MY MORNING JACKET - Z (2005)

Habillés pour l'hiver ?
My Morning Jacket (me dites pas que vous avez l’intégrale et écoutez ça tous les jours, faut faire les présentations) est un groupe démarré dans le Kentucky. Et non, ils donnent pas dans la country. D’ailleurs, ils donnent l’impression avec ce « Z » (m’étonnerait qu’il s’agisse d’une référence à Costa-Gavras) d’être plus anglais qu’américains. Faut dire qu’ils exploitent un sillon assez peu labouré outre-Atlantique, celui de la pop « à grand spectacle » lyrique (ou pompière, ça marche aussi). Pour situer, on dira qu’ils sont voisins de palier avec les productions de Fridman (Flaming Lips un peu, Mercury Rev davantage), et que la voix particulière de leur leader Jim James, genre Castafiore geignarde, leur a valu des comparaisons discutables avec Thom Yorke et sa bande de tristos… Et s’il fallait faire encore plus simple, je dirais que le groupe dont ils me paraissent le plus proche, c’est Arcade Fire (celui des débuts, de « Funeral », pas leur « Suburbs », gros loukhoum surchargé).

Ce genre de mélodies sophistiquées, ces titres très « écrits », ils étaient pas nombreux à faire ça au milieu des années 2000, et c’est pas le genre d’indie-rock le plus vendeur. Mais quelque part c’est le plus casse-gueule, il faut flirter avec toutes les limites au risque de basculer du mauvais côté de la farce. Et pour une poignée de disques réussis en quatre décennies, on compte plus les prétendants à la succession de Brian Wilson qui se sont perdus dans des titres et des skeuds surchargés. Les mélodies à tiroirs qui s’enchevêtrent, l’instrumentation lyrique, l’empilement des chœurs, faut beaucoup de chance et encore plus de talent pour que ça vire pas grotesque.
Les My Morning Jacket n’évitent pas les sorties de route. Il y a des choses (« Gideon », « Anytime ») qui sonnent comme les Simple Minds du milieu des années 80 (les grosses batteries réverbérées, les non moins grosses guitares, les chœurs virils), et c’est pas exactement une bonne idée. Idem, lorsque les MMJ sortent du cadre strictement pop, pour aller vers des choses plus « rock-rackabilly » (« Off the record »), on dirait notre Lio nationale quand elle était brune et qu’elle comptait pas pour des prunes, c’est quand même assez simplet même si ça se veut sophistiqué avec son final de titre jazzy-floydien. Pareil quand le groupe s’attaque à des choses du moment, les rythmiques electro-dance-machin (« It beats 4 U »), ça reste quand même bien scolaire, de la récitation sans beaucoup d’imagination.
A l’inverse, d’autres titres sont plus réussis tel le « What a wonderful man » (comme du Sparks du milieu des 70’s, à condition de supporter la voix suraiguë à la Russel Mael). Les meilleures choses sont à aller chercher à la fin du Cd (pas très long, dix titres et trois-quarts d’heure), un « Lay low » qu’on jurerait extrait du « Band on the run » de Sir Paul McCartney, un « Knot comes loose », une ballade toute en retenue (par rapport au reste, c’est pas vraiment dépouillé). Et bien sûr le titre sur lequel les fans ne tarissent pas d’éloges humides (et pour une fois les fans ont presque raison) ce « Dondante », épique tournerie de huit minutes, débutée comme une jam entre Jeff Buckley et Radiohead, et conclue par une accélération lyrique très floydienne (je me rends compte que ça fait deux fois que je cite le Floyd, alors que la référence des My Morning Jacket est le Velvet Underground, mais désolé, j’ai rien entendu qui ressemble à la bande à Cale et Reed, mais plutôt à son contraire sonore).

Bon, pour résumer, on dira que les My Morning Machin ont fait avec ce « Z » un disque assez bon malgré d’évidentes imperfections, dans un genre « difficile », quelques années avant que les Arcade Fire y songent. Pour être honnête (si, si, ça peut m’arriver en causant zique), il me semblait avant la réécoute bien mieux dans mes souvenirs et je crois bien avoir écrit un jour je sais plus où, que ce « Z » était un des meilleurs disques des années 2000… Mea culpa, mea culpa … Bon, remarquez, Neil Young soi-même a dit un jour que My Morning Jacket faisait partie de ses groupes préférés ...