moins tu peux poser n’importe lequel de ses disques sur la platine, tu vas pas te faire chier au bout de deux titres … Du bon rock sans prétention …
Jusqu’à ce « Sonic Highways » … comme faute de combattants, il est quelqu’un qui « compte » maintenant, il se retrouve avec ses Foo Fighters à la tête d’un projet balèze. Le concept (aïe), c’est à travers huit titres de capter à chaque fois « l’essence » d’une ville qui a compté dans la carte du rock US. En se faisant « aider » par une figure locale, généralement de la six cordes, et le plus souvent plus un perdreau de l’année (on est tout à coup ravi que Clapton ou Santana soient pas nés aux States), ce qui peut conduire à des morceaux avec 4 (quatre !) gratteux (enfoncés, les Ramolly Hatchet). Et cerise confite sur le cake aux raisins, chaque escapade citadine donnera lieu à un doc d’environ une heure payé et diffusé par la chaîne HBO. En gros ce que dans les années 80 on appelait un projet multimédia. Rajoutez à la production une des figures de proue des 90’s aux consoles (Butch Vig, pousseur de boutons pour Nirvana ou Garbage), et on s’attend à voir débarquer la grosse machine de guerre qui va récolter le brouzouf, avec une partie musicale plus ou moins à la ramasse …
Bon, « Sonic Highways », ce sera pas le disque du siècle. Mais c’est loin d’être de la daube. D’abord, y’a un son qui risque de faire date, qui déchire bien sa race comme disaient les jeunes à l’époque, une puissance de feu décibélique assez impressionnante. Les compos, on peut bien leur reprocher d’être assez mainstream, de vouloir plaire aux « kids » (le serpent du mer du wockanwoll, tout le monde en cause, s’adresse à eux, mais personne en a jamais vu un) et à leurs parents, voire leurs grands parents, s’ils étaient pas fans des concerts du Grateful Dead. Du consensuel, oui, mais dans des genres assez pointus, le titre « The feast and the famine » pouvant passer pour du hardcore centriste. Généralement, les morceaux sont très typés 90’s, nostalgie quand tu nous tiens. A noter quand même que Grohl peut se le permettre, parce que le son des 90’s, il y était un peu beaucoup au cœur.

Malgré ce, j’ai rien trouvé dans « Sonic Highway » qui me force à appuyer frénétiquement sur la touche Repeat. C’est correct, voire très correct, ça reste dans la ligne Foo Fighters, et évidemment, vu les moyens engagés, ça sonne très carré, très pro (c’est pas une insulte). De temps en temps, des influences assez évidentes remontent à la surface, le phrasé du Bowie des 70’s au début de « Something for nothing », allant même jusqu’à un démarquage du « All the young dudes » (sur le très glam « What did I do ? / God as my witness »). L’essentiel est cependant bien ricain, bien classic rock (« Congregation »), jusqu’à un final épique (7 minutes), ce « I am a river » comme un mix réussi entre le Springsteen de « Born in the USA » et les U2 dans leur période américaine (« The Joshua tree »).
Vu les moyens déployés, on peut sans trop se mouiller annoncer que les Foo Fighters seront les incontournables têtes d’affiche des festivals de l’été prochain. Live et en formation moins pléthorique, les titres de ce « Sonic highways » devraient bien envoyer le bois. On peut aussi, et c’est un sacré bon point par ces temps de délayage permanent, savoir gré à Grohl de s’être cantonné à huit titres et quarante minutes, alors qu’il aurait été facile au vu des moyens engagés de se vautrer dans un interminable double Cd.

PS. Même si le batteur crédité sur tous les titres est l’habituel Taylor Hawkins, y’a un tel niveau de drumming sur « Outside » que je serais pas surpris si c’était sur ce titre Grohl aux baguettes.
Et la pochette, collage-montage de monuments remarquables des villes "inspiratrices", elle me fait bigrement penser à celle de "Breakfast in America" de Supertramp ...


Des mêmes sur ce blog :



ALLAH-LAS - WORSHIP THE SUN (2014)

Faits comme l'Oyseau ?
Y’a des fois, malgré ma bonne volonté et mon obstination, que certains trucs me passent vite par-dessus l’occiput. Ce skeud il en fait partie.
Pas qu’il soit mauvais. Non, il est même plutôt pas trop mal. Mais comment dire … le 38975ème groupe de l’année qui donne dans la nostalgia 60’s, à la longue, ça finirait même par rebuter les gonzos qui tapissent leurs murs de compiles Nuggets ou Peebles, et d’affiches de concerts au Fillmore. Alors, pensez, un type comme moi, vieux fan de Madonna (assumé, vous avisez pas de dire du mal de la Ciccone des 80’s, ou ça va chier …).
Des fois, rien qu'à voir une photo, on a entendu le disque ...
Mon malheur, c’est qu’en plus des vieilles bimbos de Detroit, j’ai écouté plein d’autres choses. Et ce « Worship the sun », je l’ai déjà plus ou moins entendu depuis des décennies, même s’il est sorti y’a 2-3 mois. Les Allah-Las (que des cons, avec un nom pareil, ils vont finir par se faire serrer par des keufs texans au prétexte qu’ils doivent être de dangereux terroristes djihadistes … à moins que ce soit fait exprès pour ça, juste pour faire parler d’eux, ce qui est encore moins malin …) font une fixette assez grave sur le Los Angeles psychédélique et pop des mid sixties, et ce disque m’a tout l’air d’être une homélie aux Byrds et aux disques qu’ils sortaient à cette époque-là (« Fifth dimension » et « Younger than yesterday »). Aux moins les deux tiers des titres de ce « Worship the sun » me semblent en découler directement.
Seulement, là, voilà, danger. Les Byrds, s’ils sont à peu près totalement oubliés aujourd’hui, ou alors bêtement réduits à un groupe obnubilé par les reprises en version électrique des titres de Dylan, ont été en ce mitan des années 60 ceux qui ont fait bouger les lignes. Paresseusement mais judicieusement présentés comme des Beatles américains, ils pouvaient en dehors du boulet Crosby (pourvoyeur de folks feignasses qui firent malgré tout leur petit effet en ces temps reculés), s’appuyer (en plus de reprises bien trouvées) sur les redoutables compositeurs qu’étaient Hillman et McGuinn, et sur des harmonies vocales complexes et irréprochables. Le tout avec une mise en place sonore pointue, visant à reproduire les effets de drogues (cannabis puis LSD) sur le cerveau. Les Byrds étaient les précurseurs et au cœur du cyclone musical qui allait ravager la Californie avec les Love, Airplane, Dead, Doors, et tous les autres …
La pochette du premier Floyd ? Non, toujours les Allah-Las ...
Les Allah-Las, c’est les Byrds revus par le Secours Populaire. Y’a de la mélodie, des harmonies vocales savantes, de la musique « sous substances » (ou plus vraisemblablement qui ressemble à de la musique sous substances), mais c’est quand même assez loin de valoir les modèles évidents. Et puis, bien que les compos des Allah-Las soient pas minables, on ne trouve rien du calibre de « Eight miles high » ou « So you want to be a rock’n’roll star ».
Bon, évidemment, faudrait être de sacrés monomaniaques pour s’arrêter aux Byrds. On trouve aussi chez ces jeunes gens des tentatives de décollage spatiaux très Barrett-early Floyd (« Ferrus gallery »), des ballades écroulées comme sur le 3ème Velvet (« Nothing to hide »), trois instrumentaux qu’on jurerait vintage (dont le quasi surf « No werewolf »). Tout le reste, c’est de la chair à compilations Nuggets du futur avec les qualités et les défauts de ce genre d’entreprise (les trucs qu’auraient pu faire de petits hits mais que pas de bol personne a l’époque a écoutés). Ainsi, parce qu’il réunit à peu près tous ces critères, le titre le plus emblématique de ce « Worship the sun » doit être « Had it all », que, pas trop cons, les Allah-Las ont sorti en single. Tiens, et puisqu’on parle de singles, les deux derniers titres du disque sont issus de leurs 45T, avec un amusant (enfin, si on est d’humeur badine) « Every girl », qui lui ressemble plutôt aux titres des Stones circa 64-65.
Ah, et sur leur site y’a une vidéo où ils reprennent façon jam acoustique improvisée le « Alone again or » des Love, le titre qui est à la fois l’aboutissement et la quintessence de cette période qu’ils semblent tant aimer …

Allez, suivant, puisque le filon semble inépuisable …


THE ASTEROID #4 - THE ASTEROID #4 (2014)

Live from Tchouri ?
Non, les Asteroid #4 ne sont pas des requins pragmatiques qui sortent un disque pour profiter de la couverture médiatique du tas de ferraille qui s’est posé sur un tas de cailloux dans l’espace. Le groupe existe depuis longtemps dans une certaine confidentialité (les types auraient des « vrais » boulots à côté), et a sorti quelques disques qui aux dires de ceux qui les ont écoutés partent dans tous les sens et tous les genres.

Ce skeud éponyme (manque d’imagination ou volonté d’affirmer et d’affiner leur vraie nature musicale, euh … on s’en fout), comme son nom le suggère, est plutôt à ranger dans la catégorie space rock, même s’il y a plein d’autres choses. Ce machin vomi du néant aurait pu être génial si ses auteurs ne s’étaient pas embourbés à deux reprises (« Mount Meru » et « Ode to Cosmo ») dans deux saletés hindouisantes qui auraient sans doute ravi Shankar (que ceux qui n’ont pas compris écrivent à la rédaction, ils gagnent un sitar d’occasion …). Ces deux titres qui empestent patchouli, encens et méditation au fond de l’ashram foutent tout en l’air.
Parce que le reste, c’est du bon. Du tout bon. Et parfois même du lourd, du très lourd. Les fans d’Hawkwind pourraient bien voir se dresser leurs poils blanchis à l’écoute de « Rukma Vimana » ( ? ) et « Revolution prevail ». C’est du niveau de ce qu’on entendait sur « Space ritual » et « Do Re Mi … », ces riffs lourds qui tournent en boucle dans une ambiance heroic-fantasy gorgée d’amphétamines, quand la bande à Lemmy et Dave Brock lessivait les troupeaux de hippies et de freaks venus se prendre des shoots de watts et de stroboscopes en pleine poire vers 72-73.

Les Asteroid #4 adoucissent parfois le propos, ça reste spatial, mais c’est plus léger, plus éthéré dans la lignée de Spiritualized et Spacemen 3 (leur nom serait un hommage au groupe de Jason Pierce et Peter « Boom » Kember, et indéniablement de nombreuses similitudes existent). Il y a un côté mystique, zen halluciné, bab planant, parfois floydien qui émerge de titres comme « The river », « Back of your mind », « Yuba ».
Et puis, pour confirmer l’aspect puzzle sonore qui a fait leur « réputation », deux merveilles de chansons, étangs sonores paisibles au milieu d’océans plutôt agités.  « Ropeless free climber » c’est de la pop mystique ( ? ) construite autour d’un funeste sitar et là, ça sonne juste parfait. Et puis ce qui est pour moi le sommet du disque, l’extraordinaire « The windmill of the autumn sky », country-rock-americana-machin, c’est du niveau de Wilco avec la fragilité du Neil Young du début des 70’s, totalement irrésistible.

Pas sûr cependant que même avec leur jolie pochette influencée par « Space ritual » et le lettrage de celles du Grateful Dead, les Asteroid #4 attirent le troupeau des nostalgiques 70’s … 


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TY SEGALL - MANIPULATOR (2014)

La relève ?
Ty Segall, la tarte à la crème de la critique rock, tendance « c’était bien mieux avant ». L’Espoir majuscule de ceux pour qui toute forme de musique qui vaille d’être écoutée est parue avant 1980. Cela commence à faire quelques années que son nom circule, et que les éloges pleuvent sur son œuvre. Alors que ce jeune gars de vingt sept ans (gaffe, mec, c’est l’âge fatidique pour rentrer dans la légende les deux pieds en avant) a un parcours pour le moins déroutant.
Brian Eno période Roxy Music ? non, Ty Segall
Des disques en veux-tu en voilà qui partent dans tous les sens, des projets parallèles innombrables. Avec comme terrain de jeux la scène indie-garage-machin de San Francisco qui gravite autour de la figure tutélaire de John Dwyer, le leader des (entre mille autres) excellents Thee Oh Sees. Aux dires de ceux qui suivent Segall dans ses pérégrinations ininterrompues, y’a chez lui de la qualité qui a besoin d’être canalisée. On passe du folk introspectif au rock heavy psychédélique tendance Blue Cheer (un de ses derniers projets, le « groupe » Fuzz, tous larsens et comme son nom l’indique pédales fuzz en avant, dans lequel Sygall est batteur, alors que d’ordinaire il chante et joue de la guitare). Et comme il est sur de petits labels et semble peu préoccupé par tout ce qui touche à la « gestion » de sa carrière, le bonhomme semblait se confiner à une célébrité ne dépassant pas le bouche à oreille entre « initiés » et s’en contenter.
Il semblerait que Segall ait avec ce « Manipulator » décidé de passer la vitesse supérieure. Sans toutefois se vendre au music business. Le disque paraît sur le label de Chicago Drag City, étiqueté « indie-rock expérimental », et il m’étonnerait fort que l’objectif marchand soit de rivaliser avec Rihanna ou Kanye West. Ceci posé, « Manipulator » est un disque ambitieux, qui entend reprendre les choses là où les grands dinosaures des seventies les avaient laissées. A savoir qu’à cette époque, pour passer un palier supplémentaire et définitivement assoir sa légende, le truc à faire c’était le double album. Des Who aux Stones en passant par Led Zep, c’était l’exercice obligé. On fera pas à Segall l’injure de le comparer à ceux-là (même si les doubles des Who, qu’ils soient des 70’s ou pas, on peut pas dire que … bon, vous avez compris), et lui-même, qui me semble pas trop con, ne s’y hasarde pas. Mais y’a de çà, comme des airs de « Physical graffiti », difficile d’esquiver la comparaison … même s’il serait vain d’essayer de trouver dans « Manipulator » quelque chose qui s’apparente à « Kashmir », « Custard pie » ou « Houses of the holy ».
Kurt Cobain unplugged ? Non, Ty Segall
Même si « Manipulator » est un disque à guitares. Mais aussi, et c’est chose assez rare pour être souligné, à chansons. Si, si … des titres courts, nerveux, mais « construits », avec des couplets, des refrains, des ponts, des solos, des gimmicks décoratifs, et ingrédient indispensable, des mélodies mémorisables sinon mémorables. Parce que des murs de feedback, les quatre premiers cons venus avec les cheveux dans les yeux sont capables de faire (voir tous les grungeux des 90’s et leurs descendants). Mais aligner 17 titres et faire en sorte qu’on commence pas à bâiller à partir du quatrième, c’est peu commun par les temps qui courent et Segall y parvient. Je sais pas si son disque sera cité comme un de ceux qui ont compté dans le rock (enfin si, je me doute un peu qu’il sera moins célébré dans les siècles qui viennent que – au hasard – le « Double Blanc »), mais là le Segall a sorti un truc comme il en sortira pas des quantités dans l’année.

Il y a dans « Manipulator » des choses variées sans que ça sonne auberge espagnole sonore. Parce qu’il y a une unité de son d’abord (une ambiance rétro-seventies de bon goût), parce que délibérément, c’est la guitare au cœur de tous les titres (lucidement, le garçon n’entend pas se livrer à une imitation forcément risible de Page ou Hendrix). Et ensuite, comme un Lenny Kravitz qui aurait oublié d’être neuneu, c’est plein de clin d’œil, d’hommages plus ou moins distanciés aux « grands anciens », sans jamais sombrer dans la copie, la redite ou le mimétisme … Segall a fait un travail de fourmi (hein, que vous l’attendiez, celle-là, bon c’est fait), évoquant T.Rex (« The man skinny lady », The clock »), le krautrock (« The connection man »), les vieux dinosaures boogie (« The faker »), les Who de Tommy repris par Black Sabbath (« The feels »), le rock (folk ou pas) barbouillé de psychédélisme comme il en pleuvait dru il y a quarante cinq ans, tout le circus heavy hardos de la même période (avec même l’obligatoire solo de batterie, ici pour rire, du moins on l’espère, sur « Feel ») …
Seule concession à l’air du temps (enfin, l’air d’il y a dix-quinze ans), la batterie très hip-hop style de « Mister Main », et seule concession à ceux qui voudraient que pareil phénomène vende des disques, le très middle of the road « Stick around » qui conclue le skeud.
Mention particulière et félicitations du jury pour « Manipulator » le titre, qui en trois minutes fait alterner vieux synthés (ceux de « Who’s next » ?), guitares carillonantes à la U2 – Alarm – Big Country, solo tout en saturation et mélodie étrange. Un truc qui pourrait faire un single totalement zarbi à la « When doves cry » de Prince (1984, ce qui ne rajeunit personne, et surtout pas moi). Mention aussi pour « The hand » qui sur un seul titre fait défiler tous les plans qui ont fait la gloire et la fortune de Led Zep (l’atmosphère celtique, les riffs hardos et le passage acoustique).

« Manipulator », c’est le disque parfait fait par un jeune pour des vieux …


PUJOL - KLUDGE (2014)

Un état d'esprit ...
Pujol, c’est plus ou moins un groupe, tant le dénommé Daniel Pujol y tient une place primordiale (compositeur et multi-instrumentiste). Comme son nom ne l’indique pas, Daniel Pujol vient de Nashville, Tennessee. Et non, il ne donne pas dans la country. Son truc, ce serait plutôt … plein de choses en fait, essentiellement des vieilleries ripolinées aux couleurs du temps. D’ailleurs, il a sorti dans le temps  un (quoi d’autre) 45T vinyle sur le label Third Man, celui du Monsieur Loyal de la ville, le sieur Jack White himself.
Ce « Kludge », il paraîtrait qu’il a été enregistré la nuit, dans un centre de prévention et de soins pour jeunes candidats au suicide, avec du matos plus ou moins hors d’usage refilé par des associations caritatives. Il semblerait aussi que Pujol et sa troupe n’aient pas été soignés-résidents de ce centre. Une anecdote peut-être, mais qui traduit bien une nouvelle forme de « do it yourself ». Un cheminement très punk, davantage par l’esprit qu’au sens 1977 du terme.
Daniel Pujol, un pneu garage ...
« Kludge » n’a rien à voir avec Clash, Pistols, Ramones (quoique, parfois), ou Television. Pujol donne plutôt dans une sorte de power-pop, genre musical ayant connu son apogée vers 1978-80, ce qui ne nous éloigne guère de 77, on en conviendra. Cette attitude à l’arrache, démerde, de SDF musical se ressent. Il y a dans ce « Kludge » un aspect lo-fi indéniable, tout ce vieux matos étant assez imprévisible, fonctionnant correctement quand il en avait envie, et comme cette troupe dépenaillée n’avait pas les moyens de s’éterniser, plein de pains, d’approximations et autres bugs ont été conservés. Même si cet aspect lo-fi n’est valable que pour l’aspect technique, la tendance globale du skeud étant plutôt à la luxuriance instrumentale, quitte à flirter parfois dangereusement avec le syndrome Arcade Fire – Of Montreal.
Bon, de ces disques estampillés « Système D », j’en ai des wagons chez moi. A d’infimes exceptions près (j’en ai pas là des masses qui me viennent à l’esprit, tiens si, Jonathan Richman ou Young Marble Giants, … et s’il m’en arrive d’autres, je vous dirai), un disque vite fait est forcément quelque part un disque cafouilleux,  qui laisse sur sa faim et un furieux goût d’inachevé. « Kludge » n’échappe pas à la règle. Y’a du potentiel, du « background », du « vécu », mais aussi du j’m’enfoutisme flagrant peut-être à propos et marrant pour ceux qui le font, mais bon, quand t’écoutes ça peinard chez toi, ça le fait beaucoup moins.
Pujol live
Des exemples ? OK … « Dark haired suitor » et « Spooky scary », ça fait un peu Bob Dylan imité par un ventriloque, si vous voyez ce que je veux dire … Quoi que le type qui chante (Pujol ?) a une voix encore plus pénible, quelque part autant crispante et « difficile » que celle de Kevin Coyne qui passe mieux dans le registre hystérique que dans le registre conteur. Et cette volonté à vouloir coller au plus près à de vieux totems (en moins bien) est plutôt en défaveur de Pujol, on a l’impression d’avoir affaire à des versions du pauvre des Pixies (« Manufactures ») ou de Hüsker Dü (le dernier titre « caché »).
Finalement, ces types-là je les trouve meilleurs quand ils se lâchent dans des choses crétines et premier degré (« Pitch black » le punk tendance bubblegum ?), « Small world » avec son gimmick d’orgue Bontempi pas entendu depuis au moins Charlie Oleg) que quand ils se la jouent « sérieux ». Pas la peine qu’ils chiadent leur power-pop déclinée un peu à toutes les sauces, de toutes façons ils se retrouveront à la fin à brailler devant trois punks à chien sur un tapis de gros riffs hardos (le titre live « Post grad » où on entend réellement les clebs des punks aboyer, à tel point que je me demande si c’est pas un fake total).

Au final, un (des ?) talent(s) certain(s) pour un disque sans prétention. Corollaire, un disque pas vraiment indispensable …


PARQUET COURTS - SUNBATHING ANIMAL (2014)

Un peu Courts ?
Parquet Courts ? Des génies … Et pour une fois tout le monde est d’accord, des vieux « classiques » (Rock & Machin) aux branchouilles toujours à l’affût du dernier cataplasme tendance (les soi-disant Inrockuptibles, le mag-site web qui s’auto-buzze Pitchfork). Tout le monde ? Non. Du fond de son village gaulois, Lester Gangbangs, qui en a vu et surtout entendu d’autres, compte bien mettre ses milliers de lecteurs en garde. Méfiance, braves gens, rien de neuf et encore moins d’original dans cette rondelle.
Vous avais-je dit qu'ils étaient de Brooklyn?
Parquet Courts, c’est une bande de jeunots autoproclamés punk ou post-punk, ou garage-punk, enfin tout ce que vous voulez du moment qu’il y a punk dans la dénomination. Les Parquet Courts viennent de Brooklyn, l’endroit in, arty, branché de la planète rock, qui malheureusement pour des Yeah Yeah Yeahs ou Liars passables, a livré depuis une dizaine d’années beaucoup de machins plus ou moins dispensables (TV On The Radio, Animal Collective, LCD Soundsystem, Yeasayer, MGMT, Rapture et !!!, ces deux derniers bien que venant d’ailleurs s’y étant installés).
Les Parquet Courts sont pas vraiment des finauds, bon, quand on se réclame punk-quelque-chose, c’est bien le moins, mais quand même. Faut les entendre se pointer avec leurs Doc Martens à semelles en plomb, leurs références tellement évidentes qu’elles en deviennent gênantes (manqueraient-ils d’imagination, parce qu’une fois sorti de limites plagiats, reste plus grand-chose). On les trouve originaux par rapport aux autres suscités. Certes, alors que la plupart de cette scène de Brooklyn citait comme un mantra les rythmes saccadés de Gang of Four (Anglais, post-punks, ayant vendu des nèfles), les Parquet Courts concentrent leur tir sur des choses empruntées à des groupes uniquement new-yorkais, le Velvet, Television et Sonic Youth … sans en avoir le talent… Apparemment, plein de gens ( ? ) se contentent de ce son pavlovien, mettant de côté le manque de consistance évident de ce « Sunbathing animal ».
C’est finalement quand ils semblent se lâcher, ne pas vouloir (ré)citer à tout prix que les Parquet Courts sont à mon sens les meilleurs. Même si ça vole pas à un niveau stratosphérique (« Duckin’ & dodgin », simpliste, crétin, répétitif, mais efficace ; l’intéressante, une fois n’est pas coutume, et assez longue tournerie post-punk « She’s rollin’ », voire « What color is blood », pour une fois pastiche réussi de la famille Velvet).
Les Parquet Courts, ou l'art d'avoir la bière triste ...
Par contre rayon débit, l’addition pourrait être salée. Par charité, on ne retiendra que la voix pénible du chanteur (oui, oui, au moins autant que celle du type de TV On The Radio), parce que n’est pas le muezzin psychotique Lydon qui veut, pour situer le registre … et notez que c’est pas mieux quand il se prend pour Byrne des Talking Heads (« Black & white »). Les compos, c’est aux deux-tiers sans trop d’intérêt. Paraît que sur scène c’est bien, mais enfin, comment dire, je demande pas à voir et à entendre.
En fait sur ce « Sunbathing animal », y’a qu’un truc qui m’intrigue. Les trois premiers titres s’énoncent « Bodies », « Black & white » et « Dear Ramona ». Hasard ? « Bodies », c’est aussi un titre des Pistols, « Black & white », un disque des Stranglers (ou un titre de Michou Jackson), et « Dear Ramona », ça rappelle quand même les Ramones, qui n’étaient pas de Brooklyn, mais pas loin (le Queens), à moins que ce soit pour le « I heard Ramona sing » de Frank Black …

Voilà à quoi on est réduit, avec ce second disque des Parquet Courts (le premier, je l’ai aussi avec sa pochette country – cow-boy - « Happy trails », mais je me rappelle même pas à quoi il ressemble, tellement ça m’avait marqué), on s’invente des Trivial Pursuit version rock … Mais qui joue encore au Trivial Pursuit ? Et qui écoutera encore les Parquet Machin dans trois ans ?

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THE BLACK KEYS - TURN BLUE (2014)

Balle au centre ...
Y’a pas un fan de la première heure qui pourrait faire un selfie après avoir écouté « Turn blue » ? Juste pour voir … et rire un peu … Allez, les Black Keys ont viré mainstream, c’était déjà bien audible sur le précédent (« El Camino »), là, aujourd’hui, y’a plus d’ambigüité. Bon, on va pas sortir les noms d’oiseaux, les clouer au pilori. Niveau galère et ventes faméliques, ils ont cotisé, et ma foi, si maintenant ça rigole, tant mieux pour eux. Et on pourrait trouver des milliers de groupes qui aimeraient sortir un disque du niveau de « Turn blue » … s’ils en étaient capables.
Carney & Auerbach : The Black Keys
Parce que « Turn blue », je l’aime pas. Pas beaucoup en tout cas. Mais on peut pas dire que le boulot soit saboté. Les trois types, puisque Danger Mouse apparaît, et c’est confirmé par les propos de Carney et Auerbach, comme beaucoup plus que le producteur, ont mis beaucoup d’atouts de leurs côtés. Niveau compositions, niveau mise en sons, niveau production, ça tient la route. Même la pochette, avec ses faux airs de Vasarely, fait arty, et marque une évolution notable dans la façon dont les Black Keys envisagent le packaging de leurs œuvres …
« Turn blue » se paye le luxe de commencer, non pas par un machin racoleur destiné à attirer le puceau boutonneux de base du Midwest, mais par un titre long (presque sept minutes), ambitieux et « climatique », s’égrenant sur un tempo lent avec des passages très floydiens ou des solos de guitare genre Dire Straits avec moins de technique et plus de roubignolles. Danger Mouse multiplie les synthés, beaucoup sont à connotation très 80’s, et même si ce revival électronique est aujourd’hui très tendance (après tout, les guitareux copient jusqu’à l’écœurement les sons des 60’s-70’s, pourquoi les joueurs de disquettes pourraient pas donner aussi dans le rétro, hein, je vous demande, même si je m’en tape …). C’est même parfois too much, un titre comme « Fever » avec ses gimmicks putassiers, sonne comme du Cars bas de gamme, le « Year in review » qui suit, j’sais pas, mais moi ça me fait penser au « Natural blues » de Moby, c’est dire si c’est pas naturel et si c’est pas du blues … Pire (quoique), dans « 10 lovers », il y a comme des faux airs dans la mélodie de « In the air tonight ». A l’usage des jeunes générations incultes, il s’agit d’une scie du Phil Collins solo, qui avait en son temps (le début des 80’s, on y revient) foutu la honte même aux fans endurcis de Genesis, pourtant habitués aux horreurs sonores …
Danger Mouse, le 3ème Black Keys
Heureusement pour les vieux fans, il y a quelques sonorités pour eux. Des machins plus rêches, plus sournois, plus Black Keys d’avant quoi. Même si rien ne sonne rustique primitif, le titre le plus « rock » du Cd, avec son espèce de Diddley beat mutant, n’arrivant qu’à la septième piste (« It’s up to you now »). Et le boogie final (« Gotta get away »), dont n’aurait pas voulu les ZZ Top 80’s n’inversera sûrement pas la tendance. Surtout qu’il survient après des morceaux dont je ne sais trop que penser (hommages ? manque d’inspiration ?), réminiscents des choses piaillées par Jagger dans (décidément …) les 80’s (« Waiting on words » me fait penser au « Waiting on a friend » sur « Tattoo you »), du Lennon époque Plastic Ono Band (« In our prime », avec ce son de piano et cette reverb dans la voix, gaffe, si Yoyo Ono l’entend, elle va lâcher ses avocats, avant un final où Auerbach se prend pour un guitar hero, ce qu’il n’est pas et ça s’entend).
Ah, j’allais oublier, pourtant Auerbach en cause beaucoup, certains textes font référence à son divorce (bâillements …).

« Turn blue » est un disque calibré, avec en point de mire succès radiophoniques et arenas remplies. Partant du principe de qui peut le plus peut le moins, les Black Keys peuvent revenir, une fois leur compte en banque bien matelassé, à leurs premières amours blues rustiques … ou continuer avec le consensuel dans lequel s’embourbe « Turn blue » …

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ISRAEL NASH GRIPKA - ISRAEL NASH'S RAIN PLANS (2013)

Forever Young ?
Avec un blaze pareil, c’est pas gagné (et encore quelquefois on l’appelle Israel Nash Gripka, et ne me demandez pas pourquoi). Tu pars dans la vie avec un prénom qui te donne envie de buter tes parents tellement il est lourd à porter, et un nom qui peut faire croire que t’es le fils d’un Anglais, co-boulet avec Crosby de Stills et Young …
Ben non, Israel Nash, c’est pas le fils de Graham Nash, et c’est tant mieux pour lui, dans la musique comme ailleurs, l’ombre tutélaire des géniteurs se révèle souvent assez pesante … N’empêche, le Israel, il a sorti ces derniers temps un disque qui va faire croire que c’est le fils à Neil Young, pour rester dans la famille des Beatles américains.

Ce type est un rustique parmi les rustiques, et semble vomi du néant, ou plutôt des seventies (ou d’un « Spinal Tap » hillbilly) avec son look de baba barbu, qui s’entête à n’enregistrer dans son trou à rats du Missouri qu’avec du matos vintage tant au niveau des instruments que de la console (c’est lui qui produit, en plus, le gars sait ce qu’il veut et a vu le résultat, les capacités pour arriver à ses fins), il a fait un des meilleurs disques des années 70 qu’est pas sorti dans les années 70. On aurait envie d’écrire logiquement. Sauf que parmi les multitudes en manque d’imagination qui copient-collent les antiques générations, bien peu se hissent à ce niveau bluffant.
C’est bien simple, « Rain plans », il aurait pu sortir tel quel dans la disco de Neil Young, avant (ou après, peu importe) des choses comme « After the gold rush » ou « Harvest ». Et non, je déconne pas … Suffit d’écouter le skeud, c’est la pure vérité vraie. « Rain plans », c’est du folk qui s’ouvre au monde du rock, qui évite le pensum austère du type assis dans la pénombre avec sa guitare acoustique s’évertuant à tisser un répertoire que pourront reprendre des scouts à la veillée ou Cabrel en panne d’inspiration … D’ailleurs Israel Nash il a sorti un disque de folk plein de grattes électriques, et pas qu’un peu, mais qui jamais ne s’enlisent dans le gros son hardos.

Neil Young, c’est évident, plus souvent que de raison, mais sans pour autant qu’on puisse crier au plagiat. Totalement dans l’esprit et profondément différent, ne serait-ce que par la mise en avant de la pedal steel guitar, peu usitée dans la disco du Canadien. Si « Who in time », l’énormissime sommet du disque qu’est le titre « Rain plans », « Iron on the mountain », ou « Mansions » (on the hill ??), c’est pas du Young style pur sucre, je veux bien m’inscrire au fan-club de Stromae (les plus perspicaces l’auront noté, ça fait deux coms successifs dans lesquels je cite ce trisomique musical, mais j’y peux rien, je viens de le désigner comme héritier indiscutable des Mumuse, Coldplay et Radiomachin, catégorie Belge triste une fois …).
Bon, revenons-en à notre folkeux. Ouais, Neil Young, mais aussi le père Dylan. Dont « Woman at the well » qui ouvre le disque (country-rock pépère, mélodie « facile ») et « Rexanimarum » (qui le clôt en un parfait symétrisme et mériterait de devenir le « Knockin’ on heaven’s door » des années 2010) auraient pu telles quelles relever le niveau de nombre d’albums du Zim dans les seventies …
Curieusement, au mépris de tout sens mercantile (quelqu’un a-t-il dit à Israel Nash que des gens pourraient avoir envie d’acheter ses disques ?), c’est l’entrée de ce « Rain plans », en gros les trois premiers titres, qui est la plus faible. Enfin, faible, façon de parler, c’est le reste qui fait très fort.

Meilleur disque de l’année (dernière).


En écoute (et plus si affinités) ici



BLACK LIPS - UNDERNEATH THE RAINBOW (2014)

De toutes les couleurs ...
« Underneath the rainbow » dure trente quatre minutes. Et quand le skeud est terminé, tout être normalement constitué doit se poser une question, un peu saugrenue mais inévitable : les Black Lips sont-ils là, aujourd’hui, en ce printemps ripou de 2014, le meilleur groupe du monde ?
J’en vois déjà qui manquent de s’étouffer, ‘tain le Lester depuis le temps qu’on l’avait pas vu, qu’on se demandait s’il avait péri en mer, avait été pris en otage par des muslims vendeurs de pavot, ou pire, nommé ministre par Manu militari Valls, voilà t-il pas qu’il nous assène des énormités à propos d’un groupe qui a même pas fait la une des Inrocks. D’autant que si on s’en va googleliser « Black Lips », on va trouver des montagnes de pages où plein de gens qui s’affichent musicalement incontestables vont vous raconter que ce « Underneath … » c’est quasi de la daube … Les écoutez pas ces pantins, c’est moi qui ai raison, comme d’habitude, quand bien même ma légendaire modestie dusse-t-elle en souffrir …
Les Black Lips 2014, comme une pochette des Byrds, on dirait ...
Parce que les Black Lips y’a des années que skeud après skeud, ils se sont forgé une crédibilité en plutonium enrichi dans le milieu du punk-garage-sixties-bidule (eux se qualifient de flower-punk, ce qui ne veut rien dire, mais fallait y penser…), le genre de réputation après laquelle courent des milliards de groupes. Objectif avoué de l’opération : ravir les quatre pantins rances serviteurs rigoristes de la chapelle et surtout à ce moment-là ne plus bouger d’un iota. Et arrivés à ce stade, qu’est-ce qu’ils ont fait les Black Lips ? Sont allés chercher Mark Ronson, producteur-DJ branchouille et variéteux (Lily Allen, Robbie Williams, Aguilera, …) et dans un grand éclat de rire sonore, ont consciencieusement « saboté » leur carrière (leur précédent et déjà excellent selon moi « Arabia Mountain »). Là, avec « Underneath the rainbow », ils font le contraire, vont chercher un type « crédible » (Carney des Black Keys) pour produire quelques morceaux, mais en contrepartie se lâchent encore plus tout au long des douze titres.
Qu’il n’y ait pas de malentendus. C’est sérieux, les Black Lips, on n’est pas chez les Ludwig Von 88 ou Sha Na Na. Mais les quatre d’Atlanta ne s’interdisent rien. Même pas de se payer Mick Rock himself pour la photo de pochette (qui au passage a de faux airs de celle de l’antique 33T éponyme du Band avec sa dominante sépia). Même pas de citer des choses très éloignées du garage sixties (« Justice after all » ou « Drive-by Buddy », c’est du classic rock comme Petty ou Springsteen ne savent plus en faire depuis des décennies), de faire des références appuyées aux crétineries punk californiennes des 90’s comme Green Day ou Offspring (« Smiling »), de rendre hommage aux Ramones (enfin, c’est ce qu’il me semble) avec « I don’t wanna go home », de rendre obsolète le disque de « reformation » des Pixies (parenthèse : mais qu’est-ce qui lui prend à ce gros patapouf de Frank Black, arriérés d’impôts ? notes en retard chez le traiteur ? et tout çà en virant Kim Deal, faut pas déconner, gros lard …) avec un morceau comme « Funny », savants entrelacs de mélodies pur sucre et de grosses guitares fuzz …

Et puis, manière de faire un doigt aux garagistes 60’s intégristes, ils jettent en milieu de disque une sorte de truc yé-yé bubblegum très pop (« Make you mine »), un peu plus loin revisitent à leur façon le riff du « Lucifer Sam » du Floyd de Barrett, ça s’appelle « Do the vibrate », et ils le font suivre d’une bouillasse psyché (« Dandelion dust »), peut-être une référence au énième degré aux Stones (« Dandelion » est la face B de « We love you » sortie au milieu de l’an de grâce 1967, quand les Cailloux s’essayaient – de façon assez risible – au psychédélisme).
« Underneath the rainbow » est une rondelle qu’on ne sait à quel degré il faut l’appréhender. Jetée en pâture sur ce qu’il reste du « marché du disque » et démerdez-vous avec. Les Black Lips semblent comme tous les idiots savants n’en faire qu’à leur tête. Sortent un disque a priori joli, consensuel mais qu’on peut aussi percevoir comme une vaste joke j’menfoutiste. Bande de zigotos totalement ingérables qui balancent une rondelle « grand public » sur le label indépendant (mais balèze, on y trouve aussi Bloc Party, les Streets, Justice et … Charlotte Gainsbarre) Vice Records, les Blacks Lips peuvent compter sur leur leader azimuté Cole Alexander (adepte entre autres « facéties » de terminer ses morceaux live futal sur les chevilles, signe d’extrême satisfaction chez lui) pour fracasser consciencieusement et méticuleusement tout plan de « carrière » …

Des mecs bien qui font de bons disques … Le meilleur groupe du monde de la Terre d’aujourd’hui ...

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TEMPLES - SUN STRUCTURES (2014)

Le retour des babas ?
A force de revivals, il y en a qui vont finir par se frotter à de vieux trucs un peu chelous qu’on préfèrerait voir oubliés à jamais (à quand le retour au jazz-rock et au prog emersonien ? ça fout les jetons, hein ?). Et bizarrement, la plupart de ceux qui sont censés savoir dans les médias, s’entichent régulièrement de ces passéistes, alors qu’il y a des fois où l’on aimerait bien avoir des nouveaux noms, certes, mais qui proposent quelque chose de frais, d’original … quoique, y a-t’il encore quelque chose de nouveau, d’original, à découvrir ? Tout n’aurait-il pas été déjà entendu ?
La hype du moment, ça risque d’être les Temples. Anglais comme il se doit, qui après quelques singles accrocheurs, catchy comme on disait avant qu’ils naissent, livrent avec ce « Sun structures » un premier disque censé marquer son temps. Il paraît que Johnny Marr et Noel Gallagher adôôôôrent les Temples. Oh putain, le Marr et le Gallagher, deux ringards de chez ringard, qui ont pas sorti quelque chose d’audible depuis … et qui de toute façon n’ont jamais brillé par leur esprit musical aventureux (les Smiths et Oasis, c’était déjà du revival).

Les Temples, donc. Il me semblait avoir compris tout leur truc avant d’écouter les skeud. De la pochette, où on voit quatre types éparpillés dans la nature façon « Who’s next », avec son château pour prince charmant de manga, avec son leader-chanteur James Edward Bagshaw qui s’est fait un look Marc Bolan 71, avec ses titres de morceaux qui fleurent bon le retour de la revanche du rêve hippy. Le binôme central du disque s’énonce « Move with the seasons » - «  Colours to life » et on entend déjà les clochettes, les guitares fuzz, on sent l’encens et le patchouli au milieu de ces communautés du retour aux sources qui font l’amour aux arbres entre deux prières à l’alma mater.
Bon, ben, bingo ! C’est exactement de ça dont il retourne. Dans un impressionnant numéro de singes savants les quatre zozos des Temples ressuscitent le cauchemar hippy, sans vraiment prendre la peine de le mettre au goût du jour. Ce « Sun structures » (« Nous sommes du Soleil » ?) est un exercice de style. Parfois brillant. Témoins le titre d’ouverture (« Shelter song ») amusante pop pour hippies, « The golden throne », qui pourrait faire un single un peu pute avec ses synthés vulgaires et ses trompettes à la Love, « The guesser » bossa nova détournée sur une mélodie qui doit beaucoup au « Walk on by » de Dionne Warwick. Et puis le gros truc de ce skeud, c’est pour moi « Sand dance », plus de six minutes, motifs arabisants, comme si ces minots avaient voulu sur leur premier disque sortir leur « Kashmir ».
Tout n’est pas de ce bon niveau. L’essentiel, c’est quand même ripolinées avec les plug-ins à la mode, des recettes, des tics d’écriture, des harmonies vocales, des incantations qu’on a entendu des milliards de fois ailleurs il ya longtemps. Sur les compiles Nuggets (« Sun structures » le titre, « Test of time », ces pop-rocks psychédéliques des 60’s). Chez le gourou new age Devendra Machin (« Move with the season »), chez gloups … Yes (« Mesmerise », on croirait entendre le maléfique Wakeman). Aussi des mélodies tristes remplies d’harmonies vocales («Keep in the dark ») comme les Beach Boys après « Pet sounds » quand ils étaient gavés de LSD. Globalement, les Temples, on dirait le résultat d’une improbable fornication entre The Coral (le côté pop de foncedé) et l’Incredible String Band (la fanfare buissonnière hippie des 60’s) …

Tiens, à ce sujet, y’a deux questions qui me turlupinent : les Temples ont-ils déjà pris du LSD ? Vivent-ils encore chez papa-maman ? Tout ça pour dire que si c’est pas vraiment mauvais, c’est pas non plus renversant, on sent la recherche du truc dans l’air du temps, du marché de niche, … Pas l’impression d’avoir perdu mon temps à écouter cette rondelle, mais pas l’impression d’avoir eu affaire à de futurs cadors du rock …

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