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THE DARKNESS - PERMISSION TO LAND (2004)

 

... On the edge of hard ...

The Darkness, c’est l’histoire de quatre fans de hard un peu bourrins qui ramassent le jackpot … contre toute attente, et peut-être surtout la leur …

A la base du groupe, deux frangins. The Darkness, c’est la chose de Justin et Dan Hawkins, originaire du Suffolk (cambrousse au Nord-Est de Londres), deux guitaristes dont un chante lead (Justin), et qui s’entoureront au gré d’une carrière en pointillés de comparses occasionnels à la rythmique. Ils commencent à monter leur affaire au début des années zéro, alors que tous les compteurs et courants musicaux ont été remis à zéro. Les nouveaux héros, sauveurs, revivalistes, … du rock se comptent sur les doigts de la main de Django Reinhart, et officient dans des groupes qui commencent par The (Strokes, Libertines, White Stripes et leurs suiveurs, imitateurs et disciples). Les Hawkins seront donc The Darkness.

The Darkness, plein d'Awards pour eux ...

Et vont œuvrer dans un genre lui aussi sinistré où ne subsistent que quelques vieilles idoles, pas toujours au mieux de leur forme. Avec un coup d’avance (enfin, quelques mois) sur Airbourne, ils vont se lancer dans un hard rock à la AC/DC. Intention louable, mais éminemment casse-gueule. Autant la machine de guerre des Young Brothers semble jouer un truc tout simple et tout con, autant c’est compliqué à reproduire. Pour pas être accusés de pâle copie, The Darkness s’en va brouter également dans des pâturages autrefois visités par Thin Lizzy (dont ils se disent grands fans, mais j’en vois pas trop l’influence), Aerosmith (la concision), Van Halen (le côté exubérance mélodique), ou à l’inverse Black Sabbath (la lenteur plombée) … Bon, ils peuvent citer qui ils veulent, les Darkness font juste ce qu’ils peuvent …

Leur succès sera pourtant considérable (surtout chez eux en Angleterre, un peu moins ailleurs). J’ai la méchanceté de penser que sans le soutien d’une vénérable maison de disques qui a de gros moyens (Atlantic, la même qui distribue dans une grande partie du monde … AC/DC), le succès des Darkness aurait été moindre. Au passage, une petite remarque. « Permission to land » est doté (enfin, si on veut) d’une des pochettes les plus vulgos du rock (copié-collé de celle de « The pros and cons of hitch-hiking » de Roger Waters après son départ-éviction de Pink Floyd). Pas sûr que du temps du brave Ahmet Ertegün ce genre de mauvais goût ne serait pas resté dans les archives du graphiste …

Le morceau « de bravoure » (enfin, celui qui a cartonné sur les radios) de The Darkness c’est « I believe in a thing called love », qui deviendra la locomotive (poussive pour moi) du disque. Rien compris à ce titre que je qualifierai au mieux de très quelconque, mais bon, les goûts et les couleurs du hardos de base du début du siècle, c’est pas un truc que je maîtrise vraiment … A tout prendre, je préfère nettement l’introductif « Black shuck » qui recycle dans son début tous les plans de AC/DC, le dénommé Justin Hawkins réussissant un improbable mix vocal entre Bon Scott et le Brian à casquette qui lui a succédé … Sauf que le Justin sombre souvent dans l’énervant piaillement aigu de tous les machos à voix de castrat du genre, n’est pas Robert Plant qui veut. Et tant qu’à parler de clichés machos, The Darkness s’y vautre dans des choses aussi élégantes (?) que « Get your hands off my woman (motherfucker) ».

Justin Hawkins

Dans leur hard-rock qui se veut « classique », il manque quand même du solo de guitare, les deux frangins se contentant d’épaissir le son par des synthés au lieu des sarabandes de notes qu’on est en droit d’attendre au cœur des titres. Ces synthés (bon point, ils sont pas envahissants) prennent malgré tout le dessus lorsque le groupe s’essaye à la ballade musclée (« Love is only a feeling », le début de « Holding my own ») elles aussi pas franchement convaincantes. Perso, le titre que je trouve le plus réussi, c’est le hard mélodique de « Growing on me », entraînant et décontracté comme le Van Halen de la période David Lee Roth …

The Darkness ont eu la chance d’être au bon endroit au bon moment. Ça suffit pour réaliser un bon score commercial. Par contre, les amateurs du genre qui avaient mis quelques billes sur leur nom ont dû déchanter, le groupe a connu une existence erratique encombrée de come-backs qui n’ont même pas réussi à convaincre le noyau dur des fans de la première heure …

Faut dire que tous les anciens dont ils s’inspiraient, sans être pour autant géniaux à cette époque-là, assuraient quand même davantage …


ERICK ZONCA - JULIA (2008)


 From L.A. to Tijuana ...

Erick Zonca est un réalisateur peu prolixe. Quatre films en plus de vingt ans, on n’a pas affaire à un stakhanoviste des plateaux … et encore un de ses films, son second (« Le petit voleur »), était pour la télévision et n’est sorti que confidentiellement en salles. Zonca, c’est aussi un peu des espoirs déçus. Son premier film « La vie rêvée des anges » avait récupéré une Palme à Cannes (prix d’interprétation féminine pour ses deux actrices Elodie Bouchez et Natacha Régnier), et dans la foulée raflé des Césars l’année suivante. Et ensuite Zonca a quasiment disparu des radars, cachetonnant parfois dans la pub.

Tilda Swinton & Erick Zonca

« Julia » est son troisième long métrage, dix ans après « La vie rêvée des anges ». A cheval entre deux mondes. L’équipe technique est essentiellement française, les acteurs anglo-saxons, et les lieux de tournage sont aux Etats-Unis et au Mexique en anglais et en espagnol. « Julia » mélange les genres, entre polar, road movie, et dissection psychologique de son personnage principal.

Julia, c’est l’actrice anglaise Tilda Swinton qui trouve certainement là le rôle de sa vie. Présente dans toutes les scènes, elle porte le film sur ses épaules et livre une performance habitée qui marque les esprits. Un jeu très « animal » pour mettre en scène une alcoolo paumée qui va basculer dans un engrenage dont les rouages lui échappent totalement…

Une interprétation à la Gena Rowlands … A double titre. Par l’approche du personnage et parce que « Julia » présente beaucoup de similitudes avec « Gloria » de Cassavettes et Rowlands dans le rôle-titre. Zonca a réfuté le remake … ouais, mais la base du scénario (la cavale d’une femme solitaire et d’un gamin qui vaut très cher) est la même, et la tension omniprésente de la même façon …

Julia au réveil ...

La première scène nous montre Julia bien imbibée en boîte de nuit, vidant force verres et se trémoussant au son de « Sweet dreams » d’Eurythmics. Elle allume férocement un inconnu qui passait par là et ils finissent la nuit sur le siège arrière d’une bagnole. On se rend compte que c’est le quotidien de Julia, la picole forcenée et les coups d’un soir. Evidemment, c’est un mode vie peu compatible avec métro-boulot-dodo. Et son boulot, elle s’en fait virer (pas à l’heure, toujours bourrée de la veille) malgré l’intercession auprès de son boss d’un collègue de bureau (lui aussi pas mal cabossé par la vie), qui l’a faite embaucher et en est plus ou moins amoureux, on le verra par la suite (mais ils couchent pas ensemble).

La perte du boulot, les factures qu’on peut pas payer et qui s’accumulent, c’est pas ça qui va modifier le comportement de Julia. Toujours clope au bec et verre à la main, elle tente sans conviction une séance aux Alcooliques Anonymes. C’est là qu’elle rencontre une petite bonne femme mexicaine assez perturbée (mais Julia ne semble pas s’en apercevoir), qui finit par la brancher sur un kidnapping de gosse. Le sien, soi-disant séquestré par un grand-père très riche qui l’empêche de le voir. Combat éthique dans le cerveau envapé de Julia, qui finit par accepter parce qu’il y a un peu de fric à se faire (c’est la mexicaine qui doit le lui donner) et que du fric, Julia en a bien besoin. Julia prépare donc le kidnapping avec sa copine de circonstance (mais bon, ça s’improvise pas, surtout quand on est rarement à jeun), achète un flingue à une petite frappe qu’elle connaît. Au moment de passer à l’acte, elle s’aperçoit que la mexicaine est totalement dérangée et mytho, et que si l’essentiel de son histoire est vraie, elle voulait enlever son fils pour demander une rançon au grand-père … Julia voit là beaucoup plus de pognon à se faire et passe à l’action toute seule …

Opération réussie. Julia kidnappe le petit-fils du plein aux as. Et à mesure que les enchères montent (ça va finir à deux millions de dollars pour qu’elle rende l’enfant), Julia contrôle de moins en moins la situation. Parce que ce n’est pas une délinquante qui a minutieusement préparé son plan, et qu’elle n’a pas la moindre idée, n’ayant jamais été mère, de la façon dont on gère un gosse de huit ans qu’on vient d’enlever. Julia est volontaire, tente d’amadouer le bambin et en même temps de se sortir à l’arrache et en totale improvisation des situations de plus en plus compliquées qui se présentent. Il y a dans « Julia » du Cassavettes-Rowlands, évidemment, mais aussi du « Fargo » des Coen Bros, la canicule du désert du Nouveau-Mexique remplaçant les étendues enneigées du Minnesota, avec en filigrane ce kidnapping foireux fait par des branquignols et qui tourne mal… et comme Julia évacue la pression bouteille à la main, tout va de pire en pire …

Le périple de Julia et du gosse avec les flics au cul genre « Thelma et Louise » se finira au Mexique, dans la ville frontière de Tijuana, censée être la plus dangereuse du monde. Pas compliqué d’imaginer que les emmerdes encore plus gravissimes vont dès lors se multiplier.

Tijuana, tout se complique encore plus ...

Il y a du rythme dans « Julia ». Par le parti-pris de Zonca de filmer au plus près des personnages, caméra sur l’épaule. Tout en évitant un montage épileptique avec changement de plan toutes les trois secondes. Il y a de la tension, du suspense, mais surtout une interprétation fabuleuse de Swinton. Elle joue un personnage paumé affectivement, sans repères sociaux ou moraux. Julia est une grande bringue rousse qui boit comme un trou, et raisonne évidemment comme un pilier de bar aviné. Et on est loin des personnages d’ivrognes de comédie, c’est pas « Boire et déboires » if you know what I mean, on a même l’impression que Julia-Swinton est réellement bourrée, alors qu’en fait dans la vraie vie Tilda Swinton ne boit jamais une goutte d’alcool …

Et petit à petit, on voit se transformer cette solitaire instable en une femme déterminée, se rendant peu à peu compte que ce petit minot qu’elle a enlevé, c’est pas seulement un paquet de pognon. C’est à ce moment-là, quand elle va découvrir qu’elle aussi peut avoir quelque chose qui ressemble à de l’instinct maternel qu’elle va arrêter de subir, de raconter et de se raconter des bobards de comptoir, et prendre en main leur destin commun, alors que la situation est totalement cataclysmique.

« Julia » est prenant, passionnant assez souvent. Avec aussi les défauts de ses qualités. A vouloir centrer deux heures et quart sur une seule personne (tous les autres acteurs y compris le bambin sont scénaristiquement parlant, au mieux des seconds rôles), on ramène tout le reste du casting à de l’accessoire. Tout juste si on comprend qui est ce gosse, qui sont ses parents et son grand-père. Le collègue de boulot amoureux de Julia qu’on voit au début réapparaît de façon saugrenue à la fin sans apporter quoi que ce soit à l’intrigue ou à son dénouement (en fait dans les bonus du Dvd il y a des scènes coupées au montage qui permettent de mieux cerner tous ces seconds rôles). Et la partie mexicaine de l’histoire présente des acteurs plutôt énigmatiques, on voit bien qu’ils sont pas très nets, mais on a du mal à situer une hiérarchie (qui commandite, quel est le rôle des flics, du gros chauffeur de taxi, du play-boy latino amant d’un soir ?). Bon, vous allez me dire, y’a plein de bons polars ou assimilés légendaires où on comprend strictement rien de la première à la dernière image (que quelqu’un me fasse un exposé clair et synthétique sur l’intrigue du « Faucon maltais » ou de « Mulholland drive », allez, pas tous en même temps …).

Beaucoup plus de positif que de négatif. Film à voir.


SAM MENDES - LES NOCES REBELLES (2009)

Je t'aime ... moi non plus ...

Avertissement : même si les deux acteurs principaux reforment le duo / couple DiCaprio / Winslet, « les Noces Rebelles » n’a rien d’une suite de « Titanic ». Ou alors il faut jouer avec le sens des mots, car si « Les Noces Rebelles » raconte bien un naufrage, il a lieu à l’intérieur du couple …
Le film (encore une fois doté d’un titre français absurde, c’est quoi une noce rebelle ???) est tiré d’un bouquin de la fin des années 50, « Revolutionary Road », le premier de l’écrivain Richard Yates, auteur bipolaire et alcoolo, contemporain de la Beat generation (Kerouac, Burroughs), mais qui finira beaucoup plus « sagement » comme rédacteur (pour l’alimentaire) des discours de Robert Kennedy (celui qu’aurait pu succéder au frangin flingué de Dallas s’il avait pas lui aussi pris une bastos). Ensuite histoire classique, droits du bouquin rachetés par la Paramount, le scénariste Justin Haythe qui en fait une adaptation pour le cinéma, qu’il retravaillera avec Sam Mendes lorsque celui-ci se déclarera intéressé pour en faire un film.
Mendes, Winslet & DiCaprio
Sam Mendes n’a derrière lui que trois films, dont deux cartons au box-office, « American beauty » et « Jarhead : la fin de l’innocence ». Il est marié avec Kate Winslet, à qui il propose le rôle principal (c’est elle qui la première a lu le bouquin et a mis Mendes sur le coup), tout en espérant (même si c’est pas vraiment affiché) qu’elle fera des pieds et des mains pour amener sur le projet son meilleur ami, Leonardo DiCaprio. Qui est surbooké, hésite, mais finit par donner son accord.
Parenthèse. Un blaireau dont j’ai oublié de noter le nom dans les bonus du Blu-ray plastronne en disant que c’est grâce à ce film que le Leo est passé du statut de jeune premier à celui de grand acteur … ah bon, parce que le type qui venait d’enchaîner en haut de l’affiche trois Scorsese (« Gangs of New York », « Aviator », « Les infiltrés ») et un Spielberg (« Arrête-moi si tu peux ») en donnant entre autres la réplique à Daniel Day-Lewis, Tom Hanks et Nicholson, avait besoin de tourner avec Mendes pour asseoir sa réputation ?? Y’a des coups de pied au cul qui se perdent …
Ce qui ne veut pas dire que DiCaprio et la Winslet soient en roue libre sur ce film. Winslet obtiendra un Golden Globe et « Revolutionary road » (le titre en VO) 3 statuettes aux Oscars, dont une pour le second rôle de Michael Shannon (j’en recauserai plus bas de celui-là). Winslet et DiCaprio sont juste parfaits et crédibles dans ce film d’une noirceur et d’une tension qui vont crescendo …
L’histoire en deux mots, est celle du couple Frank et April Wheeler, trentenaires quelconques (lui bosse parce qu’il faut bien faire quelque chose au siège newyorkais d’une grosse boîte, elle élève leurs deux enfants) de l’Amérique de la fin des années 50 (en plein milieu des Trente Glorieuses, croissance, prospérité et possibilité de réaliser les rêves le plus fous). Et justement, Madame Wheeler (Winslet) s’emmerde. Un premier déménagement dans la « Revolutionary Road » (rue pavillonnaire d’une bourgade de banlieue du Connecticut, à quelques encablures donc de New York) lorsque va arriver le second gosse casse un peu la monotonie de sa vie, elle fait aussi du théâtre amateur dans une compagnie qui enchaîne les bides …
Au début tout va bien
Cette présentation des personnages est à mon sens le seul petit point faible du film, où la scène d’introduction nous montre des années avant que débute l’histoire la rencontre / coup de foudre de Frank et April, à laquelle s’enchaîne la fin d’une représentation théâtrale calamiteuse avec April en tête de distribution ce qui vaut un retour at home avec une monumentale engueulade du couple en bagnole (où apparaissent immédiatement la faiblesse de l’homme et la froide détermination de la femme). Et ensuite va arriver un flashback montrant le couple aménager à Revolutionary Road… on s’y perd un peu, d’autant que sont entrevus des personnages auxquels on ne prête pas forcément attention, mais que l’on retrouvera plus tard dans l’histoire …
On s’aperçoit très vite que le couple modèle, le couple idéal va mal … April ne supporte plus sa morne vie de femme au foyer (un plan superbe et qui en dit long où elle sort la poubelle, et jette un regard circulaire sur une Revolutionary Road sans âme qui vive, avec un alignement impeccable des poubelles des voisins sur le trottoir). Un jour qu’elle fouille dans une boîte de photos de jeunesse de Frank (il a fait le Débarquement et s’est fait tirer le portrait avec un pote soldat devant la Tour Eiffel), elle a l’illumination : elle sait parler français, toute la famille va déménager en France, c’est elle qui va travailler et Frank à qui elle trouve un joli coup de crayon, y deviendra peintre. On sent vite qu’April est une rêveuse borderline, on sait qu’elle est coutumière de pétages de plomb monumentaux, et donc Frank n’ose pas lui dire non, joue sans conviction à préparer leur départ vers cette Terre Promise, en se disant qu’April finira par passer à autre chose … Il continue son morne train-train de scribouillard, saute à temps perdu (et toujours sans conviction) une jeune secrétaire niaise de la boîte. Mais c’est aussi un impulsif, capable lui aussi de monter dans les tours lors des disputes du couple qui ont tendance à se multiplier. Et là, ceux qui savent qu’il y a des gens qui ont fait des bons films avant ceux de Frank Dubosc, trouveront de nombreux parallèles avec le génial « Qui a peur de Virginia Woolf » dans lequel le couple Burton- Taylor rejouait devant la caméra de Mike Nichols les colossales scènes de ménage avinées qui étaient leur quotidien à la ville …

Et on assiste à ce spectacle du couple qui s’enfonce dans l’incompréhension mutuelle, chaque événement qui survient ne faisant qu’en rajouter une couche. Un troisième enfant est mis en route lors d’un tendre moment de réconciliation. Problème, April veut avorter, Frank aimerait bien qu’elle le garde. Parce qu’un boulot bâclé fait dans sa boîte lui a valu à sa grande surprise d’attirer l’attention sur lui du PDG qui propose un gros avancement qu’il accepte sans rien dire à son April toujours en partance pour Paris … Les amis et les voisins ne font qu’envenimer la situation. Le voisin (joué par David Harbour) est dans la troupe de théâtre avec April, en est amoureux, et finit par la sauter vite fait mal fait sur le siège d’une bagnole (faut dire qu’elle l’a bien allumée dans un dancing …), tandis que sa femme est totalement effacée au milieu de sa ribambelle de gosses mais semble avoir des yeux de Chimène pour les beaux April et Frank et semble amoureuse des deux en même temps.
Une autre famille grouillote dans la troupe de théâtre. Le couple commence à être dans l’âge, elle est agent immobilier (c’est elle qui a mené April et Frank à Revolutionary Road), lui n’est relié au monde extérieur que par son sonotone qu’il débranche quand il veut avoir la paix. Ils ont un fils (excellent Michael Shannon), mathématicien de génie bien cinglé qui vient de passer des années en hôpital psy. Ce dernier, chaque fois qu’il est invité avec ses parents à manger chez les Wheeler, avec ses intuitions d’idiot savant, devient le miroir de leurs consciences et les met crûment face à leurs réalités. Les repas tournent dès lors court …
Rien ne va plus ...
Il faut reconnaître que le film est mené de main de maître par Mendes. Qui ne focalise pas la caméra uniquement sur sa bien-aimée (on en connaît qui ne s’en sont pas privés, Godard étant le premier qui me vient à l’esprit), mais tient son histoire en mettant un point d’honneur à tout filmer en extérieurs (on vit vraiment les disputes de l’intérieur dans de vraies pièces nécessairement confinées pour une équipe technique), la fin des années cinquante est minutieusement reconstituée (beaucoup de bagnoles d’époque, des scènes de foule en costumes vintage,… ) de la belle ouvrage …
Et le final est d’une tension et d’une noirceur totales, sans qu’il soit besoin pour Mendes d’agiter de grosses ficelles. On ne voit pas tout, mais le jeu des acteurs nous fait bien comprendre ce que l’on n’a pas vu … Quitte à passer pour un pourfendeur de vérités indiscutables, le couple DiCaprio / Winslet y est bien meilleur que dans « Titanic » (grand et beau film cependant), puisque le fantôme du foutu bateau les poursuivra chaque fois qu’ils seront ensemble devant une caméra …
On peut trouver de nombreux parallèles avec quantité d’autres films (l’histoire d’amour qui finit mal n’a rien d’un thème immensément original), mais plus particulièrement avec ceux de Bergman et Cassavettes (les disputes en vase clos avec montée hystérique dans les tours). Sauf que Mendes se démarque de ces films intimistes aux face-à-face hurlants des acteurs par une histoire élaborée, un portrait d’une époque et d’une société soignées, une distribution remarquable avec d’excellents seconds et deux têtes d’affiche qui ne cabotinent pas, et jouent juste …
« Les noces rebelles » est à déconseiller aux amateurs des super héros Marvel. Par contre ceux qui aiment les bons films y trouveront plus que leur compte …


Du même sur ce blog :



KIM KI-DUK - PRINTEMPS, ETE, AUTOMNE, HIVER ... ET PRINTEMPS (2003)

Et au milieu flotte un monastère ...

On peut lire partout, enfin sur toute la com qui a entouré la sortie du film que « Printemps … » était le chef-d’œuvre du cinéma coréen … ce qui est très plausible. Les archives cinématographiques du pays ont été détruites soit lors de la guerre de Corée, soit par les dictatures militaires qui ont suivi. Et au début des années 2000, le cinéma sud-coréen est le parent pauvre du cinéma asiatique. Les productions japonaises, taïwanaises ou hongkongaises se taillent la part du lion. Et du côté coréen, Park Chan-wook et Kim Ki-duk, même pas 40 ans, font figure de pionniers alors qu’ils n’ont même pas une poignée de films à leur actif. Et donc toutes les chances de faire un chef-d’œuvre …
En une décennie et demie, les choses ont bien changé et aujourd’hui le cinéma sud-coréen est un des plus prolifiques, originaux et inventifs du monde, et se retrouve palmedorisé à Cannes. Et « Printemps … » fait toujours figure de jalon filmé incontournable de ce pays …
Printemps ...
Peut-être parce que c’est un film qu’on peut trouver excellent même si on n’y comprend rien … je m’explique. « Printemps … » est sinon une allégorie ou un monument, mais tout du moins un film dont le cœur est la religion bouddhiste et ses symboles. Alors désolé, j’ai plus de cinq décennies de mécréantisme derrière moi et bac-15 dans toutes les fuckin’ religions … autant dire qu’une putain d’histoire religieuse orientale (même filmée par Scorsese comme « Kundun ») ça me gave très vite.
Alors faudra pas compter sur moi pour vous expliquer les foutues symboliques des peintures sur les portes ou sur les murs du temple, ou le pourquoi du comment des animaux (le poisson, la grenouille, le chien, le serpent, la poule, le chat, la tortue, que signifient-ils chez les bouddhistes, j’en sais rien et veux pas le savoir, mais une chose est sûre, ils sont pas là par hasard …). « Printemps … » est excellent et captivant parce qu’il renvoie aux fondamentaux et aux origines du cinéma, il montre des images qui racontent une histoire. « Printemps … » pourrait être un film muet, il produirait le même effet. Parce que les acteurs (quasiment tous des non professionnels) sont pas des bavards (le bouddhiste est plutôt méditatif et contemplatif, en tout cas un taiseux) et que les clés de l’histoire semblent couler de source. Il pourrait aussi être en noir et blanc, mais ce serait dommage. On perdrait un des plus beaux paysages vus dans un film, un petit lac niché au milieu de montagnes abruptes dans un Parc National coréen, et sur lequel l’équipe du film a construit un monastère flottant, l’embarcadère et les portes qui y conduisent sur la rive.
« Printemps … » dure un peu plus d’une heure et demie. Les quatre premières saisons se partagent à peu près équitablement le film, le dernier printemps (qui sert de conclusion, on y reviendra) n’a droit qu’à une paire de minutes.
Le premier printemps nous montre un Maître déjà âgé et son élève, un bambin de moins de dix ans. Qui sont-ils, d’où viennent-ils, pourquoi sont-ils là, on n’en sait rien. Coupés du monde (seul un sentier mène au lac, et les deux seules barques sont généralement arrimées au monastère flottant), le Maître essayant d’inculquer des valeurs et des principes au gamin. Qui se livre à des jeux cruels sur les berges, lestant des animaux de cailloux qui les font pour la plupart mourir à petit feu. Le Maître va attacher une pierre sur le dos de son élève et l’obliger à aller constater le résultat de ses jeux sadiques.
Eté, et Bouddha créa la femme ...
L’été a lieu plusieurs années plus tard. L’élève a maintenant pas loin de la vingtaine et n’a apparemment jamais quitté le monastère. Il transpire le calme religieux, la zen attitude. Il va se retrouver perturbé, forcément perturbé par l’arrivée inattendue d’une jeune gamine timide venue se faire soigner par le Maître. Evidemment, la proximité, voire la promiscuité (le monastère est minuscule, il y a bien des portes à l’intérieur mais pas de murs, ne me demandez pas pourquoi, et tout le monde passe par les portes, ne me demandez pas pourquoi non plus …). Vous le voyez venir le plan cul ? Et en plus de baiser, ils vont tomber amoureux. Et lorsque la mijaurée partira, l’élève va se défroquer et la suivre.
Lorsque l’automne du film arrive, plusieurs années ont encore passé. Bon, je vais pas tout vous raconter, mais l’élève revient auprès de son maître, suivi d’assez près par des flics. L’automne se finira avec le Maître faisant une reprise à sa façon du plus célèbre morceau de Deep Purple. Sans les riffs de Ritchie Blackmore, parce qu’en plus d’être un film peu causant, « Printemps … » n’est pas doté d’une bande-son omniprésente, c’est le moins que l’on puisse dire.
Hiver, Kim Ki-duk est le nouveau Maître

Du temps a encore passé, lorsqu’en plein hiver, sur le lac gelé, ce qui donnera lieu (comme dans tout le reste du film d’ailleurs) à quelques plans d’une beauté à couper le souffle, se pointe un nouveau Maître, joué par Kim Ki-duk lui-même, qui devra expier les fautes commises dans le monastère. Et à la fin un tout jeune enfant lui sera amené.
Le dernier printemps nous montre cet enfant s’amuser méchamment avec une tortue sur la plate-forme du monastère…
Et là on se dit qu’on a compris, que Kim Ki-duk a voulu nous livrer une parabole non pas sur la religion, qui ne servirait que de prétexte, mais sur la vie, où tout ne serait qu’éternel recommencement. Sauf que ces deux dernières minutes sont la fin « internationale » du film. Et quand on voit dans les bonus la fin coréenne, la conclusion est tout autre. Ce qui en soi est une leçon de cinéma, quand une seule scène différente suffit pour changer la perception de tout ce qu’on vient de voir.
« Printemps … » est formellement un grand film, il a obtenu plein de récompenses méritées, qu’il ne faut surtout pas voir comme des colifichets qu’on attribuerait avec une mansuétude hypocrite à une œuvre d’un « pays émergent » du 7ème Art. Même si comme moi on zappe (par ignorance) tout le côté mystico-religieux du truc, reste un film aussi prenant que peut l’être un film sur lequel on manque totalement de repères sociaux, comme au hasard, « Le salon de musique » de Satyajit Ray …
Pour l’anecdote, ce sont des producteurs allemands qui ont amené le fric pour que le film puisse se faire. A priori un mélange assez paradoxal que cette rencontre entre la rigueur toute germanique et la poésie de « Printemps … ».





OLIVER HIRSCHBIEGEL - LA CHUTE (2004)

La Bête Humaine ...

Il a toujours fallu de tout pour faire un monde (immonde). Et l’histoire de notre morceau de caillou et d’eau qui se réchauffe est pleine de tristes figures qui ont passé l’essentiel de leur vie à répandre le sang de leurs semblables. Et il y en a un dont le nom clignote plus fort que tous les autres, celui qui incarne le Mal absolu, Tonton Adolf … Le sale type de tous les records (des millions de types morts à cause de lui, d’un de plus dégueulasses régimes politiques mis en place, …), celui qui a servi à l’invention du point Godwin …
Hirschbiegel, Lara & Ganz
Il a fait des choses pas bien du tout, Hitler … et en plus il sert de paravent à tout un tas de gugusses qui valaient pas mieux que lui, mais que l’Histoire (ou ceux qui nous la racontent) ont jugé moins pires… Fantômes de Staline, Pol Pot, César, Napoléon, Hussein, …, dormez en paix … fantômes des dieux au nom desquels on s’entretue depuis trois mille ans, continuez de siéger dans vos paradis … fantômes de tous les colonialistes des cinq derniers siècles, contemplez les ruines de vos empires… et il faudra un jour faire le compte de tous ceux qui ont péri pour que la Chine affiche aujourd’hui sa richesse arrogante … sans oublier ceux qui deviendront pas vieux parce qu’ils vont crever de faim ou d’autre chose parce que d’autres qui ont déjà tout en veulent encore plus …
Alors quand arrive en salles ou dans la télé « La Chute », qui est certainement le film définitif mettant en scène Hitler, tous les donneurs de leçons y vont de leur couplet, faisant la moue, hésitant entre enthousiasme et malaise (voir les forums, blogs, revues d’acheteurs, …). What ? ce dictateur nazi serait un homme, un type capable de sourire, de pleurer, de se montrer aimable parfois ? Ben, a priori, c’est pas l’Alien de Ridley Scott et Giger, il avait des parents comme vous et moi, et s’il avait eu des enfants il les aurait aimés et aurait joué avec je suppose … ceux qui me connaissent (ou me lisent) savent que j’ai aucune admiration pour ce sale type ni pour ses idées nauséeuses qui s’offrent un revival et plaisent beaucoup en Europe et ailleurs ces temps-ci …
« La Chute » n’est pas un documentaire. Ni un film. C’est une leçon d’Histoire. Et pas l’histoire d’Hitler, ce que beaucoup oublient lorsqu’ils causent du coup d’éclat de Oliver Hirschbiegel. « La Chute » est centré sur la secrétaire d’Hitler, Traudl Junge, recrutée en novembre 1942, et qui fera son job auprès de lui jusqu’à la mort de son patron le 30 avril 1945.
Eva Braun & Hitler
Et la vraie Traudl Junge (morte en 2002), parle au début du film. Avec la rhétorique habituelle des exécutants de base du régime nazi (voir leurs témoignages dans le vrai documentaire « Shoah » de Claude Lanzmann), en gros « on était jeunes, on savait pas, on obéissait, on aurait dû se poser des questions … ». Il y aurait beaucoup à dire sur ce genre d’argumentaire, mais c’est pas le sujet … en tout cas pas celui du film …
Novembre 1942. Les nazis campent devant Stalingrad, ils n’iront pas plus loin vers l’Est. Dans son bunker berlinois, Hitler auditionne des candidates pour un poste de secrétaire personnel. La jeune Junge (22 ans) a droit à un essai dans le bureau du führer parce qu’elle est bavaroise (on voit que ça rappelle plein de souvenirs à Hitler). Evidemment, toute émotionnée, elle se montre incapable de taper un texte lisible. Très calmement, Hitler lui propose de reprendre, et elle est finalement embauchée. Traudl Junge est incarné par l’actrice roumaine Alexandra Maria Lara et c’est un peu le maillon faible du casting, ne quittant jamais son air soumis, souriant et ébahi, alors que l’histoire du monde s’écrit sous ses yeux ou sort de sa machine à écrire …
Faut dire qu’en face, il y a une performance énorme et habitée de Bruno Ganz. Il est Hitler, et non pas un acteur qui joue Hitler. Le mimétisme physique, même si c’est juste une affaire de bon maquillage est là poussé dans ses moindres détails (ces tremblements parkinsoniens de la main qu’il tient toujours derrière le dos), des terribles crises de colère entrecoupées de séquences de calme et d’apaisement, des certitudes totalement folles dans le contexte assénées devant une cour de dévoués qui ne pipent mot … Hitler par Ganz est un être humain et non pas la caricature à laquelle on l’a toujours par facilité et paresse intellectuelle réduit. Mais un être humain terrifiant, perdu dans ses rêves de grandeur et de domination fous, prêt à sacrifier jusqu’au dernier Allemand pour la poursuite de ses chimères … Pour aussi extraordinaire que soit le Hitler de « La Chute », le réalisateur Hirschbiegel (quasi inconnu jusque-là, et même après d’ailleurs …) ne tombe pas dans la facilité en faisant reposer le film sur lui. « La Chute » n’est pas (seulement) la fin d’Hitler, mais l’écroulement d’un monde et d’un système qu’il avait mis en place. D’ailleurs le suicide d’Hitler a lieu trois quart d’heure avant la fin du film (qui dure quand même deux heures et demie).
Et ce film est génial, parce qu’il s’attache certes à raconter l’histoire des derniers jours du Führerbunker (ce terrier fortifié au cœur du Berlin, poumon du régime nazi) et de ses occupants, mais aussi nous permet de suivre quelques personnages secondaires, dont l’Histoire n’a pas retenu le nom (le gamin des Jeunesses hitlériennes, décoré par l’Adolf au milieu de la débâcle berlinoise – qui est la dernière apparition historique publique d’Hitler – qui finit par traverser les lignes russes avec Junge).

La fiction
et l'Histoire ...
L’essentiel du film se passe au printemps 1945 alors que Berlin est sous un tapis de bombes anglaises et américaines, sous le feu de l’artillerie russe et que les soldats russes avancent rue après rue vers le centre névralgique de la capitale allemande. Dans son bunker, Hitler au milieu des dignitaires du régime, est le seul à croire à un retournement de situation. Il faut le voir, cet ancien caporal dont l’audace militaire a failli lui faire conquérir le monde, penché sur ses cartes, ordonner des offensives ou des contre-offensives alors que les troupes en question n’existent plus, ce que tout le monde se garde bien de lui dire pour ne pas essuyer ses terribles (et parfois mortelles) colères. Il faut le voir rêver encore devant des maquettes du centre-ville de Berlin qu’il avait en projet de réaménager, alors que la ville n’est plus qu’un champ de ruines où les dernières troupes nazies essayent de résister en tuant tous ceux qui refusent (ou pourraient peut-être refuser) cette ultime boucherie. Il faut voir Hitler, quand il comprend que tout est perdu, refuser de capituler et souhaitant à tous les Allemands de crever parce qu’ils n’ont pas su réaliser son rêve idiot de suprématie mondiale … Tiens, en passant, certains ont noirci des feuillets pour s’indigner que jamais il ne soit fait mention de la Shoah dans le film. D’abord c’est pas le sujet du film, et ensuite il me semble bien que la « solution finale » était un secret assez bien gardé y compris au sein des plus hautes sphères nazies, tout le monde ne savait pas et ceux qui savaient n’en parlaient pas …
Il y a dans « La Chute » comme un air de déclin de l’Empire romain, avec ses scènes de beuverie dans le bunker (pas l’Adolf, il était strictement végétarien et ne s’accordait que quelques gorgées de vin), et ses fêtes (je vois pas d’autres mots) dont l’instigatrice principale était Eva Braun, la maîtresse qui deviendra sa femme la veille de leur suicide commun. Personnage étonnant (elle était bien plus jeune que lui, insouciante et gaie d’apparence, passant son temps à fumer, picoler et danser et entraînant les militaires de garde ou les dignitaires de passage dans ses folles sarabandes que n’interrompaient pas les déflagrations assourdies des bombes …).
La famille Goebbels
Mais les scènes les plus saisissantes sont celles qui mettent en scène la famille Goebbels. Lui est joué par Ulrich Mattes, un acteur dont le seul fait d’armes si j’ose dire était des apparitions récurrentes dans la série policière au ralenti Derrick. Goebbels est austère, taiseux, et chacune de ses apparitions fait froid dans le dos. Il sera l’héritier d’Hitler après les défections (trahisons dit-on dans le bunker) des guère reluisants Himmler et Goering. Son royaume en ruines ne survivra que de quelques jours à la mort d’Hitler, le temps de la scène la plus effrayante du film, sa femme tuant (en leur faisant gober une ampoule de cyanure alors qu’ils sont sous sédatifs) leurs six enfants avant que le couple ne se donne la mort (il la tue d’une balle en plein cœur avant de se faire exploser la tête). Une scène d’infanticide interminable, exécutée avec une froideur et une lenteur hallucinantes.
L’atmosphère sinistre et sordide (les décors d’un bunker, fait de béton armé, ne donnent certes pas un air de fête foraine au film) est renforcée par la quasi absence de musique (des gros plans, des paroles, des actes, au milieu de scène de guerre et de boucherie militaires plutôt réalistes).
On a vu quantité de films sur la Seconde Guerre Mondiale, le régime nazi et Hitler. Dont quelques-uns d’excellents. Personnellement, je n’en ai vu que deux qui retournent les tripes et qui reviennent me hanter alors que le Dvd est depuis longtemps rangé. « La Chute » est l’un des deux. L’autre, c’est « Requiem pour un massacre » de Klimov …



OREN PELI - PARANORMAL ACTIVITY (2009)

Spielberg Activity ...

« Paranormal Activity », c’est écrit sur la jaquette du Dvd, c’est le film qui a terrorisé Spielberg … Hum, sérieusement ? Parce qu’il faut préciser certaines choses.
Micah, Katie & Oren Peli
Quand le dénommé Oren Peli, programmateur israélien dans le monde du jeu vidéo exilé aux States, a tenté de vendre à des distributeurs son film, personne n’en a voulu, des majors du cinéma jusqu’aux petites boîtes spécialisées dans les films de genre gore. Tout juste le film avait été montré dans un festival de village où il avait péniblement reçu un accueil pas trop mauvais. Jusqu’à ce que Peli, à tout hasard, parce que c’était pas du tout le genre de la maison, envoie une copie à Dreamworks, la boîte de Spielberg. Les types qui chez Dreamworks, ont jeté un œil, ont trouvé ça extrêmement cheap, tout juste bon à servir de base à un remake filmé par un vrai réalisateur avec de vrais acteurs (c’est pas moi qui le dis, mais Peli qui le laisse entendre dans la section bonus). Le Dvd a donc fini chez Spielberg pour qu’il prenne une décision. Et là, le Steven a claironné haut et fort que « Paranormal Activity » dans sa version brute était le film le plus effrayant qu’il ait jamais visionné. Il aurait même constaté chez lui (on ne rit pas) que des portes se fermaient toutes seules de l’intérieur et se serait empressé de se débarrasser du Dvd (à se demander si c’était pas « Ring » qu’il avait vu).
Grand couteau et mauvais cadrage
Toutes ces déclarations de Spielberg, on ne dit pas (ou on oublie de le dire) si elles sont antérieures à la décision prise de faire sortir le film en salles sous l’étiquette Dreamworks sans rien modifier des 83 minutes du film (même si une fin « alternative » grotesque avait été tournée par Peli). En gros, Spielberg, en bon boss et premier commercial de sa boîte, a fait un super coup de marketing pour cette mocheté qu’il venait d’acheter …
Parce que le seul truc à vraiment filer le frisson, ce sont quelques chiffres issus de « Paranormal … ». Budget matos : 3000 dollars, une caméra digitale Sony FX1, posée sur un trépied dans une piaule ou tenue à l’épaule par l’acteur principal. Décors : la baraque de Peli avec toute juste la peinture rafraîchie par endroits et quelques loupiotes rajoutées (c’est lui qui le dit). Le casting : cinq noms (quatre qui « jouent » et une autre dont on voit juste trois photos sur une page internet). Le scénario : le même que celui du « Projet Blair Witch » qui se passe dans cent mètres carrés au lieu de se passer dans des bois …
Les autres chiffres, tous les étudiants des écoles de commerce du cinéma les connaissent (des zilliards de dollars de bénef, et des suites numérotées genre discographie de Chicago (le groupe).
Alors, bouillasse en images ou pas, « Paranormal Activity » ? Ouais, mais pas nul de chez nul, surtout parce qu’on a vu (ou qu’on a évité de voir) pire depuis … Faut dire que le Peli a passé des années à cogiter son machin, tourné ensuite en cinq jours. Il y a une montée graduelle de la tension, bien soulignée à l’écran par l’affichage digital de la caméra (super trouvé, ça par contre). Des heures montrées en version très accélérée (ou évidemment il ne se passe rien) et puis quand le compteur défile à vitesse normale, on sait que là, il va se produire quelque chose … Sauf que la fin « normale » vient tout foutre en l’air (on comprend, enfin, façon de parler) et que la fin alternative (juste le dernier plan différent, la Katie qui s’égorge face caméra) est ridicule.
Attention au grand méchant loup ...
Des pans entiers de « Paranormal … » sont pompés sur « Blair Witch » (le coup des bandes vidéo retrouvées par la police et montrées au spectateur) qui lui finissait en point d’interrogation, ce qui en faisait tout le « charme ». Également sur « La maison du Diable » de Robert Wise qui lui foutait vraiment les jetons, et quelques emprunts à « L’Exorciste » (ici le médium prend les jambes à son cou devant tant de mauvaises ondes ressenties).
« Paranormal Activity » a juste fini d’ouvrir la boîte de Pandore des films horrificques comme aurait dit Rabelais censés être de vrais documentaires filmés avec les pieds par des types qui ont une caméra sur eux et devant lesquelles s’agitent de vrais faux acteurs de quinzième zone au jeu outrancier multipliant hurlements de terreur au milieu de gerbes de sang … Ceux qui pensent aux navrants « [REC] » ont gagné l’intégrale de Romero, leur père spirituel, qui boxait quand même dans une catégorie infiniment supérieure …
Les deux acteurs principaux ( ? ) ont du être bouffés par un démon de passage, car hormis dans les suites de « Paranormal Activity », on ne les a jamais revus. Peli, lui, avec les thunes amassées, a dû refaire sa baraque …
Bien joué Spielberg, tu as fait croire à des millions de types que « Paranormal Activity » était un bon film qui faisait peur …



PAUL HAGGIS - COLLISION (2004)

Tôles et vies froissées ...

En 2004, Paul Haggis est plutôt connu des initiés comme scénariste (du « Million dollar baby » d’Eastwood notamment). C’est un cauchemar récurrent qui va le lancer dans l’écriture, la production et la réalisation de « Collision ». Une dizaine d’années plus tôt, il fut avec sa femme victime d’un car jacking. Episode traumatisant et questions sans réponses : qui étaient ces jeunes braqueurs, depuis combien de temps se connaissaient-ils, que sont-ils devenus … autant d’interrogations qui lui valent des nuits blanches.
Bullock, Haggis & Fraser
Et au cours d’une de ses insomnies, il prend ce point de départ de braquage de bagnole pour écrire un scénario. Basé en gros sur l’effet papillon ou la théorie des dominos, qui fait que le hasard fait se rencontrer ou s’opposer des gens qui ne se connaissent pas mais dont la rencontre va modifier l’existence des protagonistes. En gros, un film conçu comme un mix de « Les américains » de Altman et des premiers Iñarritu.
Haggis n’a rien d’un type bankable, il y sera de sa poche pour produire, assisté d’un tas d’autres financeurs, dont le premier intéressé est l’acteur (de seconde zone) Don Cheadle qui se verra attribué un des rôles principaux. Résultat de cette sorte de crowdfunding : six millions et demi de dollars, et donc un film à petit budget où il faudra déployer des merveilles d’ingéniosité pour faire des économies et rogner sur toutes les dépenses (des scènes seront tournées dans la propre maison de Haggis).
Don Cheadle
Malgré tout, Haggis attire deux stars sur son projet : Sandra Bullock et Matt Dillon qui se contenteront de cachets dérisoires emballés qu’ils sont par le scénario (version officielle …, mais rien ne dit que leurs avocats n’ont pas négocié un gros pourcentage sur recettes et bénéfices, allez savoir …).
Le film est prenant. En même pas deux heures, on voit se croiser les destins d’une multitude de protagonistes. D’abord présentés de façon caricaturale, de stéréotypes. Et puis, les situations auxquelles ils vont se trouver confrontés va casser tous leurs codes et on va les voir évoluer tout au long du film. Qui commence une nuit et s’achève à la fin de la nuit suivante, dans la froidure d’un Los Angeles hivernal. D’après Haggis, le choix de Los Angeles est crucial, c’est une ville où il n’y a aucun contact direct entre les personnes, tous les contacts se font par le métal (les flingues devant le museau, les bagnoles qui se rentrent dedans).
Le manteau magique invisible sera t-il suffisant ?
On suit donc trente-six heures de la vie des protagonistes qui symbolisent toute la population de L.A. Le couple d’enquêteurs de police (le Black Cheadle et sa collègue Hispano, ils sont vaguement amants, lui s’occupe de sa mère impotente et il a un jeune frère en train de mal tourner), le duo de jeunes braqueurs Blacks (dont le rappeur Ludacris), le district attorney et sa femme (Sandra Bullock), la patrouille de flics (les excellents Matt Dillon et Ryan Philippe), le producteur de sitcoms Noir et sa femme, le serrurier mexicain, sa femme et sa fille, le couple de Sud-Coréens, l’épicier iranien et sa famille, …
Il faut d’abord souligner le gros travail d’écriture. Malgré la multiplicité des personnages, et donc des mini-intrigues (et certains se retrouvent dans plusieurs), le film est très fluide, facile à suivre (à la différence de ceux d’Iñarritu, où il faut s’accrocher, même si ça vaut plus que le coup). Certains personnages sont fouillés (ceux de Sandra Bullock, de Matt Dillon, de Don Cheadle, de Michael Peña qui joue le serrurier mexicain). Et puis ce sont des tranches de vie qui sont montrées, et la vie à L.A. elle est pas forcément comme sur les cartes postales. Le racisme est au cœur du film, même si c’est pas un film sur le racisme. Tous les protagonistes à un moment ou à un autre sont quasiment dépendants de leur couleur de peau, de leurs origines.
L'un des deux est la fille de Marvin Gaye. Sauras-tu la trouver ?
Il y a des scènes fortes, avec comme sommet un contrôle au faciès de Matt Dillon sur un couple noir aisé, avec fouille au corps humiliante de la femme. Mais d’autres ne laissent pas indifférent, soient qu’elles jouent sur la tension ou l’émotion (la scène du serrurier mexicain avec sa fille quand il lui offre un manteau magique invisible, et plus tard quand la gamine s’interpose entre son père et l’épicier iranien qui le menace flingue à la main).
« Collision » est un film que dans un autre siècle quand le cinéma n’existait pas on aurait qualifié de déterministe. A savoir la façon dont les événements agissent sur le comportement des gens. Et c’est là que le bât blesse un peu. On voit (en trente-six heures !) les démons devenir des anges et vice versa. L’enchaînement des évènements est crédible, ce sont les évolutions des personnages qui ne le sont pas. Certes, nobody’s perfect comme disait l’autre, témoin la révélation finale de l’activité du Coréen que l’on prenait jusque-là pour un type malchanceux (au mauvais endroit au mauvais moment) et qui semblait oublié par les scénaristes.
Mais désolé, des pans entiers du final du film laissent dubitatif. La super bourge raciste Bullock qui tombe dans les bras de sa boniche souffre-douleur mexicaine, ouais bof … ou la transformation en quelques heures du producteur de cinéma qui passe de victime consentante en redresseur de torts casse-cou … ou pire, la dérive tragique du coéquipier de Dillon qui finit par aller beaucoup plus loin que le collègue détesté … Certes, ça fait partie du projet et de la vision du scénario et du réalisateur, mais la plupart de ces rédemptions (l’autre sujet du film) sonnent faux …
Mais le constat (amiable ?) de « Collision » reste largement favorable. C’est prenant, rythmé, et réalisé humblement (Haggis se prend pas pour Scorsese, il sait qu’il n’en a ni la technique ni les moyens financiers) sans paraître misérabiliste. Pas loin d’être incontournable …



DIZZEE RASCAL - BOY IN DA CORNER (2003)

Rap 2.0 ?

« Boy in da corner » a été considéré comme un disque important, voire majeur par les gens compétents en matière de rap. Soit. Du haut de mon incompétence, j’affirme que cette rondelle me gonfle …
Le rap, quand je suis de bonne humeur (si, si ça m’arrive), je supporte. Parfois même j’apprécie. Bon, le rap old school. Parce que moi aussi je suis de la old school. Même de la very old school. Pour les quelques-uns à qui les débuts de Dizzee Rascal auraient échappé, le minot a le profil type du rappeur, avec tous les malheureux clichés qui vont avec. L’enfance difficile, la petite délinquance et la rédemption par la musique, où il se fait remarquer encore tout ado en tant que Dj remixeur dans les soirées et les endroits pointus. Contrat avec XL Recordinds, (très gros label indépendant ayant signé ou distribuant Beck, Gorillaz, Moby, White Stripes, … plus tard Adele ou Vampire Weekend, …) et alors que le gamin n’a que 19 ans, parution de « Boy in da corner ».
Ou il pose, sitting on a corner, en survet bouffant et Nike rutilantes (comme quoi il a un goût de chiottes pour choisir ses fringues), et fait des mains sur sa tête un signe susceptible de rallier tous les fans d’Angus Young. Que ceux-ci passent leur chemin, ce disque n’est absolument pas pour eux …
Dizee on Dizzee. Mar Bolan faisait ça au début des 70's
D’entrée le son surprend. Tout le temps d’ailleurs. C’est d’une sécheresse brutale et lourde, une sorte d’épure rythmique balancée façon techno. Le Dizzee il rappe par-dessus. Avec son nez, d’une voix nasale qui contribue pas à flatter l’oreille. C’est pas de l’inouï total, un type comme au hasard Tricky savait parfois donner dans les très lourd martial. « Boy in da corner » donne dans le social, dans l’introspectif d’ado immature qui arrive pas à pécho de la meuf (« I luv U » t’es une gamine et t’entends ça, tu détales …), comme des thèmes de morceaux des Buzzcocks revus par le rap.
Le coup du disque à sa petite maman chérie sonne forcément cliché (tous ces bad boys ont toujours fait ça, à commencer par les plus asociaux genre 2Pac, ça leur donne peut-être bonne conscience …), et puis 4 lignes plus loin dans le livret arrive un « fuck you » pour tous les « haters & enemies », pfff, ça finit par être d’un ridicule, cette histoire…
Sinon, comme le gars est Anglais, il y a des trucs qui ressemblent à Queen (désolé, mec, mais comme tous ceux de ton île, t’as grandi avec Mercury et sa clique en heavy rotation partout et ça laisse des traces, même si ce doit être une comparaison honteuse pour toi) comme « Fix up look sharp » (l’énorme batterie de « We will rock you » a fait des petits), ou les relents opératiques de « Just a rascal », par ailleurs d’assez loin meilleur titre de la rondelle parce que très différent des autres …
Et on appelle ce sous-genre de rap le grime (désolé j’ai pas trouvé de jeux de mots con ou une contrepèterie à faire avec ça …)
Ah, et le Dizzee il a gagné le Mercury Prize (sorte de César de la musique chez les British) avec cette rondelle …
Et sinon … sinon rien, on passe au suivant et à l'année prochaine…



ALEJANDRO GONZALEZ IÑARRITU - AMOURS CHIENNES (2000)

Walking the dog ...

« Amours chiennes » (« Amores perros » dans la langue des hispanos) est le premier long métrage de Alejandro Gonzalez Iñarritu. On peut commencer plus mal derrière la caméra … d’autant plus que maintenant Iñarritu collectionne les Oscars, deux à la suite en tant que réalisateur, une première, pour « Birdman » et « The Revenant ». Je vais pas jouer  les esprits chagrins, sortir le sempiternel couplet « c’était mieux avant », parce que « Birdman » et « The Revenant » se laissent regarder, et plutôt deux fois qu’une.
Même si le chef d’œuvre d’Iñarritu c’est pour moi « 21 grammes », son second film. Dont « Amours chiennes » se trouve être le brouillon de génie, et « Babel » son follow up hollywoodien. Point commun de ce tiercé, l’enchevêtrement des histoires, trois pour les deux premiers, quatre pour « Babel ». Et un montage à chaque fois peu orthodoxe, mélangeant espaces et temps au mépris de la chronologie. Le montage qui est l’élément clé des films du début de carrière d’Iñarritu, ce dont il s’est souvent expliqué, et notamment dans les maigres bonus du Dvd  de « Amours chiennes ».
Iñarritu & Bernal
Iñarritu aime bien aussi secouer, traumatiser, voire littéralement agresser le spectateur. « Amours chiennes » est un film violent. Il se passe pour l’essentiel dans les quartiers pauvres voire très pauvres (le squat du Chivo) de Mexico, une des villes (sinon la ville) la plus violente au monde, battant systématiquement d’année en année ses records d’homicide par arme à feu. Iñarritu ne se focalise pas sur la violence, ne la place pas systématiquement plein cadre, mais cette violence des hommes, des animaux est toujours là, parce que nécessaire à l’histoire.
Pardon, aux histoires. « Amours chiennes » nous montre les destins croisés de trois couples (il y a trois intertitres annonçant le couple concerné pendant le film, lorsque l’une de ces trois histoires va être plus particulièrement développée). Déjà, ces trois couples sont des couples qui n’en sont pas vraiment, il s’agit de deux personnes qui se cherchent, se fréquentent, se côtoient dans une sorte de parade amoureuse, mais sans se trouver vraiment. Plutôt que des couples, ce sont des antagonismes, des mondes parallèles qui sont montrés.
Octavio et son toutou
Premier « couple », Octavio et Suzana. Elle est sa belle-sœur (le frangin est caissier le jour, braqueur de pharmacies à temps perdu, son rêve est de braquer une banque, ce qui ne sera pas une bonne idée…), elle a un enfant. Tous, plus la mère des deux garçons, vivent dans la promiscuité d’un petit appartement misérable. Le rottweiler des frères va, par hasard, se révéler être une terrible bête de combat. Et pendant que son frère bosse dans son supermarché, Octavio va engager le clebs dans des combats à mort de chiens, gagner beaucoup d’argent grâce à lui, et proposer à Suzana (ils couchent un peu ensemble à temps perdu) de partir loin de Mexico…
Deuxième « couple », Valeria et Daniel. Elle est top model, lui cadre sup marié et père de famille. Il laisse tomber femme et enfants, met toutes ses économies pour installer sa maîtresse Valeria dans un appartement chic. Même s’il apparaît très vite que Valeria n’est réellement attachée qu’à son chien Ritchie dont elle ne se sépare jamais…
Troisième « couple », El Chivo et Maru. Lui est un ancien universitaire devenu guérillero qui a quitté sa femme et sa fille Maru toute enfant pour mener ses combats, en faisant promettre à sa femme qu’elle le donnerait pour mort à leur fille. Après avoir fait vingt ans de prison, il mène une vie de clochard, et accessoirement de tueur à gages, se déplaçant en haillons toujours entouré d’une meute de chiens bâtards qu’il entretient, toujours hanté, maintenant que sa femme est morte, par l’idée de renouer avec sa fille qui ignore son existence…
Ces trois couples (et leurs chiens) vont voir leurs destins se croiser lors d’un accident (séquence choc, neuf caméras mobilisées) de voiture. Responsable, Octavio, qui tente de semer dans Mexico des types qui veulent le flinguer, à cause d’un combat de chiens qui a mal fini, avec revolvers et couteux de sortis. Il grille un feu rouge, et vient taper très très fort la voiture de Valeria. Résultat de la course : un mort (un copain d’Octavio), Octavio et la Valeria salement amochés. Témoin de l’accident, El Chivo qui passait par là, en « repérage » pour un contrat. Il va récupérer le pognon d’Octavio et son rottweiler, bien amoché lui aussi …
Cet accident de voiture, point crucial du film (comme dans « 21 grammes »), va faire évoluer les trois histoires de couple dans des chemins imprévus. Déjà que les points de départ étaient pas foncièrement réjouissants, rien ne va vraiment s’arranger pour qui que ce soit …
Dès ce premier film, Iñarritu démontre qu’il est un maître du film noir. Pas le film noir des années quarante hollywoodiennes avec Bogart et Baccall. Plutôt le noir tendance sordide de la vraie vie, quand déjà rien ne va et que tout s’emmanche encore plus mal, du genre à faire passer Zola pour la Comtesse de Ségur. « Amours chiennes » est un film choc, voire même choquant si on est membre de la fondation Brigitte Bardot (on voit beaucoup de chiens morts dans le film, et même si c’est pour de faux, y’a beaucoup de sang et de langues pendantes …). « Amours chiennes » est une allégorie, genre les chiens les plus sauvages n’arrivent pas à la cheville de la sauvagerie des hommes.
El Chivo et sa meute
Il y a juste un problème pendant ces deux heures et demie d’images. C’est que « Amours chiennes » n’est pas un film. C’est une succession de trois histoires, dont les protagonistes ne se croisent (et sans se voir, vu l’état dans lequel sont la plupart) qu’au moment de l’accident de bagnole. D’ailleurs, au départ, il était question de trois courts métrages (avec les chiens comme thématique majeure), Iñarritu n’étant pas sûr du tout de trouver de financement pour un long métrage. C’est seulement une fois le pognon obtenu qu’il a imbriqué les trois histoires, faisant du Chivo le personnage le plus central. Même si c’est Gael Garcia Bernal (Octavio) qui s’est fait le plus remarquer par la profession et qui a lancé sa carrière grâce à « Amours chiennes ». Il faut reconnaître aussi que l’histoire de la top model, de son clébard disparu sous le plancher et du cadre sup est quelques tons en dessous des deux autres… Ce qui fait toute la différence avec « 21 grammes », dans lequel les trois histoires séparées se rejoignent pour n’en faire qu’une au moment de l’accident de voiture.
Il n’empêche que ceux qui ont frémi avec le survival de DiCaprio (« The Revenant ») ont intérêt à s’accrocher à leur fauteuil. « Amours chiennes » déménage beaucoup plus au niveau montées d’adrénaline. Grand film …


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