THEE OH SEES - FLOATING COFFIN (2013)

Strawberry fields ...

Putain cette pochette … qui peut raisonnablement avoir envie d’écouter une galette avec pareil visuel, foireux mélange d’un du Floyd (« A saucerful of secrets »), d’un des Pixies (« Trompe le Monde »), et d’un d’Animal Collective (« Strawberry Jam ») … et qu’on vienne pas me dire que les gens consomment du mp3 en téléchargement légal, personne va les télécharger les titres de ce skeud.
Parce que les Thee Oh Sees (et ne me demandez pas pourquoi ce blaze improbable, même les journaleux ayant pignon sur rue et salaire à la fin du mois ils en savent rien), c’est une niche musicale, comme diraient les commerciaux. Du garage-rock-psyché-psycho-punk et autres balivernes. D’aujourd’hui et de San Francisco. Dont la figure de proue, le dénommé John Dwyer, est un peu le pape-gourou-leader-référence d’une scène locale paraît-il foisonnante et pleine d’avenir (en langage clair, des groupes qui s’ils sortent un chef-d’œuvre, en écouleront 2000 copies/monde).
D’ailleurs le dénommé Dwyer, même ses fans arrivent pas à le suivre, il publie deux-trois disques par an, sous autant de noms, et dans autant de genres différents (paraît-il du folk au heavy metal, le genre de gonzo qui n’a peur de rien ni de personne …), produit les siens et ceux des autres, et a son propre label … Thee Oh Sees serait la formation-phare du bonhomme, celle des « grands disques ». On me la fait pas, j’y crois pas une seconde à ce genre de plan marketing … Sauf que ce « Floating coffin », c’est tout simplement un grand disque, et que ça m’étonnerait qu’il en sorte des wagons comme ça cette année.

D’abord les Thee Oh Sees sont un groupe à guitares. Et moi les guitares, c’est comme l’odeur du napalm le soir au fond de la jungle vietnamienne, j’aime bien ça. Et puis, les Thee Oh Sees ont un super son de basse qui devrait rendre jaloux Flea des laborieux Red Hot Machin. Et aussi un son de batterie agréable, aux antipodes des kicks de quadruples doubles grosses caisses mixées en avant. Et aussi une claviériste mimi, Brigid Dawson, qui fait plein de chœurs mais est aussi capable de chanter lead. Et surtout, un truc tout con, mais que peu qui sortent des disques savent faire, ils ont mis des chansons sur leur disque. Dix. Avec pas grand-chose à jeter. Pourtant, Dwyer et sa troupe sont partis dans un délire très seventies, genre disque sous substance, plein d’échos, d’effets spatiaux tournoyants. Y’a bien un truc qui me vient, je dépose la dénomination, c’est du krautrock garage. Autrement dit plutôt le versant Neu !, Faust et Can que le Tangerine Dream lorgnant vers le new age…
« Floating coffin » est plein de riffs bien sales, bien distordus, jouant toute la gamme des tempos. On peut passer de la méchanceté de l’inaugural « I came from the mountain », flirter avec le hardcore sur le titre éponyme, la bastonnade limite punk de « Tunnel time ». Et puis des trucs, la majorité, lourds, aplatissants, mid-tempo tournoyants. Y’a un nom qui clignote, Hawkwind, du temps du bassiste à verrues Lemmy Kilmister. Ce côté obstiné et répétitif, ce space-rock velu et mélodique à la fois. Quand c’est vraiment « apaisé », comme sur « No spell », on pense aux nouveaux minots psyché comme Tame Impala ou Jacco Gardner.
Les Thee Oh Sees, ce qui fait leur intérêt avec ce disque, c’est qu’ils ont trouvé une formule, et qu’ils ne s’y tiennent pas. Grâce aux synthés et à la voix de la miss Dawson, ça leur offre une palette sonore mouvante. On peut passer sur « Strawberries 1 + 2 » d’un début à la Hüsker Dü époque « Warehouse … » à un final adossé sur un mur de feedback et là c’est le Neil Young de « Weld » qui vient à l’esprit. Sur le bizarroïde single sorti en éclaireur (« Minotaur »), on hésite entre pop sixties endormie ou Pixies au ralenti (les chœurs, les accords de guitare). « Floating coffin », c’est un disque qu’on croirait primaire et qui dévoile à chaque écoute de plus en plus de subtilités, de digressions sonores, des bribes de guitares orientalisantes très « Kashmir » (« Sweets Helicopter », « Maze Fancier »),  des mélodies compliquées à la Randy Newman (« Toe Cutter / Thumb Buster »), des synthés lugubres comme ceux d’Orange Goblin sur les BO des films d’Argento (« Night crawler », ce titre finissant carrément dans une ambiance gothique).
Un disque un peu fou, faits par des types qui doivent être bien barrés. Un peu à l’Ouest aussi. Mais sûrement pas aux fraises …

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2 commentaires:

  1. Et ben ça fait sacrément envie sur le papier ton bidule ! La pochette est extrèmement flippante et profondémment dégoutante aussi, du genre qui passe bien sur GoT. Bon, j'avais qu'il y a tellement d'excellentes références que ça mets un petit peu la pression quand même, on dirait un papier des Inrocks.;) Blague à part, je trouve un moment pour écouter les titres et je te dis si t'as fumé la moquette ou non.
    (par contre Orange Goblin c'est un groupe de stoner psyché avec des pochettes flashy. Pour les BO de Argento tu enlèves le "Orange" et ça fera la rue Michel)

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  2. Mias dis-donc, c'est vrai que c'est pas mal du tout ce truc ! Ca me parle plutôt. Et le clip de Minotaur (Pixies au ralenti, bien vu) est très drôle et mignon comme tout. Continue comme ça avec les nouveautés, tu vas supplanter Pitchfork.;)

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