Affichage des articles dont le libellé est Les centristes. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Les centristes. Afficher tous les articles

DAVID BOWIE - THE NEXT DAY (2013)


Hero to Zero ?

Que voilà un disque qui a priori fait plaisir. Le premier de Bowie depuis dix ans (l’oubliable « Reality »). Un Bowie, dont hormis une chronique nécrologique (depuis des années, le Net bruissait de rumeurs de fin prochaine, rumeurs se répandant encore plus vite que les supposées métastases qui étaient censées l’emporter sous peu), je n’attendais rien de bon, discographiquement parlant. Et donc ce disque est une bonne nouvelle inattendue.
Mais à la réflexion, que peut-on attendre d’un type de soixante-six ans, qui semblait avoir mis un terme à sa carrière depuis que son cœur avait failli lâcher ? Qu’attendre en 2013 d’un gars qui n’a pas sorti un bon disque depuis, allez, « Scary monsters » en 1980 ? Et que des fans énamourés ne viennent pas me dire que Tin Machine était un concept intéressant, qu’il y avait des choses à sauver dans « Tonight », ou que ses disques « électro » traduisaient une remarquable ouverture d’esprit caractéristique de ce grand artiste vers des sons nouveaux qui … bla-bla bla, bla-bla-bla, … De la daube, toutes ces rondelles, qui merci à tous, se sont très bien vendues (beaucoup mieux que ses vrais bons disques) et l’ont mis, lui, sa jolie jeune femme et sa famille, à l’abri du besoin …
Parce que, je vais vous dire, Bowie, j’ai un peu écouté (vite fait, des centaines de fois chacun) pas mal de ses skeuds, et il a été fabuleux dans les rugissantes seventies quand il avait deux ou trois disques d’avance sur toute la concurrence, quand « Ziggy Stardust » annonçait le punk, quand « Young Americans » annonçait le disco, « Station to station » la cold wave, « Low », « Heroes » et « Lodger » l’avènement de l’ambient et de la musique faite par des machines, et  « Pin Ups » toutes les nostalgia à venir. Tout ça en moins de dix ans, avec au moins deux douzaines de titres officiels par an, dont la moitié dignes de figurer sur un Best of. Et Bowie a fait comme les autres, a décliné, est peu à peu descendu de son inaccessible Olympe. Dans les années 80, il a fait du fric avec de mauvais disques, se contentant de coller à l’époque, ayant perdu toutes ses longueurs d’avance sur la meute. La décennie suivante, on l’a vu courir après tous ces djeunes et leurs drôles de machines qui inventaient chaque année une tendance électronique nouvelle alors que lui essayait de copier celle de l’année d’avant. Un Bowie artistiquement has-been, se contentant de son vieux répertoire pour allumer l’étincelle dans les yeux du public lors de ses concerts …
Bowie est un malin. Le premier de cette génération de dinosaures grisonnants à avoir compris tout l’intérêt qu’il y avait dans l’internet (Bowienet, son site perso, a été créé en 1998), et maîtrisant cet outil de communication mieux que quiconque. Alors que tous les autres s’acharnent à créer un buzz par définition éphémère, silence radio total de Bowie depuis des années. Et puis, comme ça, sans prévenir, sans que le moindre fouille-merde numérique ait vu venir quoi que ce soit, il sort  le 8 Janvier, jour de son anniversaire, un clip d’une nouvelle chanson et annonce la parution d’un nouvel album sous les deux mois. Onde de choc médiatique, tout le monde y va de son couplet sur la merveille à venir du dernier des géants du rock. Et arrive « The next day », qui s’écoule instantanément comme des petits pains. De la belle ouvrage, plan marketing génial …
Bowie a toujours été un vampire, se délectant du sang de prédécesseurs et précurseurs inconnus ou oubliés pour créer sa propre musique et renaître artistiquement à chaque fois, Phénix musical sans équivalent. Maintenant, malgré son âge avancé, au lieu de s’inspirer des autres, il veut prouver qu’il bande encore, et se livre à un grand numéro d’auto-fellation contorsionniste  en recrachant au final (il avale pas, c’est so vulgaire) ses propres idées. Ça commence avec la pochette, caviardage de celle de « Heroes », la réunion en studio de vieux potes (Tony Visconti, Earl Slick, Gail Ann Dorsey, …) obligés par contrat de garder le secret le plus absolu jusqu’à la sortie du disque. Bowie, lui, comme dans le sketch des Guignols il parle pas à toi, et a juste fait savoir qu’il ne défendrait pas ce disque sur scène. Ne parlons même pas d’envie, le pourrait-il d’ailleurs ? Il suffit de voir les rares photos récentes de lui pour s’apercevoir qu’il est encore plus maquillé que du temps de la pochette de « Aladdin Sane », mais maintenant juste pour avoir apparence humaine. C’est pas Dorian Gray, juste un sexagénaire bien abîmé par ses excès passés … La voix, on s’en rend vite compte, a morflé. Certes Bowie est resté un grand interprète, chante bien et juste, mais se cantonne dans un registre medium, évitant les descentes dans les graves, et s’interdisant toute montée dans les aigus.
Passe encore, mais le plus grave, c’est qu’il n’a pas été foutu de composer en une décennie de quoi remplir dignement un disque. Les titres à sauver, maintenant que le vinyle devient so branché, rempliraient tout juste un maxi 45T, c’est dire l’ampleur des dégâts.
« The next day » commence pourtant plutôt pas mal. La chanson-titre, intéressant pop-rock, renvoie instantanément au son de « Scary monsters », et peut passer pour un exercice de style amusant. Les deux singles éclaireurs « Where are we now » et « The stars (are out tonight) », bénéficiant de clips chiadés renvoient pour le premier à ses antiques ballades crépusculaires (« Word on a wing », ce genre), le second à ses années 80 (son film de vampires « The hunger », sa musique indigente période « Never let me down »). Sans les images, ces morceaux sont tout à fait anodins.
Le tour du proprio est vite fait. A sauver de cette auto-parodie, des choses comme « Valentine’s day » furieusement réminiscent « Aladdin Sane – Diamond dogs » avec son solo de guitare calqué sur celui de « Panic in Detroit ». Ou l’amusant « Dancing out in space » (clin d’oeil à une époque où il dansait dans les rues avec Mick Jagger), titre reposant sur une rythmique Motown revisitée electro façon Kraftwerk meets Aphex Twin.
Les titres restants, une bonne dizaine tout de même, sans compter les trois « bonus » de la DeLuxe Edition (DeLuxe pour trois titres, faut pas déconner, à une époque ce label DeLuxe voulait dire que l’on doublait voire triplait la durée du disque initial), faudra beaucoup de pouvoir de persuasion au fan-club pour me convaincre qu’ils présentent le moindre intérêt. Et comme y’a vraiment pas grand-chose à sauver, Bowie et Visconti qui sont pas tombés de la dernière pluie, ont mis la batterie et les claviers-synthés très en avant, pour masquer un assortiment de rengaines fadasses, d’arrangements centristes, de mélodies bancales, enrobés d’effets sonores BCBG. Et qui toutes renvoient à des choses déjà entendues chez lui, et pas celles qu’il a faites de mieux. Le funeste « Never let me down » est souvent évoqué, des sonorités très « Lodger » (pas de bol, c’est le moins bon de la trilogie berlinoise) apparaissent ici où là, on n’évite pas la chanson pompeuse à la Scott Walker « You feel so lonely … », assortie de chœurs à la « Rock’n’roll suicide » …
« The next day » a rempli à merveille son office, faire parler de son auteur alors qu’il n’a plus rien à dire (ni à prouver d’ailleurs). Peut-être pour préparer le terrain à d’autres sorties de disques (des rééditions, des inédits, des machins remastérisés, remixés ou que sais-je encore, …). On se retrouve avec l’équivalent du tapage médiatique qui avait entouré la sortie du dernier disque des Stones (« A bigger band » en 2005), lui aussi présenté comme un retour à ce que les Stones avaient fait de meilleur, et dont je mets quiconque au défi de me citer un seul titre… Et rendez-vous dans un lustre pour discuter des chansons de ce « Next day » qui auront marqué leur époque … j’ai bien peur que le compte soit vite fait …
Non, on ne jette pas les disques de Bowie à la poubelle. Il y a des choses qui ne se font pas … Mais c’est pas l’envie qui manque …

Du même sur ce blog :
The Man Who Sold The World 

BRUCE SPRINGSTEEN - DARKNESS ON THE EDGE OF TOWN (1978)


Le bal du pompier ...

Plus de deux ans se sont écoulés entre la sortie de « Born to run », maîtresse pièce de Springsteen et la parution de « Darkness … ». Jon Landau justifie ses appointements de manager par des querelles et bisbilles avec la Columbia, label de toujours (et qui le restera) de Springsteen. Lequel tourne sans relâche, et en attendant que sa situation se décante, peaufine son disque. Méticuleusement, remettant sans cesse sur le métier ses titres. Il faut enfoncer le clou, confirmer, tout çà …
Springsteen & The E Street Band 1978
« Darkness … », c’est pas un mauvais disque. Tout un tas de titres qui font partie du patrimoine des springsteenophiles, pas de (mauvaise) surprise, l’œuvre reconnue classique d’un gars qui l’est tout autant, etc, etc ... Mais moi, y’a des trucs qui me chiffonnent, qui m’agacent un peu sur ce disque, et c’est cette accumulation de petits pas grand-choses qui fait qu’au final cette rondelle me gonfle …
Tout est trop calculé, on sent là-dedans aucune étincelle, aucun dérapage, aucune vie… un truc direct pour le musée (ou le panthéon, c’est pareil) du binaire. Le skeud à faire écouter dans les lycées, pendant les TP de twist’n’rock … c’est scolaire, le doigt sur la couture du pantalon, les cheveux bien au carré, rien qui dépasse … on sent les prises interminables des instruments, de la voix pour que tout soit parfait…
Et justement, l’axiome de base du rock depuis qu’il existe, c’est que plus on fait n’importe quoi, plus on a des chances de faire avancer le schmilblick. « Born to run », à part le morceau-titre, n’est pas parfait, il y a un côté jeune chien fou qui fonce, on verra bien ce qui arrive, ça sonne bien, y’a du feeling, on la garde … Sur « Darkness … » rien de tout ça. Cette voix forcée, toujours en surchauffe de Springsteen m’exaspère. Hey man, tu seras jamais Otis Redding, et tes potes qui moulinent derrière, ce seront jamais les MG’s. Pourquoi ces gueulantes vocales et instrumentales sur « Abel raised a Cain » ou « Streets of fire », pour moi l’exemple type des morceaux surjoués. Dis, Mr le Boss, tu crois que si vous vous étiez lâchés un peu, ils auraient été plus mauvais ces titres ? Parce qu’au final la barrière entre lyrique (et supportable) et pompier (et insupportable) elle est mince, ça se joue à rien. Et pour moi, sur « Darkness … », ça bascule trop souvent du mauvais côté …
Alors je garderai « Badlands », « Candy’s room » et « The promised land » sur un iPod de survie pour la fin du monde, et tous les autres, je m’en passerai facilement …

Du même sur ce blog :
Nebraska


BRUCE SPRINGSTEEN - LIVE / 1975-85 (1986)


Un bon chanteur et un mauvais groupe ...

De quelque côté qu’on l’envisage, ce live est un pavé. Et un pavé, que tu le prennes sur les pieds ou en pleine poire, ça fait mal …
Par où commencer ? Des chiffres ? 40 titres, 3 heures et demie … aujourd’hui trois Cds bien pleins. Lors de sa parution fin 86, cinq vinyles. Personne n’avait été aussi loin dans la démesure, les funestes live de Santana, Yes et Wings s’étaient arrêtés à trois rondelles de plastique noir, ce qui faisait déjà beaucoup (trop). Idem  en studio pour les Clash, George Harrison ou le Nitty Gritty Dirt Band (le Nitty qui ? ... pfff, c'est bon, laissez tomber ...). Argument entendu à l’époque : c’est pour être conforme à la durée des concerts du Boss. Soit …
Derrière tout ça, un plan marketing mégalo de Columbia-Sony, relayé par le management (l’ambitieux et omnipotent Landau), et in fine cautionné par un Springsteen pas très bien dans ses baskets à cette époque-là : un mariage qui part en vrille, et la sortie de sa période dents refaites – bodybuilding et look Rambo-Stallone-Rocky.
Objectif de ce « Live » : être vendu à au moins dix millions d’exemplaires sur la lancée du multiplatiné « Born in the USA ». Pour l’anecdote, il y eut un petit problème de timing. Un autre label distribué par Sony, Epic, voulait sortir à la même époque le nouveau disque de Michael Jackson (« Bad »), et comptait, en ces temps de show-biz triomphant en écouler cent millions de copies. Sollicitées, les usines de pressage américaines déclarèrent impossible de faire face à une telle demande, et l’enregistrement de Jackson fut décalé de plus de six mois. Pour la morale, aucun des deux disques n’atteint ces objectifs …
Par quoi continuer ? Springsteen ? Dont je ne suis pas fan. Que j’apprécie mais sans plus. Et dont l’essentiel de la discographie me passe par-dessus la tête. Bon, touchez pas (ou dites pas de mal) à « Nebraska » et aux deux « Born … », ces trois-là je les défendrai. Mais comment, entends-je, et …, sans parler de …, ou encore …, ils sont pas géniaux peut-être ? Si vous voulez, mais moi ils me gavent… Et l’homme Springsteen me gave aussi, ce centriste perclus de bonnes manières, de bons sentiments, de bons engagements, défenseur de toutes les causes validées par l’ONU, l’Unesco et Bono… Je veux bien le soupçonner d’être tout à fait sincère, mais il y a quand même un monde entre ce pur produit du music entertainment et le Chevalier Blanc du combat social que certains le voient incarner. Finalement aussi crédible qu’un diététicien qui mangerait matin et soir chez MacDo (reproche valable également pour l’immense majorité de ses semblables).
Son succès ? Ben, on peut ni le nier ni le lui retirer. Phénomène typiquement américain par de nombreux aspects (le fan de folk, de country, de old rock’n’roll, des films des années 40 en général et de John Ford en particulier, de Woody Guthrie, Dylan et Steinbeck, le troubadour des classes populaires, plus américain que tout ça, tu peux pas …) qui a réussi à s’exporter all around the world, tandis que des contemporains pas plus mauvais et guère différents par leurs références sont restés beaucoup plus confidentiels hors de chez eux (Seger, Petty, Southside Johnny, Graham Parker et tant d’autres …) A l’écoute de ce « Live », il m’est venu un questionnement : le public du Boss (tout a été enregistré aux States) comprend-il de quoi il retourne dans ses chansons ? Sans parler du « malentendu républicain » du morceau « Born in the USA », il y a dans ce « Live » un titre qui par l’écho qu’il reçoit fait froid dans le dos. C’est la reprise du classique de Woodie Guthrie « This land is your land ». Springsteen présente le morceau, sans citer ni le titre ni Guthrie. Silence glacial (alors qu’absolument tous les autres titres du shows sont couverts par les hurlements du public au début et à la fin). Version acoustique du titre. Personne ne réagit aux premiers vers. Timides chuchotements au début  du refrain. Fin du titre et applaudissements très très clairsemés. Chacun en tirera les conclusions qu’il veut, mais il me semble qu’en France, où les trois-quarts de ses spectateurs ne comprennent pas les paroles, ils savent qui est Woody Guthrie et la filiation idéologique que représente Springsteen.
Et ce tas de skeuds ? T’en causeras un jour ? Enervez-vous pas, ça vient … Qui dit musique, dit musiciens. Et là, surprise … autant on sait que Springsteen bâcle pas le boulot en studio, que ses prestations live ravissent forcément les fans, autant un concert ou des bribes de shows différents accolées les unes aux autres comme c’est ici le cas, on est vite amené à se gratter l’occiput. Le son d’abord. Très correct, voire excellent, rien à dire, et l’on sait Springsteen particulièrement méticuleux de ce côté-là. Sauf que je subodore que tout a été remixé avec le fameux « Born in the USA  sound », à savoir claviers très présents et batterie très très en avant de Weinberg. Et là, comment dire, misère … Weinberg est un batteur d’une médiocrité étonnante, inattendue à ce niveau … et on n’entend que lui. Un autre qu’on est obligé d’entendre, c’est le « Big Man », le pote de base du Boss dans le groupe, Clarence Clemons. Qui ne joue pas du saxophone, mais souffle dedans, ce qui n’est pas exactement la même chose … Reste le cas Miami Steve Van Zandt. Auquel, plutôt que son look assez souvent consternant, on peut reprocher d’être un guitariste effacé, bon accompagnateur rythmique, mais manquant de « présence, d’attaque ». Pas un hasard si sur certaines tournées, Nils Lofgren, pourtant pas un guitar-hero au sens seventies du terme, vient renforcer le E-Street Band. Qui reste un gang soudé (les types jouent ensemble depuis des siècles), mais techniquement assez limité …
La grosse bonne surprise, elle vient de Springsteen … qui en tant que chanteur me laisse assez froid et sceptique en studio, où je trouve qu’il a souvent tendance à en faire trop, à « surchanter ». Là, dans le cadre de concerts de plus de trois heures, il peut pas se permettre de gueuler tout le temps, il faut tenir la distance, et donc y aller plus au feeling qu’au physique, suivre la mélodie et pas brailler. Les titres essentiellement acoustiques sont pour moi les meilleurs. « Thunder Road », juste piano guitare et voix en entrée est fabuleux, de même que le « Jersey girl » repris à Tom Waits qui conclue symétriquement le tracklisting. Et entre, tous les titres sur lesquels le E Street Band reste discret, (tous ceux issus de « Nebraska », plus « Racing in the streets », « Independence day », « I’m on fire », et mentions particulières à un excellent « My hometown » et un fantastique « No surrender »), surnagent nettement du reste.
Le reste, justement … il y a des classiques springsteeniens (je suis beau joueur, il en a quand même écrit queqlues uns) qui s’en sortent mieux que d’autres, comme «Hungry hearts » (grande chanson pop, une des rares du Boss dans ce domaine) ou « Born to run » pour moi à jamais son meilleur titre. A l’inverse, ça fait mal aux oreilles de voir successivement sabotés « Badlands » par une intro calamiteuse et des arrangements catastrophiques, « Because the night » par un solo de guitare affligeant, et sur la lancée « Candy’s room » malmenée par un E Street Band à la ramasse … Curieusement, alors qu’avec quarante titre son répertoire est largement balayé, on n’a pas droit à « Glory days », un de ses plus gros succès en simple et ... et ces sagouins ils ont aussi oublié « Jungleland », faut pas déconner, « Jungleland » quand même ...
On a par contre droit à tous ces twists étriqués et ces rocks centristes plus ou moins entraînants, tous ces « Paradise by the C », « Cadillac ranch », « You can look … », « Darlington County », « Working on the highway », mais qui manquent tellement de substance, de tripes, d’adrénaline … et j’aurais préféré que sur un « Rosalita » de dix minutes, au lieu de la présentation interminable du Band, on ait droit à un medley de classiques rock’n’roll ou de Mitch Ryder, comme en contenaient parfois certaines versions live de ce titre …
Ce « Live 1975 / 85 », c’est un peu une version DeLuxe d’un « Greatest hits live ». Et du côté des fans, on a pu lire plus souvent que prévu des réserves ou de la déception par rapport à ce pavé. Et quand on cause grands disques en public, peu de téméraires se hasardent à le citer. L’occasion était bonne, Springsteen était au sommet de sa popularité, encore plus au sommet au niveau artistique (il n’a pas sorti depuis cette date un disque qu’on puisse qualifier de majeur). Mais bon, là, pour le coup, c’est un peu trop … un truc beaucoup plus concis aurait certainement eu une autre allure ...

Du même sur ce blog :
Born To Run
Darkness On The Edge Of Town
Nebraska

 

FRANZ FERDINAND - YOU COULD HAVE IT SO MUCH BETTER (2005)


Status Quo ...

Battre le fer pendant qu’il est encore chaud … c’est ce qu’ont du se dire les Franz Ferdinand et leurs conseillers financiers (pardon, les gens de leur maison de disques). Parce qu’avec leur première galette, ils avaient fait fort, devenant par la magie de quelques hits assez bien troussés un groupe qui comptait, dont les chiffres de vente se chiffraient en millions, chose prodigieuse en ces années 2000 où une connexion ADSL et MegaUpload suffisaient pour avoir de la musique.
Alors, pas téméraires pour deux sous, les Franz Ferdinand se sont appliqués à sortir fissa un skeud qui passerait comme lettre à la poste chez leurs fans. Comme y’avait les moyens, ils ont truffé leurs morceaux de petits gris-gris sonores gentiment centristes, mais sans prendre le moindre risque. Un follow-up, on appelle çà, à tel point qu’il faudrait être bien malin (ou bien fan) pour reconnaître lors d’un blindtest de quel disque provient le titre qu’on écoute. Alors c’est plutôt sympa, totalement dans l’air du temps consensuel, il n’y a plus aucun effet de surprise, tout est under control, totalement prévisible. Tout ce que les jeunes filles qui avaient acheté en masse le premier devaient attendre.
Bon, moi je suis plutôt client, avec toute ma blasitude et toute ma mauvaise foi. En fait, ce doit être mon côté pédo-pervers qui ressort, je trouverais toujours plus intéressant de voir un concert de Franz Ferdinand à la O2 Arena avec aux premiers rangs de jeunes nymphettes hurlantes miniskirtées que des hordes de graisseux fortement houblonnés index et auriculaire dressés ovationnant la reformation de Manowar ou Accept à une quelconque Hellfest …
Quelques titres surnagent du lot « The fallen », « Walk away » (comme si les Smiths avaient enregistré sous amphets), la gentiment mélodique « You’re the reason », le morceau-titre, le plus franchement rock du Cd … Il y a pas mal d’auto-citations (« Well that was easy », « Outsiders », « I’m your villain »), ce qui à force laisse à croire à un certain manque de renouvellement, de fraîcheur et d’inspiration … Quelques trucs piqués chez les autres : du piano en avant genre Coldplay (« Elanor … », « Fade together »), des choses qui tentent de sonner comme les Beatles en 65 repris par le Knack de « My Sharona » (« Do you want to »), une sorte de ska centriste énervé à la No Doubt (« This boy »), et aussi une poignée de titres aussi vite oubliés qu’écoutés …
Résultat des courses : un disque tellement prévisible que ça en devient embarrassant, plus arrangé que le premier, mais sans aucune surprise, sans la moindre trace d’évolution, sans le moindre risque. Le noyau dur des fans a adoré, ceux qui n’aimaient pas ont détesté, la routine quoi …
Il aurait tout de même peut-être fallu dire à ces jeunes gens qu’ils sont certes bien gentils, mais que bon, il serait temps de passer à autre chose. Apparemment, personne n’y a songé, leur troisième disque était comme les deux premiers, il a fini par lasser quelque peu et a pas très bien vendu. Bien fait …

Des mêmes sur ce blog : 
Franz Ferdinand
Right Thoughts, Right Words, Right Action

WHITNEY HOUSTON - WHITNEY HOUSTON (1985)


Allo Houston, nous avons un problème ...

Comme je suis un type bien, faut pas compter sur moi pour dire du mal des mort(e)s …
Bon, puisque vous insistez, juste un peu, alors …
En France, ce qu’on retiendra surtout, voire uniquement de Whitney Houston, c’est que Gainsbarre voulait la fucker dans une émission de Michel « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » Drucker. Parce que par ici à l’époque, Whitney Houston, c’était juste une jeune chanteuse de variété à la voix de cristal, mais au physique un peu plus avantageux que, au hasard ( ? ) Nana Mouskouri … Et là, elle apparaissait comme la jeune fille modèle aux prises avec un vieux pervers alcoolo… sauf que finalement, la Houston s’est révélée être au moins aussi déglingo que le pochetron de la Rue de Verneuil, cumulant mari imbécile (le junkie tabasseur Bobby Brown), consommation effrénée de coke et de junk food, et une fois la gloire venue et repartie syndrome de réclusion continue bien connu des fans d’Elvis le Bouffi …
Tandis que chez elle, là-bas, au pays de Michael Jordan, qui aime bien célébrer les nègres qui réussissent à condition qu’ils restent polis et fassent là où on leur dit de faire, elle était entrée avec ce premier disque dans le cercle très fermé des divas de la musique populaire, (genre particulier quasi séculaire dont l’archétype peut se  définir par la tante à Whitney, Dionne Warwick) … à savoir une technique vocale irréprochable au service de musiques et de textes incolores, inodores et sans saveur (le mot « love » est dans la moitié des titres de chansons de ce « Whitney Houston »), et l’entretien d’une image lisse et souriante genre la une de Cosmopolitan ou Vogue … Mais voilà, là où Warwick pouvait compter sur des joyaux ciselés par Burt Bacharach et Hal David, Houston doit se contenter de compositions fadasses vite torchées par les laborieux scribouillards recrutés par Clive Davis, le PDG d’Arista qui avait fait de Whitney Houston sa « priorité ».
Il y a dans ce disque des ballades gluantes servis par une armée de requins de studio très côtés (Phillinganes, East, Buchanan, …, ils étaient sur « Thriller » de Michou Jackson), une débauche d’arrangements (les faux violons, les fausses cordes, les empilages de synthés) qui se voulaient tellement à la mode que là, plus de vingt cinq ans après, ils ne sonnent pas sympathiquement vieillot ou vintage, ils sont juste totalement ringards. Clive Davis ressort toutes les recettes éculées pour faire vendre du disque, à commencer par les duos avec les noms ronflants à la mode : un Jackson pour deux duos (pas Michael, sans doute trop cher, mais le frérot Jermaine, qui bien que sans aucun talent, réussit à faire écouler des millions de rondelles pourvu que son nom y figure), le centriste chantant Teddy Pendergrass …
Ce disque est une grosse daube écoulée par dizaines de millions all around the world. La seule chose à conserver est bel et bien la voix de Whitney Houston qui évite d’en faire des tonnes (c’est-à-dire à l’inverse d’une quelconque québecquoise braillarde), mais sans réussir à sauver par une forme épurée un fond d’une médiocrité repoussante …
Tiens, elle aurait dégotté quelqu’un du calibre de Gainsbourg comme Pygmalion, elle aurait certainement fait une carrière autre que celle de gentille bimbo nunuche qui a été la sienne …

MICKEY 3D - TU VAS PAS MOURIR DE RIRE ... (2003)


Quoique ...

J’ai du rater un épisode, une mode, quelque chose … parce que là, je comprends pas trop …
Comment des choses aussi quelconques que ce disque, peuvent être perçues comme des révélations, des jalons qui comptent dans cette décennie ? Certes, il m’arrive parfois aux oreilles, voire plus souvent que ça encore, des choses infiniment plus mauvaises que Mickey 3D.
Mais comment se fait-il que ce machin, plein de « bons sentiments » à deux euros, d’une qualité musicale famélique, avec un type qui chante à faire passer Gainsbourg pour Placido Domingo ses textes écolos-centristes pour collégiens concernés, comment se fait-il donc qu’il s’en soit vendu des camions ?
Comme tout le monde, j’avais entendu cette scie « Respire », appris que le gars qui avait écrit ça, c’était celui de la semblable scie « J’ai demandé à la Lune » des vieux ados gothiques Indochine (les Cure bleu-blanc-rouge, les bonnes chansons et les bons disques en moins). J’avais trouvé « Respire » aussi vite fatigant que les machins  de Louise Attaque, le putain de violon en moins, et les synthés façon electro en plus, ce qui n’est pas forcément mieux.
Et bien, après écoute plus ou moins attentive du skeud, je suis en mesure d’affirmer que « Respire » est de loin le meilleur titre de cet album, c’est dire si avec tout le reste on s’emmerde ferme. Le gars derrière tout çà (Mickael Furnon, c’est en fait quasiment Mickey 3D à lui tout seul), ne sait effectivement pas chanter (bonjour la monotonie), et en gros écrit toujours la même chanson accompagnée des mêmes textes de flippé désabusé. Il n’y a rien ici d’original, on a même quelques fois l’impression, au gré des arrangements (c’est le seul truc qui différencie les morceaux, selon que ça donne dans l’ethnique-world, l’acoustique, l’électrique, l’électronique) que l’on a entendu tout ça en beaucoup mieux chez d’autres.
Chez Louise Attaque, et donc chez leurs pères électriques Noir Désir, particulièrement flagrant sur le titre caché (« Avance » ?), chez Miossec aussi (qui même à jeun pulvériserait le pauvre Mickey niveau textes), voire au détour de quelque sonorité arabisante chez les Négresses Vertes.
Niveau écoutable si on a vraiment rien de mieux à foutre, j’ai noté « Ca ne m’étonne pas », chanson yéyé avec chanteuse à voix acidulée, « La mort n’existe pas » malgré des paroles putain de simplettes, et « Beauseigne » avec ses arpèges à la Byrds-REM …
Il semblerait que le groupe n’existe plus … C’est con, j’avais oublié d’en écraser une larme …



LL COOL J - MAMA SAID KNOCK YOU OUT (1990)


Le Retour

Plus que dans tous les autres genres musicaux pour les djeunes, le rap a toujours été celui où les carrières se font et se défont le plus vite. LL Cool J est un cas d’école. Un des premiers à rapper en solo et non pas dans un « collectif », et de fait un des premiers rappeurs tout court (premier disque, « Radio », en 1985). Cinq ans plus tard, LL Cool J n’a que vingt-deux ans et se traîne une réputation de terrible has-been, de ringard total.
Ce jeune con ( ? ) a totalement zappé l’aspect qui commence à devenir essentiel dans le rap, la surenchère verbale s’appuyant sur la fameuse et fumeuse street credibility. Un « bon » rappeur se doit d’être une grande gueule, et avoir un lourd passé indiscutable de caïd de cage d’escalier, voire de dealer ou de pimp. Ceux qui cumulent tout ça (ou le prétendent) deviennent les héros d’une jeunesse américaine quelque peu lobotomisée, ayant oublié d’où venait le rap (de la rue certes), et à quoi il servait (à faire passer des messages comme le disait Grandmaster Flash, à s’exprimer, à revendiquer).
En quelques années, les petits loulous machos et bling-bling ont zappé tout ça, seuls ne comptent plus que la réputation et le paraître. Et pendant ce temps, le LL Cool J sortait des slows rap romantiques, et prenait position contre la drogue, et notamment le crack qui commençait à remplir les cimetières des ghettos urbains. Tout le « milieu » du rap s’esclaffait et rimaillait sur le pauvre James Todd Smith (son vrai blaze). Aujourd’hui, LL Cool J est toujours là (certes pas au sommet de son art), et ses détracteurs oubliés par à peu près tous (MC Hammer quelqu’un l’écoute encore ?).
LL Cool J a fait la seule chose qui vaille vraiment quand on fait de la musique, il a sorti un bon disque qui s’est vendu par pleins camions. Raide dans ses baskets, réglant juste de ci de là quelques comptes avec la concurrence, Cool J a démontré tout un tas de choses. Qu’il a un flow énervant de facilité, assorti d’une diction parfaite (en gros, il rappe pas façon Uzi en bouffant la moitié des syllabes), qu’avec son producteur Marley Marl (un des cadors aux manettes de la fin des années 80, précurseur innovant qui a déblayé le terrain pour tous les Dr Dre à venir) il a l’air et l'art de faire passer du rap pour des chansons, ou vice-versa. Il y a sur ce « Mama … » des mélodies qu’on pourra qualifier de « faciles », derrière chaque couplet, chaque refrain, chaque break … un son qui cherche pas l’agression systématique (même si accessoirement on peut penser au terrorisme sonore de Terminator X chez Public Enemy comme sur « Murdergram »), cherchant plutôt à synthétiser sur un seul disque tout ce qui a été entendu dans le rap depuis qu’il existe.
Ici plus de breakbeats colossaux comme à ses débuts, mais des rythmiques soyeuses, tout en souplesse (le morceau-titre), drivées par des basses souples, rondes, élastiques, tirant parfois vers le jazzy (« To da break of dawn »). LL Cool J n’hésite pas à balancer des cuivres rhythm’n’blues ou disco (« Jingling baby »), des ambiances envapées et guillerettes qui montrent que le premier disque de De La Soul a été assimilé. LL Cool J était accusé de faire des trucs mollassons, voire des slows ? qu’à cela ne tienne, il récidive ave « 6 minutes of pleasure » et ce titre évoque autant le Curtis Myfield des 70’s que les Fun Lovin’ Criminals à venir … Et puis, manière d’aggraver encore plus son cas, il chique au dur sur la pochette tout en biscotos saillants, chaîne en or de quinze kilos, bagouzes en poing américain pour balancer dès le second titre une chanson (y’a pas d’autre mot) très pop, avec un sample du hit bubblegum oublié des Mary Jane Girls.
En fait, avec ce disque, LL Cool J peut tout se permettre, c’est le genre de choses que l’on doit sentir dès le studio promues au succès. Les moqueurs se sont moqués, LL Cool J a raflé la mise et est devenu une institution de rap.
« Mama … » est un disque de rap qui pourrait plaire à tout le monde, et surtout à ceux qui n’aiment pas le rap.
Et si LL Cool J avait inventé le rap centriste ?


CHICAGO - CHICAGO VIII (1975)


Sauvé (de peu) par le livret ...

Avec « Chicago VIII » retour aux années Giscard. Chicago, cette fanfare émigrée à L.A., commence à passer de mode, mais paradoxalement à vendre de plus en plus de disques. Et à s’éloigner de plus en plus des influences musicales de ses débuts.
Et ce « VIII » est au premier abord un machin hétéroclite, fait à la va-vite entre deux tournées (il y a des morceaux sans la section de cuivres, chose inimaginable jusque là, de quoi hérisser le (forcément) vieux fan de base du groupe).
Et souvent, ce disque sonne comme du déjà entendu ailleurs. Il faut lire le livret de cette superbe (comme toujours avec eux) réédition Rhino pour comprendre un peu mieux où Lam , Cetera, Katz et consorts ont voulu en venir.
En fait, dans l’esprit du groupe cet album est une sorte de disque « tribute ». Fourmillant de références à leurs références à eux.
Si la dédicace de Katz à Hendrix (« Oh, thank you Great Spirit ») est connue et évidente, les morceaux-hommage à Randy Newman (« Harry Truman »), aux Beach Boys (« Never been in love before »), à Mountain (« Hideway » reprend le riff de « Mississippi Queen »  de la bande à Leslie West, autre guitariste admiré par Katz), à Ray Charles (« Brand new love affair ») montrent une ouverture d’esprit étonnante et en ce qui me concerne insoupçonnée.
Et du coup ce « VIII » qui pour les aficionados marque vraiment le début de la fin, se retrouve un peu comme le disque « à part » dans la carrière de Chicago.

Des mêmes sur ce blog :



BRIAN SETZER - THE KNIFE FEELS LIKE JUSTICE (1986)


Le cas Setzer ...

Il a eu l’immense mérite de faire perdurer avec ses Stray Cats toute l’innocence originelle du rock’n’roll, s’escrimant à recréer toute la magie perdue de choses aussi simples et évidentes que le Johnny Burnette Trio et d’une façon générale l’ensemble des pionniers de l’écurie Sun. Oui, mais voilà, pour éviter que ça tourne à la formule convenue, il fallait qu’il aille voir ailleurs, en tout cas plus loin que le revival rockabilly dont il était la jolie frimousse de proue. Et pour cela, crève-cœur obligatoire, se séparer de ses copains d’enfance, Phantom et Rocker, gentils garçons mais tout de même techniquement limités pour mener à destination tous les voyages musicaux dont rêvait Setzer.
Ce « Knife feels like justice » sera son premier album solo. En rupture par rapport à ceux des Stray Cats. Mais sans grosse surprise, il ne fallait pas non plus s’attendre à voir Setzer se muer en sorcier des synthés ou faire un disque avec des bonzes tibétains. Non, Setzer est profondément américain (pire, new-yorkais) et viscéralement attaché à la culture US, d’autant plus qu’elle aura une couleur 50’s vintage.
« Knife feels like justice » est donc un disque tout ce qu’il peut y avoir d’américain dans ce mitan des 80’s. Setzer commence à bénéficier, Stray Cats oblige, d’une bonne renommée de guitariste et chanteur, il vend du disque, a le soutien d’une major et une bonne bouille … Il se retrouve dès lors avec quelques moyens en studio, quelques requins, (la doublette Aronson – Aronoff à la rythmique, c’est du sérieux), quelques choristes réputés, et quelques « people » venus faire un tour pendant les séances… Campbell et Tench, Briseurs de Cœurs chez Tom Petty, Miami « Steve Bandana Futur Soprano » Van Zant, du backing-band du Jean-Patrick Capdevielle américain Springsteen. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que Setzer a écouté les disque du Boss, notamment « Darkness » et « The River », tant une grosse moitié des titres sonne comme des chutes de studio de ces rondelles-là. On se retrouve donc avec pas mal de rock lyriques, classiques, centristes, bien chantés, bien joués, avec quelques bonnes parties de guitare (la Gretsch, c’est pas seulement pour faire joli sur les photos, Setzer en joue plus que bien), mais qu’on a comme l’impression d’avoir déjà entendus bien souvent (tous ces « Bobby’s back », « Chains around your heart », « The knife feels like justice », « Maria » co-écrit avec Van Zant forcément…).
Quelques morceaux donnent eux dans le son FM, limite variété (« Boulevard of broken dreams »), celui avec Campbell ressemble étrangement à du Tom Petty, tout ceci finissant par traduire une légère incapacité de Setzer à se démarquer, à innover par des compositions vraiment originales. Finalement, il n’y a que quand il se lâche, sous l’influence de ses premières amours rockab, que l’on a droit à trois titres furieux et échevelés (« Radiation ranch », « Three guys », « Barbwire fence ») d’assez loin les trois meilleurs du disque.
En résumé, parce qu’on va pas y passer la nuit sur ce disque en plus à peu près introuvable aujourd’hui (grosse gamelle commerciale lors de sa sortie), ceux qui aimaient le rockabilly des Stray Cats n’y trouveront pas leur compte, ceux qui n’en démordent pas du fantastique jumpbilly du Brian Setzer Orchestra encore moins. Juste un disque ni vraiment mauvais mais pas non plus franchement captivant de rock US 80’s … Pour amateurs exclusifs du genre, tendance complétistes …

RADIOHEAD - IN RAINBOWS (2007)


Des squelettes de morceaux ...

Radiohead est sans conteste un des groupes majeurs des quinze dernières années, plus par faute de concurrence que par réel talent. Des superstars par défaut, en somme. Reconnaissance critique et populaire, groupe composé de types bien, charismatiques, et ayant des choses intéressantes et intelligentes à dire en dehors du strict cadre musical, bla-bla-bla, bla-bla-bla ...
La famille Tristos du rock ...
Mais moi, leur musique ne me « parle » pas. J’ai la plupart de leurs Cds, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ne squattent pas le lecteur. Et ce « In Rainbows » ne déroge pas à la règle. La plainte modulée de Thom Yorke qui lui tient lieu de voix me les brise vite menu, et à mon goût, l’épure musicale va trop loin. Ne reste plus que le squelette de ce qu’auraient dû être les titres de ce Cd.
Bon, tout n’est pas à jeter (deux-trois bons titres à la fin du disque) et tient quand même beaucoup mieux la route que le piètre essai solo de Yorke sorti peu auparavant (« The Eraser »), et toutes les purges déprimées et déprimantes dont ils nous abreuvent depuis. Et si ce « In Rainbows » restera dans l’Histoire du rock, ce sera plutôt à cause de son lancement (Radiohead a inventé le téléchargement pirate légal, les gens allaient sur le site internet du groupe, téléchargeaient les morceaux, et payaient ce qu’ils voulaient, ou ne payaient rien, au choix), que pour sa qualité strictement musicale. Le groupe se gagnant au passage une crédibilité un peu facile de rebelles au système (ils avaient suffisamment vendu de disques depuis leurs débuts pour être définitivement à l’abri du besoin, et de toutes façons, que ce soit eux qui le mettent en ligne ou pas, il se serait quand même téléchargé illégalement )
Moi, comme je suis vieux et con, j’ai commandé un Cd (du moins je croyais) physique quand il est sorti (un mois après la mise en ligne, j’ai pas eu trop à souffrir de cette attente). J’ai reçu une pochette-surprise avec à l’intérieur un Cd en kit à monter soi-même, sans le boîtier. Heu, Mr Yorke, on pouvait le télécharger où, ce fuckin’ boîtier ?

Des mêmes sur ce blog :
OK Computer



THE SHADOWS - MORE HITS ! (1965)


Encore de beaux restes ...

Cette compilation concerne la période 1963 – 1966 et n’est en aucune façon un Best of du groupe.
1963. Quelques mois plus tôt, les Shadows étaient les maîtres incontestés des hit-parades anglais, proposant au public des instrumentaux devenus légendaires dont aucun n’est présent ici (« Apache », « FBI », « Kon Tiki », …) portés par le jeu de guitare immédiatement reconnaissable de Hank Marvin. Et puis, un groupe de jeunes de Liverpool a débarqué, trustant le haut des charts et révolutionnant totalement la musique populaire.
Les Shadows entamèrent dès lors un lent mais sûr déclin, que cette compilation saisit bien. Non pas que les titres qui la composent soient mauvais. On ne change pas une formule qui a fait ses preuves, et les dernières pépites du groupe (le sophistiqué « Atlantis », les plus classiques « Shazam » et « Shinding ») n’ont pas grand chose à envier à leurs illustres prédécesseurs. Mais les Shadows n’étaient plus à la « mode » tout simplement et ces titres de « More Hits » sont aujourd’hui à peu près ignorés par tous.
Les Shadows ont bien essayé de s’adapter, allant même jusqu’à chanter sur quelques titres, eux le prototype même du groupe instrumental. Du coup le résultat devient involontairement comique, car ils n’ont pas le talent vocal des Beatles, c’est le moins que l’on puisse dire.
Superbe réédition avec section bonus gargantuesque, puisque à tous les titres à l’origine en mono est rajouté ici la version stéréo. Stéréo qui n’était pas la préoccupation majeure de l’époque (au moins en 1963), car une écoute au casque met en valeur (?) une mise en place quelquefois surprenante des pistes stéréo. Beau témoignage cependant (son remastérisé) d’une période relativement peu connue du groupe.
Et de toutes façons resteront toujours de superbes parties de six cordes de Hank Marvin, de loin le meilleur guitariste anglais du tout début des 60’s.

SANTANA - AMIGOS (1976)


J'avais un ami, ... mais il est parti ...
Piste 1 de « Amigos », « Dance Sister dance », rythme latino assez mou … Au bout d’une minute et vingt-deux secondes, Carlos Santana part en solo. Pause…
Flashback.
Woodstock, 16 Août 1969. Sous un soleil de plomb, Santana (le groupe) qui n’a pas encore publié le moindre album, livre une prestation torride, un des deux ou trois meilleurs concerts du festival. Avec un Carlos Santana, rétamé au mescal, machoire crispée, veines du cou prêtes à exploser, et sa Gibson SG rouge sang qui déchiquette tout … Soul sacrifice … Triomphe … Excellents disques dans la foulée … « Abraxas » … Le quasi new age « Caravanserai » … « Lotus », triple live au Japon … Et Carlos Santana, devenu leader irascible de son band, qui jette un à un tous ses premiers complices … Jusqu’à ce « Amigos » de 1976, un disque solo avec des accompagnateurs (ne reste que le bassiste David Brown du Santana band originel) …
« Amigos » … Play.
« Take me with you », « Let me », les deux titres que je sauve … ah, et puis « Europa » avec son sustain indossociable de la guitare de Santana, morceau tellement connu qu’il serait inconvenant d’en dire tout le mal qu’il conviendrait … Par contre, le reste … l’espagnolade molle de « Gitano », on dirait une face B d’un simple des Gypsy Kings, « Tell me … » et « Let it shine » sont des funkeries qui rappellent de mauvais souvenirs de cette époque (Earth, Wind & Fire pour le premier, Kool & The Gang pour le second …).
On l’a connu beaucoup plus inspiré, Santana …


Du même sur ce blog :

PJ HARVEY - STORIES FROM THE CITY, STORIES FROM THE SEA (2000)


Bien sage ...
Elle évolue, Polly Jean … elle quitte la verte campagne anglaise pour la jungle de béton de New York. Et comme si elle ne se nourrissait que de contrastes, le déferlement urbain provoque chez elle un disque étrangement apaisé …
Polly Jean a ramené des souvenirs des USA
Enregistré en petit comité (P.J., Mick Harvey, Rob Ellis), en trident rock basique, juste agrémenté par du piano ou des synthés discrets. Mais ici tout au service de compostions linéaires, assagies, ne dérapant pas dans ces bouffées de violence crue qui rendaient indispensables les « Dry » ou « Rid of me » du début de sa carrière. Un titre comme « Beautiful feeling » charrie une ambiance lourde et tendue à la Doors, et on attend une explosion de rage ou de décibels qui n’arrive pas … La musique de P.J. Harvey est policée, élégante, jolie mais convenue… Des titres sont construits exactement de la même façon (« Big exit », « Good fortune », « This is love ») et autant les deux premiers sont anodins, autant le supplément d’âme, d’implication qu’on trouve dans « This is love » réussissent à en faire un grand morceau de P.J. Harvey … le petit détail qui transforme tout.
Polly Jean sert avec ce « Stories … » un disque plaisant, destiné à l’installer définitivement dans la cour des grandes, qui n’ose sortir des sentiers battus et balisés du rock mainstream que vers son final, quand P.J. se lâche un peu. Avec « This is love », «  You said something », excellent titre qui évoque les Pretenders de la grande  Chrissie Hynde, jusque dans la voix de Polly Jean, et surtout « Horses on my dream », où ne serait-ce que par l’évidence de son titre, ressurgit l’ombre tutélaire de Patti Smith.
Le reste, ce duo avec Yorke où P.J. ne semble qu’accompagner l’endive chantante, ces morceaux à la U2 (« We float »), ces minauderies à la Björk - Radiohead (« A place called home »), … si on écoute P.J. Harvey, c’est justement parce que ça ne ressemble pas à ces trois-là…
Il faut cependant être juste, et reconnaître qu’on aimerait bien entendre plus souvent des disques de rock centriste aussi ratés que celui-ci … Mais de P.J. Harvey, on pouvait raisonnablement espérer beaucoup mieux …



SCORPIONS - LOVE AT FIRST STING (1984)


Plus très venimeux ...

C’est à partir de ce disque que les fans de la première heure et les accros de « Tokyo Tapes » ont commencé à se méfier. Et avec le recul des ans, se pose THE question : « Love at first sting » est-il le premier d’une longue série d’enregistrements soit pas bons soit mauvais, ou bien est-il plutôt le dernier d’une série de bons disques du groupe.
Klaus Meine n'a pas de guitare ... bientôt il n'aura plus de cheveux ...
Ce Cd n’est en tout cas pas pire que ceux que sortaient les têtes d’affiche du classic hard, et réussit sur le fil du rasoir un improbable équilibre entre la tentation FM (avec en ligne de mire le succès aux USA) et la pression vraiment hard. Les morceaux sont mélodiques, les guitares omniprésentes et le vieux complice Dieter Dierks réalise des prodiges tout au long d’une production impeccable, et sauve quelque peu de l’écroulement une baraque qui commence à tanguer sur ses fondations.
Et puis il y a bien sûr « Still loving you », la meilleure ballade des Scorpions qui cette année-là (1984) disputera le titre de slow de l’année à rien moins que le « Purple rain » de Prince, dans le même style rétro-seventies. Effet pervers, les Teutons se sentiront dorénavant obligés de mettre une scie gluante (« Wind of change » sur le suivant, et d’autres dont je ne veux rien savoir) sur tous leurs Cds …
Le succès de « Love … » sera colossal, boosté par une tournée mondiale exceptionnelle en terme de succès populaire. Non, vraiment , avec « Love at first sting », les Scorpions n’avaient pas encore « trahi ». Ils inventaient juste le hard centriste …

Des mêmes sur ce blog : 

CHICAGO - GREATEST HITS VOLUME II (1981)


Les bas-fonds de Chicago
La fanfare de Chicago
Compilation parue au début des années 80, 10 titres, et moins de 40 minutes … heureusement, serait-on tenté de dire …
L’intérêt de Chicago, décroissant à mesure que les disques numérotés se suivaient, reposait essentiellement sur le jeu du fabuleux guitariste Terry Kath, mort en jouant ( ? ) à la roulette russe en 1978. Et comme sur disque, les autres prenaient un malin plaisir à le reléguer au fin fond du mix, perdu derrière des couches de claviers, de cuivres, d’harmonies vocales …
Le meilleur titre de cette compile est « Dialogue, Pt 2 », où, comme par hasard, Terry Kath est très présent … Bon morceau également, « Question 67 & 68 » issu de leur premier excellent et inégalé premier album « Chicago Transit Authority »…
Le reste, ballades gluantes et disco-funks mollassons …
Ah, et puis, si vous retrouvez plus votre « 100 % Slows Hits of the 70’s », il y a la scie « If you leave me now » qui peut remplacer « How deep is your love » des Bee Gees ou « I’m not in love » de 10CC …

Des mêmes sur ce blog :





LES NEGRESSES VERTES - MLAH (1988)


Tout va bien ...

… Puisque paraît-il c’est la traduction du titre en arabe de leur premier disque. Et ma foi, ça ne correspond pas trop mal à cette forme d’optimisme et de légèreté qui semble parcourir la musique des Négresses Vertes. Cette … famille nombreuse de bateleurs venue du milieu « alternatif » comme on disait à l’époque, va remettre au goût du jour toute une tranche du patrimoine culturel français, mais pas seulement,  tombée quelque peu en désuétude.

On retrouve chez les Négresses un peu du swing du jazz ringard de Ray Ventura, un peu de la poésie simple et décalée de Trenet, un peu de la chanson réaliste française (Damia, Fréhel), de la gouaille des titis parisiens, de la morgue des Apaches, et tous ces flonflons des bals des pompiers du 14 Juillet. Le tout mêlé à des sonorités empruntant aux folklores des deux côtés de la Méditerranée, Balkans, péninsule ibérique, Afrique du Nord … Un vaste fourre-tout, déjà esquissé à des degrés divers par les contemporains Rita Mitsouko, Bérurier Noir, Pigalle, Mano Negra…

Marchands de tapis ? De soupe ?
Les Négresses, c’est au départ la crédibilité en béton armé, notamment grâce à leur chanteur et figure de proue Helno, un ex de la raya Béru, la signature sur un label indépendant (Off The Track). Tout pour faire un succès d’estime. Seulement, et contre à peu près toute attente, c’est le succès grand public sera au rendez-vous, dans le sillage du drolatique « Zobi la Mouche » et du guilleret « Voilà l’été ».

Alors, à ce stade, il y a deux façons de voir les choses. Soit on applaudit, ouais, les losers, les sans-grade, sans le soutien de l’artillerie lourde du music-business, qui vendent du disque, font les prime time à la télé, et qui viennent faire la nique au système, toute cette sorte de choses…

Ou alors, on se dit que les Négresses Vertes ont ouvert avec leurs accordéons et leurs bouzoukis toute la putain de Boîte de Pandore et on pense à toute leur descendance, tous ces groupes de java-punk minables, en bermudas et Doc Martens, qui me les brisent menu dans des raouts champêtres sentant la merguez et la bière tiède, tous ces pseudo chanteurs réalistes, qui ne chantent pas bien et sont déconnectés de toute réalité … 

Le choix, à cette époque-là, il était là, soit continuer raide dans ses boots et crever la dalle avec dignité comme l’ont fait par exemple les Bérus, Parabellum, les Ludwig et tant d’autres, avant de crever tout court, soit la jouer prétendu second degré et courir les émissions de Drucker, Foucault et Sabatier comme l’a fait la tribu Mellino …

Tout va bien … tu parles … allez, cassez-vous avec vos accordéons, laissez ça à Giscard et Yvette Horner, et envoyez plutôt un gros riff distordu à la Chuck Berry sur une gratte pourrie. Vous passerez peut-être pas à la télé ou à la radio, … mais vous aurez mon estime.